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Dépistage familial en cascade

Dans le document 2001 01 fr (Page 130-134)

6. STRATÉGIES DE DIAGNOSTIC ET DE DÉPISTAGE

6.2.1 Dépistage familial en cascade

Le dépistage familial s’adresse à tous les couples en âge de procréer qui sont à risque de transmettre le syndrome en raison d’une histoire familiale du syndrome du X fragile133 et éventuellement à d'autres apparentés. Ce type de dépistage se greffe aux différentes stratégies de diagnostic des sujets atteints mentionnées

133 Depuis qu'une association a été établie entre la ménopause prématurée et le statut de porteur de prémutations, le dépistage familial en cascade s'applique également aux femmes présentant cette nouvelle indication et à leurs apparentés.

dessus ou aux stratégies de dépistage de porteurs abordées plus bas. Dans la pratique clinique courante, ce dépistage est réalisé à la suite du diagnostic du syndrome chez un sujet symptomatique. Il s’effectue, dans le cadre du conseil génétique, en procédant en cascade à partir du cas index pour déterminer le statut de porteur des membres de la famille, d’abord nucléaire puis élargie, qui le souhaitent.

Habituellement, le contact avec les apparentés se fait par l’intermédiaire des parents du sujet atteint, une pratique qui repose sur le respect de l'autonomie et de la confidentialité de la famille touchée et des apparentés. Effectivement, un mode de recrutement plus proactif des apparentés soulèverait des problèmes d'ordre éthique et peut, dans certains cas, aller à l'encontre de la déontologie professionnelle.

Dans le cadre du dépistage familial, le statut de porteur est habituellement déterminé chez les femmes en âge de procréer, étant donné que celles qui sont porteuses d’une mutation complète ou d’une prémutation risquent d’avoir des enfants atteints. La pertinence de réaliser les tests moléculaires chez les hommes apparemment sains a été soulevée par certains auteurs (Rousseau, 1994). Alors qu’auparavant il ne semblait pas y avoir de bénéfices immédiats à préciser le statut de porteur des hommes normaux transmetteurs134, cette situation peut avoir changé suite aux connaissances plus approfondies qui se sont accumulées sur les

« high functioning males » (voir section 2.4) et à la description récente de rares cas de transmission de mutations complètes par des hommes

134 Pour rappel, les hommes normaux transmetteurs sont porteurs d’une prémutation qu’ils transmettront à toutes leurs filles. Celles-ci ne seront pas symptomatiques mais peuvent transmettre le syndrome à leurs enfants si la prémutation subit une expansion en mutation complète.

normaux transmetteurs à leurs filles (voir section 6.1.2). Par ailleurs, l’absence de confirmation du statut de porteur complique la gestion de l’information pour les générations futures et un mode de transmission de l’information doit alors être élaboré de sorte que celle-ci parvienne en temps opportun aux filles des hommes normaux transmetteurs qui, elles, sont à risque d’avoir des enfants atteints135.

L’évaluation du dépistage familial en cascade n’a pas été réalisée de manière systématique, quoique quelques auteurs rapportent leur expérience clinique (Cossée et al., 1997 ; Ryynänen et al., 1995 ; van Rijn et al., 1997) et que certaines études procédant à un diagnostic proactif chez les sujets avec retard mental suivi d’un dépistage familial en cascade fournissent des données sur le taux de participation des familles136, la proportion d'apparentés ayant eu recours aux tests et l’impact du dépistage familial en cascade sur les décisions reproductives (Robinson et al., 1996 ; Turner et al., 1992, 1997 ; van Rijn et al., 1997).

Cossée et al. (1997) rapportent que 85 % des 44 familles repérées, suite au diagnostic d’un cas index en clinique, ont participé au conseil génétique, ce qui a conduit à l’identification de 98 nouveaux porteurs de mutations complètes (FM) ou prémutations (PM) (soit 2,2 par famille)137 et

135 L’effet à long terme d’un vaste programme de dépistage, comme le programme australien, sur la prévalence à la naissance du syndrome pourrait dépendre dans une certaine mesure de l’identification des HNT et de la transmission de l’information à la génération suivante (Robinson et al., 1996).

136 Les premiers programmes visant les services aux familles n’ont rapporté que le nombre de familles qui acceptaient l’offre du conseil génétique : 50 % pour Nolin et al. (1992) et 61 % pour Gabarron et al. (1992).

137 Entre 1991 et 1996, la convention pour la prise en charge du diagnostic moléculaire du syndrome X fragile

à la réalisation de 9 dépistages prénatals.

Ryynänen et al.(1995) décrivent le suivi de 59 familles en conseil génétique138, dont 48,1 % des membres à risque ont eu recours au test moléculaire, ce qui a permis d’identifier 235 porteurs de FM ou PM (4 par famille) et 10 fœtus atteints sur 21 grossesses. Van Rijn et al.

(1997) ont suivi, sur une période d’au moins un an, 19 familles, dont certaines leur avaient été référées, alors que d’autres avaient été identifiées à la suite d’un dépistage institutionnel et scolaire proactif. Ils ont démontré que la circulation de l’information au sein des familles et la participation aux tests moléculaires sont inversement liées au degré de parenté139. Le dépistage en cascade a néanmoins permis d’identifier 56 porteurs de FM ou PM (3 par famille).

établie par l’Association française pour la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE), impliquait que le diagnostic des sujets atteints de retard mental ne soit effectué qu’au bénéfice d’une femme apparentée en âge de procréer et potentiellement demandeuse de conseil génétique (Cossée et al., 1997; Mandel et al., 1996).

138 Ces familles ont été identifiées à partir de différentes sources : individus avec retard mental ou retard d’acquisition du langage référés pour diagnostic, femmes enceintes avec histoire familiale de RM demandant un conseil génétique, et familles contactées à partir d’un registre cytogénétique (Ryynänen et al., 1994, 1995).

Cette dernière approche pourrait impliquer un recrutement proactif des familles concernées, ce qui ne correspond pas à l’approche la plus courante en génétique médicale mais qui pourrait expliquer en partie les résultats obtenus. En l’absence de précisions, nous ne prenons pas en considération cette forme particulière, proactive, de dépistage familial en cascade.

139 Globalement, 34 % des apparentés étaient informés du risque familial (100 %, 59 %, 39 % et 3 % pour les apparentés du 1°, 2°, 3°, et 4° respectivement) et 26 % des apparentés avaient participé aux tests moléculaires (90 %, 37 % et 30 % pour les apparentés du 1°, 2° et 3°

respectivement). Il faut cependant noter que la mobilité des familles est particulièrement élevée aux Pays-Bas, puisque la moitié des apparentés non informés résidaient à l’étranger.

Les renseignements fournis par le programme de diagnostic et dépistage australien reflètent le résultat de plus de 10 années de dépistage familial en cascade et témoignent de l’intensité du suivi offert aux familles140. En décembre 1996, 225 familles avaient été répertoriées et 2337 apparentés testés. Hormis les 886 personnes atteintes (4 par famille en moyenne), chez qui une mutation complète avait pu être documentée, 532 porteurs asymptomatiques de FM ou de P M (dont 103 hommes normaux transmetteurs) étaient identifiés, soit 2,3 par famille141 (Turner, 1997). En 10 ans, 104 femmes porteuses asymp-tomatiques ont eu recours au dépistage prénatal, parmi lesquels 19 fœtus masculins portaient une mutation complète.

Vers la fin des années 1980, une étude cas-témoin a été entreprise afin de documenter l’impact du conseil génétique (alors que seule la cytogénétique était disponible) sur les décisions reproductives des femmes apparentées au premier degré à un cas index. Parmi les couples ayant bénéficié du conseil génétique, une réduction de 26 % des naissances était documentée (77 versus 104), mais cette réduction était attribuable aux femmes ayant des capacités intellectuelles normales seulement. Parmi les femmes ayant eu une grossesse par la suite, 61 % se sont prévalues du diagnostic prénatal (Turner et al., 1992). Il subsiste des grossesses non suivies, le plus souvent chez des femmes avec une déficience intellectuelle, mais, dès le début des années 1990, la proportion des couples ayant

140 Annuellement, un feuillet d’information est adressé à toutes les familles qui sont recensées dans un registre depuis le début des années 1990 et une réévaluation par tests moléculaires a été proposée à toutes les familles identifiées au préalable.

141 La participation des familles au dépistage en cascade est tout de même fort variable, puisque chez 40 % d’entre elles, seuls des apparentés du premier degré s’y sont prtés.

recours au DPN a augmenté à 77 % et à 91 % pour les couples ayant déjà un garçon atteint (Robinson et al., 1996). Cette recrudescence du recours au DPN depuis la disponibilité des tests moléculaires et le fait que 79 grossesses non affectées aient été menées à terme fait dire aux auteurs qu’on assiste à un regain de confiance des familles affectées en leur potentiel reproductif.

Enfin, le contrôle du nombre de grossesses et l’interruption sélective des grossesses avec fœtus atteints ont entraîné une baisse de la prévalence à la naissance du syndrome dans ces familles142, ainsi qu’à l’échelle de la province puisque environ trois quarts des familles seraient maintenant connues grâce au programme (Robinson et al., 1996 ; Turner et al., 1997). Au New South Wales, la prévalence à la naissance pour les garçons serait passée de 1/4000 à 1/10 000 et plus de 60 % des enfants atteints naîtraient aujourd’hui dans le quart des familles n’ayant pas encore bénéficié d’un diagnostic étiologique. Le rendement de la stratégie actuelle de diagnostic et dépistage des sujets atteints en milieu scolaire, suivie du dépistage familial en cascade risque cependant de diminuer puisque le syndrome est davantage connu dans les milieux médical et scolaire et que les individus potentiellement atteints sont de plus en plus référés en génétique.

En Australie, les chercheurs commencent en conséquence à envisager le recours à des stratégies alternatives telles que le dépistage chez les femmes enceintes ou le dépistage néonatal (Turner et al., 1997) (voir discussion section 6.3).

L'efficacité du dépistage familial en cascade repose donc essentiellement sur la dissémination de l'information au sein des familles et sur l'acceptabilité des services disponibles. Or, pour

142 Comme pour toutes les stratégies de dépistage des porteurs, cette approche ne modifie en rien la prévalence des porteurs de la prémutation.

le syndrome du X fragile, des difficultés de communication au sein des familles affectées ont été mises en évidence, en raison notamment de la culpabilité associée à la transmission héréditaire du retard mental et de la possibilité d’une atteinte intellectuelle chez plusieurs membres de la famille (voir section 7.1.2). Les modalités déployées pour faciliter et maintenir le contact auprès des familles retentissent sur la participation et la satisfaction des familles. De plus, d'après une étude de simulation, si on se base sur le pourcentage des porteurs d'une population donnée pouvant être détectée par le dépistage en cascade, celui-ci serait peu efficace de sorte que la proportion des porteurs pouvant bénéficier du conseil génétique reste faible (Wildhagen et al., 1999).

Récapitulatif

Le dépistage familial en cascade offre la possibilité de préciser le statut génotypique d’apparentés symptomatiques mais a surtout pour objectif d’identifier les sujets asymptomatiques susceptibles de transmettre la mutation à leur descendance. Cette activité est intégrée à la pratique courante en génétique médicale lorsqu’un diagnostic a été posé chez un cas index référé en clinique, mais elle pourrait faire suite à tout type de stratégie. Elle est indissociable d’un conseil génétique fournissant à la fois l’information et le support nécessaires pour que les familles puissent faire face aux nouvelles données de risque qui leur sont transmises et prendre des décisions reproductives éclairées.

La proportion des sujets porteurs pouvant être rejoints par ce type de dépistage dépend, d’une part, du processus d’identification des sujets atteints et, d’autre part, de la proportion des

membres de la famille qui participent au conseil génétique et qui souhaitent se soumettre au test.

Cette participation varie avec l’intensité du suivi proposé aux familles mais dépend aussi de l’efficacité de la circulation de l’information au sein de la famille.

L’expérience accumulée à cet égard à travers le monde tend à montrer que la pratique du dépistage familial en cascade est généralement bien acceptée, qu’elle répond à un besoin des familles concernées et que, dans l’ensemble, elle a un impact sur leurs décisions reproductives. En Australie, où cette approche a été appliquée de manière systématique depuis plus de 10 ans, on constate un regain de confiance des familles touchées face à la reproduction et une diminution de la prévalence de la maladie.

6.2.2 Dépistage chez les femmes avec une

Dans le document 2001 01 fr (Page 130-134)