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Chapitre I. Propagation de la lumière dans les fibres optiques

I. 7.2.4.1. Diffusion Raman Stimulée (SRS)

Le principe de base de la diffusion Raman stimulée (SRS) est représenté sur la Figure suivante. Le matériau, initialement dans son état fondamental, absorbe une fraction hr de l’énergie des photons incidents pour évoluer vers un état excité correspondant à une résonnace de vibrations intramoléculaires. En conséquence, les photons résultant de ce processus sont réémis de manière co-propagative à une fréquence plus basse donnée par ωs = ω− Ωr et sont usuellement appelés photons Stokes, où r représente le « shift » ou décalage Raman qui est de l’ordre de 13-THz (fréquence de résonance de vibration du réseau) pour une fibre standard Télécom [8, 15]. De manière similaire, si le nombre de molécules dans l’état excité est suffisamment élevé, celles-ci peuvent interagir avec les photons incidents pour retourner dans leur état fondamental et ainsi émettre des photons de type Anti-Stokes à la fréquence ωas =ω+Ωr [8, 15].

Figure I-13 Schéma des transitions énergétiques à la base de la diffusion Raman.

Finalement, cet effet est maintenant largement utilisé par les amplificateurs de type Raman. En effet, lorsque la puissance de l’onde Stokes devient non négligeable devant celle du signal qui lui a donnée naissance, nous observons alors un régime de diffusion Raman stimulée dans lequel les basses fréquences sont continuellement amplifiées par les hautes fréquences. Ce régime, défini de façon arbitraire, intervient lorsque la puissance de l’onde Stokes devient égale à la puissance de la pompe en sortie de fibre et est donc défini par une puissance critique d’injection donnée par [7, 8] :

16 eff crit r eff A P g L = , (1.55)

Aeff est l’aire effective de la fibre, grle gain Raman (typiquement 10-13m/W pour une fibre standard) et Leff la longueur effective de la fibre due à ses pertes intrinsèques et donnée par [8] :

( )

1 exp eff L L

α

α

− − = , (1.56)

α

est le coefficient de pertes de la fibre optique en m-1 et L, la longueur de la fibre en m.

Typiquement, pour une fibre DSF de L=5km (Aeff=55µm2,

α

=0.2dB/km), la puissance critique Raman est d’environ 2W tandis que pour une ligne Télécom composée de SMF avec L=100km, Aeff=80µm2 et

α

=0.2dB/km, cette puissance passe à 590mW.

Le phénomène de diffusion Raman stimulée peut alors être exploité pour la génération de nouvelles fréquences et de larges continuums ou encore tout simplement comme amplificateur en ligne afin de compenser les pertes d’un système Télécom. En effet, la bande spectrale du gain Raman étant relativement large (∼20-THz, soit environ 100nm), ce dispositif permet d’amplifier une large bande de canaux dans des systèmes multiplexés en longueur d’onde (WDM). Par contre, ce phénomène possède également le défaut majeur d’amplifier naturellement les canaux de basses fréquences qui sont situés dans la courbe de gain Raman formée par les canaux de hautes fréquences et de briser ainsi l’équilibre du spectre.

La diffusion Raman peut être ajoutée dans l’équation NLS pour des impulsions pas trop courtes (FWHM>1ps) suivant l’expression donnée par [7, 8] :

2 2 2 2 2 2 r A A A i i A T A z t t

β γ

+= ∂ ∂ ⎢ ∂ ⎥ , (1.57)

Trreprésente la pente de la courbe au centre du gain Raman, typiquement Tr=3 à 5fs [8].

Il est alors possible de montrer qu’au cours de la propagation ce terme correspond à un décalage de la fréquence centrale des impulsions qui, pour un soliton fondamental, est égal à [7, 8] :

( )

2 2 0 8 15 r r T z z t

β

ω

∆ = − , (1.58)

t0 est la largeur à 1/e du soliton et z la distance de propagation.

Ceci s’explique aisément par la diffusion Raman stimulée. En effet, lorsque les impulsions sont très courtes et énergétiques (FWHM<1ps), elles possèdent un spectre suffisamment large pour qu’au cours de leur propagation le gain Raman amplifie les composantes spectrales de basses fréquences (rouge) grâce à l’énergie véhiculée par les hautes fréquences (bleu) qui jouent alors le rôle de pompe. Ce processus, connu en anglais sous le nom de « self-frequency shift », se poursuit au cours de la propagation et augmente progressivement le décalage fréquentiel du spectre de l’impulsion vers les basses fréquences, d’où le signe moins dans l’équation (1.58) [7, 8].

Afin d’illustrer ce phénomène de décalage fréquentiel, nous pouvons observer la propagation d’un soliton fondamental de 1ps dans une fibre SMF classique en présence de diffusion Raman stimulée. Les paramètres de la simulation sont les suivants :

D (ps/km.nm) γ (W-1/km) Tr (fs) FWHM (ps) N P0 (W) z0 (km) L (km)

17 3 5 1 1 22.5 2.33 50z0

La simulation numérique montre clairement sur la Figure I-14(a) un décalage fréquentiel progressif du spectre du soliton vers les basses fréquences. En effet, l’impulsion étant relativement courte (FWHM=1ps, donc un spectre large) et sa puissance crête élevée (22.5W), le gain Raman amplifie les composantes spectrales de basses fréquences à partir de l’énergie contenue dans les hautes fréquences. Ce processus engendre donc progressivement un décalage fréquentiel du spectre de l’impulsion vers les basses fréquences. Nous ajouterons que ce décalage fréquentiel est accompagné d’une dérive temporelle occasionnée par la différence de vitesse de groupe liée à la dispersion chromatique de la fibre, phénomène observable sur la Figure I-14(b). Cette dérive temporelle pose un véritable problème pour un système Télécom car, si l’impulsion sort de sa période initiale appelée « temps bit », la détection synchronisée sur le signal initial ne peut plus s’effectuer correctement et l’erreur devient alors systématique.

Figure I-14 (a) Evolution du spectre d’un soliton fondamental de 1ps en présence de diffusion Raman stimulée sur 50 périodes solitoniques, vue du dessus (b) Evolution du profil d’intensité en fonction de la distance de propagation normalisée par z0.

Comparons maintenant la propagation d’un soliton d’ordre 2, N=2 dans l’équation (1.48), dans une fibre SMF classique, avec et sans diffusion Raman stimulée. Les paramètres de la simulation sont les suivants :

D (ps/km.nm) γ (W-1/km) Tr (fs) FWHM (ps) N P0 (W) z0 (km) L (km)

17 3 5 10 2 0.896 2.33 10z0

En l’absence de diffusion Raman, nous observons sur la Figure I-15(a) que le soliton d’ordre 2 retrouve périodiquement sa forme initiale toutes les distances z0 après avoir subit une compression, où cohabitent alors un pic central et deux impulsions satellites, puis un élargissement.

Figure I-15 (a) Evolution d’un soliton d’ordre 2 sur 3 périodes solitoniques (b) Idem sur 10 périodes solitoniques et en présence de diffusion Raman.

Parallèlement, nous constatons sur la Figure I-15(b) que la présence de diffusion Raman stimulée brise cette périodicité. En effet, lorsque l’impulsion se comprime à z0/2, le pic central, alors court et intense, subit un décalage fréquentiel beaucoup plus important que ses deux impulsions satellites. Grâce à la différence de vitesse de groupe, il se crée alors une séparation temporelle entre le pic central et ses composantes de plus basses énergies. Le pic central évolue finalement vers un soliton fondamental de

(a) (b)

plus faible durée et de plus forte puissance crête. C’est donc un excellent moyen, comme nous le verrons aux paragraphes III.1.2.3 et III.1.3.4, pour comprimer et pour « nettoyer » des impulsions.