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3.2 Détecteur Nucifer

3.2.2 Description du détecteur Nucifer

La partie active de Nucifer se présente sous la forme d’une cuve cylindrique en acier inoxy- dable de (1404,2 ± 1,3) mm de haut et (1238,4 ± 3,3) mm de diamètre, contenant (847 ± 7) L de liquide scintillant, soit environ 760 kg avec une densité de 0,9 [83]. Ces quantités sont mesu- rées lors du remplissage, la mesure de précision étant la mesure de masse, avec une incertitude de 0,5 kg. Alliée à la mesure de la quantité d’hydrogène par unité de masse, la masse donne le nombre de protons cibles dans Nucifer, un facteur nécessaire pour la normalisation du taux de détection attendu. L’intérieur de la cuve est recouvert d’un film de téflon pour s’assurer de la compatibilité de la cuve avec les liquides scintillants dopés. Ce téflon est blanc et diffusant pour augmenter la quantité de lumière collectée.

Accroché au couvercle et enfoncé de quelques centimètres dans le liquide scintillant se trouve le tampon8, épais de 25 cm et fait d’acrylique. La hauteur de liquide sous le tampon

est (704,9 ± 1,5) mm [83]. Sur ce tampon sont montés 16 tubes photomultiplicateurs (PM) de 8 pouces de diamètre (modèle R5912 de Hamamatsu [84]), en deux cercles concentriques de 5 et 11 PM. Chaque PM est entouré d’un blindage magnétique, pour éviter que des champs magnétiques parasites ne perturbent le trajet des électrons dans le tube. Le tampon a trois fonctions :

– il découple les PM du liquide scintillant, afin d’éviter que des événements n’aient lieu au plus près des PM, ce qui dégraderait fortement l’uniformité de la réponse du détecteur ; – il fait barrage à la radioactivité des PM, due au potassium 40 présent dans le verre, et

limite donc le bruit de fond accidentel ;

– il sépare le liquide de la haute tension des PM par simple gravité, ce qui améliore la sûreté vis-à-vis du risque incendie.

Une huile minérale emplit le fond du tampon et englobe les ampoules des PM pour faire le contact optique avec l’acrylique : le liquide scintillant, l’acrylique, le verre et l’huile minérale ont tous des indices optiques proches de 1,5, ce qui limite les réfractions aux interfaces. Le volume restant sous le couvercle est rempli d’azote en légère surpression, d’une part pour prévenir tout risque d’incendie du liquide, d’autre part pour prévenir la dégradation des

performances du liquide au contact de l’air. La partie active du détecteur est présentée figure 3.9.

Pour permettre l’étalonnage en énergie du détecteur, un tube d’étalonnage en acier in- oxydable étanche traverse le détecteur. Sa surface est également recouverte de téflon pour la compatibilité matériau. Le tube passe au travers du tampon dans un trou prévu à cet effet et débouche dans le couvercle. Un coude en acier relie ensuite le tube d’étalonnage à un tube de guidage horizontal en téflon qui permet le déploiement de sources même après que le détecteur soit installé sur site. Ces deux tubes sont clairement visibles sur les figures 3.9a et 3.9b. Les sources sont chacune fixées à un porte-source en aluminium, lequel est attaché à un câble et poussé dans le tube de guidage jusqu’à ce qu’il tombe dans le tube d’étalonnage. En mesurant la longueur de câble depuis le fond du tube, il est possible de placer précisément la source à n’importe quelle hauteur.

(a) Dessin technique. Le liquide est sous le tampon (transparent).

(b) En test au laboratoire. On remarque la baie électronique au second plan.

(c) Tampon suspendu au couvercle, avec les PM vi- sibles par transparence. Figure 3.9 – Le détecteur Nucifer. La cuve présentée ici est la cuve définitive.

Blindages

Le principal défi de ce type de détecteur est d’arriver à mettre en évidence un signal antineutrino parmi un bruit de fond important. Pour réduire le bruit de fond, outre la réaction

β inverse, il est nécessaire d’employer une conception spécifique. Pour commencer, un mur

de plomb de 10 cm d’épaisseur est intercalé entre le mur côté réacteur et le détecteur pour atténuer le flux gamma en provenance du cœur. Ce mur couvre toute la largeur du blindage et monte jusqu’au plafond. Ensuite, un triple blindage concentrique entoure le détecteur (voir figure 3.10), avec de l’extérieur vers l’intérieur :

1. 10 cm de plomb sur les côtés et le dessus (5 cm dessous), pour protéger le détecteur contre les rayonnements gammas.

2. 14 cm de polyéthylène partiellement boré chargés de thermaliser puis de capturer les neutrons. Le polyéthylène, un plastique donc constitué essentiellement de carbone et

d’hydrogène, modère efficacement les neutrons. Le bore est un absorbant neutronique presqu’aussi puissant que le gadolinium, mais par réaction (n,α) qui n’émet que des gammas de 470 keV. L’absorption des neutrons n’émet donc pas de gammas qui seraient susceptibles de gêner la détection, puisque le seuil de la réaction β inverse est à 1 MeV d’énergie visible. Le polyéthylène se présente sous la forme de barreau de section en U ou en H (avec empattements) qui sont ensuite emboîtés. Les H centraux sont dopés en bore à 3,5 % en masse, alors que les U ne sont pas dopés, il en résulte un mur dont le centre seulement est boré.

3. Un système actif, le veto muon. Lorsqu’il détecte un muon, soit il déclenche l’acquisi- tion, et l’événement sera traité spécialement lors de l’analyse, soit il bloque directement l’acquisition pendant un laps de temps donné à optimiser entre réjection des bruits de fond corrélés et minimisation du temps mort.

Une structure en acier supporte le toit de plomb et de polyéthylène. Les passages de câbles et de tuyauterie sont bouchés dans la mesure du possible avec de la paille de plomb et des billes de plastique. La canne d’étalonnage en téflon est coupée au ras du plomb et peut être obstruée par un bouchon épais en téflon et par une brique de plomb posée sur une tablette vissée dans le mur.

Veto muon

Ce veto muon, développé par Subatech, est divisé en 31 modules individuels. Pour simpli- fier le veto, limiter le nombre de voies électroniques et s’adapter au faible volume disponible, une conception originale à un seul PM par module a été développée, ce qui pose le problème de l’homogénéité de la réponse en énergie. En effet, lorsque qu’un seul PM est couplé à une extrémité de la latte, l’écart est très important entre la lumière collectée pour un muon pas- sant devant le PM et pour un muon passant à l’autre extrémité de la latte. Le problème est habituellement résolu en plaçant un PM à chaque extrémité et en sommant leur réponse.

Ici, un module est constitué d’une latte de plastique scintillant sur laquelle un PM est posé sans couplage optique particulier, le tout étant encapsulé dans une boite métallique. La partie supérieure de la latte est dépolie pour permettre la sortie de la lumière, et l’intérieur de la boite est réfléchissant. Une feuille d’aluminium est également placée sous le PM. On améliore ainsi l’homogénéité de la réponse à un muon traversant la latte de part en part par rapport au cas où le PM est couplé à une extrémité de la latte. Malgré tout, la réponse d’un module varie du simple au double selon le point de passage du muon.

Pour assurer la couverture totale de Nucifer, certains modules ont une section non rec- tangulaire, en « T », ce qui permet le recouvrement des modules entre eux. Les modules sont ensuite répartis en 4 murs verticaux de 6 modules et un plafond de 7 modules (voir figure 3.11 et en annexe la figure D.2).

(a) 4 modules veto. Le logement des PM est encore

vide. 3 des modules ont une section en « T ». (b) Structure porteuse du veto muon, nécessairepour maintenir le veto à l’intérieur des blindages. Figure 3.11 – Veto muon de Nucifer