L’architecture de simulation IMACLIM-S
3 Détermination de l’équilibre général et de l’empreinte carbone
3.2 La distribution des revenus
: Asymptote technique dans la production travail : Asymptote technique dans la production énergies : Propensions à consommer des agents nationaux*
: Elasticités-prix des consom. finales d’énergies
A
: Asymptote technique dans la production capital : Besoins essentiels en énergies des ménages : Propensions à investir des agents nationaux*
: Elasticités-prix de substitution des int
K
: Elasticités des échanges commerciaux aux prix compétitivité : Taux d’accumulation du capital
: Taux de rendements décroissants statiques : Elasticités-revenu des consom. fina RA
, , : Frontière d'innovation technique (possibilités techniques, rendements d'échelle et moteur de croissance endogène) : Réaction des salaires à l'évolution du chômage (condit
ions de négociations, partage de la valeur ajoutée) : Frontière d'ajustement de la demande (possibilités techniques et préférences)
: Réaction des échanges commerciaux effec
C
X M
f
f f tifs aux termes de l'échange (importance de la compétitivité-prix)
: Evol ution de l'endettement national**
* Les propensions à consommer et à investir sont constantes mais différentes pour chaque catégorie d’agents (seules celles des administrations peuvent être modifiées dans certaines variantes de gestion des finances publiques). Par conséquent, les propensions à consommer et à investir agrégées de l’économie nationales ne sont pas fixes, elles évoluent avec la distribution des revenus.
3.2 La distribution des revenus
Dans le modèle complet, l’hétérogénéité des agents nationaux (sociétés, administrations publiques et classes de ménages représentatives) est décrite par la distribution d’un jeu de variables monétaires (revenus, dépenses, dettes, taux d’intérêt), physiques (consommation, investissement, émissions) et sociodémographiques (effectif de personnes, de retraités, de travailleurs, de chômeurs).
L’Encart 4 (page 102) résume l’ensemble des contraintes que doit respecter cette distribution à l’équilibre. On suppose que l’on se trouve au point d’équilibre macroéconomique : les valeurs des agrégats de revenus, de consommation, d’emploi, etc. sont données par la solution du système décrit dans le paragraphe précédent (Encart 3, page 98). La distribution des revenus entre les catégories d’agents nationaux résulte alors de la combinaison de cinq ensembles de facteurs :
La structure sociodémographique. Le modèle décrit la répartition de la population totale, des retraités, des actifs et des chômeurs entre les classes de ménages (équations 1 à 5).
L’effectif de travailleurs et de chômeurs par classe de ménages ‐ distingués selon leur niveau de vie ou, comme nous l’envisagerons ainsi, selon leur localisation ‐ évoluent avec l’environnement macroéconomique42, en fonction de deux facteurs d’hétérogénéité non
42 Bien entendu, nous verrons que ces effectifs évoluent en projection (cf. Tableau 7, page 111).
démographiques : le niveau relatif de leur chômage et leur taux initial de cotisations sociales (équation 4)43.
Le partage de la valeur ajoutée. Le modèle décrit comment l’excédent brut d’exploitation et la masse salariale se répartissent entre les sociétés, les administrations publiques et les classes de ménages, une fois que les prélèvements obligatoires sur la valeur ajoutée ont été acquittés (équations 9, 9‐bis et 9‐ter). Dans cette étude, le partage de l’excédent brut d’exploitation est exogène, tandis que la distribution des salaires nets évolue, elle, conformément à la distribution des emplois et aux hypothèses sur les inégalités salariales entre catégories sociales44.
Les modalités de gestion des finances publiques qui modifient à plusieurs niveaux la distribution des agrégats macroéconomiques. Les règles qui concernent la structure des prélèvements obligatoires (équation 14) déterminent les recettes fiscales des administrations (équation 16), ainsi que les revenus et les dépenses privés qui sont taxés (équations 9, 9‐ter, 10, 11, 12 et 12‐ter). Etant donné la structure sociodémographique, les règles de revalorisation des prestations modifient la masse des transferts sociaux qui sont versés aux classes de ménages (équations 6 et 7). Enfin, le niveau des dépenses publiques de consommation et d’investissement évolue conformément à la règle budgétaire retenue (équations 11‐bis et 12‐bis).
L’hétérogénéité des situations sur les marchés financiers, où les trois catégories d’agents font face à des taux d’intérêt différents mais qui évoluent selon le taux directeur que détermine le bouclage macroéconomique présenté plus haut (équations 8, 8‐bis et 8‐ter).
Dans cette étude, le taux d’intérêt payé par les ménages ne sera pas distingué par classe, car la description de situations de sélection adverse n’est pas essentielle à notre propos.
L’hétérogénéité des comportements de consommation et d’investissement. Chaque classe de ménages consomme et investit une part constante mais différente de ses revenus (équations 11 et 12) ; leur consommation d’énergie évolue avec les prix et leurs revenus selon des élasticités et des niveaux de besoins essentiels identiques ou différenciés (équation 10). Les sociétés investissent, elles, une part fixe de leur revenu disponible (équations 12‐
ter), tandis que la règle budgétaire décide des niveaux de consommation et d’investissement publics.
43 Rappelons qu’à défaut d’une représentation explicite de la segmentation du marché du travail et de différents niveaux de qualification, ces hypothèses permettent de rendre compte d’une manière simple (i) d’une exposition différente des classes de revenus à l’évolution du chômage (que nous supposons refléter leur productivité, ou plus largement, leur « employabilité ») et (ii) des allègements de charges déjà octroyés par le passé aux bas-salaires.
44 Dans le fonctionnement de référence, il est supposé que les inégalités salariales ne sont pas affectées par la réforme. Comme les classes de ménages sont distinguées par le niveau de leurs revenus, il est commode d’interpréter ces inégalités comme le reflet de différences de productivité.
Encart 4 : Une vision d’ensemble du modèle – (2) Distribution des revenus à moyen terme
On considère un équilibre macroéconomique défini par les niveaux des salaires, de l’excédent d’exploitation, des prix de production, du taux d’intérêt, de l’emploi, des consommations finales (énergies et composite), de l’investissement et de l’endettement national. Les agents sont regroupés en ménages, administrations publiques et sociétés ; les ménages par catégorie sociale. Chaque groupe d’agents tire ses ressources du partage du produit national brut. La distribution des revenus est ensuite modifiée par les opérations de redistribution. Celles‐ci sont faites par le système fiscal et social mais aussi par les échanges de revenus au titre de la rémunération de la propriété financière. Les groupes d’agents utilisent leurs revenus pour investir et/ou pour consommer (de l’énergie et un composite de biens et services non énergétiques) et ont recours aux marchés financiers pour prêter (ou emprunter) si leurs revenus surpassent (ou ne couvrent pas) leurs dépenses.
A – Catégories sociales (ménages, h)
A1‐ Effectif total d’individus A2‐ Population de retraités 1) NhN h,.N
2) NR h, NR h,.NR
A3‐ Population active A4‐ Effectif de chômeurs
, ,
3) NA hA h.NA
4) NU h, fNU h,
U h, 0,w h,
h0
.NUA5‐ Effectif de travailleurs A6‐ Niveau des prestations sociales
, ,
5) LhNA hNU h
6) k U R A; ; , k h, fk
1 . k h, 0A7‐ Transferts sociaux A8‐ Taux d’intérêt
, , , , ,
A10‐ Consommation d’énergie A11‐ Consommation de composite
A12‐ Investissement A13‐ Endettement
B5‐ Revenu disponible B6‐ Dette publique
C1‐ Taux d’intérêt C2‐ Investissement 8- ter) iSiS0i'
12- ter) 1 C. .p IC SgS.RS
C3‐ Revenu disponible C4‐ Dette
D1‐ Population totale D2‐ Population de retraités 20) h D3‐ Population active D4‐ Emploi/Chômage
20) A A h, D5‐ Revenus du travail D6‐ Excédent brut d’exploitation*
E3‐ Investissement E4‐ Endettement national
23) S G h , , : Investissement des agents
E h
FACTEURS D’HETEROGENEITE
Structure démographique Partage de la valeur ajoutée et redistribution
, : Evolution de l'emploi/chômage de la classe
h : Prestation sociale de selon le risque (initiale) , , : Part de l'EBE perçue par agent
térêt effectif des agents (initial) , , : Evol ution de l'endettement des agents**
D h D G D S
f f f
Modalités de gestion des finances publiques Structure des prélèvements obligatoires
1 2 3
: Règle d'indexation des transferts sociaux : Choix des taux de prélèvements endogènes***
: Règle budgétaire (consom. et investissement publics) : Revalorisation du niveau des prestati
fk : Fonction d'ajustement des taux de prélèvements*
: Taux de cotisations sociales propre à la classe
w h
: Consommation d'énergie de la classe : Niveau de besoin essentiel en énergie de , : Propension à investir des agents
: Elasticité revenu des consom. d'énergie de
h : Masse salariale superbrute
: Excédent brut d'exploitat
R
: Consommation domestique d'énergie : Consommation domestique de composite : Volume d'investissement
** L’évolution de l’endettement des agents dépend non seulement de l’évolution des emprunts/prêts de l’année, mais également des hypothèses faites sur toute la trajectoire des emprunts/prêts depuis la date du choc simulé jusqu’à l’horizon de moyen terme considéré.
Nous venons de séparer la description de la distribution des revenus de celle de l’équilibre macroéconomique pour la commodité de l’exposition, mais ces ajustements sont simultanés dans le modèle. La distribution des revenus influe sur l’équilibre macroéconomique via la consommation, l’investissement et l’endettement (les variables agrégées) et la macroéconomie influe sur la distribution des revenus via l’emploi et les revenus (les variables distribuées). L’algorithme de résolution calcule les valeurs d’équilibre de ces variables, c’est‐à‐dire la solution du système constitué de l’ensemble des contraintes distributives et macroéconomiques.
Figure 13 Représentation schématique du processus de convergence vers l’équilibre.
Les interactions entre distribution des revenus et macroéconomie
Par rapport aux analyses macroéconomiques, conduites avec des modèles de croissance plus agrégés, l’architecture d’IMACLIM‐S.2.4 permet de représenter plusieurs motifs d’interaction entre distribution des revenus et croissance. En outre, la relation entre la distribution des revenus et les conditions de production n’est ni mécanique, ni univoque, car la productivité apparente des facteurs
‐ le partage de la valeur ajoutée entre salaires et profits (excédents d’exploitation) ‐ ne détermine pas à elle seule la distribution des revenus. Deux éléments dans le modèle autorisent ce découplage : premièrement, la redistribution opérée par les administrations (via les prélèvements obligatoires et les transferts sociaux) et deuxièmement, le fonctionnement des marchés financiers qui introduit une distinction entre la rémunération de la propriété financière et le niveau des profits.
Dans ce cadre de modélisation, un système fiscal peut avoir sur l’équilibre macroéconomique et social des effets positifs ou négatifs variés. L’intervention n’est pas nécessairement inefficace comme dans un modèle de premier rang ; elle peut apporter un bénéfice social si elle opère une
« redistribution des revenus efficace » ou rapproche les prix de marchés des « valeurs sociales des biens » (Guesnerie, 1995). Dans ce cas, le système fiscal permet d’allouer plus efficacement les ressources disponibles. Mais à l’inverse, l’intervention peut tout aussi bien aggraver les inefficacités du système économique si elle éloigne la distribution des revenus d’une distribution efficace ou les prix de marché des valeurs sociales des biens. Dans tous les cas, comme nous l’avons souligné au chapitre précédent, la performance d’un système fiscal donné dépend des hypothèses de second rang sur la nature et la combinaison des inefficacités économiques en l’absence d’intervention.
Par conséquent, l’évaluation du coût ou du bénéfice social d’une réforme n’est pas triviale, surtout en partant d’une gestion des finances publiques qui a priori n’est pas optimale. En influençant conjointement les coûts relatifs des facteurs et des biens et la distribution des revenus, la réforme simulée peut, par exemple, avoir un effet bénéfique du côté de l’offre, mais qui peut aussi être annulé par un effet négatif du côté de la demande. Une réforme sera bénéfique indépendamment de ses effets environnementaux, si elle contribue à déplacer l’équilibre macroéconomique vers un état supérieur (produisant plus de revenus agrégés) et si elle s’accompagne d’une distribution des revenus telle que personne ne voit sa position absolue se dégrader (critère de Pareto).
Distribution des revenus
Consommation Investissement Endettement
Macroéconomie Emploi
Revenus
Au‐delà, pour parvenir à une évaluation du surplus global ou disposer d’un critère de choix lorsque la distribution obtenue favorise la position de certains mais dégrade celle des autres, il faut disposer d’un critère éthique ; ce qui, dans la théorie utilitariste de la justice par exemple, prend la forme d’un système de poids sociaux attribués aux classes de ménages. La détermination d’un tel système renvoie alors à la question normative de la contribution au bien‐être de la collectivité de l’utilité de chaque classe, discussion normative qui sera délibérément ignorée dans le premier temps de l’analyse, pour y revenir succinctement en conclusion de notre septième chapitre45.