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Une étude détaillée de la dispersion du flux liquide provenant des rejets a été menée dès septembre 1991 sur 15 km entre Maisons-Laffite et Poissy, sur 9 profils transversaux. Les conditions hydrauliques étaient les suivantes : 82 m3 s-1 pour la Seine à l’amont de la station (étiage), 25 m3 s-1 pour les rejets de la

station. Pour chaque transversale étudiée, Chesterikoff et al. (1991a) ont prélevé des échantillons d’eau en continu et à vitesse constante d’une rive à l’autre, simultanément à 0.5, 2 et 4 m au dessous de la surface libre (les prélèvements ont été réalisés au moyen de trois pompes immergées, fixées à des perches montées sur le bateau. une sonde de conductivité y a également été fixée)

Les effluents d’Achères se caractérisent par une forte conductivité électrique au moment de l’étude (1070μScm−1), en regard de la conductivité de la Seine en amont des rejets (518μScm−1).

L’étude montre que, dans des conditions d’étiage, le mélange vertical des eaux est quasiment total 2 km en aval des rejets. Avant cette homogénéisation, la conductivité est toujours plus forte au fond qu’en surface, signe que les masses d’eaux issues d’Achères « plongent » à leur arrivée en Seine. Le mélange transversal ne s’opère que 13 km en aval, au niveau de Poissy, après réception de l’Oise et action du barrage d’Andrésy.

Un suivi du panache des effluents dans ce secteur, pour un débit d’étiage de 135 m3 s-1 pour la Seine à

l’amont des rejets, a également été réalisé dans le cadre de cette thèse (Martin et al., 1999). Nous présenterons les résultats détaillés de cette campagne dans le chapitre 6. Les résultats obtenus concernant la dispersion de la phase liquide peuvent être comparés à ceux de septembre 1991, la conductivité dans les rejets et en Seine étant quasiment identiques pour les deux périodes (respectivement 1150 et 550 μScm−1

pour juillet 1999) : l’homogénéisation verticale est atteinte 1.5 km en aval des rejets. Avant cette distance, la conductivité est la aussi plus forte au fond qu’en surface. L’homogénéité transversale est atteinte 7 km en aval des effluents. Le tableau 2.1 résume les résultats obtenus.

Campagne du 09 sept 1991 Campagne du 22 juil 1999

Débit des rejets (m3.s-1) 25 24.5

Débit de la Seine amont (m3.s-1) 82 135

Conductivité des rejets (μScm−1) 1070 1100

Conductivité Seine amont (μScm−1) 518 550

Homogénéisation verticale (km) 2 1.5

Homogénéisation transversale (km) 13 7

Tableau 2.1. Dispersion des rejets d’Achères pour la campagne de septembre 1991 et de juillet 1999.

Ces résultats sont très importants car ils mettent en lumière plusieurs éléments, valables pour une période d’étiage :

• la dispersion des flux liquides issus des effluents a un caractère tri-dimensionnel quelques kilomètres seulement après leur arrivée en Seine ;

• la dispersion des flux liquides issus des effluents a un caractère bi-dimensionnel de 2 km jusqu’à une dizaine de kilomètres en aval du rejet. La longueur de mélange pour atteindre l’homogénéité transversale dépendra des conditions hydrauliques de la Seine à l’amont des rejets ;

2.2.2 Différences de comportement entre la phase dissoute et la phase

particulaire

Le transit des masses d’eau polluées a été soigneusement étudié dans l’agglomération parisienne par l’expérimentation in situ et la modélisation. Simon et al. (1994) montrent notamment que la prédiction du comportement des matières dissoutes issues du déversement de Clichy nécessite l’utilisation d’un modèle hydraulique résolvant les équations de Barré de St Venant bidimensionnelles complètes, du fait de la forte hétérogénéité transversale des éléments dissous dans le bief étudié. Concernant le transport particulaire, on devra s’attacher à connaître de façon rigoureuse, d’une part les caractéristiques physiques des matières en suspension et, d’autre part, les contraintes de cisaillement au fond et la diffusion verticale, afin d’avoir une estimation correcte des flux de dépôt et de remise en suspension.

Il apparaît que la vitesse de chute des particules issues des rejets de temps de pluie est supérieure à celle des particules circulant en Seine habituellement. Les travaux de Tangerino (1994) ont permis notamment de faire cette distinction. Les vitesses de chute médianes sont de l’ordre de 1 m h-1 dans la

Marne par temps sec alors qu’elles atteignent 2 m h-1 après un déversement d’orage. Le carbone organique

est entraîné avec les particules dans leur chute (Mouchel, 1996).

Les métaux caractéristiques des RUTP (Cd, Cu, Pb, Zn) ont permis de démontrer que la pollution particulaire d’origine pluviale se dépose rapidement après les rejets (Seidl et al., 1996a) et contribue aux flux de pollution de temps sec, en étant progressivement resuspendue. Estebe et al. (1998) ont mesuré les concentrations métalliques contenues dans les suspensions de Chatou à l’aide de trappes et établissent que 90 % des MES issues du déversement par temps de pluie de Clichy ne sont pas passées à Chatou au moment du passage des masses d’eau issues de Clichy. La plupart des MES provenant du rejet a très rapidement sédimentée avant d’atteindre Chatou (situé 24 km en aval du déversement).

Bussy et al. (1994) montrent, à l’aide d’un bilan de 7Be à la traversée de l’agglomération parisienne,

que la perte apparente du radioélément au cours de son transit était trop forte compte tenu de sa période de demie-vie et du temps de séjour de l’eau. Ainsi, un stock complémentaire de 7Be était nécessaire pour

expliquer un temps de séjour dans le système supérieur au simple temps de résidence de l’eau. L’hypothèse a été émise qu’il s’agissait du 7Be fixé sur des sédiments frais en constant remaniement.

Cette hypothèse a été vérifiée par les travaux de Bonté et al. (1999 ; 2000) concernant le suivi de radio- isotopes comme le 7Be ou le 234Th

XS en Seine, entre Andrésy et Poses sur une période de 15 mois (juillet

1999-septembre 2000). Les auteurs montrent que le stock de particules chimiquement « réactives », c’est à dire la somme des MES traditionnelles et des particules facilement remobilisables (PFM) est supérieur d’un à deux ordres de grandeur à la masse de MES qui sert communément de base aux études d’accumulation et de transport des polluants à forte affinité particulaire. Il est alors apparu que le stock sédimentaire total présent entre Andrésy et Poses et pour la période d’échantillonnage possédait un temps de résidence de 2 à 12 mois pour des débits moyens ou d’étiage (temps de résidence de l’eau compris entre 8 jours à l’étiage et 1.5 jours au maximum de la crue d’hiver). Ce constat a des implications vis à vis des flux de polluants sortants : le temps de résidence est long par rapport aux cinétiques de dégradation de certains polluants et le tronçon Andrésy-Poses pourrait se comporter comme un réacteur « biogéochimique » capable de modifier les fractions anthropiques labiles des éléments traces ou de certains composés artificiels.

Les différences de comportement entre les pollutions d’origine dissoute et particulaire sont très nettes. La pollution dissoute transite avec la masse d’eau. Plus l’écoulement est rapide et plus on retrouve cette pollution dans les secteurs avals du point de rejet. Pour la phase particulaire, les données sont différentes : les particules issues des rejets ont des vitesses de sédimentation très fortes et entraînent dans leur chute les matières en suspension provenant de l’amont par des processus de floculation. La pollution associé à ces particules se retrouve dans un premier temps à l’aval direct du point de rejet et occasionne par la suite, dans le milieu récepteur, des troubles importants, que ce soit par des phénomènes de consommation benthique ou par des remises en suspension. Les bactéries hétérotrophes, associées à la phase particulaire, se retrouvent dans les dépôts, qui sont un milieu propice à leur développement, et contribuent à l’appauvrissement de l’oxygène dissous de la colonne d’eau. L’estimation de flux de MES, de leur stockage et de la dynamique de leur transport (c’est à dire leur âge) dans les biefs avals des grands rejets urbains est indispensable si l’on cherche à évaluer l’impact de ces rejets sur le milieu naturel.

2.3

Caractérisation et dynamique des matières en suspension