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Approche maladie

2. Modélisation statistique du risque de FCO

3.1. Discussion sur les données épidémiologiques

3.1.1. Mesure de la maladie

Comme exposé précédemment (chapitre 4, partie 3.1.), le recueil des données épidémiologique est souvent plus facile, surtout s’il s’agit d’une maladie à déclaration obligatoire comme la FCO, que le recueil de données entomologiques (du fait de l’abondance, la petite taille, la variété, la ressemblance et les incertitudes taxonomiques des espèces de

Culicoides). En revanche, l’expression de la maladie implique, dans le cas de la FCO, la

transmission du virus aux hôtes sensibles par les vecteurs. Si les hôtes sont vaccinés, ou si le virus n’a pas été introduit, la maladie sera absente même si l’environnement est favorable. Ainsi, en Corse il y a certainement des élevages qui, bien qu’étant présents dans un environnement potentiellement « à risque », sont restés indemnes du fait de la vaccination.

Le choix de la déclaration officielle de foyer comme mesure de l’état sanitaire des élevages se justifie par i) son accès facile (cf. paragraphe précédent), ii) sa fiabilité et iii) sa

meilleure pertinence que les mesures sérologiques. Cette mesure peut être considérée comme fiable pour trois raisons : i) tout d’abord la méthode RT-PCR peut-être considérée comme le test de référence (Biteau-Coroller et al., 2006), ii) ensuite les éleveurs sont très fortement

encouragés à déclarer les suspicions cliniques, iii) enfin en choisissant de travailler uniquement sur les élevages ovins, on limite un peu (mais pas complètement) les cas de circulation virale asymptomatique. On peut ainsi estimer que la valeur prédictive positive (probabilité que la maladie soit présente si le test est positif, soit ici la probabilité que l’élevage soit infecté si le foyer est déclaré, cf. tableau 19) est très élevée. La valeur prédictive

négative (probabilité que la maladie soit absente si le test est négatif, soit ici probabilité que l’élevage soit indemne en l’absence de foyer) est sans doute un peu moins élevée du fait de la présence de faux négatifs. En effet, il pourrait y avoir des élevages peu touchés par la maladie où les animaux malades ou infectés mais asymptomatiques n’ont pas été identifiés.

Enfin, le choix de cette mesure comme indicateur du statut sanitaire est plus intéressant qu’une analyse sérologique. Tout d’abord, chez les ovins, un indicateur basée sur des résultats sérologiques n’aurait été possible qu’en se limitant aux données de 2000 (d’où un nombre limité d’individus), puisque dès l’hiver 2000 – 2001, certains troupeaux ovins ont été vaccinés et que, actuellement, un animal vacciné ne peut pas être distingué d’un animal infecté par sérologie. D’autre part, chez les bovins, les données sérologiques n’étaient pas exploitables car elles n’étaient pas représentatives, l’échantillonnage basé sur le volontariat des éleveurs n’était pas représentatif. Or, on peut penser que la décision des éleveurs de tester leurs bovins a pu être influencée par la présence de cas cliniques chez les ovins (pour les éleveurs ayant à

la fois des bovins et des ovins) ou dans le voisinage. De plus, au sein même des troupeaux prélevés, tous les animaux n’ont pas été testés, et la proportion d’animaux testée est le plus souvent inconnue ou alors très variable. Or, plus on teste d’animaux, plus la probabilité de trouver des séropositifs est grande. Par ailleurs, comme on ne peut être certain du statut indemne d’un élevage que si tous les animaux ont été testés, il aurait été impossible de définir quels troupeaux bovins étaient indemnes.

Prendre en compte les foyers ovins survenus sur une période de quatre années (2000 - 2003) diminue le biais lié à la vaccination (le fait que certains élevages soient restés indemnes du fait de la vaccination) puisque durant cette période deux vagues de circulation virale de sérotypes différents (les sérotypes 2 et 4) ont frappé l’île, et que à chaque fois, conformément à la législation européenne, la vaccination n’a pas été mise en place avant l’arrivée du sérotype viral (les campagnes de vaccination ont eu lieu au cours des campagnes de prophylaxie hivernales suivant la saison de circulation virale). Néanmoins, il existe très probablement des élevages restés indemnes du fait de la vaccination. Mais ce biais de mesure existe également pour les autres indicateurs de l’état sanitaire des élevages, notamment les analyses sérologiques. Par ailleurs, travailler sur une période de quatre années, par rapport au fait de travailler uniquement sur les foyers liés au sérotype 2 (responsable de foyers en 2000 et 2001), permet d’augmenter les chances d’identifier des sites à risque éloignés du site d’introduction originel de la maladie (puisqu’en quatre ans, le vecteur a pu s’installer dans de nouveaux gîtes sur l’ensemble de l’île et que les sérotypes ont pu circuler et diffuser plus largement).

3.1.2. Échantillonnage et localisation des élevages

Le recensement des troupeaux de Corse du Sud a été réalisé par un des agents des services vétérinaires de Corse du Sud en 2001. Il n’a pas pu être comparé à une liste officielle exhaustive car les archives des bases de données de la direction départementale des services vétérinaires (DDSV) ne sont pas disponibles et que les données sont consultables uniquement à l’échelle de la commune. La comparaison est aussi rendue difficile par le fait que ce sont les bergeries qui avaient été pointées, et non les élevages tels qu’ils sont identifiés par les services vétérinaires (identification avec un numéro d’élevage, cf. partie 1.3. de ce chapitre).

Néanmoins, même si le recensement effectué n’est vraisemblablement pas exhaustif, le nombre de troupeaux ovins (203 sur les 404 troupeaux pointés) est du même ordre de grandeur que le chiffre d’exploitations ovines et caprines professionnelles de Corse du Sud (220) annoncé par le Ministère de l’Agriculture et de la Pêche pour l’année 2005 (MAP,

2006a). On peut aussi regretter que les changements (cessations, nouveaux éleveurs…) intervenus depuis 2001 n’aient pas été pris en compte. L’information obtenue reste néanmoins très précieuse et n’est pas répertoriée ailleurs (seule la distribution des élevages à l’échelle de la commune est connue par les DDSV). A priori, choisir les élevages sous la responsabilité

d’un agent des services vétérinaires ne constitue pas en soi un biais important, puisque un grand nombre d’élevages ont été recensés, sans prendre en compte leur statut sanitaire (cette information étant issue d’une synthèse de données officielles de la DDSV réalisée en 2004).

Les élevages ont été localisés au niveau des bergeries. La localisation idéale des élevages infectés serait le lieu d’exposition pendant la période à risque. Cela impliquerait de disposer du parcellaire agricole afin connaître les pâturages précis occupés, ainsi que les modalités de conduite d’élevage, notamment si les animaux étaient rentrés la nuit à la bergerie ou non. Ces données ne sont pas disponibles et leur obtention représenterait une charge de travail très importante et raisonnablement envisageable que pour une zone limitée. Néanmoins, dans le cas de la FCO, ce biais de localisation potentiel est réduit par le fait que les ovins sont souvent rentrés le soir à la bergerie (notamment pour la traite), et qu’ils passent ainsi la soirée et la nuit, période d’activité des Culicoides, au voisinage des bergeries.

3.1.3. Données sur les caractéristiques des élevages

Plusieurs informations auraient pu utilement compléter cette étude : les effectifs des élevages, et leur pratique éventuelle de la transhumance.

Les effectifs des élevages n’ont pas pu être recueillis de façon rétrospective pour tous les troupeaux et n’ont donc pas été inclus dans l’analyse (trop de données manquantes). Ceci pourrait constituer un biais puisque le risque d’avoir au moins un animal malade augmente avec la taille du troupeau. Néanmoins, ce biais pourrait être moins important que supposé puisque pour 85 élevages de la région d’Ajaccio pour lesquels la taille des troupeaux était connue, aucun lien statistiquement significatif avec la survenue de foyer n’a été mis en évidence (p = 0,37).

L’absence de données relatives à la pratique de la transhumance pourrait biaiser l’étude puisque des voisinages d’élevages indemnes pourraient être favorables à la FCO sans déclaration de foyers à cause de l’absence des animaux pendant la saison de transmission de la FCO. En effet, en transhumance, les animaux ont sans doute moins de chance d’être infectés car les conditions en altitude sont moins favorables aux Culicoides (qui ne seraient

Intégrer cette information n’a pas été possible car il aurait fallu comparer les dates et les lieux de transhumance aux périodes de circulation virale afin de réellement savoir si les animaux avaient été exposés ou non ; et ces informations ne pouvaient pas être obtenues de façon fiable de façon rétrospective.

Ces informations sur la localisation précise des animaux (pâturages, conduite d’élevage et transhumance) seraient néanmoins intéressantes à recueillir lors d’études futures afin d’identifier précisément les zones où les animaux sont exposés au virus.