• Aucun résultat trouvé

Chapitre 2 Revue des concepts

2.2 La mise en garde : outil de communication des risques

2.2.4 Règles de conception des mises en garde

2.2.4.2 Directives de conception provenant des normes et de la recherche

La conception d’une mise en garde adéquate et efficace demande, de la part du concepteur, de répondre à cinq questions importantes : quoi, qui, comment, quand et où mettre en garde. Ce sont cinq questions simples, mais parfois complexes à répondre. Les prochains paragraphes résument donc les directives de conception des mises en garde qui proviennent à la fois des normes ISO 3864-2 [2004], ANSI Z535.4 [2007] et des résultats provenant des recherches effectuées dans les domaines de la psychologie et de l’ergonomie.

Qui : De façon générale, le public visé par une mise en garde inclut tout individu

pouvant être exposé au risque. Celle-ci doit donc être conçue en prenant en considération les individus dont les capacités sont les plus réduites, qu’elles soient de type physique, telle la perte d’acuité visuelle chez les personnes âgées, ou de type cognitif, telle une limitation dans la compréhension d’informations de nature technique [Wogalter, 2006b]. Selon l’ISO 3864-2 [2004], le public visé est l’un des facteurs principaux à prendre en compte lors de la conception d’une mise en garde, puisqu’il aura nécessairement une influence sur sa forme et son contenu.

Comment : La plupart des mises en garde sont communiquées de façon visuelle par

du texte et des symboles ou de façon auditive par l’utilisation de sons ou de messages verbaux. Dans certains cas exceptionnels, les mises en garde peuvent faire appel à d’autres sens, tel l’olfactif (ex. : addition d’une odeur au gaz naturel afin de faciliter sa détection). Différents médias peuvent être sollicités lors de la communication d’une mise en garde : une étiquette apposée sur un produit, un manuel à l’usager, une brochure, une affiche, une séance de formation, une communication entre deux employés, etc. L’ISO 3864-2 [2004] recommande d’ailleurs, à titre informatif, d’utiliser le processus d’appréciation et de réduction du risque proposé par le Guide ISO/CEI 51

[1999] afin de choisir les dangers qui seront abordés sous forme d’étiquetage et ceux qui seront traités sous forme de documentation destinée à l’utilisateur (ex. : emballage d’un produit, livrets d’information, manuels de fonctionnement et d’entretien). De façon générale, l’étiquetage de sécurité sera réservé aux risques les plus critiques; les normes ISO 3864-2 [2004] et ANSI Z535.4 [2007] pourront donc être utilisées comme référence lors de la conception de ces mises en garde. La documentation destinée aux utilisateurs pourra quant à elle contenir des informations nouvelles ou complémentaires à ces étiquetages; la norme ANSI Z535.6 Product Safety Information in Product Manuals, Instructions, and Other Collateral Materials [2006] pourrait donc servir de référence lors de la rédaction de ces documents [Hall et al., 2006]. La norme ISO 3864-2 [2004] ajoute également que ces écrits peuvent contenir des informations supplémentaires expliquant la signification des signaux et des symboles de sécurité afin de favoriser leur apprentissage et une meilleure compréhension des mises en garde.

Quoi : La littérature suggère qu’une mise en garde soit composée de deux encadrés :

(1) l’encadré de gravité du danger (signal word panel) et (2) l’encadré du message (message panel). Ceux-ci peuvent contenir soit du texte, soit des symboles graphiques ou une combinaison des deux.

L’encadré de gravité du danger a comme principaux objectifs d’attirer l’attention des individus et de préciser, tel que son nom l’indique, le niveau de danger relié au risque [Peckham, 2006a; Wogalter et Vigilante, 2006; Young et al., 2006b]. Selon les normes ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004], il est composé de trois éléments distincts : ƒ Mot d’alerte : Est, par définition, un mot qui attire l’attention sur la mise en garde

et qui désigne une catégorie de risque. Les mots d’alerte pour l’étiquetage de sécurité des produits sont DANGER (DANGER), AVERTISSEMENT (WARNING), ATTENTION (CAUTION) et AVIS (NOTICE), ce dernier n’étant suggéré que par la norme ANSI Z535.4 [2007] (cf. Tableau 1). La signification des mots d’alerte entre les normes ANSI et ISO se distingue selon un élément important : pour l’ANSI, les mots DANGER, AVERTISSEMENT et ATTENTION ne sont réservés que pour des dommages physiques pouvant être affligés à une personne (personal injury), alors que l’ISO ne fait pas de distinction à cet effet. C’est pourquoi l’ANSI suggère un mot d’alerte supplémentaire, l’AVIS, afin d’indiquer un danger potentiel qui n’est pas relié directement à une blessure corporelle.

Tableau 1 Définition des mots d’alerte dans les normes ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004]

MOT D’ALERTE ANSIZ535.4 ISO3864-2

DANGER

(DANGER)

Indicates a hazardous situation which, if not avoided, will result in death or serious injury. This signal word is to be limited to the most extreme situations.

Mot d’alerte utilisé pour signaler une situation dangereuse imminente qui, si elle n’est pas évitée, entraînera la mort ou un préjudice grave.

AVERTISSEMENT (WARNING)

Indicates a hazardous situation which, if not avoided, could result in death or serious injury.

Mot d’alerte utilisé pour indiquer une situation potentiellement dangereuse qui, si elle n’est pas évitée, pourrait entraîner la mort ou un préjudice grave.

ATTENTION (CAUTION)

Indicates a hazardous situation which, if not avoided, may result in minor or moderate injury.

Mot d’alerte utilisé pour signaler une situation potentiellement dangereuse qui, si elle n’est pas évitée, pourrait entraîner un dommage mineur ou modéré.

AVIS

(NOTICE) Used to address practices not related to personal injury. ---

De façon générale, le niveau de danger sera évalué en fonction de la gravité des conséquences possibles, soit la mort, un préjudice grave, un dommage mineur ou modéré, et de la probabilité qu’elles surviennent. L’ANSI suggère également de considérer dans cette évaluation la probabilité qu’un accident survienne si la situation dangereuse n’est pas évitée, et ce, quelque soit la gravité des conséquences possibles. Elle propose de plus à titre informatif une méthode et des directives afin de faciliter la sélection du mot d’alerte.

ƒ Code de couleur : La couleur de fond de l’encadré de gravité varie selon la gravité

du risque. La couleur utilisée est donc rouge pour DANGER, orange pour AVERTISSEMENT, jaune pour ATTENTION et bleu pour AVIS.

ƒ Signal d’avertissement : Le signal d’avertissement est formé d’un triangle équilatéral à l’intérieur duquel un point d’exclamation est apposé. Selon ANSI, la couleur de fond du triangle doit concorder avec celle du mot d’alerte alors que la couleur du point d’exclamation doit correspondre à celle de l’encadré de gravité (cf. Figure 7 (1)). En 2006, l’ANSI a intégré dans sa norme le symbole d’alerte de l’ISO, qui est un triangle ayant une couleur de fond jaune et un point d’exclamation en noir (cf. Figure 7 (2)). Finalement, l’ANSI exige que le symbole d’alerte soit seulement utilisé pour des risques relatifs à des blessures corporelles, alors qu’ISO n’y apporte pas de distinction.

(1) ANSI Z535.4 (2) ANSI Z535.4 et ISO 3864-2

Figure 7 Symboles d’alerte proposés par l’ANSI Z535.4 [2007] et l’ISO 3864-2 [2004]

La Figure 8 et la Figure 9 présentent l’allure générale d’un encadré de gravité du danger conforme respectivement à la norme ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004]. Finalement, contrairement à la norme ANSI Z535.4 [2007], l’utilisation de l’encadré de gravité du danger est optionnelle pour l’ISO 3864-2 [2004].

(1) Danger (2) Avertissement (3) Attention (4) Avis Figure 8 Encadrés de gravité du danger selon l’ANSI Z535.4 [2007]

(1) Danger (2) Avertissement (3) Attention

Figure 9 Encadrés de gravité du danger selon l’ISO 3864-2 [2004]

L’encadré du message d’avertissement contient quant à lui les informations essentielles relatives au danger. Selon les normes ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004], le message doit généralement comporter les informations sur (1) le danger auquel les individus sont exposés (ex. : hauts voltages) et (2) les actions à entreprendre ou à ne pas entreprendre afin d’éviter le danger. La norme ANSI Z535.4 [2007] exige également d’y intégrer une description des conséquences possibles si le danger n’est pas contourné (ex. : graves brûlures). Elle mentionne également que l’une des composantes du message peut être éliminée si elle peut être déduite à partir d’autres informations données dans la mise en garde ou du contexte dans lequel elle est située. Par exemple, une mise en garde signalant « ATTENTION – Plancher glissant » ne requiert probablement pas d’énoncer la conséquence « Vous pouvez tomber. », puisque la majorité des personnes effectuent naturellement cette déduction [Wogalter et al., 1987]. Finalement, la norme ANSI Z535.4 [2007] stipule que le message d’avertissement doit être concis et facilement compréhensible par le public visé. Elle propose également plusieurs directives et conseils afin de hausser la lisibilité du message : utiliser une voie active, éviter les prépositions, aligner le texte à gauche, utiliser des puces, utiliser un espace adéquat entre les mots et les lignes, etc.

Les normes suggèrent d’utiliser des symboles graphiques ou « symboles de sécurité » afin de clarifier, compléter ou substituer de façon partielle ou totale le message d’avertissement. L’ISO 3864-2 [2004] propose à cet effet une combinaison de signaux et de symboles de sécurité. Le signal de sécurité indique la nature de l’information divulguée, soit la nature du danger, l’interdiction ou l’obligation d’engager une action afin d’éviter le danger, alors que le symbole à l’intérieur de celui-ci communique l’information proprement dite (cf. Figure 10). Tel que mentionné précédemment, l’ISO met à disposition une collection de symboles pouvant être utilisés lors de la conception des mises en garde.

(1) Avertissement (2) Interdiction (3) Obligation

Figure 10 Exemple de signaux de sécurité accompagnés par des symboles [ISO 3864- 2, 2004]

De façon générale, les normes laissent la liberté aux concepteurs de choisir le format de la mise en garde. Elles suggèrent donc différents modes de présentation, allant du simple signal de sécurité jusqu’à une combinaison de l’encadré de gravité du danger, de symboles de sécurité et de textes. La Figure 11 présente une mise en garde typique et conforme respectivement à la norme ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004].

(1) Norme ANSI Z535.4

[Clarion Safety Systems] (2) Norme ISO 3864-2 [2004] Figure 11 Exemples de format d’une mise en garde

En somme, bien que les normes ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004] se différencient en certains points, elles restent sommairement semblables ; le concepteur pourra donc choisir la norme la plus applicable dépendamment du produit

en cause, des conditions du marché et du public visé [Peckham, 2006b]. Finalement, le lecteur est invité à consulter un résumé des directives de conception donné au Tableau 3 Règles de conception des mises en garde [Wogalter, 2006a] de l’Annexe A.

Quand et Où : Les normes ANSI Z535.4 [2007] et ISO 3864-2 [2004] mentionnent

qu’une mise en garde devrait idéalement être positionnée de sorte qu’elle soit facilement lisible pour le public visé et qu’elle alerte celui-ci suffisamment à l’avance afin qu’il puisse agir de façon appropriée face au danger.