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Le cytosquelette d’actine est une structure très proche de la membrane, reliée à elle grâce à des ancres. Son rôle principal consiste à rigidifier la membrane, et donc à conserver la forme de la cellule. Il a également été suspecté dans la compartimentation des constituants membranaires. Les implications du cytosquelette vis-à-vis de l’organisation membranaire peuvent être regroupées en trois catégories : d’une part une stabilisation des domaines

lipidiques membranaires préexistants, d’autre part une compartimentation des constituants de la membrane, enfin une interaction directe avec certains composants.

Dans le premier cas il a été montré en système modèle (GUV) que la présence d’un réseau d’actine, formé à partir de PIP2, stabilise les domaines en phase Lo. De plus ce réseau entraîne un déplacement de la température de transition de phase. Ainsi les phases Lo se forment à une température plus élevée en présence du réseau d’actine (Liu, 2006). Le rôle de PIP2 avait déjà été mis en évidence comme un lien entre les rafts et le cytosquelette, la présence de PIP2 favorisant la polymérisation de l’actine à partir des plates-formes rafts (Ikonen, 2001; Rodgers, 2001; Rozelle, 2000).

Le second cas correspond au membrane skeleton model établi par Akihiro Kusumi, qui postule que le cytosquelette constitue un obstacle à la diffusion des protéines membranaires (Kusumi, 1993). Ces dernières seraient gênées dans leurs déplacements par les filaments d’actine qui délimiteraient ainsi des domaines. Ce modèle a été établi à partir des travaux sur le récepteur à la transferrine qui présente, en suivi de particule unique, une diffusion confinée dans des domaines de tailles cohérentes avec la maille du cytosquelette cortical (Kusumi, 1993). La diffusion à longue distance observée sur le même système, en FRAP, serait due au passage des protéines par sauts d’un domaine à l’autre (Kusumi, 1996; Kusumi, 1993). Des délétions de la partie cytoplasmique des protéines du CMH de classe I ont également permis de démontrer l’influence de barrières placées à 2-3 nm sous la membrane sur la diffusion de ces protéines (Edidin, 1994). Par la suite, la diffusion de lipides (DOPE) s’est également révélée compartimentée de manière double : domaines de 230 nm inclus dans d’autres de 750 nm de diamètre. Les petits domaines observés augmentent de taille lorsque la cellule est soumise à une drogue déstabilisant le cytosquelette (Fujiwara, 2002). Pourtant les lipides ne sont pas en contact avec ce dernier puisqu’ils sont insérés dans le feuillet externe de la membrane. Le modèle a donc été modifié en anchored membrane-protein picket model qui prend en compte les ancres du cytosquelette, ces dernières gênant la diffusion des constituants sur les deux feuillets de la membrane (fig.15 ; (Fujiwara, 2002)). Les molécules bloquées dans les mailles d’actine profitent des déplacements et des mouvements des piquets et des filaments d’actine pour passer d’un domaine à l’autre (sauts, (Kusumi, 2005)).

Il existe de nombreuses drogues qui permettent de déstabiliser le cytosquelette, ou, au contraire de le figer. Elles sont largement utilisées dans la recherche des confinements dus aux filaments d’actine (ou aux microtubules). Le récepteur à la transferrine a été suivi par une autre technique (FCS) qui a également révélé une compartimentation. Elle est accentuée quand le cytosquelette est renforcé, au contraire elle est fortement réduite quand les filaments d’actine sont dépolymérisés. Nous reviendrons sur l’origine du confinement de ce récepteur par la suite. L’étude du même lipide (DOPE) par cette technique n’a pas permis de distinguer une diffusion confinée de ce dernier (Lenne, 2006).

La diffusion de certaines protéines semble donc effectivement modulée par le réseau d’actine, mais les effets sur la diffusion des lipides ne semblent pas concordants.

Enfin, certaines molécules présentent un type de diffusion particulier appelé diffusion dirigée, qui se caractérise par le déplacement de la molécule dans une direction privilégiée. Ce mode de diffusion est supposé être dû à la liaison de la molécule suivie avec le cytosquelette (Jacobson, 1995). Cette hypothèse a été prouvée pour certaines protéines dont le lien avec le cytosquelette était préalablement connu d’un point de vue fonctionnel (Schmidt, 1993) ou sans lien connu a priori (Sergé, 2003). Néanmoins il n’est probablement pas justifié d’attribuer toutes les diffusions dirigées observées à une interaction avec le cytosquelette d’actine.

Figure 15 : Modèle « barrières et piquets », tiré de (Fujiwara, 2002), vue de la face interne de la membrane. Le cytosquelette (orange) délimite des domaines. Des protéines transmembranaires liées au cytosquelette jouent un rôle d’obstacle dans le feuillet externe.

Cytosquelette

A ce jour il semble improbable que le cytosquelette n’ait aucune influence sur la diffusion des constituants membranaires. Sa proximité et son interaction avec la membrane, par le biais des ancres, font de lui un candidat parfait pour la compartimentation des constituants membranaires. Néanmoins, à l’exception des protéines connues pour leur lien avec les filaments d’actine, la question du rôle fonctionnel d’une telle organisation se pose encore.

3.2.3 – Interactions entre protéines

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Interactions directes

En plus des deux modèles d’organisation membranaire déjà décrits, chaque protéine peut être influencée par des interactions directes avec d’autres protéines, en lien avec sa fonction. C’est notamment le cas du canal CFTR (régulateur de conductance transmembranaire de la fibrose cystique) qui possède à son extrémité intracellulaire un site de liaison lui permettant de lier une protéine adaptatrice EBP50 (ezrin binding protein). Analysées par différentes techniques, ces canaux se révèlent majoritairement liés à EBP50 et immobiles à la surface des cellules. L’addition de 10 histidines à la fin de la séquence permet de masquer le site de liaison, empêchant ainsi la fixation de la protéine adaptatrice, ce qui a pour conséquence de diminuer le nombre de CFTR immobiles, et d’augmenter le coefficient de diffusion. Dans le même temps, la diffusion du CFTR muté présente des zones de confinements transitoires, qui pourraient s’apparenter aux domaines rafts (Bates, 2006). Citons encore le cas du récepteur à la glycine dont la diffusion est modifiée par la géphyrine. Lorsque cette protéine est liée au récepteur ce dernier présente une alternance entre une diffusion aléatoire rapide et une diffusion confinée plus lente (d’un facteur 10), cette dernière étant corrélée à la formation d’agrégats de géphyrine. Lorsque le site de liaison n’est plus présent, le récepteur présente majoritairement (80%) une diffusion rapide et aléatoire (Meier, 2001).

Les protéines adaptatrices, aussi appelées protéines d’échafaudages, sont donc essentielles pour la fonction mais aussi pour l’organisation et la diffusion de multiples protéines. L’analyse de la diffusion d’une protéine membranaire nécessite de prendre en compte les interactions spécifiques qu’elle peut former.

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Interactions à longue distance