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3.2 Th´ eorie cin´ etique des plasmas :

3.2.2 Energ´ ´ etique du gaz de particules :

Approche thermodynamique

Penchons-nous sur la question cruciale de l’´energie microscopique du plasma, en rai- sonnant sur la pertinence des deux hypoth`eses thermodynamiques limites : transforma- tion adiabatique ou isotherme. La premi`ere suppose un processus infiniment rapide, la deuxi`eme au contraire un processus infiniment lent. Dans un gaz de particules, la vitesse de r´ef´erence des processus ´energ´etiques microscopiques ´etant la vitesse thermique, si on

note vϕ la vitesse caract´eristique du ph´enom`ene ´etudi´e il apparaˆıt donc que le mod`ele

fluide ”classique” n’est pertinent que dans 2 situations limites tr`es diff´erentes :

– Lorsqu’un fluide maxwellien est en interaction avec des processus tr`es rapides com- parativement `a sa vitesse thermique, situation caract´eris´ee par vϕ >> vth. Dans ce

cas on peut consid´erer que l’´energie interne d’une particule fluide ne varie que sous l’effet des forces de pression (le flux de chaleur est nul) : l’´equation de fermeture adiabatique est justifi´ee.

– A l’inverse si les processus sont tr`es lents, vϕ << vth, on peut consid´erer que

l’´equilibre thermique ~∇T = ~0 va dominer : l’´energie microscopique est redistribu´ee instantan´ement dans tout le fluide. Dans ce cas le fluide peut ˆetre trait´e comme isotherme T = Cste.

Le cas limite vth → 0 correspond au fluide froid dont l’´equation d’ˆetat s’´ecrit tout

simplement : P = 0 et dont la fonction de distribution est donn´ee par :f (~r, ~v, t) = n(~r, t)δ(~v − ~V )17. Ce mod`ele sera parfois utilis´e dans la suite pour d´ecrire le fluide d’ions

qui v´erifie Ti << Te dans nos plasmas hors-´equilibre global. Cependant en g´en´eral nous

consid´ererons une temp´erature ionique faible mais finie et un fluide ionique d´ecrit par l’´equation adiabatique Pi/nγi = Cste. Ce mod`ele nous permet de d´efinir une vitesse ther-

mique ionique finie et donc un rayon de Larmor ionique ”moyen” non-nul, param`etres qui ont une importance d´eterminante comme on l’a vu dans notre ´etude des trajectoires particulaires au chapitre 2.

Pour le gaz d’´electrons nous adopterons au contraire le mod`ele du fluide isotherme puisque les ph´enom`enes qui nous int´eressent se produisent `a des temps tr`es longs devant le temps de transit (τe∼ L∇/vth) des ´electrons. Remarquons que parfois la

temp´erature (et donc la pression) du fluide maxwellien peut ˆetre consid´er´ee comme ani- sotrope, c’est le cas en particulier lorsqu’on injecte un faisceau directionnel de particules rapides dans une enceinte. Cette situation ne contredit pas le principe d’´equipartition de l’´energie et donc la d´efinition fluide ”classique” si le gaz de particules est initialement thermalis´e : il peut alors, dans la limite vϕ << vth, ˆetre trait´e comme isotherme avec des

temp´eratures diff´erentes selon plusieurs directions. C’est la situation du gaz d’´electrons primaires dans MISTRAL dont les temp´eratures v´erifient : Tep,k >> Tep,⊥.

Lorsque les vitesses thermiques des gaz de particules sont d´efinis il est possible de calculer simplement le Rayon de Larmor moyen RL par :

RL= s 1 ne Z +∞ −∞ f (~r, ~v, t)r2 Ld~v⊥= s 1 ne Z +∞ −∞ f (~r, ~v, t) (~v⊥− ~V⊥) 2 ω2 c d~v⊥ soit : RL= vth,⊥ ωc (3.15) Dans le cas plus g´en´eral o`u la dynamique des ph´enom`enes observ´es est de l’ordre de la vitesse thermique (ou quand les collisions sont inexistantes) le gaz de particules ne peut plus ˆetre d´ecrit par une distribution maxwellienne et il faut envisager soit des mod`eles fluides plus complexes avec une relation de fermeture ad-hoc18 (voir [Chust06] pour une

17. δ(~x) ´etant la fonction de Dirac

18. se r´ef´erer par exemple aux articles : [Belmont87],[Belmont92],[Ferriere2002] pour des mod`eles fluides modifi´es et `a [Snyder97] pour des mod`eles du type Landau-fluide

analyse sur les lois de fermeture des ´equations fluides dans les plasmas non-collisionnels), soit des approches purement cin´etiques r´esolues par des sch´emas num´eriques19.

Interaction onde-particule

Au del`a de l’approche purement thermodynamique, il importe de comprendre la probl´ematique de l’´energ´etique microscopique du plasma du point de vue de l’interaction ondes-particule. Comme nous le verrons un plasma est un milieu aux propri´et´es disper- sives tr`es complexes o`u divers type d’ondes peuvent se d´evelopper en pr´esence d’une source d’´energie que sont naturellement les gradients d’´equilibre (gradient de potentiel, de densit´e, de temp´erature essentiellement), ce qui autorise potentiellement un transfert d’´energie sous forme ondulatoire, donc `a longue distance, dans le milieu. Les ondes in- stables identifi´ees dans notre situation exp´erimentale, que nous allons ´etudier plus loin du point de vue th´eorique `a l’aide du mod`ele `a 2 fluides, sont des ondes ioniques v´erifiant ω . ωci << ωce. Il est donc essentiel d’identifier dans cette gamme de fr´equence la per-

tinence des hypoth`eses sur l’´energ´etique des gaz de particules

Pour qualifier l’interaction onde-particule il faut d’abord identifier dans quelle condi- tion elle est significative, pour cela commen¸cons par l’exemple d’un plasma homog`ene constitu´e d’une infinit´e de particules r´eparties selon une distribution en vitesse f0(~v, t).

Une particule constituant ce plasma peut entrer en r´esonance avec une onde ~E0exp(iωt −

~k.~r) uniquement lorsque le champ v´ehicul´e par l’onde apparaˆıt comme statique dans le r´ef´erentiel de la particule : celle-ci ressent alors son effet non plus en moyenne nulle mais en valeur effective, ce qui peut alt´erer son ´energie. Cette condition s’´ecrit tout simple- ment ω = ~k.~v [Gurnett05] dans le cas d’une particule non magn´etis´ee. En l’absence de champ magn´etique et pour un gaz de particules maxwellien la r´esonance onde-particule n’est significative que dans le cas :

ω0 = ω − ~k.~V ∼ kvth

avec ~V la vitesse moyenne du fluide et donc ω0 la fr´equence de l’onde dans le r´ef´erentiel du fluide. En effet c’est dans cette situation qu’apparaˆıt un ph´enom`ene cin´etique fonda- mental : l’effet Landau [Landau46]20 qui se traduit par un ´echange d’´energie significatif

entre l’onde et le gaz de particules : il s’av`ere que le transfert d’´energie de l’onde vers le gaz de particules est proportionnel `a l’oppos´e de la pente de la fonction de distribu- tion en v = ω0/k21, ce qui donne n´ecessairement lieu `a un amortissement de l’onde pour

19. se r´ef´erer `a [Ghizo03] pour un code Vlasov semi-lagrangien, [Besse08] pour un code gyro-water-bag et [Dif-Pradalier08] pour un code gyrocin´etique.

20. du nom du prolifique physicien russe Lev Davidovich Landau dont les travaux furent d´eterminants dans bien des domaines allant de la superfluidit´e (prix nobel 1982) `a la th´eorie de Ginzberg-Landau pour les supra-conducteurs. Pour la petite histoire une rivalit´e, sans doute autant intellectuelle que frontali`ere, l’opposait `a l’ukrainien Vlasov qui le d´epassa un moment grˆace `a la publication de l’´equation cin´etique qui porte son nom. Landau reprit la main en arguant que le traitement de Fourier employ´e par Vlasov ne prenait pas en compte les conditions aux limites temporelles et en particulier la contrainte de causalit´e : c’est en r´esolvant le probl`eme en partie par transform´ee de Laplace qu’il mit en ´evidence l’amortissement qui porte son nom

21. tr`es grossi`erement il y a amortissement de l’onde s’il y a plus de particules acc´el´er´ees que de particules frein´ees, amplification dans le cas contraire (situation d’instabilit´e cin´etique, type plasma-

une distribution maxwellienne22. En particulier l’effet Landau est n´egligeable lorsque ω0 >> kvth, la proportion de particules r´esonantes devenant tr`es vite n´egligeable, ou

dans le cas oppos´e ω0 << kvth puisque la pente de la distribution est alors quasiment

nulle.

Dans un plasma magn´etis´e il faut modifier ce raisonnement pour tenir compte d’un autre ph´enom`ene cin´etique : la r´esonance cyclotron. La nouvelle condition de r´esonance s’´ecrit [Gurnett05] :

ω − kkvk− ~k⊥.~vd = p ωc p ∈ Z

avec ~vd la vitesse de d´erive (transverse) de la particule, kk le vecteur d’onde selon ~B et

k⊥ dans la direction transverse. Cette relation traduit le fait que la fr´equence d´ecal´ee

par effet Doppler doit ˆetre un multiple de la fr´equence cyclotron pour que la particule voit un champ statique au cours de sa rotation dans le champ magn´etique. Notons que dans le cas p = 0 on retrouve la condition classique de r´esonance qui donne lieu `a un amortissement Landau significatif dans la direction parall`ele :

ω0 = ω − ~k.~V ∼ kkvthk

Pour une onde en propagation purement transverse : kk = 0, l’amortissement Landau

disparaˆıt [Bernstein58], la r´esonance apparaˆıt donc uniquement aux harmoniques de la fr´equences cyclotron :

ω0 = ω − ~k.~V = pωc p ∈ Z∗

et concerne toutes les particules du gaz. Cet effet, baptis´e amortissement cyclotron, se traduit par un transfert d’´energie tr`es efficace de l’onde vers le gaz de particules, il est exploit´e en particulier dans les exp´eriences de chauffage sur les dispositifs de fusion magn´etique (chauffage ICH ou ECH pour ion / electron cyclotron heating)[Brambilla88] [Erckmann94].

Si par contre le vecteur d’onde poss`ede une composante longitudinale : kk 6= 0, l’amor-

tissement Landau intervient dans le cas p = 0. On peut consid´erer que l’interaction onde-particule est n´egligeable en particulier si :

ω − ~k.~Ve

vthek

<< kk <<

ω − ~k.~Vi

vthik

dans ces conditions la r´esonance cyclotron n’intervient que dans les deux cas limites : ω − ~k.~Vi ' pωci p ∈ Z∗ pour les ions

kk ∼

pωce

vthek p ∈ Z ∗

pour les ´electrons

La figure 3.2 donne un aper¸cu synth´etique des situations dans lesquelles l’interaction onde particule intervient significativement, dans la situation des ondes ioniques qui nous

faisceau)

pr´eoccupent. En dehors de ces r´egions, l’amortissement cin´etique peut ˆetre n´eglig´e et les hypoth`eses de fermeture du mod`ele fluide sont pertinentes pour d´ecrire les ph´enom`enes ondulatoires dans le plasma.

Figure 3.2 – Sch´ema illustrant les diff´erentes r´egions dans lesquelles l’interaction onde-particule devient pr´edominante dans un diagramme (ω − ~k.~Vi, kk). En rouge : effet Landau

´

electronique, en bleu : effets Landau et cyclotron ioniques.