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Dynamique des communautés bactériennes dans des sols remobilisant l’As

VII. Dynamique de la mobilité de l’arsenic et des communautés

VII.2. Dynamique des communautés bactériennes dans des sols remobilisant l’As

Cette étude préliminaire a donc été menée sur les incubations des sols D2, D3, T5R et T12R mises en place par Joubert (2008). Pour un sol donné, les profils CE-SSCP des communautés bactériennes totales présentes en conditions aérobie et anaérobie (correspondant respectivement aux conditions 6 et 8 du plan d’expérience présenté Annexe 6) étaient initialement semblables, mais significativement différents après 14 jours d’incubation. La présence ou l’absence d’oxygène a logiquement influencé la structure de la communauté

bactérienne de départ, et explique probablement les différentes cinétiques de libération de l’As observées pour ces deux conditions.

Dans une même condition (aérobie ou anaérobie) et pour un sol donné, une modification de la structure de la communauté bactérienne totale a également été observée entre T0 et T14. En général, la composition de la population s’est stabilisée à partir de T14, excepté pour celle du sol D2 en condition anaérobie (condition 8). Les analyses statistiques des profils de ce sol confirment que la structure de la communauté bactérienne à T0 est significativement différente de celle à T14. Elle varie encore entre T14 et T20 et se stabilise jusqu’à T35 (Figure 49A et 49C). Ces changements sont corrélés aux modifications de cinétiques de solubilisation observées dans l’incubation du sol D2 menée en condition anaérobie (condition 8) (Figure 49B).

Figure 49 : Dynamique de la communauté bactérienne totale du sol D2 en condition anaérobie (condition 8) en fonction du temps (A), comparée à celle de la libération de l’As (B). Le dendrogramme issu des profils CE-SSCP montre le degré de similarité des communautés

bactériennes. Un pic du profil CE-SSCP est considéré comme représentant une espèce bactérienne et les noeuds du dendrogramme montrent le pourcentage de similarité entre deux

Les gènes arrA, requis pour la réduction directe de l’AsV piégé sur des HFO ont donc été recherchés dans les incubations des quatre sols menées en condition anaérobie, plus favorable à la respiration de l’AsV. Aucune amplification n’a été obtenue dans ces incubations, à l’aide de la méthode de détection proposée par Malasarn et al. (2004), contrairement aux résultats obtenus à partir des enrichissements en condition de réduction de ces sols (c.f. chapitre 6). L’absence de gènes arrA dans ces incubations suggère donc que la microflore respirant l’AsV et capable de libérer directement l’AsV piégé sur les HFO ne se soit pas développée. Puisque de fortes concentrations de Fe ont également été détectées dans cette condition (Joubert, 2008), la solubilisation d’As pourrait donc être due à l’action indirecte de bactéries FeIII-réductrices stimulées par la présence d’acétate et capables de dissoudre les HFO piégeant l’As. D’autre part, la détection des gènes arsC dans ces incubations indique la présence de bactéries capables de réduire l’AsV soluble en AsIII et peut donc expliquer la présence d’AsIII, forme majoritairement retrouvé en solution à la fin des incubations.

Ces gènes ainsi que les gènes aoxB et ont été détectés dans les incubations aérobie et anaérobie de ces quatre sols. Ces résultats montrent la coexistence des activités d’oxydation de l’AsIII et de réduction de l’AsV dans un but de détoxication, et donc la possibilité d’une biotransformation réversible de l’As inorganique par la microflore indigène du sol.

Le sol T12R, le plus contaminé en As, a présenté une cinétique contrastée entre la condition aérobie et anaérobie (Joubert, 2008). En effet, une forte solubilisation est observée en condition anaérobie (condition 8), tandis que de très faibles concentrations d’As sont détectées en condition aérobie (condition 6) (Annexe 6). La suite de ce travail a donc été focalisée sur la compréhension des processus impliqués dans la mobilité de l’As dans ce sol.

En transformant l’AsIII, forme plus mobile, en AsV, qui tend à s’adsorber plus fortement sur les HFO dans la gamme de pH considérée, les bactéries AsIII-oxydantes, présentes dans les suspensions de sol en condition aérobie, ont pu favoriser indirectement l’immobilisation de l’As. La diversité des gènes aoxB en condition aérobie (condition 6), a été étudiée par construction d’une banque de clones avec les amorces m1-2F/m3-2R développées durant cette thèse. Huit profils distincts ont été obtenus après analyses de restriction de 12 inserts de clones sélectionnés au hasard. Les séquences représentant ces profils ont ensuite été groupées en 5 OTU sur la base d’une identité de séquence protéique de 90%. L’arbre phylogénétique, présenté Figure 50, montre que ces OTU sont affiliés aux séquences d’α-, β- et γ

-Proteobacteria. Les OTU affiliés aux α-Proteobacteria (T12R14-6-6 et T12R14-6-9) et γ

-Proteobacteria (T12R14-6-5) sont éloignés des séquences de souches connues. Cependant,

T12R14-6-9 présente 97,2 % d’identité avec l’OTU T12RSOL4 issu du sol original. Parmi les OTU affiliés aux β-Proteobacteria, T12R14-6-3 est proche de Burkholderia sp. YI019A (85,7% d’identité) et de l’OTU T12ROH3 (84% d’identité), tandis que l’OTU T12R14-6-1 présente 98,9% d’identité avec T12RSOL17. Ces résultats indiquent que la majorité des OTU retrouvés étaient initialement bien représentés dans le sol original. Les analyses de spéciation menées sur ce sol ont montré que l’AsV est exclusivement retrouvé dans la phase solide, suggérant que ces bactéries AsIII-oxydantes favorisent l’adsorption ou la coprécipitation de l’AsV avec les HFO présents dans le sol.

Figure 50 : Arbre phylogénétique Neighbor-Joining des séquences AoxB (330 acides aminés) issues du sol T12R incubé en condition aérobie (condition 6) au temps T14 (en rouge). Les séquences T12ROH3, T12RSOL17 et T12RSOL4 proviennent des clones issus du sol original (T12RSOL) et d’un enrichissment AsIII-oxydant en condition hétérotrophe (T12ROH). Le nombre de séquences d’un

même genre est indiqué dans les triangles. Les séquences AoxB des souches AsIII-oxydantes Thermus

thermophilus et Chloroflexus aurantiacus ont été utilisées en racine. Les cercles situés aux nœuds des

branches représentent les valeurs de bootstrap sur 100 réplicas: grand cercles noirs = 95-100%; petits cercles noirs = 75-95%; cercles blancs = 50-75%. L’échelle correspond à 10 mutations sur 100 résidus.

VII.3.Processus biogéochimiques impliqués dans la mobilité de