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CHAPITRE 3 RÉSULTATS DE L’ÉTUDE PHÉNOMÉNOLOGIQUE : LE

3.5 Analyse des résultats

3.5.3 Les autres déterminants du processus d’innovation dans les PME

Le financement

Les gestionnaires de PME sont presque unanimes sur le fait que le financement est un frein majeur à l’innovation dans les PME. Le contexte québécois et canadien y est-il pour quelque chose ? L’OCDE (2005, p.46) dans son manuel sur l’innovation déclare : « Le financement peut être un facteur déterminant pour l’innovation dans les PME qui manquent souvent de fonds propres pour mener des projets d’innovation et ont beaucoup plus de difficultés à obtenir des financements externes que la grande firme ». Les activités d’innovation sont par nature risquées et le retour sur investissement sous forme de liquidités se produit plusieurs mois et parfois quelques années après l’investissement requis. La gestion des liquidités est par conséquent un casse-tête pour les gestionnaires de PME. Ceci est aggravé par le fait que les financiers traditionnels tels que les banques sont frileux lorsqu’il s’agit de réaliser des

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investissements en innovation surtout quand ils comportent une part importante d’actifs intangibles. Quand on ajoute à cette situation le déficit de notoriété des PME du fait de leur taille et parfois de leur historique, on comprend que le financement bancaire leur est inaccessible quand il s’agit de l’innovation. Les sources principales de financement qui leur restent sont les fonds propres générés par leurs activités traditionnelles et les diverses sources gouvernementales telles que les crédits d’impôt ou les subventions.

La technologie

Selon le dictionnaire Larousse, la technologie est l’ensemble des outils, machines, des procédés et des méthodes employés dans les diverses branches de l’industrie. La technologie ici réfère donc à l’ensemble des outils, méthodes et processus scientifiques et techniques qui forme l’expertise de l’entreprise déjà acquise ou dont elle a besoin pour ses activités traditionnelles ou ses activités d’exploration. Définie ainsi, la technologie est l’un des ingrédients majeurs du cycle d’innovation et de l’innovation elle-même. C’est un facteur de différenciation important. Dans la compétition mondiale, la PME n’a pas le choix que s’offrir un avantage technologique compétitif qui le distingue et lui permet de faire face aux multinationales. Steele (1989) définit trois dimensions de la technologie telles qu’illustrées èa la Figure 3.8 ci-dessous:

- La technologie des produits que partagent l’ingénierie et le marketing et qui englobe la planification des produits, l’ingénierie du produit, l’ingénierie d’applications et l’ingénierie de l’après-vente.

- La technologie de fabrication qui regroupe l’équipement et l’outillage, les matières premières, la manipulation des matières premières, les systèmes de fabrication, le contrôle qualité et la maintenance.

- L’informatique qui englobe les matériels et programmes informatiques, les systèmes informatiques dédiés, la connexion avec des processus physiques et cognitifs, les systèmes exécutifs et les activités nouvelles basées sur l’informatique.

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Figure 3.8 Dimensions de la technologie Adaptée de Steele (1989)

Tout en reconnaissant la place importante de la technologie, les gestionnaires que nous avons rencontrés ont tenu à préciser que la technologie doit demeurer un outil au service de la solution innovante. Elle doit demeurer un accélérateur et non un déclencheur. Voici comment Collins (2013, p.158) le résume si merveilleusement au terme d’une recherche portant sur plus de 1400 entreprises américaines cotées en Bourse :

Technologie Technologie des produits Planification du produit Ingénierie du produit Ingénierie de l'application Ingénierie de l'après-vente Technologie de la fabrication Équipement et outillage Matières premières : sélection, évaluation des fournisseurs Manipulation des matières premières Systèmes de fabrication Contrôle qualité Maintenance Informatique Matériels et programmes informatiques Systèmes informatiques dédiés Connexion avec des processus physiques et cognitifs Systèmes exécutifs Activités nouvelles basées sur l'informatique

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En effet, la confiance aveugle envers la technologie est un handicap et non un atout. Oui, bien utilisée (reliée à un concept clair, simple et cohérent, ancré dans une connaissance approfondie), la technologie est essentielle au mouvement vers l’avant. Mais mal utilisée (solution facile choisie sans discernement), elle ne fait qu’accélérer une disparition programmée. (Collins, 2013, p.158)

D’après Steele (1989), les contraintes qui conditionnent l’efficacité de la gestion opérationnelle de la technologie sont les suivantes : le refus de l’erreur, le coût, l’amélioration permanente et l’ouverture au changement révolutionnaire.

L’organisation : le dilemme de l’innovateur

Quelle structure organisationnelle est la mieux susceptible de réaliser pour une PME les promesses incarnées par l’innovation ? Les gestionnaires de PME que nous avons rencontrés ont décrit l’environnement de travail qui permettrait de favoriser la créativité. Il s’agit d’un environnement dans lequel prévalent entre autres le goût du risque, l’ouverture d’esprit, la capacité de vivre dans l’incertitude. Toutefois, pour mener à bien les idées issues de la créativité, il faut un environnement interne qui en permet la diffusion. Passer des idées au prototype, du prototype à la production requiert de la discipline et des innovateurs à tous les échelons de l’entreprise. C’est cela le moteur du cycle d’innovation. Tidd, Bessant et Pavitt (2006) déclarent à cet effet :

Dans une économie de savoir où la créativité est particulièrement recherchée, les individus constituent l’actif majeur d’une entreprise. Le défi en matière de gestion consiste à construire le type d’organisation dans lequel ce comportement créateur pourra s’épanouir… Il convient de définir une organisation adéquate, c’est-à-dire l’organisation la plus pertinente compte tenu des impondérables inhérents à l’exploitation. L’absence d’instructions et de structure est tout aussi dangereuse que leur excès (Tidd, Bessant et Pavitt, 2006, p.476).

L’une des difficultés réside principalement dans la cohabitation entre les projets d’exploration dont les résultats sont à venir et parfois incertains et les projets d’exploitation dont les résultats sont probants et font vivre l’entreprise au quotidien. Quand on y ajoute un

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déficit de ressources, la tentation est grande de travailler à court terme en privilégiant les activités d’exploitation. La quadrature du cercle pour les gestionnaires c’est d’optimiser les activités « vache à lait » tout en permettant de faire émerger les activités qui représentent le futur de l’entreprise. Ils doivent décider alors quelle activité confier à l’externe, quelle activité développer en partenariat et laquelle doit être réalisée à l’interne. Quand bien même l’activité d’innovation est réalisée à l’interne, se pose encore la question avec quelle équipe la réaliser : une équipe dédiée ou bien une équipe partagée avec les activités d’exploitation.

Tidd, Bessant et Pavitt (2006, p.477) définissent 10 composantes de l’organisation innovatrice :

- La vision partagée, le leadership et la volonté d’innover; - La structure appropriée;

- Les individus-clés;

- Le travail d’équipe efficace;

- La poursuite et l’extension du développement individuel; - La communication intensive;

- La forte participation dans l’innovation; - Le ciblage externe;

- Le climat créatif;

- L’organisation apprenante.

Christensen, Dyer et Gregersen (2013, p.163) quant à eux définissent l’ADN d’une entreprise innovante comme combinant les 3P (personnel, philosophie et processus) définis dans la Figure 3.9 ci-après :

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Figure 3.9 ADN de l’entreprise innovante Tirée de Christensen, Dyer et Gregersen (2013, p.163)

Le leadership

Dans la PME, le leadership est incarné dans la personnalité du dirigeant principal, à la différence des grandes entreprises qui doivent composer avec un rapport de forces entre l’équipe de gestion et le conseil d’administration. Les gestionnaires que nous avons rencontrés ont démontré que les stratégies d’innovation que leurs entreprises ont déployées avec succès trouvaient leur inspiration dans le dirigeant principal. Non seulement il doit agir comme bougie d’allumage, mais il doit s’assurer de la rigueur nécessaire pour la mise en place de ces stratégies. Ceci est conforme à la littérature sur l’orientation entrepreneuriale des entreprises qui stipule que cette dernière est positivement corrélée aux innovations tirées par le marché (Zortea-Johnston, Darroch et Matear, 2012).

3.5.4 La mesure de la performance du processus d’innovation dans les PME