• Aucun résultat trouvé

Descartes et le passage de l’arithmétique et de la géométrie à l’algèbre

II. De la géométrie à l’émergence des courbes

II. 2. Descartes et le passage de l’arithmétique et de la géométrie à l’algèbre

Nous n’allons pas présenter Descartes43 sans avoir remarqué qu’il avait des prédécesseurs qui ont contribué à l’édification des mathématiques modernes comme Fibonacci44, Léonard de Vinci45, Bombelli46, Stevin47, Kepler48, Galilée49, ou Cavalieri50 qui étaient parmi les premiers mathématiciens ayant eu la volonté d’améliorer les modèles des œuvres grecques.

Descartes est un auteur central dans l’histoire des mathématiques modernes. Ses œuvres mathématiques et philosophiques ont contribués au développement des sciences. Il a établi ses mathématiques en s’appuyant sur la tradition des mathématiciens grecs tels qu’Euclide, Apollonius, Pappus, Archimède, etc. En outre, il s’est intéressé à des problèmes particuliers qui ont conduit à de nouvelles conceptions des objets et des démonstrations de la géométrie51.

L’idée de ramener les courbes à des droites est tout à fait naturelle à la pensée humaine, mais le point difficile, dans cette période et même depuis l’antiquité, était de trouver des rapports qui permettent de déterminer les liens qui existent entre ces droites et ces courbes.

La contribution de Descartes à l’algèbre est assez remarquable puisqu’il avait exploité des notations algébriques comme par exemple

43 René Descartes est née le 31 mars 1596 à la Haye, petit bourg entre Tours et Poitiers, mort à Stockholm le 11 février 1650. (cf. Colette, 1973-1979).

44 Léonard de Pise (vers 1180-1250), mieux connus sous le nom de Fibonacci, ou « fils de Bonaccio ». Il étudia sous la direction d’un maître arabe et parcourt l’Egypte, la Syrie, la Grèce et la Sicile. Il composa en 1202 son ouvrage demeuré célèbre « Liberabaci ».

45 Léonard de Vinci (1452-1519) est célèbre en mathématiques aux sciences et pour la théorie des perspectives. 46 Rafael Bombelli (vers 1526-1573) il publia une Algèbre qui contribua à la solution de l’équation cubique. 47 Simon Stevin (1548-1620). Ses préoccupations de nature mathématique et mécanique. Il connaissait les mathématiques d’Euclide, d’Apollonius, d’Al-Khawarizmi et la mécanique d’Archimède, Pappus, Léonard de Vinci etc.

48 Johann Kepler (1571-1630). Astronome et mathématiciens allemand. Il a publié son « Astronmia nova » dans lequel il a étudié le mouvement planétaire et il a contribué à résoudre des problèmes liés à la détermination du genre de conique spécifié par un sommet donné.

49 Galileo Galilei (1564-1642) il a étudié avec attention les œuvres des grands savants de l’Antiquité. Il a publié deux traités contenant plusieurs points de physique qui font appel aux mathématiques et fréquemment aux propriétés de l’infiniment grand et de l’infiniment petit.

50 Bonaventura Cavalieri (1598-1647)Il écrivit des ouvrages sur les mathématiques, l’optique, l’astronomie et fut en grande partie l’artisan de l’introduction des logarithmes en Italie. Sa méthode connue en stéréométrie sous le nom de « théorème de Cavalieri » dans laquelle il énonce d’après Collette : « Si deux solides ont même hauteur

et si des sections qui sont obtenues par des plans parallèles aux bases et à égales distance de celles-ci sont toujours dans un rapport donné, alors les volumes des solides sont aussi dans le même rapport. » (Collette,

1973, p. 197)

51 « La géométrie de Descartes est divisée en trois livres : le premier traite des problèmes qu’on peut construire

en n’employant que des cercles et des lignes droites. Le second porte sur la nature des lignes courbes, tandis que le livre III couvre la construction « des problèmes solides ou plus que solides ». » (Colette, 1975, p. 8)

« …la symbolisation des inconnues par les dernières lettres de l’alphabet, x, y , z, et des connues par les premières, a, b, c ; les puissances en exposant x3, x4… (sauf pour x2

encore écrit xx) la mise en équation par l’égalité à 0. » (Belaval, 1960, p. 280).

Ce qui a contribué à l’économie d’un grand nombre de mots mais aussi à se débarrasser de certains éléments qui occupent l’esprit au moment où on traite plusieurs choses à la fois.

« Descartes a toujours souhaité que son lecteur soit mathématicien, ou qu’il s’exerce

aux mathématiques, mais il précise aussi qu’il ne pense pas à la connaissance mathématique ordinaire de l’arithmétique et de la géométrie…, c’est qu’il a vu dans la façon générale avec laquelle le mathématicien résout les problèmes concernant toutes les coniques ce qu’il nomme « une métaphysique de la géométrie » (lettre à Mersenne du 9 janvier 1639, [5], p. 824). » (Barbin, 1996, p. 44-45).

Hoefer (1984) écrit

« … que les mathématiques étaient pour lui un délassement. Ce fut vers la même

époque qu’il inventa par le moyen d’une parabole, « l’art de construire d’une manière générale toutes sortes de problèmes solides réduits à une équation trois ou quatre dimensions ». » (Hoefer, 1874, p. 390).

Nous n’allons pas étudier dans ce qui suit tous les problèmes traités par Descartes mais nous essayerons d’analyser ses techniques de résolutions dans des cas de problèmes qui sont, a priori, en rapport avec le traitement actuel, dans l’enseignement tunisien, des équations, courbes et fonctions au secondaire. Rappelons, que Descartes a traité52 un nombre assez important de problèmes tant en mathématiques que dans d’autres disciplines. Descartes a réussi à faire de la géométrie comme une science, dans de la mesure où non seulement, la géométrie et l’arithmétique sont des branches des mathématiques, mais également l’astronomie, l’optique53, la mécanique, lesquelles sont englobées dans une mathématique universelle.

52 Descartes avait traité plusieurs problèmes. Nous pouvons citer par exemple la détermination du nombre des racines en fonction du degré de l’équation, la détermination des tangentes aux courbes, la factorisation des polynômes, les tourbillons de Descartes qui ont été inconciliables avec les lois de la mécaniques … etc.

53 « Les années 1626 et 1627 de son séjour à Paris, il les employa en grande partie à des recherche sur

Il s’est inspiré des travaux d’Euclide sur les transversales54, théorie à laquelle se rattache le fameux problème de Pappus où il s’agissait,

« étant données plusieurs droites, de trouver le lieu géométrique d’un point tel que les

perpendiculaires, ou, plus généralement, les obliques abaissées de ce point sur ces droites, sous des angles donnés, satisfassent à la condition, que le produit de certaines d’entre elles fût dans un rapport constant avec le produit de toutes les autres. » (Hoefer, 1874, p. 392).

Ce problème qui était traité par Euclide, Apollonius a été repris par Descartes, qui lui a associé le nom de Problème de Pappus.

« Ce fut probablement à cette occasion que Descartes, contrairement à son dédain

habituel pour le passé, écrivait ces lignes d’une saisissante justesse : « Je me persuade que certains germes primitifs des vérités que la nature a déposé dans l’intelligence humaine, et que nous étouffons en nous à force de lire et d’entendre tant d’erreurs diverses, avaient, dans cette simple et naïve antiquité, tant de vigueur et de force, que les hommes éclairés de cette lumière de raison qui leurs faisait préférer la vertu aux plaisirs, l’honnête à l’utile, encore qu’ils ne sussent pas la raison de cette préférence, d’étaient fait des idées vraies de la philosophie et des mathématiques, quoi qu’ils ne pussent pas encore pousser ces sciences jusqu’à la perfection. Or, je crois rencontrer quelques traces des ces mathématiques véritables dans Pappus et Diophante. » (Descartes, Règles pour la direction de l’esprit, IVème règle.) » (Hoefer, 1874, p. 392).

Ce problème, n’a été traité géométriquement, par Euclide et Pappus, que dans le cas de trois ou quatre droites et il admet comme solution, selon Descartes, non pas seulement des sections coniques, mais aussi la circonférence d’un cercle ou une ligne droite.

A partir de ce cas de problèmes découle la propriété générale des sections coniques : « Quand un quadrilatère quelconque est inscrit dans une conique, le produit des distances de chaque point de la courbe à deux côtés opposées du quadrilatère est au produit des distances du même point aux deux autres côtés dans un rapport constant. ». Par ailleurs, Descartes continu la résolution de ce problème pour un nombre assez grand de lignes jusqu’à l’infini.

« … il y faudra employer une ligne courbe encore d’un degré plus composée que la

précédente & ainsi à l’infini. » (Smith, 1954, p. 24).

En plus il explique que dans le cas où

54 Euclide montre qu’étant donnée quatre droites issues du même point, elles forment sur une transversale, menée arbitrairement dans leur plan, quatre segments qui ont entre eux un certain rapport constant, quelque soit la transversale.

« … toutes celles qui font d’un degré plus composées y peuvent servir, & ainsi à

l’infini. » (Smith, 1954, p. 27).

Dans notre étude, nous allons nous limiter au cas des trois ou quatre lignes traité par Descartes et qui nous parait en parfait accord avec les objets d’enseignement que nous étudions.

Descartes supposait ce cas comme étant le plus simple puisqu’il a écrit que

« En sorte que je pense avoir entièrement satisfait à ce que Pappus nous dit avoir été cherché en ceci par les anciens & je tacherai d’en mettre la démonstration en peu de mots car il m’ennuie de ça d’en tout écrire. » (Smith, 1954, p. 27).

Descartes propose dans son Livre Premier une démonstration de la résolution du problème géométrique de Pappus où il suppose le problème déjà résolu et il se base par la suite sur la figure ci-dessous.

(Figure tirée du Livre Premier de Descartes dans Smith (1954)

Ainsi, nous pouvons dire que déduire la propriété générale des coniques qui se traduit par le fait que

« Quand un quadrilatère quelconque est inscrit dans une conique, le produit des

distances de chaque point de la courbes à deux côtés opposés du quadrilatère est au produit des distances du même point aux deux autres côtés dans un rapport constant. » (Hoefer, 1874,

p. 393).

Descartes à fait du problème de Pappus sa première exploration des applications de sa géométrie où il était capable de trouver deux lignes dont l’une augmente suivant que l’autre diminue dans un rapport constant. Ce qui lui a permit de tracer des courbes mais aussi à

exprimer ce phénomène d’une façon algébrique.

« … Descartes trouva dans ces expressions tout un résumé commode, un tableau

raccourci des propriétés manifestes d’une courbe, en même temps la clef de ses propriétés les plus abstraites. » (Hoefer, 1874, p. 397).

Après un long enchainement55, il arrive à démontrer que la solution du problème est

traduite par l’équation : 2 0 x2

m p x m z n m y= − + + −

Où la solution est représentée dans notre langage mathématique actuel à l’une des

équations suivantes : y2 = px, 2 x2 d p px y = + , 2 x2 d p px y = − qui représentent

respectivement une parabole, une ellipse et une hyperbole. A la fin de sa démonstration Descartes explique que

« Au reste a cause que les équations, qui ne montent que jusqu’au carré, sont toutes

comprises en ce que je viens d’expliquer ; non seulement le problème des anciens en 3 & 4 lignes est ici entièrement achevé ; mais aussi tout ce qui appartient à ce qu’ils nommaient la composition des lieux solides ; & par conséquent aussi à celle des lieux plans à cause qu’ils sont compris dans les solides… et si cette ligne est droite, ou circulaire, on la nomme un lieu plan. Mais si c’est une parabole, ou une hyperbole, ou une ellipse, on la nomme un lieu solide… on peut venir à une équation qui contient deux quantités inconnues, & est pareille à quelqu’une de celle que je viens de résoudre. » (Smith, 1954, p. 81).

Nous pouvons dire ainsi qu’une courbe n’est autre, au fond, qu’une solution géométrique d’un problème indéterminé qui a une infinité de solutions que les anciens appelaient lieu géométrique. Même s’ils n’ont pas pu exprimer les courbes par des équations, ils étaient capables de dire que ce lieu n’est autre que la suite d’une infinité de points satisfaisant à une condition bien déterminée. Nous pouvons donner comme exemple le cercle qui a été caractérisé comme étant le lieu de tous les points indiquant les sommets des angles droits qu’on peut former sur une même base donnée qui n’est autre que le diamètre du cercle.

On voit bien que Descartes a affirmé la simplicité de l’interprétation des lignes qui sont du premier degré, qui correspondent actuellement aux équations du premier degré à deux inconnues réelles, et le cercle, la parabole et l’hyperbole correspondent aux équations du second degré à deux inconnues réelles ayant l’une des formes présentées ci-dessus.

Dans ce qui suit nous exposons en quoi consiste sa catégorisation des courbes

géométriques et des courbes mécaniques qui nous semble parmi les facteurs essentiels qui ont contribués, par la suite, à la genèse des fonctions.