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Chapitre 1 : Épigénétique et protéines associées

II. Les DNMTs : l’art de la méthylation

La méthylation de l’ADN est la modification épigénétique la plus connue et la plus étu-diée, car elle reste la marque majoritaire dans de nombreux cancers. Elle a été pour la première fois identifiée en 1948 par Rollin Douglas Hotchkiss (1911-2004) dans un thymus de veau.46

Cette partie va se focaliser sur les enzymes DNMTs, responsables de la méthylation du génome, en exposant tout d’abord leur rôle biologique et leur nature, puis leur structure ainsi que leur mode d’action. Enfin, nous verrons quelles sont les conséquences de leur dysfonctionnent et en quoi elles apparaissent comme des cibles thérapeutiques pertinentes.

II.1. Rôles biologiques et nature des DNMTs

Chez les mammifères, les enzymes DNMTs - DNA Méthyltransférases sont respon-sables de la mise en place et du maintien, au cours des divisions cellulaires, des profils de mé-thylation. Pour cela, elles vont catalyser le transfert d’un groupement méthyle de manière régio-spécifique sur l’ADN, grâce à un cofacteur, le SAM (ou AdoMet), qui agit comme donneur de méthyle. La méthylation de l’ADN suit des profils parfaitement définis et est un processus épi-génétique clef permettant la maintenance de l’intégrité du génome.

Elle a un rôle majeur dans de nombreux mécanismes telles que :47 La régulation de l’expression des gènes

46 Hotchkiss, R. D. J.Biol.Chem. 1948, 175, 315-332

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38 • L’empreinte parentale : l’une des deux copies d’un même gène est éteinte en fonction de son origine parentale. Contrairement aux autres gènes, une seule co-pie du gène (maternelle ou paternelle) s’exprime

L’inactivation du chromosome X : chez les femmes l’un des deux chromosomes X est inactivé

La différenciation cellulaire.

Elle serait également impliquée dans le développement du système immunitaire, la reprogram-mation cellulaire, ainsi que dans le bon fonctionnement cérébral et le comportement. Cette marque épigénétique atteint les gènes de manière stable mais réversible, et joue un rôle crucial lors du développement embryonnaire. Dans ce dernier cas, le zygote va subir de manière inten-sive des cycles de méthylation et déméthylation qui vont petit à petit établir les profils au sein du génome.

Le but de la méthylation va être de réguler la transcription des gènes en contrôlant l’état transcriptionnel de la chromatine. Comme vu précédemment, il existe au sein du génome des parties hyperméthylées, plutôt associées à une chromatine inactive, et d’autres hypométylées plutôt assimilées à une chromatine active, car permettant la fixation des facteurs de transcrip-tion, et donc l’expression du gène. Cette cartographie des régions riches et pauvres en méthyles, doit absolument être respectée au fil des divisions cellulaires, pour maintenir l’homéostasie du génome. En effet, l’hyperméthylation de certaines zones va avoir pour rôle de bloquer la trans-cription des oncogènes, tandis que l’hypométhylation va favoriser l’activation de la transcrip-tion des gènes suppresseurs de tumeurs. Lorsque ces profils deviennent aberrants, les zones hyperméthylées peuvent devenir hypométhylée et inversement, ce qui donne lieu à toute une série de pathologies incluant : diabète, maladies cardio-vasculaires, troubles bipolaires, schizo-phrénie et cancer. Dans ce dernier cas, les cellules cancéreuses arborent des séquences promo-trice anormalement hyperméthylées, ce qui réprime la transcription des gènes suppresseurs de tumeurs, favorisant l’initiation et la progression du cancer.

Le génome code pour cinq DNMTs dont : la DNMT1, la DNMT2, la DNMT3A, la DNMT3B et la DNMT3L. Les processus de méthylation sont exécutés par les trois DNMTs principales : DNMT1, DNMT3A et DNMT3B.

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39 Ces trois DNMTs ont des fonctions différentes lors de la méthylation, ainsi on peut les distin-guer comme suit :

Les DNMTS de novo : DNMT3A et 3B La DNMT de maintenance : DNMT1

Les DNMT3A et 3B, considérées comme des méthyltransférases de novo, sont responsables de l’établissement des profils de méthylation pendant l’embryogénèse et de l’instauration de l’em-preinte parentale pendant le développement des cellules germinales (ovules, spermatozoïdes). En effet, elles sont très exprimées dans l’embryon, mais leur taux d’expression diminue au fur et à mesure de la différenciation cellulaire. Elles peuvent se fixer indifféremment à de l’ADN non méthylé ou hémi-méthylé. En revanche, la DNMT1 est nécessaire pour la maintenance des profils de méthylation pendant la réplication de l’ADN. Elle restaure sur le brin d’ADN fille nouvellement synthétisé le profil de méthylation spécifique, conformément à celui présent sur le brin parental instauré par les DNMT3A et 3B.48 Elle va donc reconnaître et fixer de manière préférentielle l’ADN hémi-méthylé, mais agit sur le brin non méthylé, et sera localisée lors de la phase de réplication de l’ADN (Phase S) au niveau des fourches de réplication (schéma 12).

Schéma 12 : Dynamique des profils de méthylation

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40 Les deux dernières DNMTs ne participent pas directement à l’installation des profils de méthy-lation. La DNMT3L, dépourvue de domaine catalytique, agit comme régulateur indispensable de l’activité de la DNMT3A, et opère en formant un hétérotétramère DNMT3A - DNMT3L qui facilite la méthylation et augmente l’affinité du complexe pour l’ADN (schéma 13).49

Schéma 13 : A) Structure cristallographique de l’hétérotétramère DNMT3A/3L B) Modèle de la polymérisation du complexe sur l’ADN

Enfin, la DNMT2 n’est pas vraiment considérée comme une ADN méthyltransférase, car elle a pour rôle de méthyler de petits ARN de transferts.50 En 2016, une équipe de l’Institut Curie a mis en évidence dans des cellules germinales de souris une nouvelle méthyltransférase de novo, la DNMT3C, très semblable à la DNMT3B mais avec une activité différente.51

Pour conclure, les DNMTs définissent et maintiennent les profils de méthylation, essen-tiels dans la prolifération et la différenciation cellulaire. Elles peuvent être de nature différente en fonction du rôle qu’elles adoptent, et chacune a une fonction spécifique. Malgré leurs simi-litudes, les DNMTs n’ont pas exactement les mêmes structures et adoptent un fonctionnement complexe. Pour continuer ce chapitre, nous allons décrire comment fonctionne le processus de méthylation et les mécanismes associés. Ensuite, nous nous pencherons sur les structures des différentes DNMTs et le mécanisme catalytique associé.

49 (a) Smith, Z.D.; Meissner, A. Nat. Rev. Genet. 2013, 14, 204-220 (b) Chen, T.; Li, E. Curr. Top. Dev. Biol. 2004, 60, 55-89

50 Goll, M.G. et al. Science, 2006, 311, 395-398

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II.2. Profils de méthylation, structure et mécanisme

cataly-tique des DNMTs

II. 2.1. Dynamique de la méthylation de l’ADN

Chez l’Homme, la méthylation de l’ADN a lieu sur les résidus cytosines, au niveau de leur atome de carbone 5 (C5), principalement dans des zones riches en dinucléotides cytosines – phosphate – guanine (CpGs) (schéma 14).

Schéma 14 : Dinucléotide Cytosine – phosphate - Guanine (CpG)

La méthylation des sites CpGs est tissus-spécifique et donne lieu à des profils de méthylation particulier pour chaque type cellulaire. Parmi les 56 millions de sites CpGs présents dans le génome, 60 à 80% d’entre eux sont méthylés, ce qui correspond à environ 4 à 6% des cytosines totales. La distribution des sites CpGs n’est pas homogène dans le génome, certaines régions se caractérisent par des clusters de sites CpGs, appelés îlots CpG (CpGIs). Les CpGIs sont définis comme de petites régions d’ADN très riches en CpGs, comprises entre 550 pdb à 1kb de lon-gueur, et sont colocalisées au niveau des séquences promotrices chez 60 à 70% des gènes. Dans les cellules normales, ils sont en général associés à un état ouvert, transcriptionnellement actif, de la chromatine et ont un rôle dans l’initiation de la transcription.52 Pour ce faire, les CpGIs sont hypométhylés, avec des histones hyperacétylés au niveau du nucléosome, ce qui facilite

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42 l’état décondensé. Il est primordial que les îlots CpG restent hypométhylés pendant les réplica-tions de l’ADN, même lors des périodes de méthylation de novo, pour continuer à lier les fac-teurs de transcriptions nécessaires à l’expression de gènes primordiaux, tels que les gènes sup-presseurs de tumeur. En effet, leur hyperméthylation entraîne la répression de la transcription de ces gènes et mène au développement tumoral. C’est d’ailleurs une caractéristique des cel-lules cancéreuses. Toutefois, le mécanisme par lequel ils échappent aux DNMTs est mal connu. Bien que la majeure partie soit hypométhylée, une faible portion d’îlots CpG se méthyle tout de même, notamment dans le cas de l’empreinte parentale et de l’inactivation du chromosome X. De même, lorsqu’un gène est réprimé, il présente des îlots CpG hyperméthylés.

II. 2.2. Structure des DNMTs

Les DNA Méthyltransférases sont divisées en deux parties : un domaine N-terminal de taille variable, qui a des fonctions régulatrices ; et un domaine C-terminal, assez conservé, qui correspond à la partie catalytique.53 La DNMT2 fait exception puisqu’elle ne possède que le domaine C-terminal. De même, la DNMT3L a un domaine C-terminal plus court ne contenant pas la partie catalytique. Les deux domaines sont reliés entre eux par un lien composé d’une succession de résidus Lysine (K) – Glycine (G).

Premièrement, la partie N-terminale a pour rôle de guider la localisation nucléaire de ces en-zymes, et arbitre leurs interactions avec d’autres protéines, l’ADN et la chromatine.

Le domaine N-terminal de la DNMT1 est beaucoup plus important que celui des autres DNMTs et contient de nombreux sous-domaines tels que (schéma 15) :54

- Domaine DMAP1 : arbitre les interactions entre la DNMT1 et la protéine DMAP1, un répresseur transcriptionnel, et est impliqué dans la stabilité de la DNMT1. Il permet aussi à la DNMT1 de se fixer aux sites CpGs

- Domaine RFTS : nécessaire pour le recrutement de la DNMT1 aux fourches de réplica-tion lors de la duplicaréplica-tion de l’ADN et le maintien de la méthylaréplica-tion pendant la phase S

53 Lyko, F. Nat. Rev. Genet. 2018, 19, 81-91

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43 - Domaine CXXC : en doigts de zinc, riche en résidus cystéine qui lient deux ions zinc nécessaires à l’activité enzymatique. Ce domaine permet à la DNMT1 de lier l’ADN non méthylé

- Domaines BAH 1 et 2 : bromo-domaines, leur rôle au sein de la DNMT1 reste à élucider mais ils pourraient moduler des interactions protéines-protéines.

Schéma 15 : Structure cristallographique de la DNMT149

Par ailleurs, des études structurales plus avancées ont montré que l’activité catalytique de la DNMT1 est soumise à un mécanisme d’auto-inhibition, qui les empêchent d’agir sur des cibles erronées.55 Cette boucle d’auto-inhibition relie les domaines BAH1 et CXXC dans la partie N-terminale, et se positionne entre l’ADN et le site actif de l’enzyme. D’après de récentes études mécanistiques, en présence d’ADN non méthylé, lorsque le domaine CXXC de la DNMT1 in-teragit avec l’ADN, la boucle d’auto-inhibition est entrainée dans une position particulière qui prévient les interactions entre l’ADN non méthylé et le domaine catalytique méthyltransférase. Au contraire, en présence d’ADN hémiméthylé, la boucle d’auto-inhibition ne bloque pas le site actif et l’enzyme peut catalyser la méthylation.56

55 (a) Song, J. et al. Science, 2011, 331, 1036-1040 (b) Jeltsch, A. ; Jurkowska, R. Z. Nucleic Acids Res. 2016, 44,

8556-8575

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44 Le domaine N-terminal des DNMT3 (A, B et L) ne contient que deux sous-domaines prépon-dérants :

- Domaine PWWP : domaine prolino-tryptophane, permet le recrutement des DNMT3 A et B à la chromatine

- Domaine ADD : domaine riche en résidus cystéine, constitue une plateforme pour di-verses interactions protéines-protéines.

Deuxièmement, la partie C-terminale, plus petite, porte le site actif de l’enzyme et contient dix motifs d’acides aminés quasiment communs à toutes les C5-cytosine DNA Méthyltransfé-rases.57 Six d’entre eux, les motifs I, IV, VI, VIII, IX, et X, sont cruciaux pour l’activité enzy-matique. Les motifs I et X sont impliqués dans la liaison avec le cofacteur ; les motifs IV, VI et VIII interviennent dans le processus catalytique ; enfin la région entre les motifs VIII et IX, notée TRD pour « Target Recognition Domain », n’est pas conservée d’une DNMT à l’autre, et joue un rôle dans la reconnaissance de l’ADN (cytosine) et la spécificité des DNMTs. L’ensemble des domaines structurant les DNMTs sont présentés dans le schéma suivant (schéma 16).

Schéma 16 : Structures des ADN Méthyltransférases58

57 Cheng, X. Annu. Rev. Biophys. Biomol. Struct. 1995, 24, 293-218

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45 Par ailleurs, toutes les DNMTs SAM-dépendantes partagent une structure de base commune appelée « repliement SAM dépendant » (AdoMet-dependent methyltransferase fold) impliquée dans la liaison du cofacteur et constituée au centre de sept brins β antiparallèles autour desquels sont repliées six hélices α périphériques.59 Même si le cofacteur adopte toujours la même orien-tation lorsqu’il est lié à l’enzyme, la nature des acides aminés impliqués dans la boucle varie en fonction des DNMTs.

II. 2.3. Mécanisme catalytique

En plus de posséder des structures similaires, les DNMTs présentent un mécanisme ca-talytique semblable. En effet, toutes les DNMTs utilisent le SAM - S-adénosyl méthionine comme donneur de méthyle, et adoptent un mécanisme qui fait pivoter la base azotée ciblée dans la poche catalytique de l’enzyme. Le mécanisme de méthylation se déroule en deux étapes. Tout d’abord, la DNMT forme un complexe avec l’ADN et le SAM, dans lequel la cytosine cible va être désappareillée à sa paire de base dans la double hélice et retournée dans le site actif de l’enzyme (schéma 17).60

Schéma 17 : Structure cristalline de la DNMT bactérienne HhaI et de l’ADN (en bleu), où une des bases est retournée dans le site actif (en orange)

59 Cheng, X.; Roberts, R. J. Nucleic Acids Research 2001, 29, 3784-3795

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46 Ensuite, la réaction de méthylation est déclenchée par un résidu cystéine conservé au sein de la famille des DNMTs, et qui se situe dans un motif PCQ - Proline/Cystéine/Glutamine, corres-pondant au motif IV de la partie C-terminale.61 Le groupement thiol de la cystéine catalytique suscite une attaque nucléophile sur le carbone en position 6 de la cytosine, menant à la forma-tion d’un complexe covalent cytosine-DNMT. La mésomérie présente au niveau du cycle amino-pyrimidinone confère au carbone en position 5 des propriété nucléophiliques, ce qui ac-tive l’intermédiaire stable formé. A la suite de cette étape, le carbanion formé en position 5 va pouvoir attaquer le groupement méthyl du SAM, libérant le SAH et formant un adduit covalent 5-méthylcytosine-DNMT. Enfin, la β-élimination du proton au pied du méthyl transféré permet de casser le lien enzyme-substrat, provoquant la libération de l’enzyme et de la 5-méthycytosine formée.

Suite à l’attaque nucléophile du résidu cystéine catalytique (Cys 1229), les acides aminés du site actif stabilisent les charges positives et négatives formées par mésomérie au sein du cycle amino-pyrimidinone. Il s’agit notamment de l’acide Glutamique 1266 et de l’Arginine 1312. Les schémas suivants récapitulent le bilan de la réaction et les différentes étapes du processus catalytique (schéma 18 et 19).62

Schéma 18 : Transfert du méthyle à partir du SAM

61 Hupkes, M. et al. Journal of Biomolecular Screening 2012, 18, 348-355

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Schéma 19 : Mécanisme catalytique de la méthylation de l’ADN

II.3. Régulation de l’activité des DNMTs

II. 3.1. Régulation par interactions moléculaires

L’activité des DNMTs est modulée par une série d’interactions moléculaires. L’interaction DNMT3A-DNMT3L en est un exemple. Toute seule la DNMT3L est inactive car elle ne pos-sède pas le domaine PWWP, ni la partie catalytique dans le domaine C-terminal, mais elle est nécessaire à l’activité de la DNMT3A. De même, la DNMT1 interagit avec la protéine UHRF1, une ubiquitine ligase, requise pour le processus de maintenance de la méthylation. En effet,

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48 cette dernière permet d’une part de recruter la DNMT1 au niveau de son substrat en ayant une forte préférence pour l’ADN hémiméthylé et d’autre part, elle permet de désappareiller la cy-tosine qui doit être méthylée hors de la double hélice. De plus, une autre forme de régulation existe entre l’ADN et la DNMT1. En effet, l’ADN méthylé peut induire une régulation de type allostérique, qui sera activatrice ou inhibitrice de l’activité de la DNMT1. Le but étant d’empê-cher la DNMT1 de méthyler un substrat qui l’est déjà. Enfin, d’autres protéines sont impliquées dans la régulation des DNMTs mais leurs modes d’action restent obscurs.63

II. 3.2. Régulation par modifications post-traductionnelles

L’activité des DNMTs peut aussi être régulée par des modifications post-traduction-nelles. Par exemple, la DNMT1 peut être méthylée ou déméthylée sur certaines lysines par des lysines méthylases et déméthylases. Ces modifications ont pour but de mener à la dégradation de l’enzyme. A l’inverse, la DNMT1 peut aussi être phosphorylée sur une sérine particulière, ce qui a pour conséquence de prévenir les méthylations susceptibles de mener à sa dégradation. Toutefois, le réseau des modifications post-traductionnelles des DNMTs restent mal connu et demeure un défi pour la recherche.64

D’autres formes de régulation existent, par épissage alternatif ou encore par le changement du nombre de copie des gènes dnmt, mais ces dernières ne seront pas détaillées dans ce manuscrit.65

II.4. Dysfonctionnements des DNMTs et leurs impacts dans le

développement cancéreux

Les cellules cancéreuses présentent de manière caractéristique des profils de méthyla-tion anormaux qu’elles acquièrent au cours du processus tumoral, avec notamment une hyper-méthylation des ilots CpG. Cette hyperhyper-méthylation pourrait être due soit à une suractivation des DNMTs, soit à une surexpression de ces enzymes, ou encore à leur recrutement excessif sur certains sites. Cependant, les biologistes ne parviennent pas encore à en décrire le mécanisme exact. En effet, il est difficile d’identifier les raisons de ce dysfonctionnement car les DNMTs

63 (a) Bourch’is, D. et al. Science, 2001, 294, 2536-2539 (b) Bostick, M. et al. Science, 2007, 317, 1760-1764 (c)

Sharif, J. et al. Nature, 2007, 450, 908-912

64 (a) Wang, J. et al. Nat. Genet. 2009, 41, 125-129 (b) Esteve, P. O. et al. Nat. Struct. Mol. Biol. 2011, 18, 42-48

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49 ne sont pas isolées dans la cellule, où un ensemble de protéines et de facteurs régulés entre eux interviennent. On note dans les cellules cancéreuses de nombreuses altérations dans la famille des gènes codant les DNMTs. Ce phénomène semble être la cause principale de la dérégulation des profils de méthylation. Les lésions affectant les gènes dnmt peuvent être classées en trois catégories : surexpression, mutation et délétion.66

II. 4.1. Surexpression des gènes dnmt

La surexpression des enzymes DNMTs conduit à une hyperméthylation et à l’activation des oncogènes. Dans le cas de la DNMT1, sa surexpression est corrélée avec une méthylation aberrante dans le cas des tumeurs solides. De manière semblable, on trouve des taux d’expres-sion pour les DNMT3 (A et B) trop élevés chez de nombreux patients, surtout dans le cas du cancer primitif du foie (carcinome hépatocellulaire). De manière générale, l’augmentation des taux de méthylation du génome supporte le phénotype cancéreux en favorisant la division cel-lulaire.67

II. 4.2. Mutations des gènes dnmt

L’apparition de diverses mutations au sein des gènes dnmt est également un aspect ca-ractéristique des tumeurs et participe à la transformation tumorale. Pour un type de cancer donné on observe la mutation d’une ou plusieurs DNMTs, qui peut être de différente nature. Par exemple, la mutation de la DNMT1 est fréquente dans les cancers du côlon, alors que dans les cancers hématologiques ce sont les mutations de la DNMT3A qui prédominent. Dans les cancers du côlon, l’inactivation de la DNMT1 à la suite d’une mutation spécifique conduit à une altération globale de la méthylation du génome. D’autres études ont mis en évidence que la DNMT3A était fréquemment mutée dans les leucémies aiguës myéloblastiques (LAM ou AML), et que cette mutation allait de pair avec l’agressivité de la maladie ainsi que sa résistance aux traitements. D’autres mutations affectant le domaine C-terminal catalytique vont, au con-traire, mener à une perte d’activité des DNMTs. L’ensemble de ces études montrent bien que