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Détermination de la stœchiométrie protéines par nanoparticule

Pour préciser l’effet de la protéine A3, des mesures de potentiel zêta ont été réalisées pour des QD-C3E6D de même taille et incubés avec des plus petites quantités de A3 (5 et 10 équivalents, Tableau 5). Comme expliqué à travers l’étude par électrophorèse sur gel d’agarose présentée plus haut, ces quantités permettent d’obtenir des complexes protéines— particules présentant des stœchiométries faibles. Les valeurs de potentiel zêta ainsi obtenues correspondent à des variations de charge moins importantes que celle mesurée pour des QD à la surface saturée par la protéine A3 (-6 mV) et correspondent probablement à des états de surface intermédiaires entre absence de protéine et saturation de la surface. Ces nanoparticules bioconjuguées avec peu de protéines devraient, de par leur valence plus faible, induire des nanostructures auto-assemblées de nature oligomérique et devraient être mieux stabilisées.

D. Détermination de la stœchiométrie protéines par nanoparticule

D.1 Principe du dosage des protéines greffées sur les nanoparticules d’or

Dans l’optique des auto assemblages de nanoparticules, il est essentiel de contrôler si possible la stœchiométrie du nombre de protéines par nanoparticule définie comme le rapport molaire entre protéines greffées et nanoparticules (protéines/nanoparticules). Cette stœchiométrie, illustré en Figure 17, est une donnée cruciale pour appréhender la capacité d’une nanoparticule bioconjuguée (NP-A3, par exemple) à s’auto-assembler avec une nanoparticule partenaire (NP-α2) et la géométrie des assemblages formés.

Figure 17. Représentation schématique de différentes stœchiométries protéines/nanoparticule.

Pour la détermination de la stœchiométrie de nanoparticules bioconjuguées avec des protéines, plusieurs méthodes ont été mises en place afin de mesurer la concentration de protéines effectivement greffées sur la surface de nanoparticules. Bien que la microscopie électronique permette de mettre en évidence la présence des protéines autour des nanoparticules via des méthodes de coloration négative[50], cette méthode ne permet pas de les quantifier. Il en est de même pour la DLS. Par exemple, la mesure du dichroïsme circulaire de protéines (transferrine, albumine plasmatique humaine et ovalbumine) bioconjuguées à des nanoparticules (carbon dots et AuNP) a été exploitée par Leblanc et al. grâce à l’intensité de l’absorption caractéristique des hélices α mesurée à 208 nm comparée à des gammes étalons[51]. Toutefois, cette méthode n’est pas totalement satisfaisante à cause d’un certain manque de sensibilité et aussi parce qu’elle repose sur l’hypothèse que les protéines greffées conservent la même conformation tridimensionnelle que celle de protéines libres. Cherchant à mettre au point une méthode plus fiable et plus précise, Dyer et al. ont utilisé une stratégie illustré en Figure 18. La spectroscopie de fluorescence permet de doser les protéines greffées à la surfaces d’AuNP après leur dissolution. Cette mesure d’émission de fluorescence repose sur la fluorescence du tryptophane présent au sein de la séquence des protéines qui, excité à 280 nm, émet autour de 350 nm[52]. En comparant ainsi un échantillon de protéines de concentration inconnue à une gamme étalon de protéines libres, cette méthode permet de déterminer la concentration de protéines initialement présentes à la surface des particules d’or.

Figure 18. Synoptique du dosage des protéines greffées sur des AuNP.

Ainsi, des AuNP de 10 nm de diamètre ont été fonctionnalisées avec A3 selon la méthode décrite au début de ce chapitre. Seule la protéine A3 est utilisée car elle possède 4 résidus tryptophane qui assurent une intensité de fluorescence suffisante. Dans le cas de α2, son intensité de fluorescence n’est pas suffisante car elle ne possède qu’un seul tryptophane. La bioconjugaison de AuNP-C3E6D est réalisée avec des quantités de A3 suffisantes pour saturer la surface des particules (100 équivalents, 7,45 µM). Après incubation, des purifications par filtration et centrifugation permettent de séparer les protéines en excès qui n’ont pas réagi avec les AuNP. Ces AuNP-A3 sont ensuite dissoutes par oxydation en présence d’une solution aqueuse saturée de cyanure de potassium (KCN) qui peut complexer les atomes d’Au et ainsi dissoudre les nanoparticules[53,54]. La disparition de la bande plasmon du spectre d’absorption UV—visible des nanoparticules atteste de leur dissolution totale. Finalement, la mesure du spectre d’émission de fluorescence de la solution de nanoparticules dissoutes est réalisée en excitant les résidus tryptophane à 280 nm et en récoltant leur émission entre 300 et 500 nm.

D.2 Résultats

La mesure des spectres d’émission de fluorescence d’une gamme de solutions de protéines A3 de concentrations connues, comprises entre 0,33 µM et 4,20 µM (Figure 19a), a permis d’établir la courbe étalon de l’intensité d’émission à 359 nm en fonction de la concentration en A3 (Figure 19b). La dissolution des AuNP dans l’échantillon de AuNP-A3 préalablement purifié des protéines A3 en excès, est vérifiée en suivant la disparition des pics d’absorption et de diffusion des nanoparticules. Le spectre d’émission de fluorescence correspond alors aux protéines A3 libérées (Figure 19c). Ce dernier montre une émission de fluorescence autour de 350 nm correspondant au tryptophane, démontrant la présence de protéines A3 initialement fixées à la surface des AuNP. L’hypothèse de la présence de

protéines en excès est écartée du fait des lavages réalisés extemporanément. La droite de régression linéaire tirée de la Figure 19b permet de déterminer la concentration en protéines dans l’échantillon de nanoparticules bioconjuguées : pour 938 170 cps mesurés à 359 nm cette concentration vaut donc 1,91 µM. En prenant en compte la dilution induite par l’ajout du KCN et de tampon, on obtient une concentration initiale de 7,16 µM.

D’autre part, le spectre d’absorption UV—Visible des AuNP-A3 permet de calculer la concentration en AuNP-A3 et donc la concentration en AuNP. Ainsi, [AuNP] vaut 90 nM tandis que [A3] vaut 7,16 µM. Le nombre de protéines A3 par AuNP, nA3, peut être calculé : 𝑛A3 = [A3]

[AuNP]= 80.

Figure 19. Dosage des protéines A3 greffées sur la surface des AuNP. (a) Spectres d’émission de fluorescence de A3 concentrées entre 0,33 et 4,20 µM. (b) Courbe étalon de l’intensité de fluorescence mesurée à 359 nm en fonction de la concentration de A3 dans des conditions égales à celles de l’échantillon de AuNP dissoutes (présence de KCN saturé). (c) Spectre d’émission de fluorescence de l’échantillon de AuNP-A3 dissoutes. λ = 280 nm.

D.3 Discussion

Cette étude nous permet de constater que des AuNP-A3 saturées, préparées avec 100 équivalents molaires de A3, contiennent en moyenne 80 protéines A3 par AuNP. Ce résultats sont en accord avec l’estimation réalisée à travers la saturation des AuNP observées sur les gels d’électrophorèse qui est de 75 protéines/AuNP (Tableau 2 et Figure 9). En prenant l’hypothèse d’une corrélation linéaire entre le nombre d’équivalents introduits et la stœchiométrie, nous estimons, par exemple, que des AuNP préparées avec 30 équivalents molaires de A3 serait alors fonctionnalisées avec environ 24 protéines A3 par AuNP. Dans le cas de la protéine α2, on ne peut pas appliquer la même méthode car la protéine ne possède qu’un seul résidu tryptophane. Toutefois, sa taille hydrodynamique étant théoriquement réduite (de par le nombre d’acides aminés qui la composent), on peut supposer que le nombre de protéines α2 greffées à la surface d’une particule doit être raisonnablement plus grand.

En ce qui concerne les QD, nous n’avons pas pu appliquer de méthode de dissolution des QD qui préserve la structure des protéines. À notre connaissance, seule l’utilisation de mélanges d’acides forts telles que l’eau régale permet de dissoudre efficacement les QD. Il serait tout de même intéressant de réaliser des essais de dissolution des QD en présence d’hydroxyde de sodium NaOH ou d’acide chlorhydrique HCl. D’autre part, les conclusions tirées de l’étude par électrophorèse sur gel d’agarose des QD et AuNP bioconjuguées (voir la sous-partie A), révèlent un greffage de α2 et A3 apparemment similaire sur ces deux types de nanoparticules sphériques (voir les valeurs de Aα2 et AA3 dans le Tableau 2). C’est pourquoi, faute de mieux, par la suite, nous avons considéré que, pour des tailles de particules similaires, les QD et les AuNP bioconjuguées présentent des nombres semblables de protéines par particules.