• Aucun résultat trouvé

THERAPEUTIQUE; MEDECINE D'URGENCE; ADDICTOLOGIE 4804 REANIMATION MEDICALE ; MEDECINE URGENCE 4802 AMBROSI Pierre (PU-PH)

1. conjonctives injectées 2 augmentation de l’appétit

2.4.2. Troubles psychiatriques liés à la consommation de cannabis 1 troubles psychiatriques aigus

2.4.2.3. Effets somatiques du cannabis

a) Appareil respiratoire

Le cannabis et le THC sont responsables d’une irritation bronchique chronique provoquant une augmentation de la prévalence de la toux, des expectorations, des sifflements thoraciques et des signes évocateurs de broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO) chez le fumeur.

L’exposition bronchique et pulmonaire à la fumée est beaucoup plus importante chez le fumeur de joints (tabac et cannabis) que chez le fumeur de cigarettes (tabac). La fumée de cannabis a un effet bronchodilatateur à court terme mais provoque une diminution des résistances des voies aériennes à long terme.

La muqueuse bronchique des fumeurs de cannabis présente un œdème avec une hyperplasie des cellules caliciformes, des cellules basales et une métaplasie malpighienne. La consommation de cannabis est un facteur de risque de cancer bronchique.

Les capacités phagocytaires ainsi que l’activité bactéricide et fongicide des macrophages alvéolopulmonaires sont diminuées chez les fumeurs de cannabis. Son usage accroit le risque d’infection respiratoire chez le fumeur. (31)

Fumer du cannabis entraîne également des dyspnées, des pharyngites, des altérations des cordes vocales, des bronchites. (32)

Les fumeurs réguliers de cannabis seraient plus fréquemment atteints que les non-fumeurs - de symptômes de bronchite chronique : la toux, l’expectoration et les sifflements bronchiques ;

- d’emphysème ;

et ce de manière dose-dépendante.

Les effets d’un joint de cannabis sur la fonction respiratoire, évalué par le volume expiratoire maximal par seconde (VEMS), sont comparables à ceux de 2,5 à 5 cigarettes de tabac. (20) Deux cas d’hémorragie alvéolaire avec insuffisance respiratoire aiguë suite à la pratique du bangh ont été rapportés dans la littérature. (33+34)

b) Appareil cardio-vasculaire

Chez l’homme, l’usage de marijuana provoque une tachycardie, une vasodilatation périphérique, une hypotension orthostatique et une élévation des pressions sanguines systolique et diastolique en décubitus (35) ainsi que des arythmies. (36)

- Cannabis et coronaropathies :

constaté l’apparition plus précoce de la douleur angineuse au cours d’un effort. En effet, en stimulant le système sympathique, le cannabis provoque une augmentation de la demande en oxygène par le myocarde. D’autre part, la formation de carboxyhémoglobine, résultant de l’inhalation de la combustion du cannabis, est augmentée, entrainant une diminution de l’approvisionnement en oxygène. (35)

Le risque de faire un syndrome coronarien aigu serait 4,8 fois plus élevé dans l’heure suivant l’inhalation de cannabis. Ce risque diminue rapidement après une heure. (35)

Chez les utilisateurs quotidiens de cannabis, le risque annuel de développer un évènement cardiovasculaire aigu est de 1,5 à 3%. (37)

- Cannabis et accidents vasculaires cérébraux (AVC) :

Dans une étude de cohorte de 2016 incluant 114 AVC du sujet jeune (15-55ans), le dépistage du cannabis était positif dans 16 % des cas. (38)

L’âge moyen était de 44 ans Les consommateurs étaient plus jeunes, et avaient un taux de récidive d’AVC plus élevé que les non-consommateurs. L’imputabilité de l’AVC à la consommation de cannabis était probable ou certaine chez 50 % des consommateurs.

La majorité des sujets étaient des consommateurs chroniques.

Les effets vasoactifs et arythmogènes du cannabis font partie des mécanismes potentiels. La consommation de cannabis est fréquente et associée à un pronostic défavorable chez les sujets jeunes victimes d’infarctus cérébral.

- Cannabis et ischémie des membres :

Des cas d’ischémie aiguë des membres inférieurs et supérieurs liée à des lésions artérielles distales avec nécrose des orteils ou des doigts ont été décrits (39) chez des jeunes patients (âge moyen 23,7 ans) fumeurs modérés de tabac et réguliers de cannabis sans autre facteur de risque cardiovasculaire classique.

Le tableau clinique ressemble à celui d’une thromboangéite oblitérante juvénile de Buerger. Environ 50 cas similaires ont été rapportés depuis la première description en 1960. (40) Le cannabis associé au tabac serait un cofacteur de risque cardio-vasculaire, il est difficile dans les études menées de séparer tabac et cannabis. A ce titre la consommation de cannabis mérite d’être recherchée notamment chez le sujet jeune.

c) Appareil digestif.

Le syndrome d’hyperémèse cannabique: (41)

Classiquement, ce syndrome évolue en trois phases : prodromique, hyperémique et récupération.

La phase prodromique peut durer quelques semaines, ou quelques mois, pendant lesquels le patient a des nausées matinales, une peur intense de vomir et un inconfort abdominal. Cet inconfort n’entraîne pas encore de modifications du comportement, l’alimentation reste normale et la consommation de cannabis identique ou même croissante, le patient espérant potentialiser les vertus antiémétiques du cannabis.

La phase d’hyperémèse est caractérisée par des nausées invalidantes avec des paroxysmes de vomissements incoercibles. La plupart des patients se plaignent alors de douleurs abdominales légères à modérées et commencent à diminuer leur alimentation et à perdre du poids, parfois jusqu’à plus de 10 kg. À cette phase, la prise de douches ou de bains chauds demeure la seule stratégie permettant au patient de soulager ses symptômes incapacitants mais pouvant accentuer l’état de déshydration. Lors de la consultation au service d’accueil des urgences, l’importance de la symptomatologie entraîne fréquemment de nombreux examens qui, en dehors de la déshydratation, sont le plus souvent normaux.

La phase de récupération débute à l’arrêt de la consommation et est complète, le plus souvent, en 24 à 48 h. Cependant, l’amélioration des symptômes peut être plus longue, durant de quelques semaines à quelques mois, probablement du fait de la variabilité de la demi-vie des cannabinoïdes chez les consommateurs chroniques

d) Système métabolique et endocrinien

- Cannabis, effets endocriniens et sur la fertilité:

Très peu d’études ont exploré l’effet direct du cannabis sur la fertilité masculine.

Le corpus de connaissances actuel sur ce sujet se compose principalement d’un certain nombre d’études humaines antérieures et plus récemment d’études animales, in vitro et rétrospectives. Malgré ces limites, le cannabis et ses composés peuvent influer sur la fertilité masculine à plusieurs niveaux. (42)

Un certain nombre d’études ont attribué au cannabis une dysrégulation de l’axe hypothalo- hypophyso-gonadique et la réduction spécifique d’une hormone clé comme la LH, qui, à son tour, peut affecter la testostérone et la spermatogénèse.

Il semble que le cannabis peut réellement affecter les paramètres du sperme et la fonction du sperme en agissant par les récepteurs cannabinoïdes. La fonction érectile semble être affectée

par le cannabis. (43)

- Répartition des graisses et insuline :

La consommation régulière de cannabis favorise le développement d’une adiposité viscérale ainsi qu’une résistance des tissus adipeux à l’insuline. (44)

e) Système cutanéo-muqueux

Le cannabis est à l’origine de conjonctivites à répétition, il est également impliqué dans des réactions allergiques (asthme, anaphylaxie, œdème de Quincke, urticaire de contact, prurit généralisé, prurigo). (31)

f) Cannabis et cancers

- Le cancer bronchique et le cancer des voies aérodigestives supérieures :

Le cannabis cause des cancers dans les sites qui reçoivent une exposition prolongée à long terme aux cancérogènes situés dans la fumée de cannabis ; il s’agit du tractus aérodigestif, bouche, langue, œsophage et des poumons. (45)

Indépendamment des cannabinoïdes présents, la fumée de cannabis est qualitativement identique à celle du tabac ; toutefois elle contient deux fois plus d’hydrocarbures aromatiques polycycliques.

Du fait d’un mode d’inhalation différent de la fumée de cannabis, la rétention de carcinogènes dans les voies aériennes est 4 à 5 fois supérieure comparativement à celle du tabac. Elle a des effets carcinogènes démontrés in vitro et in vivo.

Les résultats des études épidémiologiques sont discordants mais des études cas-témoins et de cohortes mettent en évidence la relation positive entre consommation de cannabis et cancer bronchique.

La consommation de cannabis multiplie, au moins par 2, le risque de développement d’un cancer bronchique.(46)

- Les tumeurs des cellules germinales testiculaires :

Une consommation chronique et fréquente de cannabis augmenterait le risque de développer une tumeur des cellules germinales testiculaires, particulièrement des tumeurs non séminomateuses (environ 2,5 fois plus de risque que la population générale). (47)

g) Complications gynéco-obstétricales

Du fait de la légalisation du cannabis dans bon nombre d’états aux USA, Ira J. CHASNOFF a fait une revue de la littérature scientifique publiée en 2017.(48)

Elle concerne les conséquences de la consommation de cannabis durant la grossesse : Chez les femmes ayant consommé du cannabis durant leur grossesse, le taux d’enfants mort- nés et de nouveau-nés de petit poids de naissance est augmenté,

On peut difficilement incriminer le seul effet du cannabis, la co-intoxication avec le tabac est fréquente.

Cependant, l’action du cannabis pourrait expliquer les effets sur le développement neurologique des nourrissons et des enfants exposés avant leur naissance.

Le THC est hautement liposoluble et traverse le placenta et la barrière hémato-encéphalique avec facilité, s’accumulant dans les tissus fœtaux, en particulier le cerveau.

Le système endocannabinoïde a un rôle important dans la mise en forme des circuits neuronaux chez le fœtus ainsi que la modulation du développement de divers systèmes neurotransmetteurs (les systèmes catécholaminergiques et opioïdogéniques).

L’exposition gestationnelle au cannabis peut cibler le récepteur cannabinoïde CB1, perturbant la migration, la différenciation et la communication synaptique dans le développement du système neurotransmetteur.

Les composants du système endocannabinoïde sont présents au cours du développement du système nerveux central embryonnaire dès 16-22 jours de gestation chez l’Homme.

C’est à ce moment-là que la plaque neurale et le tube neural se forment. Il y a un risque significativement plus élevé d’anencéphalie lorsque le fœtus est exposé au THC pendant le premier mois de gestation.

L’exposition intra-utérine au THC nuit à l’expression de l’ARNm de la dopamine dans l’amygdale et dans le noyau accumbens vers 18-22 semaines de gestation. La signalisation défectueuse de la dopamine dans ces centres joue un rôle dans le fonctionnement cognitif et émotionnel ; cela est compatible avec les troubles neurologiques et comportementaux observés chez les nouveau-nés exposés (irritabilité, tremblements, troubles du sommeil …).

Les enfants plus âgés, adolescents et jeunes adultes, (exposés in utéro au cannabis) ont développé des déficits dans le fonctionnement cognitif :

- A l’âge de 6 ans, on a constaté une diminution des scores de raisonnement verbal, des déficits dans la mémoire à court terme et dans les scores de quotient intellectuel.

ainsi qu’une augmentation significative de l’hyperactivité, de l’impulsivité, des problèmes d’inattention et des symptômes dépressifs.

- Chez des jeunes adultes (18-22ans) les IRM fonctionnelles ont révélé un fonctionnement neuronal altéré qui a eu un impact sur la mémoire à court terme.

h) Cas particulier des cannabinoïdes de synthèse

Une méta-analyse de 2016 a listé les effets toxiques des cannabinoïdes de synthèse. (49) Les symptômes associés à la toxicité des cannabinoïdes synthétiques ont été signalés chez 3695 individus, principalement des jeunes hommes.

Les symptômes incluaient des domaines physiologiques (par exemple, tachycardie, hypertension, nausées / vomissements), psychiques (par exemple, agitation, irritabilité, paranoïa), comportementaux (par exemple somnolence, agressivité), des perceptions sensorielles (par exemple, hallucinations).

Les symptômes les plus fréquents étaient la tachycardie (30,2%), l’agitation (13,5%), la somnolence (12,3%), les nausées / vomissements (8,2%) et les hallucinations (7,6%). La mort ou des complications médicales graves étaient rares (décès 0,2%, AVC 0,1%, infarctus du myocarde 0,09%).

Du fait de la sortie récente de ses produits, nous n’avons peut-être pas suffisamment de recul les concernant.