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Chapitre 2 : Site d’étude et campagne de mesures non destructives

I. Présentation de l’atelier D des ATUE

I.4. Difficultés rencontrées par le projet

La problématique de la caractérisation est fondamentale pour la conduite d’un projet de dé- mantèlement d’une installation nucléaire. Afin d’illustrer les difficultés rencontrées, les préoccu- pations et les contraintes inhérentes à un tel projet, deux exemples sont illustrés sur les ATUE.

L’objectif, plutôt que d’insister sur certaines erreurs passées, est de mettre en évidence la grande difficulté de la caractérisation des déchets lors des opérations de démantèlement et d’assainissement. L’absence d’une méthodologie éprouvée et pertinente pour la caractérisation radiologique des structures de génie civil est ainsi mise en évidence malgré la grande nécessité de cette phase-ci pour la réussite des projets de démantèlement.

Chapitre 2 : Site d’étude et campagne de mesures non destructives

Avis d’incident sur un colis de déchet mal caractérisé (Autorité de Sûreté Nucléaire, 2003)

« Atelier d'uranium enrichi (ATUE) - Cadarache - CEA

Dans le cadre des opérations de cessation définitive d'exploitation de l'installation ATUE (Ateliers de traitement d'uranium enrichi), un colis de déchets a été constitué, comprenant plu- sieurs objets contaminés tel que : une armoire, des boîtiers électriques, un tabouret, etc. Il a été dirigé le 19 avril 2003 vers la station de traitement des effluents et déchets solides (INB 37), si- tuée également sur le site de Cadarache, afin d'y être traité.

La masse de matière nucléaire fissile présente dans le colis a été estimée à l'origine par une procédure forfaitaire basée sur des mesures surfaciques partielles.

Après traitement, en juin 2003, les déchets ont fait l'objet d'une mesure de radioactivité très précise, qui a mis en évidence la présence d'une masse d'uranium nettement supérieure à celle qui avait été estimée forfaitairement (35,5 grammes d'uranium 235 présents au lieu de 0,035 gramme estimés).

Cet écart semble dû à l'inadaptation de la procédure utilisée pour évaluer forfaitairement la masse de matière nucléaire dans ce type de colis. Des investigations sont en cours pour confirmer ce diagnostic. Cet écart a conduit à un non-respect des conditions de sûreté du transport interne des déchets entre les deux installations, ainsi qu'à un non-respect des règles de comptabilisation des matières nucléaires.

Cet évènement n'a eu aucune conséquence sur le personnel et l'environnement. En particulier, tous les déchets font systématiquement l'objet d'une mesure de radioactivité précise avant leur évacuation du centre de Cadarache, vers une installation extérieure d'élimination des déchets.

Cet évènement est classé au niveau 1 de l'échelle INES, compte tenu de l'application d'une procédure manifestement inadéquate. »

Bien que cet évènement n’ait entraîné ni contamination de l’environnement ni impact sur les travailleurs, il met en doute le bien-fondé de la méthodologie de caractérisation employée jus- qu’ici : présence d’un facteur 1000 entre valeur estimée de manière forfaitaire et valeur mesurée. Rappelons que l’uranium est un émetteur alpha qui se quantifie difficilement à partir de mesures surfaciques si la contamination est en profondeur (1 mm de vernis suffit à masquer le rayonne- ment alpha). Cet événement, d’une portée relativement limitée, n’est malheureusement pas isolé et imputable au seul projet des ATUE. Des erreurs de caractérisation sont malheureusement chose assez courante, ce qui pénalise systématiquement la catégorisation des déchets et la bonne con- duite des projets d’assainissement.

Chantier pilote de l’atelier B

Pour la déclinaison du guide SD3-DEM-02 par le projet de démantèlement et d’assainissement des ATUE, des chantiers pilotes ont été mis en place afin de valider la méthodo- logie d’assainissement retenue. Ils concernaient les appentis Ouest de l’atelier C ainsi qu’un local de l’atelier B. Ils ont mis en évidence un nombre très important de singularités présentes dans les structures : chevilles, fissures, inserts métalliques, plans de joints, tuyaux noyés dans la chape ou dans les murs, etc. De plus, les enduits et revêtements ont une qualité variable, ce qui complique les opérations d’agression des structures par rabotage ou bouchardage.

La méthodologie d’assainissement a alors été modifiée pour intégrer le retour d’expérience sur les chantiers pilotes des ATUE ainsi qu’en tenant compte d’autres projets d’assainissement. La méthodologie de traitement des singularités a été complétée et des cartographies complémen- taires se sont avérées nécessaires pour ajuster la catégorisation des surfaces (afin d’optimiser la gestion des déchets).

Les sols, murs et plafonds de l’atelier B ont été traités (Figure 10). Cependant, l’atelier reste à ce jour partiellement écroûté, suite à des difficultés contractuelles avec le prestataire. De ce fait, il n’est que partiellement assaini (quelques contaminations sont encore présentes malgré le traite- ment des surfaces).

Figure 10 : Atelier B pendant les opérations d'assainissement (à gauche) et à l'issue des travaux (à droite). La méthodologie de caractérisation après assainissement a également fait l’objet de modifica- tions (seconde ligne de défense) par l’évolution du critère de décision qui a été adapté pour at- teindre un processus industriel. Le programme des contrôles finaux a également été redéfini par rapport à des contraintes de limite de détection des appareils de mesures afin d’optimiser le temps de comptage nécessaire.

Le retour d’expérience sur ce chantier pilote a montré la nécessité de disposer d’une analyse historique beaucoup plus poussée que celle réalisée à l’époque et l’importance de la mise à jour de la cartographie radiologique du génie civil après dépose des équipements de procédés (constitu- tion de l’état radiologique initial avant les opérations d’assainissement). Le zonage déchets en vigueur pendant l’exploitation de l’installation ne coïncide pas systématiquement avec le zonage « opérationnel » pour l’assainissement des bâtiments. Cette démarche va dans le sens de l’optimisation des surfaces à écroûter et de la gestion des déchets.