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II. La cadence de pédalage

5. Effet de la cadence de pédalage sur le débit sanguin

5.1. Au niveau musculaire

Afin d’effectuer un exercice pendant quelques minutes, M doit répondre à la demande métabolique. La contraction musculaire a un effet direct sur M. Cet effet dépend du mode de contraction, de l’intensité de l’exercice et de la fréquence des contractions musculaires (Bellemare et al., 1983 ; Buchler et al., 1985 ; Lutjemeier et al., 2005 ; Walloe et Wesche, 1988). Pendant l’exercice dynamique, un afflux de sang se produit dans le muscle durant la phase de relaxation tandis que, durant la phase de contraction, la pression intramusculaire élevée conduit à une éjection du sang en dehors du lit capillaire (Vedsted et

al., 2006). La pression artérielle ne dépasserait pas la pression intramusculaire produite

pendant la contraction, même lorsque la production de force est modérée à faible, de telle sorte que l’afflux de sang à travers le muscle n’est possible que durant la phase de relaxation

(Walloe et Wesche, 1988). Toutefois, le volume des globules rouges au niveau microvasculaire est conservé pendant les contractions musculaires (les globules rouges sont présents dans les capillaires), et le profil cyclique de déoxygénation-oxygénation pendant les phases de contraction-relaxation suggère que l’extraction d’O2 n’est pas limité à la phase de relaxation, mais continue à se produire au cours de la contraction musculaire (Lutjemeier et

al., 2008).

Un exercice de pédalage à cadence élevée implique une faible durée de la phase de relaxation. Dans cette condition, M pourrait devenir limitant. Cette limitation a été observée effectivement sur le diaphragme de chien (Bellemare et al., 1983). En effet, ces auteurs suggèrent que M dépend à la fois de la durée de la phase de relaxation et de la durée de la phase de contraction. Ils ont montré ainsi qu’il existe un seuil du rapport entre la durée de la contraction et la durée totale du cycle (~ 20%) au-dessus duquel l’écoulement du sang peut être empêché mécaniquement. De plus, Hoelting et al. (Hoelting et al., 2001) ont étendu les conclusions obtenues à partir des études sur diaphragme de chien au muscle de l’Homme (Figure 16). Ils ont montré qu’à durée de contraction constante, le raccourcissement de la phase de relaxation induisait une diminution de M pendant un exercice progressif d’extension de genou. Selon ces auteurs, cette baisse du débit sanguin serait due à la réduction du temps disponible pour l’écoulement du sang entre les phases de contraction.

Figure 16 : réponse du débit sanguin musculaire pendant l’exercice incrémental d’extension du genou jusqu’à épuisement effectué à 40, 60 et 80 cpm. MBFNET (A), débit sanguin net ; MBFANT (B), débit sanguin antérograde ; MBFRET (C), débit sanguin rétrograde ; les statistiques ont été effectuées uniquement sur les 4 premières puissances et à l’épuisement,

(n=9) ; *, P < 0,05, différence significative comparativement à 80 cpm ; †, P < 0,05, différence significative comparativement à 60 cpm (Hoelting et al., 2001).

Toutefois, à l’aide de l’échographie Doppler Osada et Radegran, (Osada et Radegran, 2002) ont montré que lors de l’exercice dynamique d’extension de genou, le débit sanguin au niveau de l’artère fémorale est directement lié à l’intensité de l’exercice de telle sorte que le débit sanguin est réglé pour correspondre à l’intensité de travail et à la demande métabolique

indépendamment de la fréquence de contraction musculaire. Cependant, d’autres études ont au contraire montré que M augmentait avec l’augmentation de la fréquence de la contraction musculaire dans le muscle gastrocnemius plantaris isolé du chien (Hamann et al., 2005) et chez l’Homme lors d’un exercice d’extension du genou (Ferguson et al., 2001 ; Sjogaard et

al., 2002) et lors d’un exercice de flexion plantaire (Quaresima et al., 2001). D’après ces

auteurs, ce plus grand M lorsque la fréquence de contraction est élevée s’expliquerait par une plus faible pression intra-musculaire, une plus grande contribution de la pompe musculaire ainsi qu’une plus grande pression sanguine systémique. En effet, lors de l’exercice à fréquence de contraction élevée, les pressions intramusculaires développées au cours de la période de contraction sont faibles et, de plus, la pompe musculaire pourrait exercer une plus grande contribution à la perfusion (Gotshall et al., 1996 ; Sheriff et Hakeman, 2001). Cela permettrait en quelque sorte d’optimiser la perfusion musculaire lors de l’exercice à fréquence élevée. Cependant, l’efficacité de la pompe musculaire comme mécanisme important de régulation de M au cours de l’exercice chez l’Homme est moindre à puissance de travail élevée (Lutjemeier et al., 2005). En outre, une pression artérielle plus élevée pendant l’exercice à 100 rpm a été rapportée et cette plus grande pression aiderait à maintenir (ou à augmenter) M à des niveaux similaires à ceux observés à 60 rpm (Gotshall et al., 1996).

Dans le même contexte, au cours d’un exercice de pédalage (Takaishi et al., 2002) et de flexion plantaire (Quaresima et al., 2001), ont constaté que SaO2 évaluée par la NIRS était similaire à des fréquences de contraction allant de 40 rpm à 80-85 rpm suggérant que M au niveau de la microcirculation n’était pas limité au cours de l’exercice effectué à une cadence inférieure ou égale à 85 rpm. Cependant, ces résultats sont sujets à caution car les variations du volume sanguin lors de l’exercice pourraient influencer la mesure de SaO2 par la NIRS (Ferrari et al., 1997). En outre, ces études (Quaresima et al., 2001 ; Takaishi et al., 2002) n’ont pas évalué les effets de l’augmentation de fréquence de contraction sur l’équilibre O2M/ O2M dans un large éventail d’intensités d’exercice. Par ailleurs, l’oxygénation au niveau du vastus lateralis était similaire au cours de l’exercice de pédalage à 60 et 100 rpm, suggérant qu’aucune altération de la circulation sanguine musculaire ne s’était produite suite à l’augmentation de la fréquence des contractions musculaires (Ferreira et al., 2006). Selon ces auteurs, l’oxygénation musculaire similaire et un plus grand métabolisme à 100 qu’à 60 rpm, ont été expliqués par un débit sanguin supérieur à 100 rpm comparativement à 60 rpm.

5.2. Au niveau cérébral

Plusieurs facteurs peuvent influencer indépendamment, en synergie, et parfois d’une manière antagoniste la régulation du débit sanguin cérébral lors de l’exercice. Ces facteurs sont l’autorégulation cérébrale, le débit cardiaque, le baroréflexe artériel et le contrôle chémoréflexe (Ogoh et Ainslie, 2009). Malgré l’importance du débit sanguin cérébral dans la tolérance à l’exercice et l’effet potentiel de la fréquence de la contraction musculaire sur ce débit, peu d’études ont porté sur ces aspects. Lors de l’exercice de pédalage prolongé, le volume sanguin régional au niveau du cortex frontal était probablement inférieur à 80 rpm qu’à 40 rpm comme le suggèrent les plus faibles valeurs de ∆[tHb] observées dans l’étude de Kounalakis et Geladas, (Kounalakis et Geladas, 2012). Ces auteurs ont émis l’hypothèse que cette baisse du volume sanguin au niveau cérébral à cadence élevée serait due à un plus faible débit cardiaque. En effet, il a était montré que la réduction du débit cardiaque peut affecter le débit sanguin dans l’artère cérébrale moyenne (Ide et al., 2000). Une autre explication avancée serait une augmentation de la sympathoexcitation à cadence élevée qui pourrait avoir une incidence sur l’approvisionnement sanguin cérébral en modifiant la relation entre la pression artérielle et la circulation cérébrale (Ogoh et al., 2008), ou en permettant la redistribution entre la circulation systémique et la circulation cérébrale (Ogoh et al., 2005). D’autre part, l’augmentation de la cadence de pédalage a été souvent accompagnée par une hyperventilation (voir 3.2). Il a été montré que, même à des intensités sous-maximales, l’hypocapnie induite par l’hyperventilation peut réduire Céréb (Nybo et Rasmussen, 2007 ; Ogoh et Ainslie, 2009).