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CHAPITRE 1 : UN APERÇU HISTORIQUE POLITIQUE ET

5. Disparité d’accès aux TIC en Tunisie :

L'infrastructure des télécommunications reste insuffisante. Le débit d'Internet est l'obstacle le plus revendiqué par les tunisiens. En effet, malgré les efforts fournis par l’État pour la modernisation de l'infrastructure des télécommunications, il s'avère que la capacité technique de l'infrastructure utilisée aujourd'hui ne supporte pas la charge actuelle et l'on remarque une faiblesse ainsi qu'une instabilité du débit d'Internet (coupures, saturation) dans certaines zones des lignes ADSL. En outre, les frais de connexion demeurent encore élevés»72. La problématique de l'accès se caractérise par son caractère inégal (fracture régionale).Victor Scardigli a ainsi noté qu'il existe "trois temps de l'insertion sociale des techniques"73. Le premier est encombré d'images de discours et de promesses : c'est le temps des discours prophétiques qui précèdent et accompagnent l'insertion et l'expérimentation de l'innovation technologique dans le corps social. Le deuxième temps, celui de la diffusion de l'innovation, voit se développer les premiers usages, l'entrée en scène des médiateurs et des prescripteurs. À l'enthousiasme pour une nouvelle technologie, fait souvent suite une phase de désillusion. Le troisième temps est celui de l'appropriation socioculturelle d'acculturation, voire de maturalisation de la technique, se produit. La Tunisie est entre la 1ère et la 2ème phase.

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http://www.itu.int/en/ITU-D/Statistics/Pages/default.aspx consulté le 20-12-2012.

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Ministère des Technologies de l’Information et de la Communication : http://www.mincom.tn/.

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BEN HASSINE, Adel, 2008, Les enjeux des nouvelles technologies de l'information et de la communication en Tunisie, Migration et religion en France (Tome 1), p. 193-227.

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5.1. Disparités régionales :

Si les données disponibles au niveau de l’ensemble du pays montrent une progression de la Tunisie dans le domaine des TIC au cours de ces dernières années, les inégalités entre ceux qui les maîtrisent et/ou entre ceux qui les disposent sont flagrantes. En effet, et en dépit des nombreux efforts et des politiques volontaristes, la Tunisie présente notamment de sérieuses disparités régionales en la matière. Selon les données de l’INS (2011), pour l’année 2011 le district de Tunis seul a connu la plus grande densité téléphonique fixe d’une valeur de 20.3 (par 100 habitants), valeur supérieure à celle du Nord-Est et du Nord-Ouest respectivement avec 9.8 et 6.3 (par 100 habitants), du Centre Est et du Centre Ouest respectivement de 13.4 et 4.5 (par 100 habitants) et du Sud Est et du Sud-Ouest respectivement de 12.6 et 10.2 (par 100 habitants). La délégation de Tunis est composée des quatre gouvernorats suivant : Tunis, Ariana, Ben Arous et Manouba. Le même constat est à noter pour la densité de la téléphonie mobile. Pour le Grand Tunis, on a une densité téléphonique de 111.6%, valeur qui est supérieure à celles du Nord Est et du Nord-Ouest qui sont respectivement de 82.2% et 70.9%, celles du Centre Est et du Centre Ouest d’une valeur de 96.2% et 58.9% et celles des régions du Sud Est et du Sud-Ouest respectivement de 124.9% et 102.7%. Une autre donnée vient appuyer ces disparités numériques entre les différentes régions de la Tunisie, à savoir la répartition du nombre d’abonnés à des lignes spéciales dédiées pour la transmission de données (LS, X25, ADSL, Frame Relay, R, N, I, S). Selon l’INS (2011), le nombre d’abonnés a atteint 264485 milles dans le Grand Tunis contre seulement 152735 milles et 21034 milles respectivement pour le Centre Ouest et le Centre Ouest et 6 9433 milles pour les régions du Sud (Ben Hassine, 2008).

Si les nouvelles TIC se développent en Tunisie d’une manière spectaculaire, il n’en va pas de même au niveau régional. En effet, cet essor des TIC n’est qu'à ses débuts et ne concerne qu'une minorité de délégations en Tunisie et vient se greffer sur d’autres disparités déjà existantes (chômage, revenu, éducation…) aggravant ainsi les inégalités entre ceux qui les maîtrisent et y ont accès et ceux qui n’ont pas cette opportunité.

92 L’acquisition des TIC est plus prononcée dans les grandes villes ou les délégations situées principalement sur la côte ayant des taux de chômage inférieur à 10% contrairement aux régions intérieures plus isolées où le taux de chômage est de l’ordre de 20 à 30%74.

5.2. La marginalisation politique :

Le sud et l’ouest ont été sciemment pénalisés pour leur soutien à ceux parmi les fellagas qui avaient refusé de rendre les armes après les accords d’autonomie interne de 1954 et tout un pan du pays a été mis ensuite au pain sec. Il faut savoir que les fellagas étaient en majorité originaires du sud, étant les seuls Tunisiens disposant d’armes à feu pendant la colonisation, celles-là même abandonnées sur place par l’armée du général allemand Rommel. C’est à partir des refuges naturels de djebel Bou-Ramli, djebel Ben Khedache et djebel Châambi, respectivement à proximité de Gafsa, Médenine et de Kasserine, qu’ils avaient multiplié les opérations de guérilla bénéficiant du soutien sans faille des tribus rebelles locales75.

5.3. La marginalisation économique :

Cette marginalisation politique a tout naturellement engendré une marginalisation économique. Celle-ci a été accentuée par la priorité accordée au tourisme balnéaire depuis les années 70, qui a mobilisé énormément de capitaux et qui a profité quasi exclusivement au littoral. Elle a également provoqué un exode massif des compétences locales vers la capitale.

Pourtant, l’intérieur du pays, avec ses ressources en pétrole et phosphate, disposait d’atouts économiques intrinsèques importants, mais il n’en a que trop peu bénéficié. Il conviendrait de les valoriser davantage à l’avenir en mettant en œuvre des stratégies de filières pour capter localement le maximum de valeur ajoutée et créer les opportunités et les emplois qui

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Galiegue X, 2009, « Economie de la connaissance, rattrapage et diffusion des technologies : digital divide ou digital provide? », papier présenté aux 24èmes Journées du Développement de l'ATM (Association Tiers Monde), 19-21 mai, Saint Louis, Sénégal.

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Tunisie tribune, Publié le mercredi 16 mars 2011, http://www.kapitalis.com/tribune/3084-comment-reduire-la-fracture-regionale-en-tunisie.pdf., consulté juin 2012.

93 y font défaut. Il en va de même pour le potentiel agricole des régions du centre-ouest et du nord-ouest insuffisamment exploité alors qu’il n’a rien à envier à celui du Cap-Bon76

Toutefois, le creusement du fossé numérique nord-sud fait craindre l’exclusion des économies périphériques de ces mutations, accentuant les phénomènes de marginalisation de la division internationale du travail. La réduction de ce fossé suppose la mise en œuvre d’une politique volontariste favorisant une large diffusion des TIC, mais également la participation à l’offre mondiale afin de tirer parti des fenêtres d’opportunité ouvertes par la recomposition de la géographie industrielle des TIC, tant dans les activités manufacturières (assemblage et production de composants génériques,…) que dans les activités de service (conception de software, télé services,…).

Nous avons dans ce chapitre essayé de décrire les contextes économique, politique et social de la Tunisie pour mieux comprendre ce qui a poussé et ce qui pousse encore les administrations à introduire les TIC.

L’objet du présent chapitre c’était de présenter le contexte dans lequel évoluent les administrations publiques en Tunisie. Ayant choisi de travailler sur des études de cas, nous mettrons en valeur l’environnement institutionnel, économique et social de notre terrain de recherche. Ce travail nous a permis de positionner les administrations enquêtées par rapport au contexte tunisien actuel et d’apprécier par la suite les contraintes qui en découlent.

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