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Dérivée de l'épaisseur du film Rayon de courbure

3.5 Discussions sur le modèle et ses applications

Le modèle mis en place permet de prendre en compte les effets des forces de Van Der Waals et la résistance de changement de phase sur l’évaporation d’un film mince. Toutefois, il comporte des approximations permettant d’obtenir des résultats numériques. Nous allons discuter les différentes hypothèses afin de clairement définir les limites du modèle.

Tout d’abord, il apparaît que le modèle mathématique de la pression de disjonction n’est valable que pour certains fluides et que la détermination des constantes thermophysiques associées est très délicate. Notons cependant que la sensibilité du modèle à ces constantes est très faible.

L’hypothèse d’un écoulement liquide parallèle à la paroi lisse est nécessaire à la résolution simple du modèle. La Figure IV-15 permet de visualiser la forme générale du ménisque obtenu pour la micro région. Au vu de cette allure, l’hypothèse peut paraître discutable et une étude plus approfondie semble nécessaire à la généralisation de ce modèle. Potash & Wayner [115] ont considéré un écoulement bidimensionnel en coin dans leur modèle. En fait, ils utilisent la relation entre le gradient de pression et les pertes de charges dans un écoulement en coin à la place du modèle d’écoulement que nous avons adopté et qui conduit à la relation (IV-31). Leurs résultats donnent des ordres de grandeur comparables à nos valeurs, même si les résultats ne sont pas directement comparables aux nôtres en raison d’un manque de données sur les entrées du modèle.

Notons cependant que l’utilisation d’un modèle d’écoulement laminaire se justifie a posteriori par la courbe de la vitesse débitante du liquide (calculé à partir du débit et de l’épaisseur du film) illustrée par la Figure IV-22. Si cette vitesse peut paraître élevée (jusqu’à 0,55 m s-1), le nombre de Reynolds associé est lui très faible (de l’ordre de 2,5 10-2) en raison de la dimension caractéristique de l’épaisseur du film. Si l’on admet la validité du nombre de Reynolds comme critère même à ces échelles, l’écoulement peut donc être considéré comme totalement laminaire.

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0 2 10-7 4 10-7 6 10-7 8 10-7 1 10-6 Vliq (m s-1) X (m)

Figure IV-22 : évolution de la vitesse débitante liquide dans le film mince

De plus, une étude expérimentale récente menée par Pratt & al [123] a montré que la zone d’accrochage peut être le siège d’instabilités thermocapillaires lorsque le gradient de température en surface de la paroi solide passe une valeur critique qui varie expérimentalement de 20 et 160 K cm-1 en fonction de différents paramètres géométriques et thermophysiques pour du N-pentane sur une paroi en verre. En effet, il faut rappeler que dans notre modèle la dérivée de la tension superficielle par rapport à la température est supposée négligeable (voir hypothèse viii page 136). Or cet effet doit être pris en compte si la température de paroi n’est pas constante en intégrant l’effet Marangoni comme l’ont montré les travaux de Gourdache ([49] chap. IV).

Notons que ce modèle suppose de façon implicite une surface parfaitement lisse. Or les épaisseurs de film mince étant de l’ordre du nanomètre, nous explorerons sommairement la prise en compte du profil géométrique de la paroi.

A ce stade d’élaboration du modèle, nous allons exposer des voies nouvelles d’études permettant de valider le modèle présenté. Elles sont orientées vers des méthodes numériques traitant le problème à l’échelle atomique et se libèrent ainsi de l’hypothèse parfois très discutable de milieu continu.

3.5.1 Modèle avec surface rugueuse

Dans le cadre des hypothèses de milieux continus et afin d’étudier l’influence de la rugosité de la paroi solide, Khrustalev & Faghri [124] ont développé un modèle basé sur celui présenté dans ce chapitre mais en incluant une courbure de la paroi venant s’additionner à la

courbure due à la variation de l’épaisseur du film. La courbure de l’interface liquide décrite par l’équation (IV-46) pour une surface lisse s’exprime alors par :

K = K

p

+   

1 +( ) 

2

( )

3 / 2 (IV-56)

Kp représente la fonction décrivant la courbure de la paroi solide.

Khrustalev & Faghri traitent le cas d’une rugosité cylindrique ayant une extension infinie dans le sens axial donnant ainsi une valeur constante pour la courbure de la paroi. Ils justifient cette approche par le processus d’usinage longitudinal des rainures. Ainsi la courbure est prise égale à l’inverse de la rugosité de la paroi.

Néanmoins, leur modèle numérique semble très discutable puisqu’ils lient la valeur de la rugosité à la différence de température entre la paroi et la vapeur. En fait, Kp et (Tw-Tvap) servent de perturbation au système d’équations et jouent le rôle de 1 et 2.

En dépit de leur traitement numérique, l’idée de la courbure de la paroi peut être exploitée en se basant sur nos résultats, si le travail de validation du modèle par des méthodes de dynamique moléculaire est positif. Un balayage statistique de différentes fonctions de la courbure en fonction de l’abscisse curviligne le long de la paroi peut permettre d’obtenir une valeur moyenne du coefficient d’échange dans la micro région pour une répartition donnée de la rugosité de la paroi.

3.5.2 Hypothèse de milieu continu

En dehors des conditions aux limites et des hypothèses simplificatrices, le modèle développé dans cette partie est basé sur une hypothèse implicite considérant la paroi, le liquide et la vapeur comme des milieux continus.

La zone d’accrochage dans laquelle la densité de flux est très importante a une dimension caractéristique inférieure à 100 nm en étendue mais l’épaisseur du film absorbé est de l’ordre du nanomètre. De plus, en première approximation on peut évaluer la dimension caractéristique d’une molécule de fluide en considérant que la phase liquide est dense, en d’autres termes tout l’espace est « occupé » par les molécules. Il vient ainsi en utilisant la masse molaire, le nombre d’Avogadro et la densité liquide :

˜

d = M



l

N

a

3 (IV-57)

Soit dans le cas de l’ammoniac, une dimension caractéristique de l’ordre de 0,36 nm. Si l’on se réfère au Tableau IV-3, les épaisseurs calculées du film adsorbé vont de 1 fois à 4 fois la dimension caractéristique de la molécule. Rappelons de plus que l’augmentation de la température de paroi diminue la valeur calculée de l’épaisseur du film adsorbé (équation (IV-48)). Même si la croissance du film liquide est rapide, l’épaisseur du film

adsorbé reste une condition aux limites ayant une importance a priori non négligeable. Une étude à l’échelle atomique de cette région semble donc nécessaire pour confirmer la validité du modèle.

Les travaux de Muruyama & Kimura [125], [126], [127] utilisent la méthode de la dynamique moléculaire pour simuler le comportement d’un fluide aux environs d’une paroi. Ils obtiennent des résultats qualitatifs très intéressants car décrivant des comportements macroscopiques en utilisant une modélisation élémentaire de l’interaction moléculaire. Ils utilisent un potentiel d’interaction entre les molécules de type Lennard Jones (12-6) :

˜

 r( ) = 4 ˜  r

0

r





 



12

 r

0

r





 



6





 



(IV-58)

˜



et r0 étant deux constantes caractéristiques de l’interaction moléculaire. Elles diffèrent en fonction des interactions considérées (fluide fluide ou paroi fluide). Notons par ailleurs que l’ordre de grandeur de

 ˜

est de 10-21J et celui de r0 est du nm.

La Figure IV-23 visualise l’évolution de ce potentiel d’interaction entre deux molécules en fonction de la distance les séparant. Les forces d’interaction sont calculées à partir de la dérivée de cette courbe. Le potentiel est donc répulsif pour la partie décroissante de la courbe et attractif pour la partie croissante.

-1.5 - 1 -0.5 0 0.5 1 1.5 2 0.5 1 1.5 2 2.5 3

˜

 r( ) ˜ 

r r

0