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DIFFERENTS NIVEAUX D’ANALYSE DU SAVOIR APPRETE : CONTRAINTES ET ESPACE DE LIBERTE POUR L’ENSEIGNANT

ENSEIGNANTES : DIVERSITE DES PRATIQUES SUR UN DOMAINE D’ETUDE

II. DIFFERENTS NIVEAUX D’ANALYSE DU SAVOIR APPRETE : CONTRAINTES ET ESPACE DE LIBERTE POUR L’ENSEIGNANT

Analyser l’apprêtage didactique du savoir fait par les enseignants sur un domaine mathématique donné nécessite de faire un choix sur la granularité de descriptions à adopter. Car comme le souligne Bosch (2002, p. 32), il faut « être capable d’analyser [les organisations mathématiques mises en place] en éléments ni ‘trop gros’ ni ‘trop fins’ pour ne pas tuer [leur] ‘structure vitale’ ».

Pour tenir compte tout à la fois, de la dynamique des OM de même niveau de définition sur l’année, et de celle des OM de différents niveaux entre elles nous avons choisi d’utiliser les niveaux de détermination mathématique95 (Chevallard, 2002).

Nous avons découpé le programme d’arithmétique de 1998 selon cette échelle de niveaux :

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Pour plus de détails sur notre méthodologie d’analyse et les outils utilisés, se reporter au chapitre précédent « Analyse des pratiques ens eignantes : point de vue théorique et choix méthodologiques ».

Chapitre C2 : Diversité des pratiques sur un domaine d’étude

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Fig. 22 : Découpage mathématique du programme de spécialité mathématique de 1998 en domaines, secteurs, thèmes et sujets d’étude

GEOMETRIE DOMAINE ARITHMETIQUE Secteur Divisibilité Multiples d’un entier Thème s Etc. Diviseurs d’un entier Etc. Sujet Etc. Etc. Nombres premiers Existence décomposition Existence infinité Etc. Etc. Etc. Nombre premier ? Etc

Division euclidienne et algorithme d’Euclide

PGCD PPCM Entiers Etc.

premiers entre eux Calcul Calcul

Etc. Etc. Etc.

Critère Div.

Numération

Etc.

Théorèmes de Bézout et de Gauss

Etc.

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Si, dans le programme, les secteurs d’étude sont explicitement inscrits, les thèmes et les sujets d’étude ne sont que peu développés. On ne trouve par exemple aucun thème associé au secteur théorèmes de Bézout et de Gauss. Nous avons donc indiqué par « Etc. » le fait que d’autres thèmes, respectivement sujets, d’étude pouvaient prendre place dans un secteur, respectivement thème, d’étude donné.

Dans l’apprêtage didactique du savoir, les enseignants possèdent donc une marge de manœuvre importante dans « les niveaux de plus grande spécificité, sujets et thèmes » (Chevallard 2002, p. 43).

En nous appuyant sur le découpage en secteurs, thèmes et sujets d’étude du programme, nous allons maintenant analyser le découpage du savoir apprêté par P1, P2 et l’IREM de Poitiers afin d’en dégager la dynamique sous-jacente. Comme bien sûr les enseignants n’organisent pas leur cours selon le découpage mathématique proposé par Chevallard mais qu’ils l’organisent généralement en chapitres, parties et paragraphes, en tenant compte de contraintes didactiques et temporelles, nous allons croiser les deux découpages en essayant de voir dans quelle mesure ils sont superposables.

Nous nous arrêtons au découpage en parties ; le découpage en paragraphes sur l’ensemble de l’année scolaire ne nous paraît pas pertinent ici. La dynamique entre ces deux grains de découpage de l’activité mathématique sera analysée en détail dans le cas particulier de l’organisation mathématique régionale construite autour de la division euclidienne96.

Nous finissons cette analyse par une étude de la contrainte temporelle sur le choix de progression des enseignants sur une année entière.

II.1 Apprêtage didactique du savoir : le découpage en chapitres ou secteurs d’étude ?

Dans le tableau ci-dessous, nous donnons le découpage en chapitres du cours d’arithmétique de P1, P2 et l’IREM de Poitiers :

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Cf. chapitre suivant « Observations naturalistes de deux enseignantes : comparaison du savoir apprêté autour de la division euclidienne. »

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Fig. 23 : Découpage en chapitres du cours d’arithmétique de P1, P2 et l’IREM de Poitiers

Deux points se dégagent de la comparaison de ces différents découpages et de celui proposé par le programme. D’une part, le découpage en chapitres et celui en secteurs ne se superposent pas et, d’autre part, l’introduction des nombres premiers n’intervient pas au même moment dans la progression mathématique de ces cours.

a) Découpage en chapitres et découpage en secteurs

Alors que P2 et l’IREM de Poitiers ont un grain de découpage en chapitre plus grossier que celui en secteurs d’étude du programme, P1 en a un beaucoup plus fin.

Le choix de structuration des OM en deux grands blocs fait par l’IREM de Poitiers s’explique par des contraintes liées à la volonté d’intégrer l’outil informatique dans le cours d’arithmétique. En effet, comme le souligne l’enseignant, « l’emploi [systématisé] du tableur Excel […] induit une approche et des types de démonstrations adaptés à cette démarche » (IREM de Poitiers 2000, p. 239).

En débutant le cours d’arithmétique par une introduction de la notion de divisibilité avec tableur, l’enseignant introduit la partie entière du quotient de deux entiers. A partir de là, la partie entière permet la programmation de la division euclidienne. Il devient alors possible de programmer l’algorithme d’Euclide et donc de rechercher un PGCD ou de résoudre une équation diophantienne. Ainsi le regroupement des secteurs divisibilité, division euclidienne, algorithme d’Euclide et théorèmes de Bézout et de Gauss en un seul chapitre est cohérent avec le choix d’utiliser un tableur en arithmétique.

P2 découpe également son cours en deux grands chapitres. Cependant, l’organisation du savoir qu’elle propose dans ces chapitres est différente de celle de l’IREM de Poitiers. Elle est

ARITHMETIQUE Divisibilité (1 séance) Nombres premiers (1 séance et demie) Division euclidienne (3 séances) PGCD (1 séance) Bézout et Gauss (2 séances) PPCM (2 séances) P1 Divisibilité et Nombres premiers (5 séances) Coupure de 13 semaines P2 PGCD-PPCM Nombres premiers entre eux

(4 séances) Divisibilité et PGCD–PPCM (9 séances) Coupure de quelques semaines Poitiers Nombres premiers et applications (4 séances)

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également différente du découpage proposé par le programme car ces chapitres se composent comme suit :

Divisibilité-Nombres premiers PGCD-PPCM-Nombres premiers entre eux

Divisibilité Nombres premiers Division euclidienne

PGCD Algorithme d’Euclide Théorèmes de Bézout et de Gauss

PPCM Fig. 24 : Découpage des chapitres en parties faits par P2

Dans le découpage de P2, le secteur division euclidienne et algorithme d’Euclide est scindé en deux. C’est un découpage qui est plutôt traditionnel : dans le premier chapitre, elle introduit les objets et les outils élémentaires du cours d’arithmétique avant de développer les théorèmes et outils plus élaborés dans le second. Ce découpage est lié au fait P2 centre ses pratiques mathématiques sur le logos, comme nous l’avons montré précédemment.

P1 se distingue nettement de P2 et de l’IREM de Poitiers sur l’organisation de son cours en chapitres. Tandis que ces deux derniers opèrent des regroupements de secteurs pour former leur chapitre, le cours de P2 semble « atomisé » en une succession de chapitres indépendants qui occupent une à deux séances au maximum97. Les chapitres qu’elle construit correspondent soit à des secteurs d’étude, soit à des thèmes.

Ce découpage fin s’explique par les choix pédagogiques de P1. En souhaitant faire travailler les élèves en autonomie sur des feuilles d’exercices, la praxis devient le moteur de l’avancée de son cours. Il devient alors cohérent de ne proposer que des petites unités de cours centrées sur des thèmes. Rappelons qu’un thème est une OM locale, centrée sur une technologie. Cette technologie outille les techniques nécessaires pour résoudre un ensemble de type de tâches. Les fiches d’exercices de P1 proposent ces types de tâches rattachés à chacun des thèmes. Elles « rythment » donc le découpage du cours en chapitres très courts.

b) Place des nombres premiers

Un point important de divergence possible entre les différents découpages concerne la place des nombres premiers. En effet, la notion de PGCD peut-être introduite soit avant les nombres premiers, soit après. Ces deux possibilités ne sont pas neutres vis-à-vis des choix effectués par la noosphère en 1971 et en 1998. Comme nous l’avons vu dans les chapitres B1 et B2, l’algorithme d’Euclide devient en 1998 la méthode de recherche de PGCD privilégiée alors qu’en 1971, c’était la décomposition en produit de facteurs premiers qui tenait le haut du pavé. Cette différence est liée à la volonté noosphérienne d’introduire l’ utilisation des outils informatiques en arithmétique.

P1, tout comme P2, introduit les nombres premiers avant le PGCD. Elles ne privilégient cependant pas la décomposition en produit de facteurs premiers pour le calcul d’un PGCD. D’autres raisons ont motivé leur choix.

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Le chapitre sur la division euclidienne mis à part. Nous l’étudierons plus particulièrement dans la suite de notre thèse.

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P1 a hésité sur le moment où introduire les nombres premiers la première année où elle a enseigné l’arithmétique :

« De toutes les façons, y’a des grands ordres, y’a par exemple savoir si on fait la décomposition en nombres premiers d’abord ou PGCD d’abord… Bon je dirais que ça s’est joué dans des discussions avec P11 [il s’agit de la seconde enseignante de spécialité avec qui P1 travaille très régulièrement] et avec… Je dirais que j’ai un peu hésité la première année puis finalement tu vois, à partir du moment où on a pris la brochure de l’IREM de Clermont qui était vraiment structurée, on a décidé de suivre son ordre. » (Extraits entretien P1)

P1, en accord avec P11, a donc adopté cette progression car c’est celle choisie par la brochure qui lui sert de référence pour construire son cours d’arithmétique. Cette brochure propose un projet de cours « qui était vraiment structuré » qui correspondait à leur vision des mathématiques :

« On aime bien sur certaines parties quand on peut insister sur le raisonnement, la formation, la rigueur du raisonnement, les points de logique, les choses comme ça […] » (Extraits entretien P1)

C’est cette idée de rigueur et de raisonnement qui a guidé la rédaction de ce projet de cours98 et qui a poussé P1 et P11 à suivre l’ordre de cette brochure.

Le choix de P2 a été guidé par d’autres raisons :

« […] Je ne me souviens plus de l’ordre précis mais je sais que la seconde année, j’ai pas fait la même chose, pas dans le même ordre. C’est l’introduction des nombre s premiers que je n’ai pas faite au même moment. Maintenant, je le fais plus tôt qu’avant. […]. Alors que la première année, je les avais laissés pour les mettre… et en fait ce n’était pas un bon calcul […]. Ca m’a gêné. Y’a des tas de moments où j’aurais eu envie de les utiliser et je ne les avais pas à ma disposition. » (Extraits entretien P2)

P2 a modifié l’ordre d’apparition des nombres premiers d’une année sur l’autre pour des raisons plus globales de structuration mathématique de son cours. Ce choix est cohérent avec l’analyse que nous avons faite du découpage en chapitres qu’elle propose. En effet, les nombres premiers font partie des objets élémentaires de l’arithmétique. Il n’est donc pas surprenant qu’elle se soit sentie mal à l’aise quand elle avait situé les nombres premiers en fin d’enseignement d’arithmétique. Ces objets élémentaires lui manquaient au moment d’aborder des notions plus complexes.

Cependant, cette raison d’ordre mathématique paraît peu fondée si l’on ne s’intéresse qu’au contenu du cours. En effet, les nombres premiers ne sont utiles que dans la 10ième et dernière séance de son cours, quand elle énonce la règle de détermination d’un PGCD ou d’un PPCM de deux entiers à partir de leur décomposition en produit de facteurs premiers. Cette raison semble beaucoup plus toucher à la vision qu’a P2 de l’arithmétique qui reste fortement influencée par le programme de 197199.

Contrairement aux cours de P1 et P2, dans le cours de l’IREM de Poitiers, les nombres premiers sont introduits après la notion de PGCD. Comme nous l’avons expliqué précédemment, ce choix est induit par l’intégration des outils informatiques dans le cours

98 Dans l’introduction de ce projet de cours nous pouvons lire : « Sauf erreur de ma part tout ou presque peut se démontrer dans ce cours […]. Enfin, de nombreux types de raisonnement peuvent être utilisés dans ce cours : raisonnement par récurrence, raisonnement par l’absurde etc. L’occasion rêvée de préparer nos élèves aux mathématiques du supérieur. » (Moncorgé 1998, p. 11)

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Voir entretien avec P2 qui est émaillé de références au temps où P2 enseignait l’arithmétique en collège il y a maintenant une vingtaine d’années.

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d’arithmétique. Il s’inscrit dans la droite ligne des conceptions noosphériennes qui ont guidé la rédaction du programme : l’algorithme d’Euclide est préféré aux nombres premiers pour la recherche d’un PGCD du fait de la volonté de favoriser l’usage d’outils informatiques100.

II.2 Apprêtage didactique du savoir : le découpage des chapitres en parties ou thèmes d’étude ?

Après avoir analysé le premier grain de découpage du savoir par les enseignants, les chapitres, nous allons maintenant nous intéresser à l’organisation de ces chapitres en parties.

Tout comme précédemment, nous allons analyser ce découpage à la lumière des niveaux de détermination mathématique et de la granularité de description du contenu du programme.

Nous donnons ci-dessous un tableau comparatif du découpage en parties des chapitres de cours de P1, de P2 et de l’IREM de Poitiers.

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Cette même volonté se retrouve dans le programme actuel de la classe de troisième. L’algorithme d’Euclide est plus « efficace » en terme de programmation car il n’est pas nécessaire de posséder une liste de nombres premiers.

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P1

Divisibilité

Propriétés de N

Multiples et diviseurs dans

Z Nombres premiers Existence infinité Existence décomposition Critère Eratosthène Division euclidienne Division euclidienne Congruences PGCD

Nombres 1ers entre eux Propriétés du PGCD Méthodes de calcul Existence Bézout et Gauss Théorème de Gauss Equation diophantienne Théorème de Bézout PPCM Propriétés PPCM Fraction irréductible P2 Divisibilité et Nombres premiers Nombres premiers. On travaille dans N Division euclidienne Multiples et diviseurs (dans Z) PGCD-PPCM Nombres premiers entre eux

Nombres 1ers entre eux Equation diophantienne PGCD PPCM PGCD-PPCM-Décomposition en produit de facteurs premiers Poitiers Divisibilité et PGCD– PPCM Diviseurs, multiples Division euclidienne Divisibilité Congruence Diviseurs et multiples communs PGCD et PPCM Base de numération Nombres premiers et applications

Les nombres premiers Définition Décomposition en

facteurs premiers

Infinité des nombres 1ers

Détermination PGCD-PPCM

Les nombres 1ers à travers l’histoire Une application pratique : la cryptographie Chapitres Parties

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Nous constatons tout d’abord que le découpage en parties regroupe des niveaux de découpage mathématique très divers. En effet, on a aussi bien des sujets –détermination PGCD-PPCM à partir des nombres premiers de l’IREM de Poitiers–, des thèmes –existence d’une infinité de nombres premiers de P1– que des secteurs –nombres premiers chez P2. Le cas de P2 est ici particulier. En effet, son découpage en parties reste encore à un niveau d’organisation très « grossier ». Son organisation centrée sur le logos contraint fortement son apprêtage didactique du savoir à enseigner.

Il est surprenant de voir qu’aucun des trois enseignants ne présente l’algorithme d’Euclide à ce niveau de découpage alors que c’est un des contenus centraux du programme.

Chez P1, nous voyons apparaître deux parties qui diffèrent de celles présentes chez les deux autres enseignants : les propriétés de N et les fractions irréductibles. Le fait de débuter le cours d’arithmétique par les propriétés de N correspond à un choix mathématique fort de P1 : faire travailler le raisonnement aux élèves, choix motivé par la spécificité des élèves de spécialité mathématique. Quand on demande à P1 son avis sur la spécialité mathématique, elle répond :

« Moi je dirai pour les élèves, ben l’objectif de formation qui est plus l’abstraction […]. En cours obligatoire actuellement on fait presque que de la technique alors qu’en spécialité math, sur le cours de géométrie ou le cours d’arithmétique, […] on truande moins sur le départ. C'est-à-dire qu’il y a une axiomatique qui est plus claire, et il y des démonstrations qui sont nettement plus rigoureuses. Donc en fait, ça sert énormément aux élèves qui font des études de mathématiques après, même à ceux qui font de la physique. […] [j’aimais bien enseigner l’arithmétique] parce que je pense que justement ça a l’avantage de partir d’une axiomatique sur les propriétés de N qui sont simples et que ça a l’avantage justement de pouvoir être rigoureux. » (Extraits entretien P1)

Le cours de l’IREM de Poitiers se situe plus dans l’esprit du programme actuel. Les propriétés de N ne sont pas introduites et deux parties apparaissent spécifiquement dans ce cours : les nombres premiers à travers l’histoire et leur application pratique à la cryptographie. C’est le seul cours qui fasse vivre la niche « culturelle » du programme en y consacrant une partie. Par ailleurs, c’est également le seul cours qui introduise la cryptographie. Ceci est conforme au programme qui propose dans le cadre des travaux pratiques «l’introduction de quelques exemples de […] méthode de codage ou de cryptage » pour donner aux élèves des « occasions d’applications concrètes » d’algorithme. Nous reviendrons sur ce point lors de l’analyse écologique des cours de chacun des trois enseignants.

II.3 Apprêtage didactique du savoir : poids de la contrainte temporelle sur l’organisation du domaine d’étude

Les analyses faites précédemment ne nous ont pas encore permis de prendre en compte le poids que peut avoir la contrainte temporelle sur les choix d’apprêtage du savoir faits par les enseignants. Or cette contrainte ne peut être ignorée lorsque l’on s’interroge sur les pratiques des enseignants sur un domaine d’étude.

Au début de l’année scolaire, le professeur doit programmer, pour chacune de ses classes, son enseignement de mathématiques. Habituellement, pour les professeurs expérimentés, organiser cette progression n’est pas problématique. L’expérience du métier acquise au fil des

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années leur permet d’apprécier le temps à consacrer à chaque domaine d’étude et de prévoir leur répartition sur l’année.

Cependant, sous certaines conditions, cette tâche peut poser problème. Les enseignants débutants, par exemple, éprouvent des difficultés importantes pour « concevoir [un] cours complet sur chaque notion, au sein d’une progression cohérente sur l’année » (Robert 2001, p. 64). En effet, comme le souligne Robert, la prise en compte de cette « double globalité » leur demande de mettre en œuvre « des activités y compris mathématiques dont certaines étaient peu pratiquées jusqu’alors, comme l’organisation des connaissances, avec le choix d’un ordre pour l’année et d’un découpage pour chaque chapitre, avec la prise de conscience, voire la mise en évidence de relations entre les chapitres […] » (Ibid.). Dans une moindre mesure, les professeurs expérimentés peuvent eux aussi être confrontés à ce problème si par exemple les programmes d’enseignement changent ou s’ils ont, pour la première fois, une classe d’un niveau qu’ils n’avaient jamais eu auparava nt.

La réintroduction de l’arithmétique a mis les professeurs de terminale S spécialité mathématique face à cette difficulté. En effet, ces derniers ne disposaient pas de repères par rapport à l’enseignement de l’arithmétique, tant au niveau des difficultés d’apprentissage des élèves qu’au niveau du degré de développement à donner à chacune des notions du programme, pour ne citer que ces deux contraintes. Et si certains des enseignants avaient pu enseigner l’arithmétique avant sa disparition des programmes en 1983, cette expérience ne pouvait être suffisante pour dépasser ce problème, les programmes d’arithmétique de la période des mathématiques modernes et ceux de la période contemporaine étant, comme nous l’avons vu, très différents.

Une des premières tâches didactiques dont doit s’acquitter un professeur pour apprêter le savoir à enseigner est de déterminer le temps à consacrer à chacun des domaines d’étude. Tandis que le programme de 1998 ne donnait aucune indication temporelle, le programme de 2002 précise explicitement que la répartition des séances de spécialité doit se faire de façon équitable entre l’arithmétique et les compléments de géométrie. Nous pouvons interpréter ceci comme une régulation de la noosphère aux perturbations entraînées par la réintroduction de