• Aucun résultat trouvé

Développement des dislocations visant les interlocuteurs dans les

7.2 Développement des dislocations dans les interviews

7.2.2 Développement des dislocations visant les interlocuteurs dans les

La distribution, dans les interviews, des dislocations visant les interlocuteurs est présentée dans les tableaux 29 et 30.

Tableau 29. Distribution des différents types de dislocations référant aux

interlocu-teurs dans les interviews aux différents stades de développement

Stades de développement (n = nombre d’interviews) (N = nombre d’informants) Stade initial (n=10) (N=9) Stade post-initial (n=24) (N=17) Stade intermé-diaire (n=6) (N=5) Stade avancé inférieur (n=8) (N=5) Stade avancé moyen (n=11) (N=8) Stade avancé supérieur (n=11) (N=11) Total (n=70) (N=40) 1. Dislocations à gauche moi je SV 1 2 1 11 25 27 67

moi + Pro objet 0

moi c’est X – – – – – – 0 toi tu SV – – – – – 1 1 toi et moi on SV – – – – 1 – 1 2. Dislocations à droite je SV / moi – – – – 1 1 2 tu SV / toi – – – – 1 – 1 Total 1 2 1 11 28 29 72

Tableau 30. Distribution des différents types de dislocations référant aux

interlocu-teurs dans les interviews des LNN de Paris, des LN Erasmus et des LN de Paris

(n = nombre d’interviews) (N = nombre d’informants) LNN Paris (n=10) (N=10) LN Erasmus (n=10) (N=10) LN Paris (n=8) (N=8) Total (n=28) (N=28) 1. Dislocations à gauche moi je SV 105 41 24 170

moi + Pro objet 3 2 3 8

moi c’est X 2 2 toi tu SV – – – 0 toi et moi on SV – – – 0 2. Dislocations à droite je SV / moi 1 2 – 3 tu SV / toi – – – 0 Total 109 47 27 183

Les dislocations [moi je SV] commencent à être employées systématique-ment à partir du stade post-initial115, et [moi + Pro objet] après le stade avan-cé supérieur (c’est-à-dire uniquement chez les LNN de Paris). Voici un exemple pour chacun de ces deux types de dislocations.

(122) oui moi j’ai uN un travaiL eh aUssi

(Robert, débutants, interview 1, stade initial) (123) mais moi / moi ça me perturbe actuellement .

(Ursula, LNN de Paris, interview 1) Granfeldt & Schlyter (2004 : 350-352) montrent que les apprenants suédo-phones adultes de français L2 ne traitent pas toujours les pronoms sujet je comme des clitiques. Plusieurs facteurs permettent d’en juger ; il arrive :

• que les apprenants accentuent le pronom pour marquer un contraste (comme JE dans l’exemple 124 ci-dessous),

• qu’ils séparent le pronom du verbe par un adverbe (comme dans l’exemple 125),

• qu’ils emploient la forme non élidée du pronom je même devant une voyelle (comme dans l’exemple 126) ou devant un h muet,

• qu’ils insèrent une pause entre le pronom sujet je et le verbe fini (comme dans l’exemple 127).

(124) *HEN: JE comprendre, e la / la dame comprendre

(Henry, corpus de Lund, apprenants non guidés, stade initial, exemple de Granfeldt & Schlyter 2004 : 350) (125) *LIS: Je seulement habite…

(Lisa, corpus de Lund, apprenants non guidés, stade intermédiaire, exemple de Granfeldt & Schlyter 2004 : 350) (126) *HEN: Je je aime.

(Henry, corpus de Lund, apprenants non guidés, stade initial, exemple de Granfeldt & Schlyter 2004 : 350) (127) *PTR: Et je # vais aller avec un ami.

(Petra, corpus de Lund, apprenants non guidés, stade post-initial, exemple de Granfeldt & Schlyter 2004 : 351) Or, dans les dislocations [moi je SV] de notre corpus, le pronom je semble traité comme un pronom clitique dans la quasi-totalité des cas : (i) il ne sem-ble jamais accentué116 ; (ii) il n’est jamais séparé du verbe fini par un ad-verbe ; (iii) il est toujours élidé devant une voyelle (comme dans l’exemple 122 supra) ou un h muet ; (iv) il est presque toujours répété avant le verbe après une pause (comme dans 128 ci-dessous), sauf dans un cas (la seule exception du corpus, semble-t-il ; exemple 129).

116 Autant que les transcriptions et l’étude de quelques profils acoustiques permettent d’en juger.

(128) c’est eh c’est+ intéressant avec cette classe parce que / moi je eh je suis pas trèS âgée .

(Lena, étudiants de 1ère et 2ème années, interview 1, stade avancé moyen) (129) oh no:n / non mais moi je / je / préférerais .

(Marie, étudiants de 1ère et 2ème années, interview 4, stade avancé moyen) Dans (128), la locutrice, Lena, hésite après moi je, puis répète le pronom je avant le verbe, comme c’est le cas, normalement, en français langue-cible (Granfeldt & Schlyter 2004 : 351). En revanche, dans (129), Marie effectue une première pause après la séquence moi je, répète le pronom je, puis fait une nouvelle pause, pour enchaîner sur le verbe sans répétition du pronom.

En conclusion, ce dernier cas mis à part, les pronoms sujet je dans les dis-locations [moi je SV] semblent, d’après les critères proposés par Granfeldt & Schlyter (2004), être toujours traités par les LNN de notre corpus comme des pronoms clitiques. Ceci suggère que l’acquisition de la clitisation est une condition préalable à la mise en œuvre par les apprenants de français de dis-location de type [moi je SV]117.

Soulignons par ailleurs que quelques dislocations à droite [je SV / moi] ont été relevées dans les interviews : une au stade avancé moyen, une au stade avancé supérieur et une chez les LNN de Paris (tableaux 29 et 30). Nous pouvons toutefois faire remarquer que, même chez les LN, [je SV / moi] est beaucoup plus rare que [moi je SV] (tableau 30) : la variante dislo-quée à droite n’est attestée que deux fois chez les LN Erasmus, et pas une seule fois chez les LN de Paris, contre respectivement 41 et 24 occurrences de [moi je SV] dans ces deux groupes.

Enfin, la dislocation de type [moi c’est X], relevée chez un LN (exem-ple 130 ci-dessous, lignes 05 et 07-08), n’est attestée chez aucun LNN du corpus de l’étude.

117 Nous avons également examiné les autres types de dislocations. Tous les pronoms sujet et objet préverbaux répondent aux critères (i) à (iv) susmentionnés, à une exception près : « et mon frère / il / cohabite (RIRE) avec une Norvégienne . » (Anita, futurs professeurs, interview 1, stade avancé moyen). Comme dans l’exemple (129), la LNN marque ici une pause entre le pronom et le verbe sans répéter le pronom devant le verbe après la pause. Dans tous les autres cas, les pronoms semblent traités en tant que clitiques par les LNN.

(130) 01 I: et les alentours de Manosque qu’est-ce que c’est ... ? 02 E: alors c’est très typique +

03 I: XMannes euh SIM

04 E: eu:h voilà . oui oui je vois que vous connaissez (RI- 05 RE). euh moi c’est plutôt vers Saint-Auban Château XX

06 (I:mm) c’est-à-dire que XMannes c’est vers le le côte 07 l’autre côté versant de la montagne de XXLure . / et moi 08 c’est de l’autre côté en fait .

(Rachelle, LN Erasmus, interview 1) En conclusion, les tableaux 29 et 30 (voir supra) permettent de proposer l’ordre de développement suivant pour les dislocations référant au locuteur (« moi ») :

Ordre de développement 2 :

(1) [moi je SV] → (2) [moi + Pro objet] (1) à partir du stade post-initial.

(2) au-delà du stade avancé supérieur.

7.2.3 Développement des dislocations référant simultanément