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Venons-en enfin à la description d’un phénomène typique associé à la filamentation :

l’émis-sion conique. On observe dans ce cas [cf fig.1.15(a), issue de [37]] une tache blanche sur l’axe

de propagation, entourée par des anneaux colorés dont la longueur d’onde va en diminuant

du centre vers les bords, à l’inverse de la diffraction "normale", pour laquelle le rouge diffracte

plus que le bleu et devrait donc se retrouver plus étalé. Le processus engendrant la création des

anneaux colorés peut être vu comme issu d’un mélange à quatre ondes non-colinéaire de type

2ω

0

ω

I

+ω

EC

. En principe, l’accord de phase de ce processus est impossible à obtenir en

ré-gime linéaire. On peut néanmoins montrer [38] que l’effet Kerr modifie les conditions d’accord

de phase (on parle alors d’instabilité de modulation), permettant alors au processus de mélange

à quatre ondes de se produire de manière efficace.

La figure1.15(b) correspond à la simulation effectuée pour une focale de 1 m, et représente

l’intensité du spectre en fonction de la fréquence et de la divergence du faisceau par rapport à

son axe de propagation (et donc à travers cette-dernière, en fonction dek

). Trois zones y sont

identifiées par des lettres :

❏ zone (A) : elle est nommée émission conique infrarouge par [39], même si elle est

identi-fiée comme provenant du mélange à quatre ondes impliquant la fréquence fondamentale

ω

0

et la fréquence de l’émission conique décalée vers le bleuω

EC

qui lui correspond. La

fréquence alors créée vautω

I

=2ω

0

ω

EC

.

❏ zone (B) : l’émission conique à proprement parler, telle qu’elle est décrite ci-avant. La

distribution radiale du décalage en fréquences, que traduisent l’apparition des anneaux

colorés, est donc convenablement dépeinte par les simulations numériques.

❏ zone (C) : sur l’axe de propagation (i.e. pour des angles faibles), le faisceau subit un

élargis-sement spectral, abordé précédemment, tant vers l’infrarouge [zone (C1), élargisélargis-sement

dû à la SPM] que vers le visible [zone (C2), élargissement dû en partie à la SPM mais

sur-tout au plasma]. Cet élargissement spectral correspond à la tache blanche visible au centre

de la figure1.15(a).

Sp e ct re (d B) Emission conique Axe de propagation a)

14

12

10

8

6

4

2

0

0.5 1 1.5 2

0

-50

-100

Fréquence (harmonique)

D

ive

rg

e

n

ce

(mra

d

)

(b)

Sp

e

ct

re

(d

B)

(C2) (A) (B) (C1)

F

IGURE

1.15: (a) : Photo expérimentale d’émission conique, issue de [37]. (b) : Intensité du

spectre en fonction de la fréquence et de la divergence du faisceau, après 24 m de propagation

(dont 16 m de filamentation), tirée de [40]. L’impulsion était alors centrée àλ

0

=800 nm, avait

une durée de 45 fs, une énergie de 5 mJ. Les points blancs correspondent aux données

expéri-mentales de [39] (partie IR) et de [41] (partie visible-UV).

4 Equation de Schrödinger Dépendante du Temps (E.S.D.T.) et

base des splines

Lors de la partie 2 de ce Chapitre, nous nous sommes placés dans le cadre du modèle

éta-bli, c’est-à-dire que nous avons utilisé la théorie des perturbations pour développer la réponse

optique du milieu en termes de puissance du champ électrique. Celle-ci est valide dans

l’ap-proximation du champ faible, qui stipule que le champ laser appliqué au système doit

demeu-rer négligeable devant le champ intra-atomique, responsable de la liaison noyau-électron. La

valeurE

c

de celui-ci peut être évaluée grâce à la formule suivante dans le cas de l’hydrogène :

E

c

= |e|

4πǫ

0

a

02

≃5.1×10

11

V.m

1

(1.100)

a

0

≃52 pm est le rayon de Bohr. Or, comme nous venons de le voir à la partie précédente,

les éclairements atteints (et transportés par le filament) lors de la propagation d’un faisceau

la-ser ultra-intense sont de l’ordre de la dizaine à la centaine de TW.cm

2

. A titre d’exemple, un

éclairement pic d’une valeur de 62 TW.cm

2

correspond à une valeur de champ pic de 2.2×

10

10

V.m

1

, soit environ 4.4 % de la valeur du champ intra-atomique.

L’approximation du champ faible, légitimant le développement de la polarisation en série

perturbative du champ électrique, peut donc raisonnablement être contestée, d’autant plus

que des processus tels que la génération de hautes harmoniques

14

[42] ou encore l’ionisation

au-dessus du seuil [16], mettant en jeu des valeurs d’éclairements similaires à celles liées à la

filamentation sont, eux, traités en dehors de la théorie des perturbations.

Ainsi, la solution est d’avoir recours à une méthode non-perturbative, une méthode dite

« champ fort », en d’autres termes : résoudre l’Equation deSchrödingerDépendante duTemps

(ou E.S.D.T.)

15

, qui régit l’évolution de l’atome interagissant avec le champ laser.

La résolution de l’E.S.D.T. à chaque instantt nous permet d’avoir accès à la valeur de la

fonction d’ondeΨ(r,t) à tous les temps. Cette fonction d’onde contient toutes les informations

sur l’état du système au tempst. Il faudra donc en extraire les informations pertinentes pour

évaluer des quantités physiques, en lien avec la réponse optique microscopique du système.

Nous pourrons ainsi évaluer les termes sources de l’équation de propagation établie à la partie

2. L’E.S.D.T. est une équation différentielle du premier ordre par rapport au temps, ce qui

si-gnifie que la connaissance de l’état initial du système, et de sa fonction d’ondeΨ(r,t=t

0

) est

suffisante pour la détermination de la fonction d’onde à un tempstultérieurΨ(r,t).

14. H.H.G. en anglais, pourHigh-HarmonicsGeneration.

Une autre méthode de résolution existe cependant, et consiste à effectuer les calculs dans

une base, c’est-à-dire à réduire cette équation différentielle en un problème d’algèbre

matri-cielle, pour lequel il existe des algorithmes numériques de résolution très puissants. La base des

états propres du système en l’absence de champ électrique constitue l’exemple le plus intuitif

pour cela. Toutefois, au cours de cette thèse, c’est dans une autre base que les calculs ont été

effectués : la base des fonctions splines [43,44].

En particulier, la fonction d’ondeΨ(r) peut être séparée en deux parties, radialeU

o,l

(r) et

angulaireY

lm

(θ,ϕ), comme suit :

Ψ(r)=U

o,l

(r)

r Y

m

l

(θ,ϕ) (1.101)

lest le moment angulaire,mest le moment magnétique etY

lm

(θ,ϕ) est l’harmonique

sphé-rique

16

àl etmdonnés, état propre de l’opérateur moment cinétiqueL. Comme nous aurons

l’occasion d’y revenir plus loin,msera fixé nul.

U

o,l

(r) est la fonction d’onde radiale :oéquivaut àn, le nombre quantique principal, dans le

cas d’un état lié, et àcdans le cas d’un état du continuum. Nous faisons cette distinction du fait

que les états du continuum ne sont pas indexables par le nombre quantiquen. Ainsi, la partie

angulaire sera traitée par les harmoniques sphériques, tandis que les fonctions splines se

char-geront de la partie radiale.

Nous commencerons ainsi cette partie par la présentation de ces fonctions. Nous

montre-rons ensuite brièvement qu’elles permettent de calculer la structure atomique (énergies,

fonc-tions d’onde, ...) de notre atome. Nous considérerons alors l’hydrogène ; en effet, il existe pour

cet atome des solutions analytiques auxquelles nous pourrons comparer les résultats obtenus

par la méthode des B-splines. Enfin, nous expliquerons comment nous pouvons les employer

pour résoudre l’E.S.D.T., et en retirer par la même les valeurs que prennent les observables

phy-siques d’importance dans le contexte de la filamentation.

16. La formule générale des harmoniques sphériques est [45] :

Ylm(θ,ϕ)=(1) (l+m) 2ll! s 2l+1 4π (lm)! (l+m)!e imϕ (sinθ)m d l+m d(cosθ)l+msinθ2l