• Aucun résultat trouvé

Design, synthèse et évaluation biochimique d’inhibiteurs des ADN Méthyltransférases

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Design, synthèse et évaluation biochimique d’inhibiteurs des ADN Méthyltransférases"

Copied!
217
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: tel-02865357

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02865357

Submitted on 11 Jun 2020

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Design, synthèse et évaluation biochimique d’inhibiteurs

des ADN Méthyltransférases

Lucrezia Chappuit

To cite this version:

Lucrezia Chappuit. Design, synthèse et évaluation biochimique d’inhibiteurs des ADN Méthyl-transférases. Biochimie, Biologie Moléculaire. Sorbonne Université, 2018. Français. �NNT : 2018SORUS372�. �tel-02865357�

(2)

Sorbonne Université

ED 406 Chimie Moléculaire Paris Centre

Laboratoire des Biomolécules – Centre de Recherche François Hyafil

Design, synthèse et évaluation biochimique

d’inhibiteurs des DNA Methyltransferases

Par Lucrezia Chappuit

Thèse de doctorat de Chimie Moléculaire

Dirigée par le Pr. Philippe Karoyan

Présentée et soutenue publiquement le 30 Novembre 2018 Devant un jury composé de :

Pr. Sandrine ONGERI Dr. Sophie FAURE Dr. Raphaël RODRIGUEZ Pr. Christine MENAGER Dr. Alexis DENIS Pr. Dominique GUIANVARC’H Pr. Philippe KAROYAN Rapporteur Rapporteur Examinateur Présidente du jury Co-directeur de thèse Co-directeur de thèse Directeur de thèse

(3)
(4)

1

Alla mia Mamma. À mon Père.

(5)
(6)

Remerciements

1

Remerciements

En premier lieu, je souhaite remercier le Professeur Sandrine Ongeri et le Docteur

Sophie Faure d’avoir accepté d’être rapporteurs de cette thèse. Je remercie également le Doc-teur Raphaël Rodriguez d’avoir accepté d’être examinaDoc-teur de ce travail. Enfin je remercie le Professeur Christine Ménager, ainsi que le Professeur Dominique Guianvarc’h et le Docteur Alexis Denis d’avoir accepté de faire partie de ce jury.

Je remercie le Professeur Anna Proust, directrice de l’école doctorale de Chimie Moléculaire Paris Centre (ED406), et son successeur le Docteur Cyril Ollivier, pour m’avoir permis de réaliser cette thèse au sein de l’école doctorale.

Je remercie également le Docteur Sandrine Sagan, directrice du Laboratoire des Biomolécules (UMR 7203), pour m’avoir permis de faire cette thèse au sein de son unité.

Je tiens à remercier le Docteur Fabrice Viviani, directeur du Centre de Recherche François Hyafil, pour m’avoir permis de réaliser cette thèse sur le site des Ulis ; ainsi que le Docteur

Nadine Weisslinger – Darmon, responsable de la Direction Médical GSK pour m’avoir permis

de participer à plusieurs reprises aux réunions de département afin de présenter mon travail. Je remercie sincèrement le Professeur Philippe Karoyan pour m’avoir donné l’opportunité et la chance de réaliser cette thèse multidisciplinaire sous sa direction. Je le remercie pour la confiance qu’il m’a accordé, sa « positive attitude » et pour m’avoir encouragé dans mon pro-jet professionnel. Je lui en suis très reconnaissante.

Je remercie tout particulièrement le Docteur Alexis Denis pour avoir accepté de me co-enca-drer sur ce sujet en me formant à la modélisation moléculaire, ainsi que pour ses conseils avisés, ses réunions toujours très instructives, et son regard méticuleux et pointu lors des séances de modélisation.

Je n’oublie pas le Professeur Dominique Guianvarc’h, je la remercie également d’avoir ac-cepté de co-encadrer cette thèse, de ses précieux conseils en biochimie et de son aide fort utile lorsque des questions en biologie se posaient à moi.

(7)

Remerciements

2

Je souhaite remercier vivement le Docteur Pascal Grondin, chercheur en Biologie aux Ulis, pour m’avoir aidé dans la mise en place et la compréhension du test d’inhibition de la DNMT1 et pour le temps qu’il m’a accordé en parallèle de ses propres projets de recherche.

Je remercie le Professeur Olivier Lequin pour les études RMN réalisées sur les différents com-posés.

Je tiens à témoigner ma profonde reconnaissance aux différents chercheurs et techniciens Chi-mie du Centre de Recherche François Hyafil, pour leur aide précieuse, leurs conseils, leur soutien, les sorties que nous avons faîtes ensemble, et les moments de rires partagés. Ils m’ont permis de travailler dans un environnement privilégié (particulièrement Anne, Alexandre, Jérôme, Nicolas F, Mélanie, MC, Fred, Stéphane, Franck, Nicolas G, Marie-Hélène, Alain L, Olivier ; ainsi que les nouveaux arrivants Aurélien, Eva F, Maxime, Audrey et tous les autres). Je remercie mes co-thésards, Thomas Denèfle et Eva Lardé, pour les moments partagés et la superbe équipe que nous avons formé.

Je salue les différents personnels, post-doctorants, et doctorants du Laboratoire des Biomolé-cules, avec qui j’ai pu interagir de temps à autre, et pour leur aide occasionnelle.

Enfin je remercie mes parents pour leurs corrections et pour m’avoir soutenue et supportée, je remercie mes amis pour m’avoir encouragée, ainsi que Karel pour sa patience et ses correc-tions.

(8)

Sommaire

1

Sommaire

Liste des abréviations………..5

Introduction Générale……….11

Chapitre 1 : Épigénétique et protéines associées………..17

I. L'épigénétique : symphonie du vivant………...19

I.1. Définition et origines………..19

I.2. Rôles biologiques, mécanismes et protéines impliquées……….22

I.2.1. Méthylation de l'ADN et des histones………..25

I.2.2. Acétylation et phosphorylation des histones………28

I.2.3. Complexe de remodelage de la chromatine……….31

I.3. Mutations des CMPs……….32

I.3.1. Nature et conséquences des mutations épigénétiques………..33

I.3.2. Traitements épigénétiques : les « épi-médicaments »………..35

II. Les DNMTs : l’art de la méthylation………37

II.1. Rôles biologiques et nature des DNMTs………37

II.2. Profils de méthylation, structure et mécanisme catalytique des DNMTs…..41

II. 2.1. Dynamique de la méthylation de l’ADN………...41

II. 2.2. Structure des DNMTs………42

II. 2.3. Mécanisme catalytique………..45

II.3. Régulation de l’activité des DNMTs………..47

II. 3.1. Régulation par interactions moléculaires………...47

II. 3.2. Régulation par modifications post-traductionnelles………..48

II.4. Dysfonctionnements des DNMTs et leurs impacts dans le développement cancéreux………48

(9)

Sommaire

2

II. 4.1. Surexpression des gènes dnmt………49

II. 4.2. Mutations des gènes dnmt………..49

II. 4.3. Délétion des gènes dnmt………50

III. Inhibiteurs des DNMTs………...52

III.1. Inhibiteurs Nucléosidiques………..52

III. 1.1. Azacytidine et Décitabine : 1ère génération………...53

III. 1.2. Guadecitabine (SGI-110) : 2ème génération………...55

III. 1.3. Autres analogues nucléosidiques………...56

III.2. Inhibiteurs Non-Nucléosidiques……….58

III. 2.1. Inhibiteurs non-nucléosidiques naturels………58

III. 2.2. Inhibiteurs non-nucléosidiques synthétiques……….60

Chapitre 2 : RG108 et composés dérivés ……….67

I. Le RG108………..69

I.1. Découverte, synthèse et propriétés………...69

I.2. Étude de la relation structure - activité du RG108……….72

II. Prolino-homo-tryptophanes………...76

II.1. La proline comme matrice conformationnelle………..77

II.2. Caractéristiques des prolino-homo-tryptophanes………79

III. Définition des objectifs de la thèse………...81

Chapitre 3 : Les Prolino-homo-tryptophanes………...83

I. Modélisation moléculaire……….85

I.1. Modélisation moléculaire et drug discovery……….85

I.2. Principes de la modélisation moléculaire……….85

(10)

Sommaire

3

I. 2.2. Champ de force………..88

I. 2.3. Minimisation………..89

I.3. Résultats et discussion………..90

II. Analogues contraints de 1ère génération……….. 93

II.1. Modélisation moléculaire………94

II.2. Résultats et discussion……….98

III. Analogues contraints de 2ème génération………102

III.1. Modélisation moléculaire………102

III.2. Résultats et discussion……….105

IV. Analogues contraints de 3ème génération……….108

IV.1. Modélisation moléculaire……….108

IV.2. Résultats et discussion………..112

V. Étude SAR des analogues contraints de 3ème génération………....114

V.1. Modélisation moléculaire………114 V.2. Résultats et discussions………121 V.2.1 Composés LCPK16o, LCK16p et LCPK22……….121 V.2.2 Composés LCPK21, LCPK21o et LCK21p……….122 VI. Conclusion………...125 Chapitre 4 : Pyrazoles……….127

I. Identification de la matrice pyrazole………..129

I.1 Pertinence de la matrice pyrazole………..129

I.2 Pyrazoles et Méthyltransférases………131

II. La matrice pyrazole………132

(11)

Sommaire

4

II.2 Résultats et discussion………..139

II.2.1. Synthèse de LCPK24………139

II.2.2. Synthèse de LCPK23, LCPK25 et LCPK26………...140

III. Conclusion……….143

Chapitre 5 : Évaluation biochimique………145

I. Évaluation de l’inhibition de la DNMT1………147

I.1. Test biochimique d’inhibition………...147

I.2. Résultats et discussion………148

II. Évaluation de l’affinité………..156

II.1. Expériences d’effet-dose……….156

III. Conclusion………..158

Conclusion Générale ………...159

Partie expérimentale ………...163

(12)

Liste des abréviations

5

Liste des abréviations

A AA acides aminés

Ac anticorps

ADN acide désoxyribonucléique AdoHcy SAH

AdoMet SAM

AMBER assisted model building and energy refinement AML acute myeloid leukaemia

aq. aqueux Arg arginine

ARN acide ribonucléique

ARNm acide ribonucléique messager Asn asparagine

Asp aspartique

ATP adénosine-5’-triphoshate

B Bn benzyle

Boc tert-butyloxycarbonyle BRCA1 breast cancer 1, early onset Bz benzoyl

C °C degré Celsius C concentration cat. catalyseur

CMP chromatin-modifying proteins

CpG

cytosine – phosphate – guanine Cys cysteine

D d doublet Da dalton

dba dibenzyldièneacétone DCM dichlorométhane

(13)

Liste des abréviations

6 dd doublet de doublet

DIEA / DIPEA N,N-diisopropyléthylamine

DMAP para-(N,N-dimethylamino)pyridine DMF N,N-diméthylformamide DMSO dimethylsulfoxyde DNMT DNA methyltransferase DO densité optique dR désoxyribose

DU 145 cellules cancéreuses prostatiques

E éq. Equivalent

ESI electrospray ionization Et éthyle

F FDA Food and Drug Administration G g gramme

Gly glycine

GSK GlaxoSmithKline Glu glutamique

H h heure

HAT histones acétyltransférase HCT 116 cellules de colon cancéreuses HDAC histones déacétylase

HDM histones déméthylase

HMT histones méthyltransférase

HPLC chromatographie liquide haute performance HRP enzyme Horseradish peroxidase

(14)

Liste des abréviations

7

J J constante de couplage

K kb kilo base

L LBM Laboratoire des Biomolécules

LCMS liquid chromatography mass spectrometry LDA lithium diisopropylamide

Leu leucine Lys lysine

M M molaire

m multiplet

m- meta

MBD methyl binding domain

MCF-7 cellules cancéreuses mammaires MDS syndrome myélodysplasique Me méthyle Met méthionine mg milligramme mM millimolaire mn minute

MOE molecular operating environment MS mass spectroscopy

MW molecular weight

N ND non déterminé

nM nanomolaire nm nanomètre

(15)

Liste des abréviations

8

O o- ou o ortho

OD densité optique

OMS organisation mondiale de la santé

P p- ou p para

PCQ motif Proline-Cystéine-Glutamine pdb paire de base azoté

PDB Protein Data Bank Ph phényle

ppm partie par million

PPP phosphoprotéine phosphatase Pro proline

PyBOP benzotriazol-1-yl-oxytripyrrolidinophosphonium hexafluorophosphate

Q q quadruplet

R R.T. room temperature

rac racémique rdt. rendement

RMN résonnance magnétique nucléaire RX rayons X

S s singulet

SAH S-homocystéine SAM S-adénosylméthionine

SAR structure-activity relationship SEM écart moyen

(16)

Liste des abréviations

9

T t triplet

TA température ambiante TET teen-eleven translocation TC50 concentration toxique à 50%

TFA acide trifluoroacétique THF tétrahydrofurane TIS triiopropylsilane

TMB 3,3',5,5'-tetramethylbenzidine tR temps de rétention

TPSA topological polar surface

U µM micromolaire

uma unité de masse atomique

(17)
(18)

Introduction Générale

11

Introduction Générale

Le cancer constitue aujourd’hui, par sa fréquence, une inquiétude pour tous les indivi-dus, un enjeu majeur pour les politiques de santé publique, et un défi de taille pour la commu-nauté scientifique. Au cours du XXème siècle l’incidence du cancer a augmenté brutalement, notamment à cause de l’évolution des modes de vie et de l’industrialisation des sociétés mo-dernes ; mais la maladie fait son apparition dès la préhistoire. En 2016, un ostéosarcome, c’est-à-dire une tumeur osseuse, a été identifiée sur un hominidé du Paléolithique vieux d'1,7 million d'années. La plus ancienne description de la maladie remonte à 3000 ans av. JC en Egypte antique et se trouve dans le papyrus d’Edwin Smith, dans lequel est décrit un état pathologique qui est aujourd’hui identifié comme étant un cancer.1

Cette pathologie constitue la deuxième cause de mortalité dans le monde, avec 8,8 millions de morts en 2015, soit près d’un décès sur six (schéma 1). Selon les estimations de l’OMS, la

mortalité devrait continuer à augmenter pour atteindre 13,1 millions de morts en 2030. L’impact économique est également colossal, puisqu’en 2010 le coût annuel du cancer a été estimé à 1160 milliards de dollars.2

Schéma 1 : La mortalité dans le monde selon les types de cancers en 2012

Le cancer appartient à la famille des maladies néoplasiques et se caractérise par un dérè-glement de la division cellulaire menant à une prolifération cellulaire anormale incontrôlée. Dans ce cas, l’absence de réponses aux signaux qui régulent à la fois leur croissance et leur

1 https://www.nlm.nih.gov/news/turn_page_egyptian.html (accessible le 18/07/18)

(19)

Introduction Générale

12 processus de mort cellulaire programmée (apoptose), engendre le dérèglement de la division de certaines cellules.3 À la suite de leur prolifération excessive, les cellules anormales finissent par

former une masse de tissu excédentaire que l’on nomme tumeur. Leur apparition peut être due à de nombreux facteurs externes (facteurs comportementaux, facteurs environnementaux, entre autres) ou internes (mutations héréditaires, hormones, par exemple). Ces facteurs de risque peu-vent agir en synergie pour favoriser l’apparition et le développement du cancer.

De multiples types de cancer ont été caractérisés à ce jour et chacun possède ses caractéristiques propres, avec des causes, des évolutions ainsi que des conséquences différentes. Ils peuvent également prendre plusieurs aspects :

- Soit sous forme de maladie hématologique maligne, atteignant le sang et le système lymphatique avec dissémination des cellules malignes dès leur apparition.

- Soit sous forme de tumeur solide au niveau d’un organe ou d’un tissu. Toutes les tumeurs solides ne sont pas cancéreuses. Si la prolifération se fait sans envahisse-ment des tissus voisins ni dissémination on parle alors de tumeur bénigne (non can-céreuse). A l’inverse, certaines cellules peuvent quitter leurs tissus d’origine et co-loniser les tissus adjacents via les vaisseaux lymphatiques et sanguins pour former un cancer secondaire appelé métastase. Dans ce cas on parle de tumeur maligne (cancéreuse).

Le processus de transformation tumorale est complexe et a de multiples causes. L’ap-parition de mutations génétiques (héréditaires ou isolées), affectant la structure de certains gènes clés (dits proto-oncogènes) essentiels au bon fonctionnement cellulaire, est au cœur de la transformation cancéreuse. Leur altération génétique mène à l’activation d’oncogènes, impli-qués dans la multiplication et la croissance cellulaire, et dont l’expression favorise le cancer. A l’inverse, les gènes suppresseurs de tumeurs ont pour rôle de protéger contre le cancer, en frei-nant la croissance ou en induisant l’apoptose. Si ces gènes suppresseurs ne fonctionnent pas correctement, l’ensemble des processus de croissance, de division et d’apoptose sont alors dé-réglés. De plus, la présence d’anomalies au sein des gènes de réparation de l’ADN aboutit à l’accumulation de mutations car ces dernières ne sont plus réparées.

(20)

Introduction Générale

13 Par ailleurs, la carcinogénèse est un processus long qui se développe en trois phases4 :

- Phase d’initiation : sous l’influence d’agents carcinogènes ou de manière inexpli-quée, la cellule perd sa capacité à reconnaître et à réparer les anomalies génétiques. - Phase de promotion : au contact de certaines substances dites promoteurs la cellule

accumule les lésions. Les promoteurs ne causent pas le cancer eux-mêmes mais fa-vorisent le passage à l’état cancéreux d’une cellule ayant déjà subi une initiation. - Phase de progression : la cellule transformée acquiert un fonctionnement et une

croissance anormal et devient cancéreuse.

Au vu de leur grande diversité, il est fondamental que les traitements soient adaptés aux carac-téristiques spécifiques de chaque cancer. On distingue de nombreuses thérapies anticancéreuses parmi lesquelles la chirurgie et la radiothérapie constituent les deux traitements principaux pour les tumeurs solides ; alors que la chimiothérapie n’est pas systématique et se situe dans une stratégie de soutien aux précédentes thérapies. Elle est cependant curative en hématologie où elle reste la seule option de traitement. Différents types d’agents anticancéreux sont utilisés en chimiothérapie (agents cytotoxiques / alkylant / intercalant / antimétabolites, etc.) mais de nou-velles classes de thérapies font leur apparition. Il s’agit notamment de l’immunothérapie, dont le rôle est de stimuler et de renforcer le système immunitaire ; et de l’hormonothérapie qui consiste à bloquer l’action et la production des hormones naturelles afin de limiter la croissance des cellules cancéreuses.

Malgré les avancées de la recherche, les chiffres du cancer restent affolants. Pourtant 30 à 50% d’entre eux pourraient être évités en limitant l’exposition aux différents facteurs de risques et aux cancérogènes.5 En effet, le cancer apparaît lors de l’interaction entre différents

facteurs qui peuvent être internes ou externes. Parmi les facteurs internes on peut citer le vieil-lissement, car avec l’âge les mécanismes de réparation deviennent moins efficaces ; et l’héré-dité dans le cas de prédispositions génétiques, où la mutation de gènes spécifiques (BRCA 1 et BRCA 2) se fait au niveau des cellules germinales et sera ensuite transmise à la descendance.

4 Siddiqui, I. A.; Sanna, V.; Ahmad, N.; Sechi, M.; Mukhtar, H. New York Academy of Science, 2015, 1-12 5 Ferlay et al. GLOBOCAN 2012 Cancer Incidence and Mortality Worldwide: IARC Cancer Base International

(21)

Introduction Générale

14 Les facteurs externes sont liés à l’environnement et au mode de vie de l’individu. On distingue donc plusieurs types de cancérogènes :

- Cancérogènes chimiques (contamination par diverses substances chimiques inha-lées, ingérées ou par contact)

- Cancérogènes physique (rayonnement UV, radiation ionisantes)

- Cancérogènes biologiques (virus VIH et hépatite B, bactéries, parasites)

L’impact environnemental sur l’incidence du cancer est considérable. Les principaux facteurs de risques comportementaux et alimentaires sont responsables d’environ un tiers des décès par an.6 Il s’agit particulièrement de la sédentarité, de l’obésité, de la consommation excessive de

tabac et d’alcool et de la faible consommation de fruits et de légumes. Selon l’OMS, la modifi-cation des régimes alimentaires ainsi que la pollution des sols, de l’eau et de l’air par des subs-tances chimiques cancérogènes explique 1 à 4% des cancers.7 En effet, il est aujourd’hui admis

que dans leur ensemble ces facteurs environnementaux sont susceptibles de perturber les pro-cessus de régulation épigénétiques au sein du génome, et en conséquence, d’engendrer une mo-dification de l’expression des gènes.

De nombreuses études tendent à prouver que les altérations épigénétiques sont une des causes majeures à l’origine de nombreux cancers.8 Dès lors, le cancer apparaît aussi bien

comme une pathologie génétique que comme une pathologie basée sur un dysfonctionnement épigénétique. Ainsi, Pfister et Asworth, dans de récentes études, ont clairement démontré que les cellules cancéreuses présentent couramment des profils épigénétiques modifiés suite à la mutation de gènes codant pour des protéines fondamentales impliquées dans ces processus.9

Par ailleurs, l’aberration des profils de méthylation de l’ADN reste la marque majoritaire dans de nombreux cancers.10 Le vieillissement et les habitudes alimentaires seraient en partie

res-ponsables de cette aberration, mais le mécanisme demeure encore inconnu. Néanmoins, la no-tion selon laquelle l’épigénétique joue un rôle capital dans le développement cancéreux repose à l’évidence sur un socle scientifique de plus en plus solide.

6 Site OMS http://www.who.int/cancer/prevention/fr/ (accessible le 18/07/18) 7 Source CIRC/OMS, 2003

8 Agrawal, K., et al. Pharmacology & Therapeutics 2018, https://doi.org/10.1016/j.pharmthera.2018.02.006 9 Pfister, S. X.; Ashworth, A. Nature Reviews 2017, 16, 241-263

(22)

Introduction Générale

15

Dans ce manuscrit, nous définirons dans un premier temps la notion d’épigénétique au travers de rappels bibliographiques. Les chapitres suivants traiteront plus particulièrement des DNMT, enzymes impliquées dans le mécanisme épigénétique de méthylation de l’ADN, et des composés susceptibles t’interagir avec elles. Une attention particulière sera portée sur le RG108 et ses analogues. La seconde partie du manuscrit couvre l’ensemble des travaux réali-sés au cours de cette thèse. Nous aborderons le design et la synthèse d’inhibiteurs des DNMT, en nous concentrant sur les composés prolino homo tryptophanes et pyrazoles. Enfin la der-nière section porte sur l’évaluation biochimique des composés synthétisés et l’analyses des résultats obtenus.

(23)
(24)

17

Chapitre 1

(25)
(26)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

19

I. L’épigénétique : symphonie du vivant

11

I.1. Définition et origines

Le philosophe Aristote (384-322 av. JC) expose à l’Antiquité la théorie de l’épigénèse, selon laquelle la complexité des organismes émerge progressivement au cours du développe-ment.12 Cependant, c’est le biologiste britannique Conrad Hal Waddington (1905-1975),

con-sidéré comme « le père de l’épigénétique » qui, le premier, évoque la régulation de l’expression des gènes et la place qu’elle occupe au cœur du développement des organismes. Il cherche à comprendre comment un unique jeu de gènes, le génotype, en interagissant avec l’environne-ment, conduit à plusieurs phénotypes, soit des caractéristiques morphologiques et fonction-nelles différentes. En 1942, Waddington redéfinit le terme épigénétique, du Grec « epi » qui signifie « au-dessus de » ou « au-delà de » pour traduire le fait que l’épigénétique agit « au-delà » de la génétique. Il définit un trait épigénétique comme « un phénotype stable et transmissible

qui résulte de changement dans un chromosome sans altération de la séquence d’ADN ».13 Pour

illustrer son propos, il développe la métaphore de ‘paysage épigénétique’ (« epigenetic

land-scape ») fait de monts et de vallées dans lequel les cellules « empruntent différents chemins »

et se différencient au fur et à mesure.14 Bien que nos cellules possèdent toutes la même identité

génétique, elles vont suivre différentes voies de différenciation pour donner plus de 100 phé-notypes cellulaires différents. Cette diversité résulte de profils différentiels d’expression de notre génome qui sont mis en place pendant l’embryogénèse et ensuite maintenus. La machi-nerie épigénétique va mettre en place au cours du développement des marques épigénétiques spécifiques qui permettront ensuite à un même génome de s’exprimer différemment.

L’exemple des abeilles est fréquemment cité pour illustrer la diversification d’individus pour-tant dotés d’un génome unique et appartenant à une population génétiquement homogène. En effet, la reine et les ouvrières ont le même génome mais leur alimentation est différente puisque

11 Joel de Rosnay, La symphonie du vivant : comment l’épigénétique va changer votre vie, Les liens qui libèrent, 2018

12 Collège de France https://www.college-de-france.fr/site/edith-heard/Qu-est-ce-que-l-epigenetique-d-Aristote-a-Waddington-.htm (accessible le 21/07/18)

13 Berger, S. L.; Kouzarides, T.; Shiekhattar, R.; Shilatifard, A. Genes Dev. 2009, 23, 781-783

14 (a) Noble, D. The Journal of Experimental Biology 2015, 218, 816-818 (b) Slack, J. M. W. Nat. Rev. Genet.

(27)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

20 seule la reine reçoit de la gelée royale. Alors que les ouvrières ont une espérance de vie de 40 jours à 6 mois, la reine peut vivre jusqu’à 5 ans. Sous l’influence d’un comportement alimen-taire, l’expression des gènes a été modifiée par les mécanismes épigénétiques, montrant que l’environnement et les modes de vie affectent les processus épigénétiques.

L’épigénétique connaît, tant au sein du monde académique que de l’industrie pharma-ceutique, un essor considérable depuis une vingtaine d’années ; illustré par la croissance expo-nentielle des publications qui lui sont consacrées aujourd’hui (plus de 8000 en 2017) et le nombre de composés en phase clinique (schéma 2). Par exemple, la société pharmaceutique

GSK – GlaxoSmithKline - a aujourd’hui 5 molécules en phase clinique pour le traitement des cancers épigénétiques.15 Le domaine de l’épigénétique comporte une multitude d’enjeux à la

fois scientifique, éthiques, sociétaux, mais également juridiques. Son impact dans le domaine de la santé publique, ainsi que ses conséquences juridiques et scientifiques, sont tels que l’Of-fice Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) a effec-tué plusieurs rapports sur le sujet entre 2014 et 2016.16

Schéma 2 : Nombre de publications par an sur l'épigénétique depuis 196017

La régulation épigénétique permet un changement de l’expression du génome sans alté-ration de la séquence nucléotidique, au contraire d’une mutation. Au niveau moléculaire, ce changement se traduit par des modifications chimiques de la chromatine, acquises sous l’action

15 Site GSK https://www.gsk.com/media/3599/cowen-37th-annual-healthcare-conference-slides.pdf

16 (a) Rapport de l’OPECST “Les enjeux et les perspectives de l’épigénétique », Juin 2014 (b) Rapport de l’OPECST “Les enjeux et les perspectives de l’épigénétique dans le domaine de la santé », Octobre 2016 https://www.senat.fr/notice-rapport/2016/r16-033-2-notice.html (accessible le 21/07/18)

17 Graphique réalisé à partir de data Web of Science

0 2000 4000 6000 8000 10000 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020

Nombre de publications sur

l'épigénétique depuis 1960

(28)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

21 de protéines. La chromatine est la structure d’empaquetage de la molécule d’ADN au sein du noyau d’une cellule eucaryote. Son unité de base, le nucléosome, est composé d’un cœur de protéines structurales octamérique nommées histones, autour duquel est enroulée la double hé-lice d’ADN (environ 150 paires de bases). Dans le nucléosome, les histones sont assemblées en deux hétérodimères [H2A, H2B] et un hétérotétramère [H3, H4]. Les interactions ADN / histones sont de nature électrostatique puisque les groupements phosphates de l’ADN sont char-gés négativement alors que les histones sont riches en acides aminés basiques (lysine et argi-nine), chargés positivement à pH physiologique. De plus, les marques épigénétiques se diffé-rencient des modifications génétiques par leur caractère réversible et transmissible au fil des divisions cellulaires d’une part et, d’autre part, à la descendance.18 Les nombreuses protéines

impliquées dans les processus épigénétiques sont autant de cibles thérapeutiques pour lesquelles on peut espérer la mise au point de thérapies, notamment dans le domaine de l’oncologie. Les protéines impliquées ainsi que les modifications seront détaillées par la suite.

Malgré les avancées introduites par le séquençage du génome humain (1990-2003), la régulation des gènes reste à élucider. L’épigénétique pourrait-elle répondre à des probléma-tiques que la génétique n’a pas pu résoudre ? En effet, la génétique se heurte à ses limites dans la compréhension des pathologies à déterminisme génétique complexe et multifactoriel, où les anomalies génétiques causales ne sont pas toujours connues. Dans ce contexte, l’épigénétique permet d’apporter des informations supplémentaires sur la régulation de l’expression des gènes, où les marqueurs épigénétiques pourraient jouer un rôle crucial dans le développement et le maintien de l’identité cellulaire. On définit le génome codant comme l’ADN qui est transcrit en ARN messager, lui-même traduit en protéine. Or à la suite du programme de séquençage du génome humain, on constate que seul 3% du génome est codant, c’est-à-dire utilisé, si bien que 97% de notre génome est non-codant, et sera qualifié pendant longtemps de « poubelle du gé-nome » ou « junk DNA ».19 Grâce aux nouvelles technologies de séquençage, on sait

au-jourd’hui que ce génome non-codant est tout de même transcrit à 70% en petits ARN non tra-duits qui régulent spécifiquement l’expression des gènes et des protéines, démontrant ainsi la complexité des rapports entre génétique et épigénétique.

18 (a) Wright, J. Nature 2013, 498, 10-11 (b) Jurkowska, R. Z.; Jurkowski, T. P.; Jeltcsh, A. ChemBioChem. 2011,

12, 206–222

19 Rapport de l’OPECST “Les enjeux et les perspectives de l’épigénétique dans le domaine de la santé », Octobre 2016

(29)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

22 Chaque cellule présente un état épigénétique particulier, appelé épigénome. La mise en place de ce code épigénétique, en parallèle du code génétique, répond à des mécanismes com-plexes et a de multiples rôles biologiques que nous allons maintenant développer.

I.2. Rôles biologiques, mécanismes et protéines impliquées

Nous avons vu précédemment que l’épigénétique est nécessaire à la différenciation cellu-laire et que l’environnement a également un impact. En fonction du phénotype cellucellu-laire, les marques épigénétiques varient d’une cellule à l’autre. Ainsi toutes les cellules n’expriment pas les mêmes gènes à partir d’un même génome. Pour cela, les cellules reçoivent en permanence des signaux de l’environnement interne et externe et produisent toutes sortes de molécules en réponse à ces stimuli, permettant l’établissement de traits épigénétiques stables en 3 stades20 :

1. Le « géniteur épigénétique » : la cellule reçoit un signal environnemental qui sera con-verti en une voie de signalisation intracellulaire pour activer un « initiateur tique ». Ce signal est passager, il est nécessaire pour déclencher un phénotype épigéné-tique mais ne permet pas sa mise en place ni son maintien.

2. « L’initiateur épigénétique » : une fois activé, il traduit le premier signal reçu pour en-traîner la mise en place de modifications locales de l’environnement chromatinien, dans une région précise du génome (protéines liant l’ADN, ARN non codants, par exemple). 3. Le « mainteneur épigénétique » : il permet de maintenir l’état épigénétique de la

chro-matine grâce à différentes modifications chimiques de l’ADN et des histones

Le rôle de l’épigénétique est de réguler l’expression des gènes en modifiant l’état trans-criptionnel de la chromatine. Certaines protéines vont induire des modifications chimiques ca-ractéristiques sur l’ADN ou les molécules d’histones, et la chromatine adoptera un état con-densé, transcriptionnellement inactif. Cet état bloque l’expression du gène car il ne permet pas aux facteurs de transcription d’accéder au promoteur et d’initier la transcription. À l’inverse, sous l’action d’autres protéines qui engendrent différentes marques chimiques, la chromatine adoptera un état décondensé, transcriptionnellement actif. Au contraire, cet état autorise la transcription du gène car les facteurs de transcription peuvent se fixer au promoteur. C’est

(30)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

23 l’équilibre entre les états condensé et décondensé qui permet ou non l’expression des gènes, sous l’influence de protéines spécifiques (schéma 3).

Schéma 3 : États de la chromatine sous l’influence des marques épigénétiques21

La régulation épigénétique se fait grâce aux protéines de modifications de la chromatine

(chro-matin-modifying proteins - CMP) qui vont contrôler la conformation de la chromatine, ouverte

ou fermée, par trois mécanismes biochimiques principaux :22

- La modification de l’ADN (méthylation)

- Les modifications post-traductionnelles des histones (acétylation, méthylation, phosphorylation, ubiquitination)

- Le remodelage des interactions entre l’ADN et les histones au sein du nucléosome

21Perry, A. S. et al. Nat. Rev. Urol. 2010

(31)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

24 Chacune de ces voies épigénétiques implique des enzymes bien distinctes, que l’on peut classer comme suit23 (schéma 4 et 5) :

- Les « Writers » : caractérisant les enzymes qui transfèrent une modification sur l’ADN ou les histones

- Les « Editors », « Modifiers » ou « Erasers » : ces enzymes modifient ou suppriment une modification présente au niveau de l’ADN ou des histones

- Les « Readers » : enzymes qui font le lien entre les modifications et des complexes pro-téiques pour exercer un effet sur la transcription.

Schéma 4 : Enzymes impliquées dans les voies de modification de l’ADN20

23 Plass, C.; Pfister, S. M.; Lindroth, A. M.; Bogatyrova, O.; Claus, R.; Lichter, P. Nat. Rev. Genet. 2013, 14, 765-779

(32)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

25

Schéma 5 : Enzymes impliquées dans les voies de modification des histones20

Nous allons maintenant décrire plus en détail les différentes modifications de l’ADN et des histones, ainsi que les enzymes impliquées. Dans un premier temps, nous parlerons de la mé-thylation (ADN, histones), puis de l’acétylation et de la phosphorylation des histones. Dans un second temps, nous nous concentrerons sur les complexes de remodelage de la chromatine.

I.2.1. Méthylation de l’ADN et des histones

Des profils de méthylation bien définis sont présents au niveau de la chromatine. Les groupements méthyles peuvent être ajoutés sous l’action de différentes enzymes, soit au niveau de l’ADN soit sur les histones. Nous verrons d’abord la méthylation de l’ADN, avant de détail-ler celle des histones.

La méthylation de l’ADN est une des voies principales de régulation épigénétique et a de nombreux rôles biologiques que nous aborderons dans la partie suivante. Ce sont les DNMT – DNA Méthyltransférases - qui catalysent cette réaction par transfert d’un méthyle à partir d’un cofacteur, le SAM, au niveau des bases azotées cytosine, plus particulièrement dans des régions riches en dinucléotides cytosine-guanine. Il existe plusieurs types de DNMTs, dont les

(33)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

26 principales sont la DNMT1, la DNMT3A et la DNMT3B. Certaines zones de l’ADN sont peu méthylées, d’autres présentent de forts taux de méthylation. Dans le cas d’un gène qui doit s’exprimer, on observe en général que les régions promotrices en amont du gène sont hypomé-thylées, pour permettre la transcription, alors que le corps du gène sera hyperméthylé, pour éviter que la transcription ne commence n’importe où. Il est important de noter qu’il n’y a pas un état de méthylation global de l’ADN mais qu’il s’agit de modèles régio-spécifiques, mis en place par les DNMT au cours de l’embryogénèse et maintenus tout au long de la vie de l’orga-nisme par ces mêmes enzymes. Cependant, cette modification est réversible, grâce à l’action de déméthylases : les TET 5-méthylcytosine hydroxylase.24 Ces dernières catalysent une suite

d’oxydations successives de la 5-méthylcytosine (5mC) en 5-hydroxyméthylcytosine (5hmC) d’abord, puis en formyle et carboxycytosine. À la suite de ce mécanisme, l’action d’une décar-boxylase ou un processus de réparation de l’ADN par excision de la base azotée modifiée, per-met de retrouver la cytosine native (schéma 6).

Schéma 6 : Déméthylation active de la cytosine par les enzymes TET

En dernier lieu, les effets de la méthylation de l’ADN sur l’expression des gènes sont dus à l’intervention de protéines qui reconnaissent la marque 5-méthylcytosine et induisent un chan-gement de la chromatine.25 Parmi les protéines qui lient l’ADN méthylé on trouve la famille

des « methyl-binding domains » (MBD) et les protéines en doigt de zinc (ZnF). La famille MBD comprend les protéines MeCP2 et MBD1- 4, qui lient l’ADN méthylé et, par le moyen de leur domaine de répression de la transcription, interagissent avec différents complexes répresseurs

24 Cadet, J.; Wagner, J.R. Mutation Research 2014, 18–35, 764–765 25 Hamidi, T.; Singh, A. K.; Chen, T. Epigenomics 2015, 7, 247-265

(34)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

27 qui bloquent la transcription du gène. Les protéines en doigt de zinc vont jouer un rôle de pro-tection des profils de méthylation lors de la vague de déméthylation lors de la pré-implantation de l’embryon. Cependant, d’autres protéines vont intervenir pour recruter les DNMT lors de la réplication de l’ADN.

La méthylation des histones sur leurs résidus arginine et lysine est une autre voie pré-pondérante de la régulation épigénétique. Cette modification est catalysée par les enzymes HMT - Histone méthyltransférases, que l’on peut séparer en deux familles : les HKMTs – His-tones Lysine méthyltransférases et les HRMTs – HisHis-tones Arginine méthyltransférases. Toutes deux utilisent également le cofacteur SAM comme donneur universel du groupe méthyle, et le transfert au niveau de l’azote terminal des chaînes latérales des acides aminés basiques. Il existe plus de 60 types différents d’HMTs, que nous ne citerons pas ici, et chaque famille est respon-sable de la méthylation d’un ou deux résidus lysine ou arginine, qui composent les queues des histones. Les HMTs peuvent mono- (me1), di- (me2) ou tri- (me3) méthyler les lysines, alors que les arginines sont mono-méthylées. Chaque état de méthylation d’une lysine ou d’une ar-ginine particulière peut entraîner des conséquences très différentes sur l’activation ou la répres-sion de la transcription, la réplication de l’ADN et sa réparation. En fonction de la nature de l’histone (H3, H4 etc.), du résidu touché et du nombre de méthyl ajoutés (mono-, di- ou trimé-thylation), la chromatine adopte un état transcriptionnellement actif ou non. Par exemple, la marque H3K4me3 c'est-à-dire triméthylation (me3) de la lysine (K) en position 4 de l’histone H3, mène à une chromatine ouverte ; alors que H3K9me3 mène à une chromatine fermée. Les profils de méthylation des histones peuvent aussi être altérés par l’action de HDM – Histone déméthylases - qui opèrent via un mécanisme d’oxydation du groupe méthyle (schéma 7)26.

Elles existent en deux sous-groupes : les KDM (« lysine-specific histone déméthylases »), qui déméthylent les lysines mono- ou diméthylées ; et les JHDM, protéines à domaine Jumonji (« Jumonji histone déméthylases »), qui déméthylent les lysines mono-, di- ou triméthylées.27

26 Walport, L. J.; Hopkinson, R. J.; Chowdhury, R.; Schiller, R.; Ge, W.; Kawamura, A.; Schofield, C. H. Nature

Communication DOI: 10.1038/ncomms11974

27 Plass, C.; Pfister, S. M.; Lindroth, A. M.; Bogatyrova, O.; Claus, R.; Lichter, P. Nat. Rev. Genet. 2013, 14, 765-779

(35)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

28

Schéma 7 : Déméthylation oxydative des lysines par les KDMs

I.2.2. Acétylation et phosphorylation des histones

L’acétylation et la phosphorylation des résidus lysine des histones constituent une autre forme de modification en parallèle de la méthylation. Dans ces cas également, des profils d’acé-tylation et de phosphorylation sont bien définis et doivent être respectés pour conserver l’ho-méostasie du génome. Nous présenterons rapidement l’acétylation, avant de faire de même avec la phosphorylation.

Contrairement à la méthylation, qui peut avoir des effets opposés, l’acétylation des his-tones va activer la transcription de manière ubiquitaire. Cette marque mène à un état ouvert de la chromatine, augmentant son accessibilité pour divers facteurs de transcription. En effet, le groupement acétyle va neutraliser les charges positives au niveau des résidus lysines et argi-nines, ce qui va avoir pour conséquence de réduire les interactions électrostatiques entre les histones et l’ADN, chargé négativement. Les HAT - Histone acétyltransferases - catalysent l’ajout d’un acétyle sur les histones à partir de l’acétyle coenzyme A (acétyl-CoA). Le méca-nisme est séquentiel, à la suite de la formation d’un complexe ternaire entre l’acétyl-CoA, la lysine de l’histone et l’enzyme HAT, le groupement carboxylate d’un glutamate du site actif de l’enzyme va déprotoner la lysine, permettant son attaque nucléophile directe sur le carbonyle de l’acétyle CoA. Il existe plusieurs familles de HAT, dont les deux principales sont Gcn5 et MYST, que nous ne détaillerons pas ici.28 Les HDAC - Histone déacétylases - seront au

con-traire responsables du clivage des acétyles au niveau des lysines et tendront à réprimer la trans-cription.

28 Pour plus d’informations voir : (a) Berndsen, C. E. et al. Biochemistry 2007, 46, 623-629, (b) https://www.bio-syn.com/tew/mechanisms-of-protein-lysine-and-arginine-modifications.aspx

(36)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

29 Les histones peuvent aussi être phosphorylés par plusieurs protéines kinases au niveau de leurs acides aminés aliphatiques à fonction alcool (résidu sérine, thréonine et tyrosine), de manière ATP-dépendante.29 Cette modification joue un rôle majeur dans les processus de

répa-ration de l’ADN (phosphorylation de l’histone H2A), lorsque celui-ci est endommagé, mais également dans la compaction de la chromatine et la régulation de la transcription (phosphory-lation des histones H3 et H2B). Le mécanisme implique d’abord la déprotonation du groupe-ment hydroxy de l’acide aminé, générant ainsi un fort nucléophile qui va attaquer le phosphore électrophile et extraire un des phosphates de l’ATP en présence d’ion magnésium (II) (schéma 8).30

Schéma 8 : Exemple de la phosphorylation d’un résidu sérine

La déphosphorylation sera médiée par des phosphatases, tel que la PPP - PhosphoProtéine

Phosphatase.

29Rossetto, D. ; Avvakumov, N. ; Côté, J. Epigenetics 2012, 7, 1098-1108

30

https://www.thermofisher.com/us/en/home/life-science/protein-biology/protein-biology-learning-center/pro-tein-biology-resource-library/pierce-protein-methods/phosphorylation.html#/legacy=www.piercenet.com (acces-sible le 23/07/18)

(37)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

30 L’ensemble des modifications présentes sur la queue des histones vont ensuite être reconnues par une série de protéines « reader » qui vont lire les marques et traduire l’information qu’elles contiennent en profil transcriptionnel distinct et cela par l’altération de l’état chromatinien. Cer-taines protéines vont lire les groupements méthyles, d’autres reconnaitrons les groupements acétyles ou phosphates.31

Le tableau et le schéma suivants récapitulent l’ensemble des protéines « Writers », « Erasers » et « Readers » répertoriées à ce jour qui sont impliquées dans les modifications de l’ADN et des histones (Tableau 1, schéma 9).

« Writers » « Erasers » « Readers »

ADN DNMTs (1-3) TETs (1-3)

MeCP2

Proteins with methyl-bind-ing domains MBD Histones : o Méthylation o Acétylation o Phosphorylation HMTs / HKMTs HATs Kinases HDMs / KDMs HDACs PPPs TAF3, DIDO1, CHD Protéines à bromodomaine Phosphatases Tableau 1

(38)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

31

Schéma 9 : Modulation des modifications covalentes de la chromatine32

I.2.3. Complexe de remodelage de la chromatine

Le remodelage de la chromatine, que nous allons décrire rapidement dans cette partie, constitue le dernier mécanisme principal de la régulation épigénétique.

Les complexes de remodelage de la chromatine ou chromatin remodeling complexes CRCs fonctionnent comme des machines macromoléculaires ATP-dépendantes, car elles comportent plusieurs sous-unités et utilisent l’énergie de l’hydrolyse de l’ATP pour perturber localement l’association entre ADN et histones. En conséquence, ils permettent de déplacer les nucléo-somes le long de la chromatine et d’enlever ou échanger des nucléonucléo-somes.33 Ainsi, ces

com-plexes rendent l’ADN et les histones accessibles pour des protéines qui ont besoin d’y accéder lors de mécanismes cellulaires. Par ailleurs, ils ont un rôle essentiel dans tous les processus

32 Jones, P. A. ; Issa, J-P. J. ; Baylin, S. Nat. Rev. Epigenetics 2016, 17, 630-641 33 Hargreaves, D. C.; Crabtree, G. R. Cell Research 2011, 21, 396-420

(39)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

32 cellulaires, particulièrement lors du développement embryonnaire incluant la pluripotence, le développement cardiaque, la morphogénèse dendritique et le renouvellement des cellules souches cérébrales. Il existe plusieurs familles de complexes, incluant un grand nombre de pro-téines différentes, qui ne seront pas développés ici. Ces modélisateurs ATP-dépendants sont requis pour la transcription et catalysent les glissements et les échanges des nucléosomes. Ils sont également critiques pour de nombreux autres phénomènes cellulaires, tells que la réplica-tion, la recombinaison et la réparation de l’ADN.

Nous avons vu que les modifications épigénétiques précédemment décrites sont établies selon des profils précis et mettent en place des cartes épi-génomiques, essentielles au bon fonc-tionnement des cellules et donc de l’organisme. D’autre part, l’identification de ces mécanismes épigénétiques a permis, dans le domaine clinique, de renouveler l’étiologie de plusieurs mala-dies et d’adapter leur traitement. En effet, de nombreuses études ont montré que l’apparition de mutations au sein des gènes codant pour les protéines impliquées dans la mise en place de ces profils épigénétiques, engendre diverses pathologies. De ce fait, le dressage de ces cartes épi- génomiques pourraient permettre l’identification de biomarqueurs, qui seraient utilisés à des fins de médecine personnalisée et préventive, pour prédire la réponse à un traitement, ou encore dans le développement d’outils pour le diagnostic et le pronostic.34 Pour clore ce chapitre nous

explorerons la nature des diverses mutations qui touchent les profils épigénétiques, les consé-quences qu’elles génèrent, ainsi que les stratégies développées pour les contrer.

I.3. Mutations des CMPs

Il est aujourd’hui clair que les variations génétiques et épigénétiques, causées entre autres par les facteurs environnementaux et le mode de vie, influencent ensemble notre santé et l’apparition de pathologies, y compris psychiatriques.35 L’altération de l’épigénome, suite à la

mutation de gènes codants pour des protéines épigénétiques, sera transmis au fil des divisions cellulaires et entraînera de multiples pathologies tels que : le diabète, les maladies cardio-vas-culaires, les maladies auto-immunes, les troubles comportementaux (schizophrénie, troubles bipolaires) ou encore le cancer.36 Cependant, la compréhension de ces altérations n’en est qu’à

34 Yan, W.; Herman, J. G.; Guo, M. Epigenomics 2016, 8, 119-133

35 Zhang, T-Y.; Hellstrom, I. C.; Bagot, R. C.; Wen, X. Diorio, J.; Meaney, M. J. The Journal of Neuroscience

2010, 30, 13130 –13137

(40)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

33 ses débuts, même si ces dernières sont de mieux en mieux connues dans le cas des cancers. Certaines mutations déclencheront l’initiation de la tumeur, d’autres favoriseront sa progression et le développement de métastases, ou la résistance aux traitements (Schéma 10).

Schéma 10 : Transmission des traits épigénétiques acquis

Dans un premier temps nous verrons la nature et les conséquences de ces mutations, ensuite nous passerons à la nature des traitements.

I.3.1. Nature et conséquences des mutations épigénétiques

Les mutations vont toucher les gènes codants pour toutes les protéines majeures impli-quées dans les processus épigénétiques tels que :

- Les enzymes modifiant l’ADN (DNMTs, TETs)

- Les enzymes modifiant les histones (HMTs, HACs, HDMs, HDACs, kinases, phos-phatases)

- Les protéines « readers »

- Les complexes de remodelage des nucléosomes / de la chromatine

Elles peuvent engendrer soit des gains de fonctions, soit des pertes de fonctions, ce qui va pro-voquer une instabilité génomique et amorcer le développement d’une pathologie. Les gains de fonctions se traduisent par une surexpression des DNMTs menant à leur hyperactivité, tandis que les pertes de fonctions ont l’effet inverse.

(41)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

34 Dans le cas de la méthylation de l’ADN, on sait depuis près de 30 ans que les cellules cancéreuses arborent des profils anormaux, avec de manière générale, une hypométhylation globale du génome, mais avec une hyperméthylation au niveau des régions promotrices des gènes.37 Un promoteur est défini comme une petite séquence d’ADN, le plus souvent située en

amont de la partie transcrite d’un gène, impliquée dans la fixation des facteurs nécessaires à l’initiation de la transcription. Naturellement, cette région présente un faible taux de méthyla-tion pour permettre la fixaméthyla-tion des facteurs et la transcripméthyla-tion du gène. Au sein des cellules cancéreuses, l’instabilité génomique va être générée d’une part, par l’activation des gènes on-cogènes en raison de l’hypométhylation globale du génome ; et d’autre part, par le blocage de la transcription de certains gènes spécifiques, comme les gènes suppresseurs de tumeur, suite à l’hyperméthylation des séquence promotrices.38 L’hyperméthylation des promoteurs peut être

due soit à des mutations pertes de fonction des gènes codants pour les enzymes déméthylases TETs ; ou au contraire à un gain de fonction des gènes codants pour les enzymes méthyltrans-férases DNMTs, menant à leur surexpression.39 Dans le cas de l’hypométhylation globale du

génome, elle peut être la conséquence d’une mutation perte de fonction du gène codant pour une des DNA méthyltransférases, la DNMT3A.40 La cause de la modification aberrante des

profils de méthylation demeure mal connue, mais on peut en partie l’attribuer au vieillissement et aux habitudes alimentaires.41

En parallèle, les mutations affectant les complexes de remodelage de la chromatine pro-meuvent le développement cancéreux par la perturbation de la transcription des gènes impliqués dans le contrôle de la prolifération et de la différenciation cellulaire, mais aussi en dérégulant les mécanismes de réparation de l’ADN.42 En conséquence, la chromatine ne peut plus être

restructurée lors de la division cellulaire par exemple, pour laisser aux diverses enzymes et protéines un libre accès à l’ADN et aux histones. En conséquence, on aura une altération des phénomènes de : transcription, traduction, réparation et réplication de l’ADN, contrôle du cycle cellulaire et apoptose.

37 Arrowsmith, C. H. et al. Nat. Rev. Drug Discov. 2012, 11, 384-400 38 Pfister, S. X.; Ashworth, A. Nat. Rev. Drug Discov. 2017, 16, 241-263

39 (a) Mizuno, S. et al. Blood, 2001, 97, 1172-1179 (b) Abdel-Wahab, O. et al. Blood 2009, 114, 144-147 (c) Hamidi, T.; Singh, A. K.; Chen, T. Epigenomics 2015, 7, 247-265

40 (a) Ehrlich, M. Epigenomics 2009, 1, 239-259 (b) Ley, T. J. et al. N. Engl. J. Med. 2010, 363, 2424-2433 41 The Lancet 2018 http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(18)31310-2

(42)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

35 Enfin, les mutations touchent également les gènes codant les enzymes qui modifient de manière covalente les histones, ce qui mène là aussi à des profils de méthylation, d’acétylation et de phosphorylation anormaux. Dans ces cas, leur déstabilisation entraîne également l’activa-tion d’oncogènes et l’inactival’activa-tion de gènes suppresseurs de tumeurs. De plus, des gains et des pertes de fonction ont tous deux étés observés dans ces gènes mutés. Par exemple, la mutation des gènes codant les méthyltransférases HMTs engendre un gain de fonction et permet la su-rexpression de ces enzymes.43 Les gènes codants pour les histones eux-mêmes peuvent subir

une mutation ; par exemple, c’est le cas du gène codant l’histone H3, particulièrement dans certains cancers (tumeur cérébrale pédiatrique et chondroblastomes).

En résumé, l’apparition d’une mutation dans un gène codant pour une enzyme impliquée dans la régulation épigénétique, entraîne une forte perturbation des cartes épi-génomiques. Lorsque ces profils sont altérés, l’expression des gènes n’est plus régulée. Cette instabilité gé-nomique favorise le développement de pathologies tel que le cancer, par l’activation d’onco-gènes et l’inactivation des d’onco-gènes suppresseurs de tumeurs. De ce fait, ces protéines ont un rôle fondamental dans le maintien de l’homéostasie du génome. Dès lors, elles deviennent des cibles thérapeutiques privilégiées. C’est ce que nous allons détailler dans la section suivante.

I.3.2. Traitements épigénétiques : les « épi-médicaments »

D’un point de vue mécanistique, les modifications épigénétiques sont largement réver-sibles, y compris celles acquises de manières anormales. Ainsi, les thérapies épigénétiques pourraient réactiver des gènes suppresseurs de tumeurs anormalement réprimés. Par exemple, si les DNMT sont surexprimées on obtient un profil de méthylation de l’ADN anormal, avec l’ajout de méthyle en excès dans certaines régions, menant à une répression des gènes suppres-seurs de tumeurs et donc au cancer. Mais si on bloque les DNMT, par des inhibiteurs enzyma-tiques, la modification anormalement acquise, ici les méthyles, peut être supprimée ce qui va permettre la remise en place des profils normaux et la réactivation des gènes suppresseurs de tumeurs. Cette spécificité particulièrement intéressante est très étudiée par l’industrie pharma-ceutique, qui cherche à développer des « épi-médicaments » ou « epi-drugs », ciblant les divers mécanismes épigénétiques (schéma 11).

(43)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

36

Schéma 11 : Exemple « d’épi-médicaments » développés par GSK

Du fait de leur rôle majeur dans la conservation des profils épigénétiques normaux et la régu-lation de l’expression des gènes, les enzymes épigénétiques apparaissent comme des cibles thé-rapeutiques intéressantes. C’est la raison pour laquelle elles sont les cibles privilégiées des trai-tements épigénétiques.

Parmi les traitements, on distingue ceux qui s’intéressent soit aux mutations épigéné-tiques qui engendrent un gain de fonction, soit à celles qui engendrent une perte de fonction. Les mutations « gain de fonction » sont ciblées par l’inhibition directe des enzymes DNMTs, HMTs, HDACs, etc.44 Dans ces cas, la recherche tend à développer de petites molécules qui

agiront en tant qu’inhibiteurs enzymatiques, de manière compétitive ou non. Les mutations « perte de fonction » sont quant à elles contrées en exploitant les interactions létales synthé-tiques. Ce concept, inventé dans les années 20, s’applique dans les cas où deux gènes sont impliqués dans une interaction l’un avec l’autre de sorte à former une paire de gènes. Dans ces situations, une mutation sur l’un des gènes appartenant à la paire n’a pas de conséquences phé-notypiques, mais la mutation simultanée des deux gènes de la paire est létale pour la cellule.45

Les interactions létales synthétiques entre gènes peuvent être exploitées pour le développement de modulateurs sélectifs des CMPs, qui auront la particularité d’être léthaux uniquement pour les cellules qui porteront la mutation adéquate. De manière générale, ces traitements peuvent être utilisés soit comme monothérapies, soit combinés entre eux ou avec d’autres thérapies anti-cancéreuses.

44 Pfister, S. X.; Ashworth, A. Nat. Rev. Drug Discov. 2017, 16, 241-263 45 Chan, D. A.; Giaccia, A. J. Nat. Rev. Drug Discov. 2011, 10, 351-364

(44)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

37

Dans cette première partie, nous avons vu que la régulation épigénétique à un rôle essentiel dans le fonctionnement normal des cellules, par le biais de la régulation de la trans-cription des gènes. Par ailleurs, elle est régie par un ensemble de processus complexes dans lesquels sont impliqués une multitude de protéines. Son dysfonctionnement, à la suite de muta-tions affectant des gènes spécifiques, mène au développement de diverses pathologies, dont le cancer. Le propos va désormais se concentrer sur une classe enzymatique particulière, les DNMTs, que nous allons développer de manière détaillée dans cette deuxième partie.

II. Les DNMTs : l’art de la méthylation

La méthylation de l’ADN est la modification épigénétique la plus connue et la plus étu-diée, car elle reste la marque majoritaire dans de nombreux cancers. Elle a été pour la première fois identifiée en 1948 par Rollin Douglas Hotchkiss (1911-2004) dans un thymus de veau.46

Cette partie va se focaliser sur les enzymes DNMTs, responsables de la méthylation du génome, en exposant tout d’abord leur rôle biologique et leur nature, puis leur structure ainsi que leur mode d’action. Enfin, nous verrons quelles sont les conséquences de leur dysfonctionnent et en quoi elles apparaissent comme des cibles thérapeutiques pertinentes.

II.1. Rôles biologiques et nature des DNMTs

Chez les mammifères, les enzymes DNMTs - DNA Méthyltransférases sont respon-sables de la mise en place et du maintien, au cours des divisions cellulaires, des profils de mé-thylation. Pour cela, elles vont catalyser le transfert d’un groupement méthyle de manière régio-spécifique sur l’ADN, grâce à un cofacteur, le SAM (ou AdoMet), qui agit comme donneur de méthyle. La méthylation de l’ADN suit des profils parfaitement définis et est un processus épi-génétique clef permettant la maintenance de l’intégrité du génome.

Elle a un rôle majeur dans de nombreux mécanismes telles que :47

La régulation de l’expression des gènes

46 Hotchkiss, R. D. J.Biol.Chem. 1948, 175, 315-332

(45)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

38 • L’empreinte parentale : l’une des deux copies d’un même gène est éteinte en fonction de son origine parentale. Contrairement aux autres gènes, une seule co-pie du gène (maternelle ou paternelle) s’exprime

L’inactivation du chromosome X : chez les femmes l’un des deux chromosomes X est inactivé

La différenciation cellulaire.

Elle serait également impliquée dans le développement du système immunitaire, la reprogram-mation cellulaire, ainsi que dans le bon fonctionnement cérébral et le comportement. Cette marque épigénétique atteint les gènes de manière stable mais réversible, et joue un rôle crucial lors du développement embryonnaire. Dans ce dernier cas, le zygote va subir de manière inten-sive des cycles de méthylation et déméthylation qui vont petit à petit établir les profils au sein du génome.

Le but de la méthylation va être de réguler la transcription des gènes en contrôlant l’état transcriptionnel de la chromatine. Comme vu précédemment, il existe au sein du génome des parties hyperméthylées, plutôt associées à une chromatine inactive, et d’autres hypométylées plutôt assimilées à une chromatine active, car permettant la fixation des facteurs de transcrip-tion, et donc l’expression du gène. Cette cartographie des régions riches et pauvres en méthyles, doit absolument être respectée au fil des divisions cellulaires, pour maintenir l’homéostasie du génome. En effet, l’hyperméthylation de certaines zones va avoir pour rôle de bloquer la trans-cription des oncogènes, tandis que l’hypométhylation va favoriser l’activation de la transcrip-tion des gènes suppresseurs de tumeurs. Lorsque ces profils deviennent aberrants, les zones hyperméthylées peuvent devenir hypométhylée et inversement, ce qui donne lieu à toute une série de pathologies incluant : diabète, maladies cardio-vasculaires, troubles bipolaires, schizo-phrénie et cancer. Dans ce dernier cas, les cellules cancéreuses arborent des séquences promo-trice anormalement hyperméthylées, ce qui réprime la transcription des gènes suppresseurs de tumeurs, favorisant l’initiation et la progression du cancer.

Le génome code pour cinq DNMTs dont : la DNMT1, la DNMT2, la DNMT3A, la DNMT3B et la DNMT3L. Les processus de méthylation sont exécutés par les trois DNMTs principales : DNMT1, DNMT3A et DNMT3B.

(46)

Chapitre 1 : Epigénétique et protéines associées

39 Ces trois DNMTs ont des fonctions différentes lors de la méthylation, ainsi on peut les distin-guer comme suit :

Les DNMTS de novo : DNMT3A et 3B La DNMT de maintenance : DNMT1

Les DNMT3A et 3B, considérées comme des méthyltransférases de novo, sont responsables de l’établissement des profils de méthylation pendant l’embryogénèse et de l’instauration de l’em-preinte parentale pendant le développement des cellules germinales (ovules, spermatozoïdes). En effet, elles sont très exprimées dans l’embryon, mais leur taux d’expression diminue au fur et à mesure de la différenciation cellulaire. Elles peuvent se fixer indifféremment à de l’ADN non méthylé ou hémi-méthylé. En revanche, la DNMT1 est nécessaire pour la maintenance des profils de méthylation pendant la réplication de l’ADN. Elle restaure sur le brin d’ADN fille nouvellement synthétisé le profil de méthylation spécifique, conformément à celui présent sur le brin parental instauré par les DNMT3A et 3B.48 Elle va donc reconnaître et fixer de manière

préférentielle l’ADN hémi-méthylé, mais agit sur le brin non méthylé, et sera localisée lors de la phase de réplication de l’ADN (Phase S) au niveau des fourches de réplication (schéma 12).

Schéma 12 : Dynamique des profils de méthylation

Références

Documents relatifs

The combined organic layers were dried over anhydrous sodium sulfate, were filtered, and were concentrated under reduced pressure. Soc.,

3D Stationary and Temporal Electro-Thermal Simulations of Metal Oxide Gas Sensor based on a High Temperature and Low Power Consumption Micro-Heater Structure using COMSOL

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des

This field remains especially challenging because these core institutions are characterized by different institutional logics and complex arrangements of

It has been reported, however, that several plants for producing ethyl alcohol from wood waste, wrre installed in Germany during the war, and that their output of

CT- scan images preprocessing and segmentation to improve bioprosthesis leaflets morphological analysis.... CT-scan images preprocessing and segmentation to improve

Commission Recommendation 2003/311 of 11 February 2003 on relevant product and service markets within the electronic communications sector susceptible to ex ante regulation

10 Tsukiura T, Suzuki C, Shigemune Y, Mochizuki-Kawai H (2008) Differential contributions of the anterior temporal and medial temporal lobe to the retrieval of memory for