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Enfants en organisation d’actions, possédant également le pointage proto-déclaratif :

Recueil des données :

B) Enfants en organisation d’actions, possédant également le pointage proto-déclaratif :

Charlotte, âgée de 4 ans et 7 mois, a un âge de développement de 28 mois et 15 jours à l’ECSP et de 16-18 mois pour les premiers raisonnements. Son lexique actif est riche, elle commence à produire de petites phrases et se détache de la situation présente en réalisant des liens par l’intermédiaire du langage. Le pointage proto-déclaratif est maîtrisé. L’organisation d’actions en cours d’acquisition : Charlotte peut tirer parti d’un événement fortuit, réalise divers enchaînements et successions d’actions et y introduit des variations.

Flavien, 3 ans et 3 mois, obtient un âge développemental de 24 mois et 17 jours à l’ECSP et ses préoccupations cognitives sont celles d’un enfant d’environ 18 mois. Il est capable d’organisations d’actions : il peut améliorer ses actions présentes en considérant ses actions précédentes. De plus, le pointage proto-déclaratif est acquis. Ses moyens et buts de communication sont variés ; son absence de mots est bien compensée par l’usage de signes.

Hugo, âgé de 3 ans et 5 mois, obtient un âge de développement de 28 mois et 25 jours à l’ECSP, de 18-20 mois pour les premiers raisonnements. Hugo est également au niveau de l’organisation d’actions : ses actions sont menées dans un objectif précis, il introduit des variations et observe les différents résultats obtenus. Il n’exprime pas encore l’effet de son organisation d’actions : les anticipations sont encore rares. Le pointage proto-déclaratif est utilisé pour obtenir des renseignements à propos d’un sujet ou d’un événement qui l’intrigue.

L’âge de développement communicatif de Camille, âgée de 4 ans et 10 mois, est de 30

mois et 11 jours ; le pointage proto-déclaratif est acquis. Ses préoccupations cognitives sont

celles d’une enfant de 22 mois. Camille est dans l’organisation d’actions, avec des explorations variées et anticipées : elle semble proche de la coordination d’actions. De plus, elle se sert du langage pour faire des liens, demander des informations, comprendre les situations et raconter elle-même.

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2. Analyse

A) Le développement communicatif

1. Acquisition des compétences socles de la communication :

Les compétences socles de la communication les plus fréquemment acquises par les enfants de notre étude sont l’imitation, immédiate et différée, et le pointage

proto-impératif. Ces compétences sont acquises par 10/11 enfants (à l’exception de Joachim).

L’attention conjointe est dépendante de la capacité de l’enfant à se fixer : les enfants avec d’importants troubles attentionnels utilisent, donc, cette compétence de façon aléatoire. Ils peuvent attirer l’attention de l’adulte sur un objet extérieur – en utilisant le pointage proto-impératif – mais ont des difficultés à diriger et surtout à maintenir leur attention sur un événement indiqué par l’adulte. L’attention conjointe est acquise par 8/11 enfants. Elle est en cours d’acquisition chez Ismaël, Joachim et Lilian.

Le tour de rôle dépend, lui aussi, de la capacité qu’a l’enfant à maintenir une interaction. Un jeu d’échange d’objet sur le modèle « à toi, à moi » nécessite, de plus, que l’enfant ait dépassé le stade de l’exploration et de la vérification des propriétés de l’objet. Le tour de rôle est acquis par 5/11 enfants. Il est en cours d’acquisition chez 3/11 enfants (Tristan, Valentine et Estéban) et n’est pas acquis par 3/11 enfants (Joachim, Lilian et Ismaël).

Enfin, le pointage proto-déclaratif, qui marque la triangulation de la communication et un découpage symbolique du monde objectal par l’enfant, est acquis par 4/11 enfants (Flavien, Hugo, Charlotte et Camille).

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2. La mimogestualité :

a. En lien avec l’Inventaire Français du Développement Communicatif :

Les sept gestes acquis par 75% des enfants ordinaires âgés de plus de 12 mois, développés par Sophie Kern25, ne sont pas tous acquis par les enfants de cette étude, qui ont pourtant un âge communicatif supérieur à 12 mois. Cependant, les trois gestes les plus fréquemment acquis par les enfants ordinaires le sont également par les enfants de notre étude.

Les trois gestes acquis par les 11 enfants de notre étude sont :

- Tendre les bras pour être porté (acquis par 94,95% des enfants ordinaires de 12 mois) - Etendre son bras pour donner un objet qu’il tient dans sa main (acquis par 94,85% des

enfants ordinaires de 12 mois)

- Jeter une balle (acquis par 85,66% des enfants ordinaires de 12 mois) 10/11 enfants peuvent également :

- Manipuler un livre de façon adéquate (acquis par 85,11% des enfants ordinaires de 12 mois) : tous les enfants, sauf Joachim.

- Faire « au revoir » spontanément quand quelqu’un quitte la pièce (acquis par 81,25% des enfants ordinaires de 12 mois) : tous les enfants à l’exception d’Ismaël.

- Pointer (acquis par 77,20% des enfants ordinaires de 12 mois) : tous les enfants, sauf Joachim.

En outre, 8/11 enfants peuvent :

- Etendre le bras pour montrer un objet qu’ils tiennent dans leur main (acquis par 76,47% des enfants ordinaires de 12 mois) : Joachim, Lilian et Ismaël ne réalisent pas spontanément cette action.

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156 On constate, donc, un décalage notable mais des acquisitions similaires, acquises selon une chronologie semblable à celle des enfants ordinaires : les trois gestes acquis par plus de 85,66% des enfants ordinaires le sont, également, par tous les enfants de cette étude.

Notons que les six enfants trisomiques de l’expérimentation possèdent la totalité de ces gestes : leur communication paraît donc moins troublée que celle des autres enfants, plus proche d’une évolution ordinaire.

b. En lien avec la classification de J. Cosnier :

Au niveau des gestes quasi-linguistiques, on remarque l’utilisation par ces enfants de mimiques, de gestes opératoires pour transmettre une information, de gestes conatifs (« chut », « stop ») et phatiques pour établir le contact.

Les enfants de notre étude utilisent également la gestualité phonogène pour produire des sons et phonèmes, des gestes extra-commuicatifs ainsi que de nombreux paraverbaux, c’est-à-dire des variations prosodiques et des expressifs (faciaux), le plus souvent pour transmettre un ressenti. Estéban emploie, également, des gestes illustratifs pour pallier son absence de mots oraux. La majorité des enfants emploie des gestes synchronisateurs de l’interaction (qui appartiennent à la fonction phatique).

c. De façon générale :

Les gestes signifiants les plus souvent employés par les enfants de notre étude sont : « Envoyer un baiser », « au revoir », « chut » et « bravo ». D’autres gestes tels « pleurer », « boum » ou « câlin » sont utilisés moins fréquemment.

Les enfants ayant la mimogestualité de communication la plus développée sont ceux ayant le moins de mots à leur disposition pour exprimer leurs préoccupations cognitives et leur désir d’interaction. Les gestes kinémimiques (visser, couper…) et pictomimiques (petit,

157 gros…) sont utilisés par les enfants ayant des messages riches à faire passer sans le support des mots. L’éventail des gestes acquis dépend donc du développement général de l’enfant : plus il a de choses à signifier, plus il enrichit son stock gestuel pour pallier cette absence de mots.

Les enfants au langage oral le plus développé, notamment Camille, utilisent des gestes coverbaux pour accompagner leur discours.

Les enfants de cette étude suivent donc l’évolution des enfants ordinaires, au niveau du développement de la communication non verbale : les uns comme les autres

utilisent de nombreux gestes signifiants puis, lorsque les mots apparaissent, la communication gestuelle décline, sans pour autant disparaître, au profit de la communication verbale, qu’elle vient enrichir.

3. L’acquisition des différentes fonctions de communication :

Les fonctions de communication sont acquises de façon inégale par les enfants de cette étude, que les moyens soient verbaux ou non. L’unique fonction totalement maîtrisée

est la fonction expressive : tous les enfants, en effet, utilisent mimiques, gestes ou mots pour exprimer des émotions.

La fonction conative, permettant d’agir sur autrui, est acquise par 10/11 enfants : le onzième et dernier enfant, Joachim, l’utilise de façon incertaine.

La fonction phatique est maîtrisée par 7/11 enfants : les quatre autres sujets l’utilisent peu, voire très peu.

La fonction référentielle est acquise par 7/11 enfants, qui ne sont pas les mêmes que pour la fonction phatique.

Les fonctions poétique et métalinguistique ne sont encore utilisées par aucun enfant de cette population d’étude.

158 On constate par conséquent une gradation dans le développement des fonctions de communication. Les fonctions référentielle, poétique et métalinguistique dépendent en effet du support verbal ; les deux dernières supposent également une mise à distance du langage et une réflexion à son sujet. La fonction phatique, elle, est liée à l’attention conjointe : elle est donc peu développée par les enfants n’ayant pas encore atteint ce stade cognitif.

4. Les premiers mots utilisés par ces enfants :

Les mots les plus utilisés par ces enfants sont « oui – non », « bonjour – au revoir », « maman », « papa », « allô », « regarde », « boum ». Les images et objets les plus souvent dénommés sont « bateau », « avion », « lumière », « lunettes », « gâteau », « biberon », « bébé » et « lapin ».

Les mots relevant de la fonction phatique et/ou conative les plus fréquents sont : « encore », « allez » et « attends ».

Certains enfants utilisent des marqueurs spatiaux ou de quantification, tels : « où ? », « ici », « là », « partout », « tout plein », « assez », « tout ça », « apu » et « un petit peu ».

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