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Les effets du vieillissement sur l’alimentation et les manières de manger en Ehpa

1.3 Les modes de vie et d’alimentation en foyer-logement

1.3.3 Les effets du vieillissement sur l’alimentation et les manières de manger en Ehpa

Les pratiques alimentaires mettent en jeu de nombreux éléments : des ressources matérielles (économiques, matérielles, espaces, véhicule), des ressources sociales (formes de présences ou d’absences de réseaux familiaux et amicaux, compétences de sociabilités), des ressources symboliques (représentations, normes, savoir-faire), des ressources culturelles (connaissances

sur l’alimentation et les questions médicales associées, savoirs, savoir-faire et compétences culinaires), des ressources physiques fonctionnelles (possibilités de déplacement, de porter les courses, de préparer les repas), des ressources liés au foyer-logement (implantation dans la ville et dans le quartier, présence de commerces et de services à proximité, équipements collectifs disponibles). Dès lors, quand l’un de ces éléments change sous l’effet du vieillissement ou d’un événement biographique, cela remet en question les allants de soi.

Les travaux en sociologie de l’alimentation ont révélé que les pratiques alimentaires se modifient sous l’effet du vieillissement et de la perte d’autonomie. En effet, les travaux ont montré qu‘avec l’avancée en âge, la délégation des courses alimentaires augmente. Plus les personnes vieillissent, plus elles délèguent les courses alimentaires, aux proches d’abord, puis au fur et à mesure, elles font de plus en plus appel à des aides professionnelles, ce qui réduit la diversité du panier alimentaire (Cardon et Gojard, 2009). Dans la dépendance culinaire, la personne a recours à un tiers qui fait les courses alimentaires à sa place. Selon le lien avec l’aidant (familial ou professionnel), les disponibilités de ce dernier, et la forme de l’aide reçue « déterminent en grande partie la fréquence et les types de produits achetés, notamment leur fraîcheur. » (Cardon, 2009). Ces transformations des pratiques alimentaires sont à mettre en lien avec les capacités des personnes âgées à continuer à faire, car les travaux ont montré que « (…) les évolutions des façons de cuisiner sont fortement liées au degré d’autonomie des personnes et à leur capacité à «†cuisiner†», c’est-à-dire à mobiliser et à utiliser des produits qui vont être «travaillés » (lavés, épluchés, coupés, découpés, etc.), puis « assemblés» (mélangés, battus, etc.). » (Gojard et Lhuissier, 2003). D’autant plus, que rappelons-le, ces générations consomment davantage de produits frais, qui nécessitent une préparation plus importante.

Une enquête par entretiens auprès de personnes en situation de dépendance et veuves, a mis en évidence que les effets des déterminants sociaux se conjuguent aux inégalités sociales de santé. Ainsi, « (…) la comparaison des menus montre que ce sont surtout les femmes des catégories supérieures qui consomment principalement des produits frais, là où les femmes des catégories populaires qui préparent encore à manger ont davantage recours aux produits et plats préparés, soit totalement, soit partiellement (auquel cas, elles «†bricolent†» entre produits frais et produits de 3e

et 4e

gamme). En ce sens, les stratégies d’adaptation culinaires (notamment dans l’approvisionnement et la préparation) dépendent du contexte social d’existence » (Cardon, 2009). Les pratiques alimentaires se transforment selon les effets conjugués des déterminants sociaux et des évènements biographiques.

Le vieillissement est accompagné par des modifications du mode de vie tels que le passage à la retraite, le veuvage, la mobilité résidentielle, un séjour en institution hospitalière qui peuvent affecter durablement ou temporairement les manières de cuisiner, les goûts, les choix de consommation. Par exemple, le veuvage peut conduire les femmes « à une réappropriation d’anciennes habitudes ou préférences alimentaires, antérieures au mariage. » (Cardon, 2009). Tandis que pour les hommes de ces générations, l’absence de compétences, de savoirs et de savoir-faire culinaires, les oblige à des stratégies de délégation des opérations de préparation des repas quand leur conjointe, auparavant en charge des repas de la famille, décède (Cardon, 2009).

A l’instar du domicile, les établissements d’hébergement pour personnes âgées sont également investis par les politiques publiques gérontologiques pour la lutte contre l’isolement et la dénutrition. Un guide de recommandations nutritionnelles1, à destination des professionnels des Ehpa, insiste sur le fait que « le temps des repas constitue un moment privilégié et essentiel de plaisir, de sociabilité́ et de convivialité́ ; en particulier pour les personnes âgées fragiles résidant en établissements d’hébergement. Ainsi, notre alimentation répond non seulement à des besoins physiologiques, mais revêt aussi une grande importance en apportant à notre corps un plaisir essentiel à notre bien-être et à notre santé. ». Les repas en Ehpad sont pensés comme des supports de sociabilité et de convivialité, supposés soutenir l’intérêt pour la nourriture et lutter contre la dénutrition, par ailleurs très fréquente dans ces établissements. Les travaux sur les repas en Ehpad mettent en avant une grande distance entre les discours de prévention, la façon dont les repas sont pensés, et l’expérience des convives. La thèse de Guérin (2016) a mis en évidence que ces repas, loin d’être conviviaux, sont de véritables moments d’épreuves (au sens commun du terme) pour les résidents, « dans un contexte où des résidents décèdent fréquemment, ont des difficultés motrices et psychologiques à se déplacer jusqu’au réfectoire, à manger, et, régulièrement, affirment ne vouloir ni vivre dans l’institution, ni y manger collectivement ». Entre délégation totale obligatoire et dépossession des pratiques alimentaires dans leur totalité, l’alimentation en Ehpad est totalement prise en charge par l’institution. De ce fait, l’admission en institution remplace les pratiques alimentaires antérieures par de nouvelles, dans lesquelles les personnes ont l’obligation de prendre le repas en salle, n’ont pas le choix des heures de repas, ni de leur placement à table c'est-à-dire des

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PROGRAMME NATIONAL NUTRITION SANTÉ - Recueil d'actions pour l'amélioration de l'alimentation en établissement hébergeant des personnes âgées.

convives qui seront leurs voisins pendant les repas, et dont les manières de table seront peut- être très différentes des leurs (Mokdad, 2010). L’institution impose également des répertoires culinaires différents, des manières de cuisiner, des menus. Enfin, l’organisation des soins médicaux et le caractère collectif des repas déterminent une temporalité des repas nouvelle. Le temps du dîner, souvent prévu entre 18h et 19h, est souvent l’objet de critiques de la part des résidents (Mokdad, 2010). En outre, comme l’ont montré Cardon et Soutrenon (2013), la salle de restaurant est un lieu de tensions : « elle est avant tout un espace social dans lequel les résidents, ainsi que le personnel encadrant, sont en interactions de face à face. Si l’on peut considérer le restaurant comme une immense scène sociale dans laquelle les différents acteurs sont amenés à jouer différents rôles sociaux, nous insisterons ici sur les types d’interactions qui cristallisent des conflits récurrents observables en situation d’observation et qui conditionnent de manière forte la perception et l’expérience de la prise de repas en contexte collectif. ».

Les travaux sur les Ehpa se sont intéressés au service de restauration présent dans les établissements. Les enquêtes révèlent que la restauration est « l’un des services les plus plébiscités, même quand elle n’est pas comprise dans le pack de services « de base ». » (Bacconnier-Baylet, Chaudet et Madoré, 2018). D’après les auteurs, les personnes interrogées expliquent leur fréquentation du restaurant collectif de trois manières : d’une part, cela leur permet de « manger équilibré », d’autre part, « c’est un moyen de se faciliter la vie car on n’a plus besoin de préparer ses repas ni de faire ses propres achats de denrées alimentaires », enfin cela leur offre des occasions de rencontre et de discussion avec les autres résidents. (Bacconnier-Baylet, Chaudet et Madoré, 2018, page 212). Pour les établissements, la prestation du déjeuner en collectivité est vue comme un moyen de lutter contre l’isolement, grâce aux opportunités de rencontre entre résidents qu’elle génère. De plus, elle constitue un moyen de lutter contre la dénutrition et la malnutrition, car les résidents y trouvent des menus complets, élaborés par un professionnel de la diététique, c'est-à-dire conformes aux normes nutritionnelles en vigueur et suffisant en quantité.

Les motifs d’entrée dans les foyers-logements sont des réponses aux problèmes rencontrés au cours de la retraite, et une réponse aux enjeux sociétaux du vieillissement. Les parcours biographiques des personnes et les motifs d’entrée influent aussi sur l’expérience de vie en foyer-logement. Selon les caractéristiques sociales, les modes de vie en foyer-logement diffèrent, comme c’est le cas en domicile ordinaire, et l’expérience de vieillissement est

également influencée par les inégalités sociales de santé et de conditions de vie. De même, l’alimentation est modifiée par le vieillissement, les évènements biographiques, la perte d’autonomie, et la mobilité résidentielle. En institution, les repas, loin des représentations de convivialité diffusées par les programmes nationaux de prévention, sont vécus comme des moments de tension et d’épreuves.

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Les travaux présentés dans ce premier chapitre ont montré que la dénutrition, l’isolement social et la perte d’autonomie sont liés dans les programmes de prévention à destination des personnes âgées, mais également dans les pratiques de catégorisations et de gestion des populations âgées. Les activités alimentaires servent de critères d’évaluation du degré d’autonomie des personnes âgées. A domicile, l’absence de pratiques d’achat et d’approvisionnement est considérée comme un indice de l’isolement social des personnes. De ce fait, les pratiques alimentaires servent de leviers de prévention de la perte d’autonomie, dans des programmes nationaux à destination des personnes âgées. Les recommandations nutritionnelles sont largement diffusées dans la société, par le biais de campagnes de sensibilisation, auprès de populations de différentes tranches d’âge. On pense ici aux campagnes télévisuelles « Manger Bouger », par exemple. Les prescriptions alimentaires pénètrent aussi les espaces domestiques, par le biais des professionnels et des familles entourant les personnes âgées. Le vieillissement n’est pas sans effet sur les pratiques alimentaires des personnes. En effet, les travaux ont montré que les évènements biographiques liés à l’avancée en âge et la perte d’autonomie amènent les personnes âgées à modifier leurs pratiques alimentaires, et souvent à perdre en diversité et en fraicheur des denrées, avec la délégation culinaire (Cardon et Gojard, 2009). Toutefois, les personnes mettent en œuvre des stratégies pour maintenir leurs habitudes alimentaires, dans lesquelles les ressources de leur environnement présent jouent une large part, que ce soit les conditions matérielles d’existence, ou une mobilité résidentielle près de leurs enfants.

Parmi ces stratégies résidentielles des personnes âgées, l’entrée en foyer-logement peut être une réponse aux problèmes rencontrés au cours de la retraite, une réponse aux enjeux sociétaux du vieillissement (isolement social, santé) et augmenter les ressources disponibles dans

l’environnement présent. Avec le foyer-logement, les personnes peuvent respecter la norme d’autonomie-proximité avec leurs proches, ne pas être une charge pour eux, tout en étant proche géographiquement. Selon les caractéristiques sociales des personnes, les modes de vie en foyer- logement diffèrent, comme c’est le cas en domicile ordinaire. Les parcours biographiques des personnes et les motifs d’entrée influent aussi sur l’expérience de vie en foyer-logement. Le contexte de ces établissements en lui-même a des effets sur les modes de vie en foyer-logement, selon la manière dont les personnes s’en emparent. Les travaux montrent, enfin, que les foyers- logements sont des espaces de vie fortement structurés par les enjeux autour de la perte d’autonomie des personnes âgées. D’abord, plus prosaïquement, ce type d’habitat influe sur la cotation du degré d’autonomie, dans le modèle AGGIR. Ensuite, ils comportent des services de restauration et d’animation, pensés comme des dispositifs de prévention de la perte d’autonomie.

2 L

ES PRATIQUES ALIMENTAIRES DES RESIDENTS DE

FOYER

-

LOGEMENT

,

CONSTRUCTION DE L

OBJET DE

RECHERCHE

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Dans le chapitre précédent, nous avons exploré la littérature existante au prisme des liens existants entre vieillissement, alimentation et foyer-logement. Comme nous avons pu le constater dans ce premier chapitre, peu de recherches portent sur l’alimentation des vieilles personnes en institution, moins encore sur les foyers-logements, et sur les pratiques de prévention des questions de santé liées au vieillissement dans ce contexte. L’exploration de la littérature laisse donc une série de questions sans réponses, concernant le déroulement de la prévention de la perte d’autonomie en foyer-logement, dont on sait qu’elle est basée sur les pratiques alimentaires, avec l’aide de dispositifs de services présents sur place.

L’objet de ce deuxième chapitre est de présenter le cadre de réflexion de cette recherche. Pour ce faire, nous présenterons dans une première section l’objet de recherche, la construction du questionnement, le questionnement général de la thèse, et les hypothèses principales (section 2.1). Dans une deuxième section, nous expliciterons les choix méthodologiques auxquels nous avons procédé pour mener cette étude, le déroulement de l’enquête de terrain, et les modalités d’étude des différents matériaux collectés (section 2.2). Dans une dernière section, nous présenterons le terrain d’enquête, le corpus dans un premier temps, et les conditions matérielles de vie dans les établissements dans lesquels l’enquête a été menée (section 2.3).

2.1 Présentation de l’objet de recherche

La vieillesse est construite comme un temps de « risques », dont le principal est celui de la dépendance, des études médicales ayant montré un lien entre dénutrition et perte d’autonomie. Les autres risques sont l’isolement social et la dénutrition, qui favoriseraient la survenue de la dépendance. L’enjeu de ces risques pour la société, défini par les politiques publiques, est celui des modalités et des coûts de la prise en charge, des aides et des dépenses de soins et d’aides sociales ; mais aussi un enjeu de solidarité envers les membres les plus démunis et les plus fragiles de la collectivité. Le vieillissement et l’alimentation sont l’objet d’actions publiques conjointes envers la population ciblée des personnes âgées. L’alimentation est au cœur des actions publiques contre les risques en santé, et contre la dépendance des personnes âgées, mais aussi dans les préconisations pour « Bien Vieillir ». Les politiques publiques de santé conçoivent l’alimentation comme un levier pour promouvoir des comportements favorables à un maintien en santé. Elle est utilisée par les actions publiques pour prévenir les risques au niveau individuel. Du Programme National Nutrition Santé et du Plan Bien Vieillir découlent des prescriptions normatives diffusées par de multiples canaux : professionnels médicaux et sociaux, aides à domicile, proches, média. Les normes nutritionnelles qui en résultent sont diffusées auprès des publics ciblés, non seulement directement par des campagnes grand public mais aussi indirectement auprès de tous les professionnels en charge des services et des soins à la personne, travaillant dans les espaces privés des domiciles et les espaces collectifs des institutions. Les travaux en sociologie (Cardon, 2007 ; Cardon, 2008) ont montré qu’à domicile, les aidants professionnels ou profanes sont envisagés comme des relais des recommandations nutritionnelles pour essayer d’influer sur les pratiques alimentaires des personnes âgées, qui en définitive sont considérées comme relevant de leurs propres décisions ; tandis qu’en Ehpad, il a été montré que l’alimentation est totalement prise en charge par l’institution, nutritionnellement normée, et dont les individus sont quasiment totalement dépossédés (Cardon et Soutrenon, 2013 ; Mokdad, 2010).

Les foyers-logements en tant qu’établissements médico-sociaux, se font le reflet de cette problématique, de cet enjeu de prévention des risques du vieillissement. Ces établissements sont une des expressions concrètes des façons de penser le vieillissement et la vieillesse dans la société française. Pour preuve ils ont évolué et les législateurs les ont fait évoluer en suivant les changements de paradigmes au cœur des politiques gérontologiques depuis leur création

jusqu’à aujourd’hui, comme nous l’avons vu dans les sections précédentes. Ils constituent de ce fait un contexte de vie singulier parmi les lieux de vie possibles après la retraite. Ils sont destinés à des personnes retraitées mais autonomes ou presque autonomes sur le plan fonctionnel. Le statut de ces établissements entérine le fait que les vieilles personnes ne peuvent y emménager ni y rester s’ils sont catégorisés comme dépendants. Les résidents doivent y entrer autonomes et le rester. Ils sont devenus au cours des années 2000 un lieu de prévention de la dépendance et d’aide au maintien de l’autonomie, à la suite de la réforme de la tarification. Cette nouvelle mission est désormais inscrite dans le nom même des foyers-logements qui sont devenus des Résidence Autonomie avec la loi ASV (Adaptation de la Société au Vieillissement) de 2015. Pour ce faire, les foyers-logements s’appuient sur des dispositifs, au cœur desquels l’alimentation joue un rôle important, notamment par la présence d’un restaurant collectif, et d’aides pour faire les courses. De plus, dans la mesure où dans les établissements, les repas peuvent être produits par l’institution (ceux pris en collectivité) ou produits par les résidents eux-mêmes (ceux préparés dans les appartements par les résidents), l’alimentation en foyer- logement se situe au croisement des alimentations à domicile et de celles en Ehpad.

L’alimentation s’inscrit dans un système dynamique entre différentes pratiques et différents enjeux qui ont des effets les uns sur les autres. Les évènements spécifiques qui se déroulent (en général) après la retraite, tels l’arrêt de la conduite automobile, le veuvage, l’apparition de fragilités et d’incapacités fonctionnelles, affectent les manières de mener les activités les plus banales, et notamment les pratiques alimentaires. Ainsi, ces dernières reflètent les transformations de la vie quotidienne. En outre, par la preuve concrète qu’elles donnent aux personnes qui les vivent, elles encadrent l’expérience du vieillissement, en participant au sentiment d’avancer en âge et à la transformation de l’identité des personnes vieillissantes. C’est pourquoi Cardon (2009) estime que « la problématique de l’alimentation permet alors plus globalement d’éclairer de manière significative la problématique du vieillissement abordée en termes de « processus† » et d’ «† expérience †», entre transformations et maintien de soi (Caradec, 2004). ».

Les pratiques alimentaires comprennent de nombreuses activités : élaboration des menus, approvisionnement, stockage, préparation culinaire, prise des repas. Celles-ci mobilisent pour leur mise en œuvre des ressources de divers ordres, telles des capacités fonctionnelles physiques, des compétences techniques, relationnelles, et des ressources matérielles, familiales, symboliques. Elles permettent de mettre en évidence les petits et grands changements, liés à l’avancée en âge, dans la vie quotidienne des personnes âgées. De ce fait, les formes des

pratiques alimentaires donnent à voir les processus de reconversion-déprise (Caradec), c'est-à- dire les différentes modalités sur lesquelles les personnes âgées se saisissent des ressources disponibles dans leur contexte de vie présent au fur et à mesure de leur avancée en âge pour s’en servir comme « support » (Martuccelli, 2006) de leur vieillissement. L’entrée par les changements dans les pratiques alimentaires permet de voir comment les personnes mettent en œuvre leurs ressources pour faire face aux divers problèmes engendrés par l’avancée en âge.

Cependant, après cette exploration des travaux sur le vieillissement, l’alimentation et les foyers-logements, certaines questions restent sans réponse. Aucun de ces travaux n’éclaire la manière dont se déroule la prévention de l’autonomie en foyer-logement, dont on sait qu’elle est basée sur les pratiques alimentaires, avec l’aide de dispositifs de services présents sur place, ni sur la manière dont les résidents y réagissent. Aucune étude ne dit non plus de quelle façon les établissements utilisent concrètement l’alimentation pour promouvoir l’intégration sociale, lutter contre l’isolement et la dénutrition, et ce que font les résidents des normes de santé publique à ce sujet. Enfin, on sait que l’identité et l’alimentation sont liées, et que l’identité est mise à mal par la mobilité résidentielle, dans la mesure où les personnes se voient attribuer un nouveau statut, et que les changements d’environnement de vie provoquent des modifications des comportements alimentaires. Mais on ne sait pas comment les pratiques alimentaires des personnes âgées se modifient dans le contexte du foyer-logement et quel effet cela a sur leurs expériences de vieillissement au fil de leur séjour. En définitive, quels effets cette organisation