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Chapitre 3. Autorité, démocratie et droits de la personne : l’Église catholique

3.4 La démocratie comme « mode de vie » : le développement d’une culture

3.4.2 Les droits et les devoirs du citoyen

Le catéchisme glauben–leben–handeln présentait les différents devoirs civiques dans deux leçons (n° 107 à 113) du chapitre consacré au 4e commandement, intitulé « Les

êtres humains vivent ensemble »128. On peut diviser ces devoirs en quatre catégories

principales : le devoir de participation à la vie politique, le devoir de tolérance, le devoir de solidarité envers les peuples étrangers et le devoir d’esprit critique et de désobéissance civile.

Le devoir de participation à la vie politique était présenté et expliqué dans la leçon n° 108 (« Peuples et États »129). Avant d’aborder les devoirs civiques de l’individu, le

catéchisme glauben–leben–handeln prenait la peine d’évoquer les devoirs de l’État envers ses citoyens :

127 Gaudium et spes, n° 75, § 6.

128 « Das Zusammenleben der Menschen ». 129 « Völker und Staaten ».

L’État a le devoir de veiller à ce que chaque citoyen puisse vivre dignement. Il doit venir en aide partout où les possibilités des petites communautés sont épuisées. Le devoir de l’État ne se limite toutefois pas à ne se préoccuper uniquement que de l’individu : l’État doit avant tout s’assurer du bien-être de la communauté130.

On peut remarquer que dans le catéchisme glauben–leben–handeln, la présentation des devoirs de l’État était très semblable à celle du KKBD ; dans les deux cas, le principe de subsidiarité était à la base du rapport entre l’État et ses citoyens. Dans Pacem in terris, Jean XXIII avait d’ailleurs rappelé ce principe, étendant son application jusqu’aux rapports entre les organisations supranationales et les États membres de ces organisations131.

Parmi les devoirs du citoyen, on évoquait tout d’abord celui de participation à la vie politique. Dans un régime démocratique, le premier de ces devoirs est sans aucun doute l’exercice du droit de vote. Pour le catéchisme glauben–leben–handeln, le fait de voter lors d’élections n’était toutefois pas suffisant pour garantir le bon fonctionnement d’une démocratie ; afin d’exercer leur droit de vote de manière éclairée, les citoyens doivent en effet s’informer le plus possible de l’actualité politique et des objectifs des partis et des candidats pour lesquels ils souhaitent voter :

Aucun citoyen ne doit demeurer indifférent devant ce qui se passe dans sa communauté, son peuple et son pays. Au moyen de la presse, de la radio et de la télévision, il doit se tenir informé des lois qui doivent être adoptées. Il doit prêter attention aux objectifs des partis politiques, ainsi qu’à la manière dont ceux-ci les poursuivent. Ce n’est que de cette façon que le citoyen peut être en mesure d’exercer consciencieusement son droit de vote lors d’élections132.

Depuis son ralliement à la démocratie, l’Église catholique considérait elle aussi que l’exercice du droit de vote constitue souvent plus un devoir qu’un droit à proprement parler. Comme le rapporte Herbert Schambeck, Pie XII rappelait à ses fidèles que le

130 « Der Staat hat die Aufgabe zu sorgen, daß jeder Bürger menschenwürdig leben kann. Er soll überall

dort helfen, wo die Möglichkeiten der kleineren Gemeinschaften erschöpft sind. Die Aufgabe des Staates beschränkt sich aber nicht darauf, sich um den einzelnen zu kümmern, er muß vor allem für das Wohl der Gemeinschaft sorgen. » (glauben–leben–handeln, p. 231).

131 Voir Pacem in terris, § 140-141.

132 « Kein Staatsbürger darf gleichgültig sein gegenüber dem, was in Gemeinde, Volk und Staat passiert.

Er soll sich durch Presse, Rundfunk und Fernsehen informieren, welche Gesetze beraten werden. Er muss darauf achten, welche Ziele die Parteien haben und wie sie sie verfolgen. Denn nur so ist er imstande, bei Wahlen gewissenhaft zu entscheiden. » (KKBD, p. 231-232).

droit de vote est un acte de haute responsabilité morale, et que ne pas l’exercer contribue à mettre la démocratie en danger. Ce pape considérait même que lorsque des questions religieuses dépendent d’un vote, l’abstention représente un grave péché d’omission133.

C’est dans cet esprit que, dès les premières élections fédérales ouest-allemandes d’août 1949, l’épiscopat allemand avait exhorté ses fidèles à faire usage de leur droit de vote de manière réfléchie134.

Exercer son droit de vote ne constitue néanmoins qu’un seul aspect – peut-être le plus passif – du devoir de participation à la vie politique. C’est pourquoi le catéchisme

glauben–leben–handeln invitait ceux qui en avaient les capacités à s’y impliquer

directement :

Il est nécessaire que tous les citoyens remplissent leurs devoirs politiques et qu’ils consacrent temps et énergie à influencer la vie publique. Celui qui en a les capacités doit être prêt à assumer des fonctions dans la vie publique. Si les dirigeants servent la communauté sagement et consciencieusement, le chrétien doit les respecter et les soutenir135.

Afin de faire prendre conscience à l’enfant de l’importance d’une participation active aux processus démocratiques, le glauben–leben–handeln reproduisait d’ailleurs, entre le texte de la leçon et les questions de réflexion, la célèbre citation du président américain John F. Kennedy : « Ne demande pas ce que ton pays peut faire pour toi, mais plutôt ce que tu peux faire pour ton pays136. »

En renvoyant l’enfant à son manuel d’éducation civique, une question de réflexion de la leçon n° 108 faisait en outre explicitement référence au cours d’éducation civique : « 5. Quels droits reviennent au citoyen ? Quels devoirs a-t-il ? — Vérifie dans un manuel d’éducation civique137 ». Enfin, en lui demandant d’énumérer au moins quelques-uns des

droits du citoyen dans un régime démocratique, le catéchisme glauben–leben–handeln

133 Schambeck, p. 39.

134 « Gemeinsames Hirtenwort der Bischöfe der Bundesrepublik Deutschland vom 14. Juli 1949 », dans

Heinz Hürten, dir., Katholizismus, staatliche Neuordnung und Demokratie, 1945–1962, Paderborn, Schöningh, 1991, p. 58.

135 « Es ist notwendig, daß alle Bürger ihre politischen Pflichten erfüllen und daß sie Zeit und Kraft

einsetzen, das staatliche Leben mitzubestimmen. Wer die Fähigkeit hat, muß bereit sein, im öffentlichen Leben eine Aufgabe zu übernehmen. Wenn die Regierenden der Gemeinschaft klug und gewissenhaft dienen, soll der Christ sie achten und unterstützen. » (glauben–leben–handeln, p. 232).

136 Ibid., p. 232.

137 « 5. Welche Rechte stehen dem Staatsbürger zu ? Welche Pflichten hat er ? – Sieh in einem

ne souhaitait pas sensibiliser l’enfant uniquement à ses devoirs civiques, mais également aux droits qui accompagnent ces devoirs. À cet égard, il apparaît significatif que la leçon n° 108 ait débuté par un long extrait du préambule de la Charte des Nations unies et que le chapitre sur le 4e commandement ait lui-même commencé par une série de

consignes qui demandaient entre autres : « À partir de la Loi fondamentale, de la Déclaration universelle des droits de l’homme, de la constitution de votre Land, recopiez les paragraphes qui traitent des droits fondamentaux de la personne138 ».