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Synthèse pour la moitié Sud de la France

2.1.2. Les données du Nord-Ouest de l’Europe et de l’Europe centrale

L’Europe septentrionale est caractérisée par l’abondance de gisements de plein air préservés au sein de séquences lœssiques ou fluviatiles d’envergure. Cette zone s’étend depuis le Massif Central jusqu’aux Pays-Bas, en passant par la Belgique, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Il existe une discontinuité dans les occupations de ces zones liée aux phases de péjorations climatiques rendant cette zone difficilement habitable.

2.1.2.1. La France septentrionale

Dans le Nord de la France, les sites se trouvent principalement sur des terrasses fluviatiles et dans des séquences lœssiques pour le Nord-Est. Des occupations côtières viennent s’ajouter pour le Nord-Ouest.

Dans le Nord de la France, le débitage Levallois apparaît de manière sporadique dès le MIS 12 en contexte acheuléen. C’est le cas des industries de Cagny-Cimetière au MIS 12 et au MIS 12/11 à Cagny-la-Garenne et à Saint-Acheul (TUFFREAU, 1982 ; ANTOINE et al., 2007 ; BAHAIN et al., 2007). On retrouve au MIS 9 les derniers sites attribués à de l’Acheuléen classique, comme Cagny l’Epinette (TUFFREAU et al., 1896, 1995, 2008), Soucy 1 (LHOMME et al., 2000) ou Etricourt-Manancourt, niveaux HUD et HUZ (HERISSON et GOVAL, 2013 ; HERISSON et al., 2016a).

Dans l’Ouest de la France, en Bretagne, le site côtier de Menez-Dregan I (Plouhinec) a livré plusieurs assemblages lithiques attribués au Colombanien (MONNIER ET MOLINES, 1993 ; MONNIER, 1996). La série la plus récente (couche 4a b et c, corrélées géologiquement entre les MIS 9 et 7) montre une standardisation des outils par rapport aux niveaux sous-jacents. L’industrie est composée d’outils massifs sur galets, d’un débitage « opportuniste », d’un débitage sur enclume de petits galets de silex et de deux nucléus Discoïdes. Pour cette raison, la couche 4 a été attribuée à une phase de transition entre Paléolithique inférieur et moyen (RAVON ET MONNIER, 2013 ; RAVON et al., 2016). En l’absence d’éléments « classiques » du Paléolithique moyen (débitage Levallois ou dominance d’une production sur éclat normalisée), cette couche reste toutefois difficile à interpréter. L’incertitude chronologique (entre les MIS 9 et 7) et le peu de données sur le Paléolithique moyen ancien en Bretagne rendent les interprétations complexes.

Le nombre de site au MIS 8 en France septentrionale est assez faible (LOCHT et al., 2016). On retrouve toutefois à ces dates les premières occupations véritablement attribuées au Paléolithique moyen ancien. Ainsi, le site de Salouel a livré un débitage Levallois abondant (MIS 8-7 ; AMELOOT-VANDER HEIJDEN et al., 1996). Il s’agit d’un débitage à la fois linéal et récurrent (unipolaire et bipolaire, plus rarement centripète). Les produits retouchés sont essentiellement des encoches et des denticulés et les racloirs sont rares. A noter une utilisation ancienne du débitage Laminaire volumétrique dans le complexe de Saint-Valéry-sur-Somme, associé à quelques nucléus prismatiques et de rares pièces retouchées (DE HEINZELIN

tandis que les niveaux 20 a,b,c sont attribués au MIS 9 (BURACZYNSKI ET BUTRYM, 1987 ; JUNKMANSS, 1991, 1995). Tous les niveaux ont été rattachés au Paléolithique moyen ancien, à débitage Levallois sans bifaces. Le débitage Levallois apparaitrait localement et se développerait progressivement au cours de la séquence.

La phase interglaciaire du MIS 7 voit une augmentation du nombre de sites dans la zone. Le site le plus emblématique est celui de Biache-Saint-Vaast, où des restes de néandertaliens ont été mis au jour, associés à une industrie Levallois à pointes et à éclats (TUFFREAU et SOMME, 1988 ; HERISSON, 2012). Les assemblages lithiques de la période sont marqués par l’utilisation de débitages Levallois diversifiés. Des débitages Laminaires ont également été identifiés, comme à Tourville-la-Rivière (VALLIN, 1991 ; FAIVRE et al., 2014). Un « micro-débitage » original est aussi présent sur le site de Ranville (CLIQUET, 2008).

Plusieurs sites sont attribués à la fin du MIS 7 ou au début du MIS 6 : quelques niveaux de Biache-Saint-Vaast, Therdonne (LOCHT et al., 2010 ; HERISSON, 2012), ou Le Pucheuil série B (DELAGNES et ROPARS, 1996). Dans les Côtes-d’Armor, à Piégu, on retrouve majoritairement un débitage Levallois à pointes, possiblement associé à deux bifaces (MONNIER et al., 1985 ; BAHAIN et al., 2012).

Avec la péjoration climatique du Saalien, l’occupation humaine est réduite. Les quelques vestiges mis au jour sont localisés plus à l’Ouest avec systématiquement du débitage Levallois. A l’Ouest, quelques bifaces sont présents dans les séries, comme à Gouberville ou la Roche Gélétan (CLIQUET et al., 2003 ; Fig. 17). Ainsi, aux MIS 7 et 6, des assemblages à bifaces (Le Pucheuil, Port Pignot, la Roche Gélétan, la Cotte de Saint-Brelade) coexistent avec des assemblages sans bifaces, comme à Le Long Buisson ou à Tourville la Rivière (CLIQUET, 2013). Les occupations du Paléolithique moyen se multiplient nettement ensuite avec l’Eemien.

Figure 17 – Occupations de la fin du Paléolithique inférieur et du début du Paléolithique moyen ancien dans le

Nord-Ouest de la France (Carte et illustrations in CLIQUET ET LAUTRIDOU, 2009 ; Gélétan, bifaces et produits Levallois d'après MICHEL, 1994 ; Tourville la Rivière, éclats laminaires d'après GUILBAUD et CARPENTIER,

2.1.2.2. Le Nord de l’Europe

L’Europe du Nord (Fig. 18) correspond ici à la zone regroupant la Belgique, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.

Belgique

Les traces d’occupations du

Paléolithique inférieur et moyen sont rares en Belgique. On les retrouve principalement dans les formations fluviatiles du bassin de la Haine et les dépôts lœssiques du bassin de la Meuse (DI MODICA et PIRSON, 2016).

Dans le bassin de la Haine, plusieurs terrasses possèdent des occupations datées du

MIS 10 et 8. Ainsi, des séries attribuées au Paléolithique inférieur ont été découvertes dans la terrasse de Petit-Spiennes (CAHEN et al., 1985). Le matériel lithique, remanié, comprend des bifaces diversifiés (amygdaloïdes, lancéolés et micoquiens) associés à des pics et des racloirs. Le débitage a été défini par certains auteurs comme « Levallois non-sophistiqué » (CAHEN, 1987) ou « Para-Levallois » (WATTEYNE, 1985).

Les premiers sites du Paléolithique moyen ancien se trouvent dans la terrasse de Mesvin (MIS 8). Le site de Mesvin IV constitue l’un des témoignages les plus importants de la région. Le matériel y est faiblement remanié et comprend un débitage Levallois bien développé (à éclats et à pointes) associé à des racloirs et des bifaces asymétriques (CAHEN et al., 1984 ; CAHEN et MICHEL, 1986 ; SORIANO, 2000). Toujours sur cette terrasse, le site de Petit-Spiennes III a livré un débitage Levallois (à éclats et lames), des racloirs et un biface à dos (CAHEN etHASAERTS, 1982). Enfin on retrouve également le site du Rissori dont l’unité inférieure (IV) est corrélée au MIS 8. Dans les quatre ensembles, on voit un débitage Levallois et une production orientée vers l’obtention de pointes pseudo-Levallois (ADAM, 1991, 2002). Dans les unités IIIa et b, un débitage laminaire volumétrique a été décrit (REVILLION, 1995).

Daté autour de 280 ka, le site de Kesseld-Op de Schans (Limboug) a livré des niveaux du Paléolithique moyen ancien dans une séquence lœssique (VAN BAELEN, 2017). Le niveau 3 correspondrait, sur la base de corrélations géoarchéologiques, à la transition entre le MIS 9 et 8. On y retrouve des débitages Discoïdes et Levallois. Les bifaces sont absents.

Au MIS 6, les niveaux D1 et D2 (ce dernier étant possiblement plus ancien) de la grotte Walou à Trooz (DRAILY, 2011 ; PIRSON et DI MODICA, 2011) correspondent à la seule occupation en grotte du Paléolithique moyen ancien du pays. Le matériel moustérien essentiellement composé d’éclats, est pauvre (n=189 pour les deux niveaux) et en position remaniée.