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Dispositif de surveillance métrologique des pollens et outils de communication associés

Liste des figures

3. Distribution géographique de l’ambroisie à feuille d’armoise et de ses pollens

3.2 Dispositif de surveillance métrologique des pollens et outils de communication associés

3.2.1 Réseau National de Surveillance Aérobiologique en France (RNSA)

En France, en application du II de l'article L. 221-1 du code de l'environnement et de l'arrêté du 5 août 2016, sont chargés de coordonner ensemble la surveillance des pollens et, le cas échéant, des moisissures de l'air ambiant, et l'information associée :

 l'association Réseau national de surveillance aérobiologique (RNSA) ;

 les organismes agréés mentionnés à l'article L. 221-3 du code de l'environnement lorsqu'ils participent à la surveillance des pollens et des moisissures de l'air ambiant ;  l'Association des pollinariums sentinelles de France (APSF).

En 2019, le RNSA il comptait 84 sites de mesures équipés de capteurs Hirst sur l’ensemble du territoire (Cayenne inclus) : 73 sites tous pollens, 10 sites spécifiquement dédiés à la surveillance des pollens d’ambroisie, et 1 site utilisé à des fins de validation scientifique (Figure 21).

Méthode d’analyse pollinique

Une description détaillée de la méthodologie d’analyse pollinique utilisée par le RNSA peut être trouvée dans la publication de Thibaudon, Oliver, et Besancenot (2019). Un descriptif détaillé des instruments de mesure existants peut être trouvée dans un rapport précédent de l’Anses (2014).

La méthode traditionnelle de dénombrement et d’identification des grains de pollen recueillis par les capteurs de type Hirst utilise la microscopie optique opérée par des analystes spécifiquement formés. À partir des bandes de recueil, les analystes préparent des lames de microscope permettant la discrimination et le comptage des grains de pollen parmi les autres particules présentes dans l’air ambiant. Pour faciliter le travail des analystes, le RNSA a développé une clé de détermination des pollens – utilisée désormais lors de toutes les formations françaises et internationales – couplée à un logiciel d’acquisition vocale des objets discriminés au microscope. Afin de garantir une plus grande homogénéité des données

Figure 21. Localisation des capteurs du Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA)

mesurées dans toute l’Europe, l'Association française de normalisation (AFNOR) et le RNSA ont développé et publié une norme européenne : NF EN 16868 Air ambiant, échantillonnage et analyse des grains de pollen en suspension dans l'air et des spores fongiques pour les réseaux relatifs à l'allergie, méthode volumétrique de Hirst. Cette norme inclut une définition des spécifications techniques minimales des capteurs volumétriques utilisant la méthode Hirst et les procédures d'analyse à respecter.

Le capteur pollinique volumétrique de type Hirst fournit des données de concentration de pollens sur une résolution temporelle de 2 heures. Le temps d’exposition étant connu, le nombre de grains par mètre cube d’air et par unité de temps peut être calculé. Ce pas de temps permet de connaître les variations intra-journalières des concentrations polliniques et de vérifier si le pollen recueilli est d'origine locale ou distante. Ainsi, l'ambroisie libérant l’essentiel de son pollen en fin de nuit ou en début de matinée (Martin, Chamecki, et Brush 2010, Ogden et al. 1969), il existe une forte probabilité pour que les grains captés avant midi

soient majoritairement autochtones (cas habituel à Lyon), alors qu'un recueil en milieu ou fin d’après-midi laisse à penser que la source des émissions est éloignée (cas à Aix-en-Provence ou Dijon) (Thibaudon, Oliver, et Sindt 2009). La capacité des pollens d’ambroisie à parcourir de longue distance est bien documentée dans la littérature (Zauli et al. 2006, Smith et al. 2008, Sommer et al. 2015, de Weger et al. 2016, Grewling et al. 2016).

En dépit de sa robustesse et de son ancienneté, la méthode traditionnelle de dénombrement et d’identification des grains de pollens présente des limites. La procédure est longue (comptage et reconnaissance manuels) et lourde à mettre en place (formation spécifique de l’analyste), et ne permet pas la diffusion instantanée des données mesurées. De plus, elle renseigne uniquement sur le contenu de l'air en grains de pollen, sans donner d'indications sur leur contenu en allergènes12. Ainsi, divers développements et programmes de recherche

se sont orientés depuis une vingtaine d'années tant sur les méthodes d'analyse automatique, discriminantes au niveau des espèces botaniques ou des allergènes, que sur la mise au point de capteurs automatiques pouvant accepter une analyse en temps réel ou quasi réel. Quatre orientations font l'objet d'investigations intensives (Thibaudon, Oliver, et Besancenot 2019). Certaines font appel à l'analyse d'image pour faciliter l'identification des grains de pollen tandis que d’autres utilisent la biologie moléculaire et diverses techniques associées. D’autres encore s'appuient sur les méthodes immunologiques développées dans le cadre du diagnostic in vitro et de la standardisation des allergènes. Enfin, les dernières ont recours à la mesure automatique des paramètres physiques et capacités de fluorescence des particules biologiques – ce qui rend possible une triple automatisation du recueil, de l'analyse et de l'information en temps réel. À ce jour, les seuls équipements capables de fournir une information en temps réel sont le HUND BAA 500® et le PLAIR Rapid-E® mais leurs coûts sont très élevés, rendant leur utilisation en routine difficile à l’heure actuelle.

Localisation des capteurs

De façon générale, la localisation des capteurs vise à maximiser la représentativité des mesures réalisées ; ces mesures ont en effet pour objectif de refléter l’exposition de la population vivant dans une zone assez large. Ainsi, les capteurs sont généralement placés en ville – du fait de la forte densité de population et donc de malades potentiels – en hauteur, à distance suffisante des sources, et éloignés de la rugosité urbaine ou du terrain. Une mesure obtenue par un capteur placé trop près d’une source ne représente que la typologie pollinique locale et ne s’applique qu’à la population locale. Un compromis doit être trouvé entre la qualité du site pour la mesure, son accessibilité, l’installation du capteur, la disponibilité des personnes effectuant les relevés et les mesures de sécurité à appliquer pour ces dernières.

12 La mesure spécifique des allergènes présents dans l’air se heurte à des problèmes et limites

Les appareils de type Hirst utilisés par le RNSA respectent les recommandations de la norme NF EN 16868. Ils sont installés en ville, sur des terrasses d’immeubles à une hauteur comprise entre 15 et 20 mètres et bien dégagées, afin de représenter la végétation d’une zone assez vaste et non celle des abords immédiats du capteur. Les endroits où l’air circule verticalement (bords de toits, balcons…) sont déconseillés car la proximité d’immeubles plus élevés peut créer des ascendances et des turbulences importantes. Les abords d’un parc public (potentielle surreprésentation d’un type particulier de pollens) ou la proximité directe d’une source de forte pollution chimique (poussières, fumées noires…) sont également à éviter. Lorsque toutes ces précautions sont prises, les mesures obtenues sont représentatives d’une zone de 20 à 50 km de rayon (Katelaris, Burke, et Byth 2004, Pashley et al. 2009).

Représentativité du réseau

Le choix de la localisation des capteurs du RNSA ainsi que la représentativité de ce réseau a fait l’objet de nombreuses réflexions et d’adaptations depuis les années 2000. Le réseau a notamment été optimisé afin de réduire les disparités interrégionales et le maillage a été corrigé en fonction des effectifs de population concernés par les informations polliniques. La densité de surveillance a été développée dans certaines régions afin de témoigner au mieux de spécificités locales d’intérêt : l’ambroisie en région Rhône-Alpes ou le cyprès dans le Midi méditerranéen.

Rieux, Personnaz, et Thibaudon (2008) puis Raffard (2017) se sont appliqués à estimer la représentativité du réseau de capteurs RNSA en définissant des « bassins d’air » homogènes à l’intérieur desquels les propriétés polliniques sont comparables – tant pour les concentrations en pollen que pour les principales caractéristiques des saisons polliniques (dates de début et de fin, date du pic, etc.). Une corrélation positive a ainsi été établie entre le degré de similarité des propriétés polliniques de deux sites de mesures et la distance entre ces sites i.e. les sites présentant des profils polliniques similaires sont toujours peu éloignés sur le terrain. La latitude et l’altitude ont été identifiés comme deux facteurs majeurs discriminant les propriétés polliniques, ce qui était attendu par les auteurs en raison du rôle que jouent ces deux facteurs dans le climat et le développement de la végétation locale. Enfin, il est ressorti de ces travaux que, dans sa configuration actuelle, le réseau RNSA souffre plus d'un manque de stations que de redondances : environ 22,6 millions de Français, soit 36,6% de la population vivant à moins de 1 200 m d'altitude, sont à plus de 30 km d'un capteur de pollen (Raffard 2017).

3.2.2 Informations collectées et diffusées par le RNSA

Le dispositif de mesure et de surveillance mis en place par le RNSA a pour vocation d’être un outil au service de la santé publique. Ainsi, le RNSA renseigne régulièrement la population générale sur la présence de particules biologiques dans l’air ambiant par le biais de bulletins polliniques.

Comptes polliniques

Le réseau de surveillance du RNSA fournit un comptage bi-horaire du nombre de grains de pollens par m3 d’air. Ces comptes polliniques « bruts » sont difficiles à interpréter en raison des différents niveaux d’allergénicité des pollens. Ils ne sont donc pas diffusés directement au grand public, mais sont très largement utilisés à des fins descriptives ou de recherche. Les mesures obtenues en stations sont supposées représentatives d’une zone de 20 à 50 km de rayon (Katelaris, Burke, et Byth 2004, Pashley et al. 2009). Ainsi, les comptes polliniques représentent une approximation de l’exposition des populations et de la pertinence clinique de cette exposition pour les malades. La modélisation des niveaux de pollens dans l’air ambiant (cf. paragraphe 3.3) permet d’obtenir une approximation de l’exposition à plus fine échelle.

Potentiel allergisant

Depuis sa création, le RNSA développe et met à disposition du grand public un tableau du potentiel allergisant des différentes espèces végétales retrouvées sur le territoire. Le potentiel allergisant reflète la capacité du pollen à provoquer une allergie ou une réaction allergique pour une partie non négligeable de la population générale. Il est défini sur la base de la littérature scientifique (Sindt et al. 2019, Sindt et al. 2017) en trois catégories :

 Faible ou négligeable : une très grande quantité de grains de pollen est nécessaire pour déclencher une allergie et cela ne concerne que les personnes les plus sensibles ;  Modéré : une quantité importante de grains de pollen est nécessaire pour provoquer des phénomènes allergiques chez un faible nombre de personnes sensibles (espèces généralement présentes de manière ponctuelle) ;

 Fort : quelques grains de pollen suffisent à provoquer une réaction allergique pour la majorité des personnes sensibles.

Le potentiel allergisant de l’ambroisie est considéré fort au même titre que celui du bouleau, du cyprès, et des graminées.

Risque allergique théorique

Les comptes polliniques reflètent un comptage de grains de pollen dans l’air et le potentiel allergisant est une caractéristique propre du pollen ; aucun de ces deux indicateurs ne présente de pertinence clinique pour les malades allergiques.

Le risque allergique théorique développé par le RNSA est un indicateur multifactoriel représentant la pertinence clinique d’un pollen pour une personne allergique dans une zone spécifique. Il s’étend de 0 (risque nul) à 5 (très élevé) et dépend : du potentiel allergisant, de la durée de la saison pollinique, des conditions météorologiques, des comptes polliniques, et de la situation géographique, c’est-à-dire l’infestation de la zone par l’espèce.

Dans les zones infestées, le risque allergique théorique sera élevé même avec un compte pollinique très bas en raison de l’existence d’une population sensibilisée ou à risque d’être allergique. Au contraire, dans les zones pas ou peu envahies, le risque allergique théorique restera nul ou faible malgré la présence de grains importés par le vent car la population n’est pas ou peu à risque. Pour chaque pollen et chaque zone d’infestation, une grille de correspondance a été créé entre le risque allergique théorique et les comptes polliniques, journaliers ou hebdomadaires (grille de correspondance pour les pollens d’ambroisie visible en Figure 22). Cette grille peut être ajustée au cours du temps, en fonction de l’évolution du changement climatique par exemple. Un risque allergique supérieur ou égal à 3 est considéré

Figure 22. Grille de correspondance entre risque allergique théorique du pollen d’ambroisie et comptes polliniques selon zone d’infestation

cliniquement pertinent : 6 grains de pollen d’ambroisie mesurés dans un m3 d’air sur une journée peuvent provoquer des symptômes chez les personnes allergiques. À des fins de comparaison, la valeur correspondante pour les pollens de bouleau est de 50 grains/m3 par jour ; celle des graminées est de 10 grains/m3 par jour.

Risque allergique lié à l’exposition au pollen (RAEP)

Par la suite, le RNSA a développé le concept de risque allergique lié à l’exposition au pollen (RAEP) permettant de fournir une information prévisionnelle, à quelques jours, du risque allergique. Le RAEP varie de 0 (risque nul) à 5 (risque très élevé) ; un RAEP ≥3 est considéré cliniquement pertinent, c’est-à-dire que les personnes allergiques ont de forte chance de présenter des symptômes. Le RAEP représente bien un niveau de risque sanitaire et non pas un niveau d’exposition, il intègre des données de plusieurs natures selon la formule :

𝑅𝐴𝑡ℎ + 𝐶 + 𝑀 + 𝑃 3 Avec :

 𝑅𝐴𝑡ℎ, le risque allergique théorique hebdomadaire sur la zone, intégrant les comptes polliniques de la semaine ;

 𝐶, index quantitatif basé sur les observations cliniques de la zone – informations issues de bulletins cliniques complétés chaque semaine par les médecins du réseau sentinelle du RNSA partout en France ;

 𝑃, index quantitatif basé sur les observations phénologiques de la zone – informations issues de bulletins d’observations complétés chaque semaine par des bénévoles, souvent membres des services d’espaces verts, partout en France ;

 𝑀, index quantitatif basé sur les prévisions météorologiques (températures, durée des précipitations, direction et vitesse des vents) à quelques jours.

Le RAEP est utilisé tant pour les informations hebdomadaires, nationales, régionales ou locales, que pour l’établissement de la carte annuelle d’exposition et de risque induit sur le territoire métropolitain (exemple de l’ambroisie en Figure 23).

Figure 23. Carte annuelle des comptes polliniques et du risque sanitaire induit par les pollens d’ambroisie en France

3.3 Modélisation de la présence de la plante et de la dispersion de