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Le design d’interaction et le renforcement des indices de l’être-ensemble numérique

4.3 Le design expérientiel de ScnVir PYV

4.3.3 Le design d’interaction et le renforcement des indices de l’être-ensemble numérique

Les participants sont formalisés dans l’application. Ils communiquent avec et à travers celle- ci, sur le modèle humain-machine-humains (Jones & Marsh, 1997). Les interactions d’un participant avec le système sont transmises aux autres participants. L’interaction et la collaboration de plusieurs participants se font à travers l’interface du système et par l’intermédiaire des contenus médiatiques. Les participants et leur avatar sont environ aux mêmes endroits, dans l’environnement réel et virtuel. La différence entre leurs positions entraîne une forme de jeu de comparaison et de repérage. Le système considère les situations suivantes comme des événements d’interaction : à travers leurs avatars, les participants se regardent, vont dans la même direction, sont à proximité, sont en contact. Nous avons cherché les moyens d’inciter les participants à découvrir le moteur d’interaction du projet,

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l’être-ensemble numérique, en mettant en évidence les gestes qu’ils ont envers les autres.

4.3.3.2 Les indices de l’être-ensemble numérique : la proximité, les participants sont les uns à côté des autres.

Parmi les moyens employés pour mettre en évidence les indices de l’être-ensemble numérique, nous utilisons la proximité des avatars. La collision des capsules de simulation physique enveloppant les avatars provoque autour de chacun d’eux l’apparition d’un nuage de triangles, qui s’entremêlent comme une explosion de confettis (Figure 4-39). Cet effet symbolise la dématérialisation des corps, réduits à une définition élémentaire : l’individu devient un nuage, son enveloppe est indéfinie et les identités se mélangent71. Cet indice est rendu visible à travers le changement de couleur de ciel,

qui a une influence sur l’ambiance générale de la scène virtuelle.

Figure 4-39 : Exemple de représentation visuelle de l'être-ensemble numérique de trois participants. © Jean-Ambroise Vesac 4.3.3.3 Les indices de l’être-ensemble numérique : la sociabilité, les participants se visent

Un autre effet visuel est utilisé pour démontrer que la direction du regard du participant provoque des actions dans la simulation, tel un geste que l’on porte sur un objet distant : le « rayon rose », comme l’ont appelé plusieurs participants, permet de pointer un objet comme la visée du regard le ferait. Pour encourager ce geste, au passage du rayon sur un immeuble visé, un son est émis et l’aspect visuel de celui-ci change. Par son instantanéité, le rayon se déplaçant sur les immeubles peut être « joué » comme un instrument musical primaire : comme un doigt passant sur les touches d’un piano. De plus, le son émis par un immeuble visé est audible par tous les participants. Nous avions émis l’hypothèse que ces effets visuels et sonores pourraient avoir un effet d’entraînement : les

71 Suite à une erreur du programmeur pigiste qui a été engagé à la fin du projet, cette fonction était absente du prototype de novembre 2016. Elle sera ajoutée à la prochaine version.

106 participants pourraient jouer de la musique ensemble.

Quand deux avatars se regardent (Figure 4-40), leur point de vue passe de la première à la troisième personne, ce qui doit signifier l’engagement (perceptif) envers l’autre : ils se voient aller vers l’autre. Cette impression de sortie du corps est théorisée par Berthoz et Andrieu dans leur théorie spatiale de l’empathie (Berthoz & Andrieu, 2010, p. 14). Cette fonction a été mise en œuvre dans nos prototypes de 2015. Dans la version expérimentée PYV de novembre 2016, nous avons choisi de rendre le changement de point de vue toujours disponible sur un toucher (clic) de l’écran. Nous avons renoncé à ce signe de l'être-ensemble numérique, car il est très intéressant de « suivre » son avatar à la troisième personne. Dans une prochaine version, quand deux avatars se regarderont, les avatars se feront un geste de salutation de la main pour signifier leur volonté de relation.

Figure 4-40 : Les participants se visent. © Jean-Ambroise Vesac

Les effets des rayons sont utilisés pour renforcer l’interaction de groupe : les rayons sont visibles par les autres participants, qui ainsi voient où les autres participants regardent. Quand plusieurs participants se regardent, les rayons ressemblent à une corde qui les unit, et quand deux participants se regardent mutuellement, le ciel change de couleur (Figure 4-41).

107 Figure 4-41 : Le ciel change de couleur. © Jean-Ambroise Vesac

4.3.3.4 Les indices de l’être-ensemble numérique : la coordination, les participants regardent la même chose

L’indice de l'être-ensemble numérique est objectivée par le changement d’état visuel définitif qu’entraîne le regard combiné de tous les participants, ensemble sur le même objet. Dès lors qu’un immeuble change d’aspect visuel, le groupe de participants peut comprendre qu’il s’agit d’une tâche à accomplir : transformer par un regard conjoint tous les immeubles de la place D’Youville (Figure 4-42). De là, nous espérons que les participants cherche d’autre objet interactif et qu’ils fassent la distinction entre leur action individuelle sur l’objet et l’interaction de groupe sur ce même objet.

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4.3.3.5 Les indices de l’être-ensemble numérique : la coordination, les participants vont dans la même direction.

Quand les participants vont dans la même direction, le ciel change de couleur, la sculpture virtuelle est visible et la musique de la scène bonus commence à être audible. L’amplitude du son augmente avec la proximité du groupe et de la sculpture (Figure 4-43).

Figure 4-43 : Les participants en direction de la sculpture. © Jean-Ambroise Vesac

4.3.3.6 La condition de l’être-ensemble numérique : la mission, tous les participants en dessous de la sculpture en même temps

Quand les participants sont sous une des deux sculptures (Figure 4-44), sous le nuage ou sous le soleil, ils parviennent à la scène bonus.

Figure 4-44 : Les participants sous la sculpture. © Jean-Ambroise Vesac 4.3.4 L’agentivité

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mixtes, l’agentivité comprend les composantes physiques et virtuelles, les comportements et les amorces de narration. L’étude de la combinaison de l’agentivité des lieux réels et virtuels est hors de portée de notre recherche.

4.3.4.1 L’agentivité systémique

L’agentivité systémique décrit la manière de guider ou d’influencer l’interacteur par le design des fonctionnalités d’interface de base : navigation, bouton de configuration, champ de vision et information sur l’état du système.

Dans notre projet, l’interface est la plus transparente et intuitive possible. Comprenez : la moins intrusive et disruptive pour l’expérience utilisateur, afin de ne pas distraire le participant de son immersion. Le fonctionnement simple, gestuel et kinesthésique de ScnVir simplifie l’effet d’immersion et d’agentivité systémique. Par exemple, le participant doit se déplacer physiquement pour naviguer dans l’environnement virtuel. L’agentivité systémique entraîne le corps du participant dans le mouvement; il est emporté par l’œuvre.

4.3.4.2 L’agentivité environnementale de réalité mixte

L’agentivité environnementale virtuelle se traduit par la participation corporelle du participant à l’espace virtuel sur le plan perceptif. La simulation a été perceptiblement adaptée pour diriger le participant dans ses déplacements. Par exemple, les variations du niveau de détail dans les objets virtuels et les textures animent la curiosité et deviennent des pôles d’attraction. Les zones sonores sont placées les unes après les autres, pour marquer une continuité. Cependant, les zones sonores sont stylistiquement différentes, afin de marquer une transition dans la continuité, pour attiser la curiosité. Les médias ont été spatialisés pour inciter la déambulation, mais aussi pour transmettre une atmosphère.

4.3.4.3 L’agentivité objectale

Nous avons ajouté du mobilier urbain dans les zones d’intérêt, pour les rendre plus attrayantes. Le mobilier urbain, comme un banc public, a un usage reconnu de repos. Il est donc facile de s’y arrêter pour écouter les sons. Au-delà du décor, les objets ajoutent à l’effet de réalisme de la simulation et amplifient ainsi l’effet d’immersion.

Une forme de nuage colorée flotte et circule autour de la zone d’interaction à un rythme constant. Cette forme et le son qui y est attaché sont des emprunts à la version ScnVir Ensemble,

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autre part, autrement (EAA). L’agentivité de cette forme est de faire bouger les participants, de les déranger.

4.3.4.4 Les agents virtuels

Les agents virtuels sont des ombres, l’envers de l’être sous le soleil. Ils représentent l’ombre de l’auteur dans son œuvre. Ils vont à la rencontre des participants quand ceux-ci s’aventurent dans leur zone. L’agentivité des agents virtuels repose sur un jeu d’attraction et répulsion.

Les agents virtuels sont mobiles, mais leur trajet est répétitif. Le participant est par contre capable de perturber leur déplacement en interposant son avatar sur leur trajet, ou en se positionnant sur un des points charnières du trajet des agents virtuels.

4.3.4.5 L’agentivité de groupe

L’agentivité de groupe, suivant des comportements et des actions collectives, est au cœur de notre projet. Le projet est construit pour faciliter l’émergence de l’être-ensemble numérique : à la base, l’environnement virtuel et le paysage sonore sont immersifs, ensuite, les interactions portent à la rencontre des autres. Autrement, il n’y a rien d’autre à faire que visiter la sculpture. Il n’y a pas non plus d’instruction à suivre. L’agentivité de groupe met en place les moyens de rapporter au point de vue individuel l’état de l’activité collective, avec comme objectif de renforcer cet engagement. Pour y répondre, nous avons mis en œuvre plusieurs signes et informations d’interface. Voici la liste des actions : quand les participants sont au même endroit, quand ils vont dans la même direction, quand ils se regardent et quand ils regardent au même endroit. En retour, ces comportements sont reflétés par le changement de la couleur du ciel et par l’apparition de formes géométriques autour des participants, d'informations numériques à l’écran et de la sculpture virtuelle.