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Effets des ultrasons sur le taux de dopage des films 134

Chapitre VI Effets des ultrasons sur le taux de dopage et la conductivité

A. Effets des ultrasons sur le taux de dopage des films 134

Le taux de dopage des films est le rapport du nombre de monomères chargés sur le nombre de monomères total au sein du polymère. Nous l’évaluerons exclusivement par XPS, en effectuant le rapport des composantes chargées (polarons et bipolarons) sur le signal total de l’hétéroatome (S pour le PEDOT et N pour le PPy). Rappelons que ces analyses ne concernent que l’extrême surface (4 à 10 nm).

I. Influence de l’épaisseur

Des films PEDOT/ClO4- d’épaisseur variable furent électrosynthétisés avec et sans

irradiation ultrasonore. Leur taux de dopage est ensuite évalué en étudiant la région S2p des analyses XPS, comme vu au Chapitre 1. Le graphique suivant présente la différence (en %) entre le taux de dopage des films élaborés sous ultrasons et celui des films silencieux en fonction de l’épaisseur des dépôts.

Elle est calculée comme suit : (TauxdedopagesousUS TauxdedopagesansUS)

TauxdedopagesousUS  X 100 0 5 10 15 20 25 30 35 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 D if re nc e de t aux de do pa ge ( % ) épaisseur du film (µm)

Nous observons ainsi un effet seuil quant aux effets des ultrasons sur le taux de dopage. Pour les épaisseurs inférieures à 0,5 µm, il reste quasiment le même, quelles que soient les

Figure 77. Différence de taux de dopage entre les films PEDOT élaborés sous ultrasons et les films silenceux en fonction de l’épaisseur des dépôts.

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conditions. Une nette augmentation (> 30 %) du taux de dopage pour les films irradiés est visible pour les épaisseurs supérieures.

Pour les petites épaisseurs, les contre-ions perchlorate pénètrent et diffusent aisément au sein du film suite à l’oxydation de celui-ci. Lorsque l’épaisseur augmente, leur mobilité devient plus réduite, entravant le phénomène de dopage des films (une diminution du taux de dopage de 7% est observée quand l’épaisseur passe de 0,1 à 1 µm). Rappelons que l’oxydation du film pour former les structures polaroniques et bipolaroniques (dopage) ne peut avoir lieu qu’en étant accompagnée de l’insertion de contre-ions assurant l’électroneutralité. L’effet bénéfique des ultrasons est donc avéré pour les fortes épaisseurs de dépôt. La micro-agitation induite par la propagation de l’onde sonore et l’implosion des bulles de cavitation facilite la pénétration des contre-ions au sein du film, permettant un meilleur dopage. De plus, le polymère irradié absorbe une partie de l’énergie acoustique et s’échauffe. Cet échauffement va augmenter le coefficient de diffusion des ions au sein du film qui seront plus mobiles [147].

II. Effets des ultrasons sur le taux de dopage de films PPy épais

Des films PPy/ClO4- de 1 µm sont synthétisés avec et sans irradiation ultrasonore.

L’étude de la région N1s permet l’évaluation du taux de dopage en surface des dépôts. Les spectres sont présentés Figure 78.

Le signal N1s peut être divisé en quatre composantes présentées dans le tableau ci-dessous.

Figure 78. Région N1s du spectre XPS obtenu pour un film PPy/ClO4- synthétisé A) en conditions

silencieuses et B) sous ultrasons. 406 404 402 400 398 396 A =NH+ - -NH+ - -NH- =N- In te n si té Energie de liaison / eV 406 404 402 400 398 396 B =NH+ - -NH+ - -NH- =N- In te n si té Energie de liaison / eV

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En conditions silencieuses, le taux de dopage du film est de 25% tandis qu’il augmente jusqu’à 33% sous ultrasons. Le signal du bipolaron est particulièrement plus important pour le film irradié. Effectivement, le rapport (=NH+-/NTotal) passe de 7% en conditions silencieuses à

15% pour le film élaboré sous ultrasons. Notons également que le signal du composé imine =N- est lui aussi augmenté par l’irradiation sonore. D’après la littérature, il correspond à des défauts structuraux au sein du film [171, 173]. De plus, ce type de liaison apparaît dans la structure du PPy suroxydé.

La même expérience fut réalisée pour des films PPy/TS-. Dans ce cas, le taux de dopage

est de 27 ± 2 % pour les films silencieux et de 33 ± 2 % pour ceux élaborés sous ultrasons.

III. Effets des radicaux OH· sur le taux de dopage des films

La meilleure diffusion des ions au sein des films pendant l’irradiation ultrasonore apporte un élément d’explication quant à l’augmentation de leur taux de dopage mais ne permet pas d’élucider entièrement le mécanisme. Les conditions d’irradiation apportent certainement une source supplémentaire d’oxydation des films, menant à une quantité plus importante de polarons et de bipolarons.

Deux possibilités apparaissent:

- l’énergie libérée lors de l’implosion des bulles de cavitation permet la rupture de liaisons dans le film et la formation d’espèces chargées au sein de la structure. L’interaction avec les ions dopants est plus grande. Cette hypothèse fut émise par Osawa pour les études à basse fréquence [114].

- les radicaux OH· formés lors de la propagation de l’onde vont pouvoir oxyder le film. Ces radicaux comptent, en effet, parmi les oxydants connus les plus forts.

Energie de liaison (eV) Composante

398,0 ± 0,1 =N-

400,0 ± 0,1 -NH-

401,1 ± 0,1 -NH+- (polaron)

403,3 ± 0,5 =NH+- (bipolaron)

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Afin d’obtenir quelques éléments de réponse supplémentaires, l’action des ultrasons et des

radicaux OH· fut étudié sur des dépôts polymères. Ainsi, un film PPy/ClO4- électrosynthétisé

en conditions silencieuses a été exposé en parallèle, durant 5 minutes, à une irradiation

ultrasonore et à une immersion dans une solution de Fenton diluée (1 mM H2O2 + 1mM Fe2+),

afin de travailler dans un milieu possédant le même ordre de grandeur en concentration de radicaux OH· que lors de l’irradiation sonore. La Figure 79 présente les régions N1s issues de l’analyse XPS des dépôts traités. Avant le traitement (irradiation ultrasonore ou immersion en milieu OH· dilué), le taux de dopage du film est évalué à 25 ± 1%.

Le taux de dopage des deux films traités se trouve égal à 33 ± 1%. L’irradiation des dépôts conduit donc à une augmentation du taux de dopage, comme lorsque le film est élaboré directement sous ultrasons. Il semblerait donc que les effets des ultrasons sur le taux de dopage s’exercent directement sur le film plutôt que lors de sa croissance.

Ce qui est plus intéressant encore, c’est la même augmentation observée pour les films soumis aux radicaux OH·. Ainsi ces espèces, présentes en très faible concentration dans le milieu, permettent d’oxyder d’avantage le film en augmentant les composantes polarons et bipolarons. Il est à noter également que la composante imine (=N-), caractéristique des défauts structuraux au sein du film, est plus élevée suite au traitement en milieu OH· (rapport

(=N-/NTotal) plus élevé de 4%). Cela est probablement dû à une légère suroxydation du PPy.

Figure 79. Région N1s du spectre XPS obtenu pour un film PPy/ClO4- A) irradié sous ultrasons

pendant 5 minutes et B) immergé en milieu (1 mM H202 + 1 mM Fe2+) durant 5 minutes.

406 404 402 400 398 396 A =NH+- -NH+ - -NH- =N- In te n si té Energie de liaison / eV 406 404 402 400 398 396 B =NH+- -NH+- -NH- =N- In te n si té Energie de liaison / eV

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Les radicaux OH· produits par la sonolyse de l’eau en milieu irradié pourraient donc être une des causes de l’augmentation du taux de dopage des films élaborés sous ultrasons : ils seraient, dans ce cas, une source d’oxydation supplémentaire à l’oxydation électrochimique.