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Dessin, sélection et évaluation d’amorces ciblant les gènes aoxB

II. Matériels et méthodes

III.3. Dessin, sélection et évaluation d’amorces ciblant les gènes aoxB

Les gènes aoxA et aoxB codant respectivement la petite et la grosse sous-unité de l’AsIII-oxydase ont été recherchés chez quatre souches pures AsIII-oxydantes de notre collection de souches : Thiomonas arsenivorans, Thiomonas sp. WJ68, Thiomonas sp. NO115 et Leptothrix sp. S1.1. Des fragments migrant à la taille attendue ont été obtenus à partir des trois souches du genre Thiomonas avec les couples d’amorces, uniaoxaF/aoxb763R (environ 1500 pb des gènes aoxAB), uniaoxaF/degaoxb5R (environ 2000 pb des gènes aoxAB) et aoxb65F/aoxb763R (environ 1 200 pb du gène aoxB), fournis par le laboratoire de l’ULP. L’amorce uniaoxaF nous a permis d’amplifier l’extrémité 3’ du gène aoxA, la séquence intergénique séparant les gènes aoxA et aoxB ainsi qu’une partie du gène aoxB. Cependant, aucun fragment de gène aox n’a pu être amplifié à partir de Leptothrix sp. S1.1 à l’aide de ces couples d’amorces. De plus, de nombreuses amplifications non spécifiques ont été observées, rendant plus difficile la détection des fragments d’intérêt. Ces amorces n’ont donc pas un spectre suffisamment large pour cibler des genres divergents et elles sont donc inadaptées pour rechercher les gènes aoxB dans des échantillons complexes.

Des amorces hybrides ciblant les gènes aoxB ont donc été dessinées à l’aide du programme CODEHOP, afin de favoriser l’amplification spécifique de gènes homologues chez des souches phylogénétiquement diverses. Les sites de fixation potentiels de ces amorces ont été recherchés à partir de neuf séquences protéiques AoxB provenant de souches bactériennes appartenant à des genres différents des domaines Bacteria et Archaea. Trois motifs protéiques ont été sélectionnés parmi ceux proposés par le logiciel Block Maker : les deux motifs les plus éloignés (par environ 1100 pb) afin d’extraire le maximum d’information phylogénétique, et un motif situé à mi-distance (Figure 29). La première région conservée (s’étendant entre les résidus 383 et 391 de la séquence protéique AoxB d’H. arsenicoxydans) comprend la première partie du motif CX2CX3CX70S requis pour la fixation du groupement [3Fe-4S] (CHFCIVGCGYH, m1), la deuxième inclut une des histidines et la glutamine qui forment probablement le site de fixation de l’AsIII (HNRPAYNSE, m2) et la dernière région, s’étendant entre les résidus 383 et 391, correspond au motif consensus YEKGIIWGN (m3).

Parmi les amorces hybrides dessinées sur ces motifs par le programme CODEHOP, seulement sept ont montré leur capacité à cibler spécifiquement leur site de fixation au cours d’une simulation de PCR.

Figure 29 : Position des amorces en fonction des motifs protéiques ciblés sur les séquences AoxB.

La capacité des 10 combinaisons possibles de ces sept amorces à amplifier spécifiquement les gènes aoxB a donc été testée sur les trois souches du genre Thiomonas citées au premier paragraphe. Un fragment spécifique de taille attendue a été obtenu avec les cinq couples d’amorces suivants : m1-2F/m2-1R (538 pb) ; m1-2F/m3-2R (1112 pb) ; m1-4F/m2-1R (536 pb) ; m1-4F/m3-2R (1108 pb) ; m2-1F/m3-2R (595 pb) (Figure 30). Au contraire, aucune amplification (puits 3, 4 et 8) ou des amplifications non spécifiques (puits 7 et 9) ont été obtenues avec les couples contenant les amorces m2-3F et m3-1R. Des deux amorces sens ciblant le motif m1 (CHFCIVGCGYH), l’amorce m1-2F a été préférée à l’amorce m1-4F, plus dégénérée (respectivement 32 et 36). Au vu de ces résultats, les deux couples d’amorces 2F/m2-1R et m2-1F/m3-2R (donnant un produit PCR d’environ 550 pb) et le couple m1-2F/m3-2R (donnant un produit PCR d’environ 1 100 pb) ont été retenus pour la suite des expériences.

Figure 30 : Efficacité de l’amplification PCR d’un fragment du gène aoxB chez Thiomonas spp. avec différents couples d’amorces. Couples d’amorces: (1) 2F/m2-1R, (2) 4F/m2-1R, (3) m1-2F/m3-1R, (4) m1-4F/m3-1R, (5) m1-2F/m3-2R, (6) m1-4F/m3-2R, (7) m2-3F/m3-1R, (8) m2-1F/m3-1R, (9)

m2-3F/m3-2R, (10) m2-1F/m3-2R. Souches pures: (A) Thiomonas sp. WJ-68, (B) Thiomonas arsenivorans, (C) Thiomonas sp. NO115.

La spécificité de la réaction PCR étant similaire avec ces 3 couples pour des températures d’hybridation variant de 52°C à 62°C et des concentrations de MgCl2 de 1,5 mM à 2,5 mM, les conditions de plus faible stringence, c’est à dire 52°C et 2,5 mM de MgCl2, ont été préférées afin de cibler également des séquences divergentes. Leur sensibilité a ensuite été évaluée dans ces conditions sur des dilutions en séries d’ADN génomique des deux souches AsIII-oxydantes dont le génome a été séquencé et contient un seul gène aoxB :

Herminiimonas arsenicoxydans et Chloroflexus aurantiacus. Le couple m1-2F/m3-2R permet

une amplification spécifique avec moins de 8,3 pg d’ADN cible (Figure 31). Sachant que le génome d’H. arsenicoxydans mesure 3,4 Mb environ et contient seulement un gène aoxB (Muller et al., 2007), cela représente environ 2,2 x 103 copies de gènes aoxB. La sensibilité est plus faible pour la souche phylogénétiquement plus éloignée C. aurantiacus, la limite de détection étant de 1,7 x 104 copies de gènes aoxB. Le couple m2-1F/m3-2R montre également une bonne sensibilité, avec seulement 4,15 ng d’ADN de H. arsenicoxydans, soit 1,1 х 105 copies, nécessaires pour amplifier un fragment spécifique. Par contre, 415 pg d’ADN, soit 1,1

х 106 copies, sont nécessaires avec le couple d’amorces m1-2F/m2-1R. Au vu de ces tests de sensibilité, les deux couples d’amorces m1-2F/m2-1R et m1-2F/m3-2R ont été retenus pour la suite des expériences.

Figure 31 : Test de sensibilité du couple d’amorces m1-2F/m3-2R sur différentes concentrations d’ADN de H. arsenicoxydans. Pistes 1 à 10 : amplifications obtenues avec 88.3 ng, 8,3 ng, 4,15 ng, 830

pg, 415 pg, 83 pg, 41,5 pg, 8,3 pg, 4,15 pg et 830 fg d’ADN. Piste 11 : marqueur de poids moléculaire.

Ces deux couples d’amorces ont conduit à des amplifications spécifiques à partir des 18 autres souches AsIII-oxydantes disponibles dans notre collection (c.f. Tableau 13) et appartenant à divers genres des Proteobacteria : Lepthotrix sp. S1.1 (dont aucun fragment aoxB n’avait pu être amplifié à l’aide des autres amorces citées au premier §), Thiomonas cuprina, Thiomonas

YI013H, Alcaligenes sp. T12RB, Aminobacter sp. 86, Burkholderia sp. YI019A, Limnobacter sp. 83, Pseudomonas sp. 1, 46, 72, 73, 89, D2OHCJ, Ralstonia sp. 22. Une amplification moins spécifique a été obtenue à partir de l’Archaea, Aeropyrum pernix, dont le génome a été séquencé et contient un gène aoxB. Aucune amplification n’a été observée à partir de 10 souches bactériennes n’oxydant pas l’AsIII, dont 6 possèdent une enzyme à molybdène de la famille des DMSO-réductase (comme l’AsIII-oxydase), i.e. Rhodobacter sphaeroides,

Desulfitobacterium hafniense, Bacillus selenitireducens, Geobacter metallireducens, Escherichia coli, Halomonas denitrificans.

La pertinence de ces couples à cibler spécifiquement les gènes aoxB a également été démontrée par l’amplification spécifique d’un fragment de taille attendue à partir d’ADN extraits d’échantillons environnementaux : (i) les quatre sols des sites industriels du bassin de la Meuse (D2, D3, T5R et T12R), (ii) les huit eaux collectées dans le bassin de l’Isle (YI009, YI011, YI016, YI019, YI020, YI025, AB001 et PZR10) (Figure 32). Des expériences de clonage et séquençage des certains produits PCR obtenus ont confirmé que ces bandes correspondaient bien aux gènes aoxB recherchés (c.f. chapitres 5 et 6).

Figure 32 : Amplifications obtenues à l’aide des couples d’amorces 2F/m2-1R (A) et m1-2F/m3-2R (B). Pistes 2 et 9 : sol D2 ; Pistes 3 et 10 : sol D3 ; Pistes 4 et 11 : sol T5R ; Pistes 5 et 12 : sol T12R ; Pistes 6 et 13 : Thiomonas sp. N0115 (témoin positif) ; Pistes 7 et 14 : B. selenitireducens (témoin