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a. Compe nsation d e dose chez les mamm ifères

Chez les mam mifères, la comp ensation de dose s ’effectue en gra nde pa rtie p ar une répression g lobale de la transcription ch ez le s femelles, m ais égalem ent par une augm entatio n d e la transcriptio n de quelq ues gènes chez les m âles [Brockdorff et T urner, 2015]. Plusie urs étud e s transcriptomiq ues [Nguye n et D isteche, 2006 ; Lin et al., 2007 ; D eng et al., 2011] ont en effet m ontré q ue les mâles com porte raie nt une augm entation de l’expression de plus ie urs gènes d e leur unique chromosom e X , ce dernier com portant un ratio d’expres sion X : Autosomes supérie ur à 0.5, et ce , de manière rép étable. Cette a ugm e nta tion n’étant pas globale, il es t fait l’hypothès e que se uls les gènes les plus sensibles à une différe nce de dose (pour laq uelle la non-co mp ensation est p ar exem ple léthale) feraie nt l’objet de cette augme ntation de la tra nscription [Pes sia et al., 2012]. La m ajeure partie de la com pe nsation de dose ch e z les m am mifères s’effectue donc chez les femelles, p uisque la plupart des cellules de ces dernières comporte nt un corps de Barr, correspondant à une cond ensation com plète de la chromatine d’un des de ux chro mosom es X [Brockdorff et T urner, 2015]. Ce m écanis me p erm et de n’avoir qu’u n seul chro m osom e X actif que ce soit dans les cellules m âle s ou femelles. Cette spectaculaire conde ns atio n de la chromatine d u chromosom e X mate rnel ou pate rnel chez les femelles est d’ailleurs reliée à certains p hénotypes chez les m am mifères, notam me nt les chattes à la robe écailles de tortue ou ca licot. Chez le chat, le chromosom e X est en effet porteur du g ène resp onsa ble de la pigm e ntation d u p elage , alors que les cellules som atiques des fem elles ne com porte nt qu’un seul X actif, maternel ou paternel, choisi de manière aléatoire s elon les cellules. Ainsi, en fonction q ue le X actif soit maternel ou paternel et en fonction d es allèles portés par chacun de ces chro m osom es X, la couleur d u p ellage peut être différente d ’une cellule d e l’épid erme à l’autre, et ainsi génére r une robe spécifiq ue aux fem elles. Les mâles ne p rése ntant q u’un seul chromosom e X dans le ur géno me , soit ma ternel soit paternel, ils présente nt un p elage uni d u même typ e q ue leur mère ou leur père [K ala ntry, 2011].

La co ndensation d e la chromatine à l’origine de l’inactivation du chromosom e X (XC I) s’effectue grâce au X inactivation Center (X iC), un locus comportant les gènes codant pour les ARN non-codants X ist [Brow n et al., 1991, 199 2 ; Brockdorff et al., 19 92], T six [Lee et al., 19 99], Jpx [T ia n et al., 2010] et Ftx [Churea u et al., 2011], tous impliqués dans l’inactivation du chromosom e X, ainsi que des sites de fixation de protéines régulatrices. Le Xist est un lncARN transcrit tout d’abord faible me nt par les deux X puis majoritairem e nt par le X inactif. Le Xist s’enroule tout autour de la chroma tine du chromosom e X à inactiver, puis recrute les com ple xes protéiq ues Polycomb Repressor Com plex 1 et 2 (PRC 1 et PRC2), responsables d’un enric hissem ent glo bal d e la m arq ue histone H 3K 27me3. PRC 1 va ens uite permettre d e stabiliser et maintenir l’inactivation d u X par enrichissem ent d e la mono-ubiquitination de la Lysine 119 de l’his tone H2A (H 2AK 119U b 1) [Silva et al., 2003 ; de Napoles et al., 2004 ; G ross niklaus et Paro, 2014]. La chromatine du ch romo so me X inactif vis-à-vis du chromosom e X actif

II. Synthèses b ibliographiq ues C. Chromosom e X et compe nsation d e d ose

prése nte des niveaux élevés de méthylation de l’AD N, de m éthylatio n d e la Lysine 9 et de triméthylation de la Lysine 27 des histones H3, de faibles niveaux d’acétylation des que ues des histones, ainsi que de faibles enrichiss em e nts de la marq ue H 3K4 me 3 [O ’Neill et al., 2008], et un enrichissem ent d e l’histo ne variant m acroH2A [Costan zi et Pehrson, 1998 ; Csank ovszk i et al., 1999].

b. Compe nsation d e dose chez C. elegans

Le ném atode C. eleg ans comporte d es individ us m âles X 0 et des individus he rma phro dites XX . La com pe nsation de dose s’effectue chez ce tte es pèce de manière e xclusive chez les herma phro dites par une division globale par d eux d e la transcription de leurs deux chrom osomes X [Meyer, 2005]. C e mécanis m e d e comp ensation implique un D osage Comp ensation Com plexe (D C C), resse m blant e n de nom bre ux points au Cond esin Com plex respo nsab le de la com paction d e la chromatine et de la ségrégation des chro mosom es lors de la m éiose et de la m itose chez C. elegans [Lau et al., 2014]. Une des protéines essentielles du D C C est s ex determination and dosage com pe nsation defective 2 (SD C-2), respo nsable : i) de la reconnaissance d e m anière sp écifiq ue des d eux chromosom es X des herma phro dites po ur l’ass e mbla ge d u D CC, ii) d e la détermination du se xe e n agis sant de concert avec SD C-1 et SD C-3, plaç ant de ce fait SD C -2 au cœ ur d u progra m me génétiq ue des individus herma phro dites . L’e xpression de sdc-2 est spécifique des individ us herma phro dites et son express ion ectopique chez des individus X 0 déclench e l’ass em blage d u D CC sur leur unique chromosome X , entraînant la m ort de ces individus [Meyer, 2005]. SD C -2 est ainsi une protéine herma p hrodite spécifique nécessaire et s uffisante à l’activation d e la compe ns ation d e dose. Cette dernière est égale me nt bas ée sur la rég ulation par le D CC d e l’activité des protéines SET -1 et SET -4 q ui contrôlent ense mble l’e nrichiss em e nt d’H4K 20me 1 le long des deux chromosom es X des individus herma phro dites . L e D C C régule égalem ent l’activité de SIR-2.1, d éplétant ainsi les chromosom es X de la marque active H4K 16ac [ Lau et al., 2014]. Ces de ux phéno m ènes contribuent à réd uire globa leme nt l’express ion des gènes portés par les deux chromoso m es X des herm ap hrodites afin qu’ils atteignent des nivea ux d e transcription éq uivalent au seul X des m âles.

c. Compe nsation d e dose chez la D rosophile

Chez D rosophila m ela noga ster, la com pensation d e dose s’effectue exclus ive me nt chez les individus mâles et implique différe nts éléme nts régulateurs [Conrad et Ak htar, 201 2] : le complexe male-s pecific lethal (M SL, égale me nt app elé D C C bien que très différent du D CC de C. elegans), et les lncARN roX1 et roX2. Le com plex e MSL e st composé des protéines MSL1, MS L2, M SL3, m a leless (MLE) et m ales-absent-on-the-first (MO F) [ H ama da et al., 2005 ; Stra ub et al., 2005]. L ’ass em bla ge d u com plexe M SL est orchestré par la protéine MSL2, retro uvée uniq ue m e nt chez les m âles [Conrad et Akhtar, 2012]. En effet, chez les femelles, la traductio n de l’ARNm ms l2 est inhib ée par la fixation d e sex lethal (SXL), qui n’est pas correctem ent splicé chez les mâles, et donc pas exprim é [Sa ka moto et al., 1992 ; K elley et al., 1997 ; Bas ha w et Ba ker, 1997]. MSL 2 va d’une part s ta biliser M SL1 qui régule q uant à elle l’intégration de MSL3 et MO F [Morales et al., 2004 ; Hallacli et Akhtar, 2009 ; K adlec et al., 2011], et d’a utre part permettre la transcriptio n des lncARN roX1 et roX2 [Rattner et Meller, 2004 ; Lee et al., 2004 ; Li et al., 2008 : 1 ; Aratani et al., 2008], intégrés par la suite a u s ein d u com ple xe par MLE [Melle r et al., 2000]. L’express ion ectopique che z les fem elles de MSL 2 active l’as sem blage co mplet d u com plexe MSL s ur

II. Synthèses b ibliographiq ues C. Chromosom e X et compe nsation d e d ose

les deux ch romosom es X des femelles, aya nt pour conséq uence un phénotyp e léthal ; ceci dém ontre bien le rôle majeur de MSL 2 au sein d u m écanism e d e compe nsation d e dose de la D rosophile [ K elley

et al., 1995]. Une fois assem blé, le co m plex e MSL v a reconnaître des sites de haute affinité (H AS ) distrib ués le long d u chro m osome X (Fig ure 18), p uis se disséminer a utour de ces H AS e n cibla nt des sites de faibles affinité correspondant notam me nt à des gènes [Palmer et al., 1994 ; Lyman et al., 1997 ; Straub et al., 2008 ; Alekseyenko et al., 2008 ; Conrad et Akhtar, 2012]. C e mécanism e est favorisé au niveau du chromosom e X par la transcription des lncARN roX1 et roX 2, mais peut égale me nt avoir lieu a u niveau des a utosomes q ue le comple xe M SL peut cibler dans certaines conditions. Au niv eau d es sites de faible affinité, le complexe MSL va m odifie r les que ues d es histones en y d éposa nt la ma rq ue H 4K 16ac grâce à la protéine MO F [Ha llacli et Ak htar, 2009]. C ette m arq ue active est globaleme nt corrélée avec une augm e ntatio n de l’acces sibilité de la chrom atine a ux facteurs de transcription, dont la RNAP II. C e m écanism e fin va ainsi perm ettre une acétylation globale de la chrom atine d u s e ul X des m âles , conduisa nt à un do ublem ent de la tra nscriptio n d u chro m osom e X , permettant ainsi d’équilibrer l’express ion du X vis-à-vis des autosomes par rapport aux fem elles [Conrad et Ak htar, 2012]. Le mécanis m e p ermetta nt le double me nt précis de la transcriptio n du se ul chrom osom e X des m âles reste cepe nda nt mal comp ris.

II. Synthèses b ibliographiq ues C. Chromosom e X et compe nsation d e d ose

Fig ure 18 | Mod èle d e dispe rsion d u complexe MSL au nivea u du chrom osom e X des individ us mâles d ans le cadre d e la comp ens ation de dose d e D . melanogaster. L'identification d u chrom osome X des mâles par le com ple xe d e com p ensation de dose (D CC) est la p re mière éta pe d u process us d e com pe nsation d e dose. A) Le D C C devient e ntière m ent com pétent pour le cibla ge de la chromatine suite à l'incorporation des lncARN roX au niveau de leurs sites de synthèse sur le chromosome X. Le D C C atteint ensuite ses sites cibles finaux par diffusion au sein de la chrom atine. Ces derniers corresponde nt à des sites de haute affinité (H AS), attirant le D C C vers de multiples loci à travers le chrom osom e X à partir d'où il s e propage sur ses sites de faible affinité. B) Il a été proposé que l'attraction p hysiq ue d u D C C par un H AS e ntraînerait une augm e ntation locale d e la concentration e n D C C. Ce deséq uilib re biochimique local décle nche rait alors la fixation du D CC à des sites de faible affinité, où le D C C génére rait des m odifications post-trad uctionnelles d ’histone s, à savoir H4K 16ac, permettant une augm enta tion de la transcription de gènes actifs. Comm e le D C C est cap able de modifie r les histones pendant des interactions tra nsitoires da ns l'es pace tridim ensionnel de la chrom atine, la marq ue H 4K 16ac peut se répartir s ur plusieurs kilobas es autour de s sites de liaison du D C C. L'exposition de ces sites au D CC grâce à la structure tridim ensionnelle de la chromatine dans le noyau pourrait constituer un mécanis m e d e diffusio n alternatif du D CC . D ’ap rès [Conrad et A khta r, 2012].

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3. Étude de la com pensation d e dos e chez le s insecte s

non-drosophilides

O utre les organism es m od èles pré-cités chez qui la compe nsation de dose a été caractérisée à des niveaux très fins, il a été montré q ue d’a utres organis m es, no n-mod èles ou néo-modèles, présentent une com pe nsation d e dose au niveau tra nscriptionnel (aucune étud e épigénétiqu e n’ayant été m enée chez ces organismes dans le cadre d e la com p ensation de dose ). La caractérisation au nivea u transcriptio nnel de la compensation de dose es t principale me nt effectuée par la comparaison des ratios d’express ion de l’e ns em ble des gènes portés pa r le (les) chromosom e(s) X ou Z sur l’ense m ble des gènes portés par les autosomes autosom es, et ce au sein de chaque s e xe. Il est égalem ent possible de co m pare r la distributio n de l’expression des gènes portés pa r le X (ou le Z) vis-à-vis des gènes portés pa r les autosomes [D eng et al., 2011] en filtrant au p réala ble les gènes les m oins exp rim és ou tissus spécifiq ues [D eng et al., 2011 ]. Ce type d ’e xp érime ntation a été me née nota mm ent chez Ma nduca sexta [ Smith et al., 201 4], A nopheles stephensi [Jia ng et al., 2015] et Anopheles ga m biae [Hah n et Lanzaro , 2005 ; B aker et al., 2 011] : des com pe nsations de dosag e complètes ont été m ises en évidence avec des ratios X:AA = 1 chez les m âles et les fem elles , et d es différe nces non-significatives de distribution d’expression des gènes liés aux autosom es et au X. Chez T ribolium cas tanaeum, une comp ens ation de dose sem ble être prése nte chez les mâles, prése nta nt un ratio d’e xpression X:AA égal à 1. Cependant le chro mosome X de cette espèce éta nt enrichie en gènes femelle-biaisées , les femelles prése ntent un ratio X:AA > 1, s’éloigna nt ainsi de la compensation de dose canoniq ue [Prince et al., 2010]. Certains insecte s du genre Strepsitera ont qua nt à eux m ontré une co mpensatio n de dose partielle (cibla nt certains gènes) [Mahaja n et Bachtrog, 2015], tandis que T eleopsis dalmanii ne prés ente pas de compe ns ation de dose (X:AA = 0.5 chez les m âles , X X:AA= 1 chez les femelles) [W ilkinson et al., 2013]. Chez le pucero n du pois Acyrthosipho n pisum, la com pe nsation de dose a été étudiée au niv eau tra ns criptomiqu e [Jaq uiéry et al., 2013 ; Pal et Vicoso, 2015], et fait l’objet d’un chapitre d édié au sein d e ce manuscrit (V. Chapitre 1).

Chez la plupa rt de ces organis m es non-m o dèles, la compensation de dose a été étudiée par l’interm édiaire de RNA-se q d’invidus mâles et fe melle s entiers ou à des stad es larvaires précoces, et donc sexuellem ent im m atures. Cep endant, l’utilisation de ce typ e d e m atériel biologiqu e p eut induire des biais importants da ns l’évaluatio n et la caractérisation de la compe ns ation d e dose au nivea u du chrom o me X entre les deux sexes , ce m éca nis me pouvant être tissu spécifique [D eng et al., 2011]. Ainsi, il a été suggéré q u’afin de tes ter de m anière précise la compe nsation de dose chez un organis me, il est importan t de réaliser des analyses d’e xpress ion différentielle de gènes au sein de plusie urs tissus afin de déterm iner quels gènes sont tiss us spécifiques, et éliminer ces gènes lors du calcul des ratios X:A. Cette filtration co nce rne notam me nt les g ènes spécifiq ues des go nad es et d es têtes, ces tissus présentant généralem ent des profils de com pensation différe nts comparativem e nt à d’a utres tissus considérés « neutres » (m em bres, m us cles, orga nes vitaux) [D eng et al., 2011]. E n outre, une filtration g rad uelle des gènes selo n leur e xp res sion avant le calcul des ra tios X:A, au sein d e chaque tissu, p erm et une déte rm ination p récise d e la com pensatio n de dose chez les mâles et les femelles.

II. Synthèses b ibliographiq ues D . Plasticité phénotyp ique , p olyp hénism es et m écanism es ép igénétiques chez les inse ctes

Après avoir détaillé l’implication des mécanism es épigénétiq ues au sein de la comp ensation de dose, intéressons-nous à p rése nt au rôle de ces m éca nism e s dans le cad re de la plasticité phénotypiq ue, et plus particulièrem ent d ans la régulatio n du polyphénis me chez les ins ectes.