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B - Des dépenses au titre des avantages non contributifs insuffisamment identifiées

S’il est dans la nature même des régimes spéciaux, comme ceux des fonctionnaires, de comporter des dispositions spécifiques qui les distinguent du régime général, il est en revanche regrettable que les coûts qui en résultent ne fassent pas l’objet d’un recensement exhaustif et d’un suivi régulier qui permettraient d’apporter une plus grande transparence et favoriseraient des comparaisons plus étayées.

Un tel recensement permettrait également de distinguer les financements relatifs aux avantages contributifs des régimes de ceux consacrés à des avantages non contributifs, qu’il s’agisse de dispositifs de solidarité (droits familiaux, minimum garanti de pension, par exemple) ou des départs anticipés à la retraite dont bénéficient les catégories actives.

En effet, contrairement à ceux du secteur privé, les régimes de retraite des fonctionnaires ne distinguent pas les financements consacrés à ces derniers, l’ensemble étant confondu, soit avec la contribution des employeurs de fonctionnaires de l’État, soit avec les cotisations sociales employeurs pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.

Un tel effort de transparence a été réalisé, même s’il n’est pas complètement abouti71, pour le secteur privé, dès 1993, avec la création du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) qui prend en charge le coût des avantages non contributifs, tels les cotisations sociales des demandeurs d’emploi, le minimum vieillesse ou, plus récemment, la participation au financement des minimums contributifs. La prise en charge par la CNAF, intégrale depuis 2011, du coût des avantages familiaux pour les retraités du régime général, participe des mêmes efforts de transparence des coûts et d’identification des sources de financement selon le caractère contributif ou non contributif des prestations.

S’agissant de la fonction publique d’État, l’annulation par le Conseil constitutionnel72 de la disposition de la loi de finances initiale pour 1995 prévoyant la prise en charge par le FSV (en contrepartie d’un versement de l’État au fonds) des majorations de pension pour raisons familiales a empêché la clarification de leur coût. De même, s’il avait été envisagé, au moment de la mise en place du CAS Pensions de différencier les taux de contribution employeur aux fins de prendre en compte le surcoût lié aux départs anticipés des fonctionnaires des catégories actives, selon le service des retraites de l’État, cette décision n’avait pu alors être mise en œuvre pour des raisons techniques73.

Une plus grande clarification de ces dépenses apparaît d’autant plus nécessaire que les dispositifs de solidarité tout comme les départs anticipés des catégories actives ou pour raisons familiales ont un coût élevé, quoique d’un niveau différent entre le régime des pensions de l’État et la CNRACL. Pris dans une acception large, mais hors pensions de réversion, les avantages non contributifs représentent 13,9 % des dépenses du régime de retraite de la FPE et 25,8 % de celles de la CNRACL, contre 17,5 % pour les régimes de salariés du secteur privé.

71 Ainsi le coût des majorations de durée d’assurance n’est pas pris en charge par le FSV et celui du minimum contributif, seulement pour partie.

72 Décision n° 94-351 du 29 décembre 1994. La disposition a été déclarée non conforme à la Constitution en ce qu’elle contrevenait au principe d’universalité budgétaire en faisant prendre en charge par un fonds extérieur au budget de l’État une charge permanente qui lui incombait en application de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959. L’abrogation de cette ordonnance et l’entrée en vigueur au 1er janvier 2005 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances autorisent un réexamen au plan juridique d’une éventuelle prise en charge d’une partie des pensions des fonctionnaires par le Fonds de solidarité vieillesse.

73 En particulier, le processus de paie n’intègre pas d’information sur l’appartenance d’un fonctionnaire à une catégorie active, ce qui nuit par ailleurs à leur recensement.

La répartition de ces dépenses par nature fait apparaître de grandes différences entre les populations des deux régimes de la fonction publique au regard de la structure des revenus, du taux de féminisation, du poids des catégories actives, etc. Ainsi, les majorations liées aux minima de pensions comptent pour à peine 6 % des dépenses de solidarité au SRE, contre 27 % pour la CNRACL, du fait du faible niveau moyen de rémunération des affiliés à ce régime.

Tableau n° 15 : les dépenses liées aux avantages non contributifs en 2012

FPE civile CNRACL CNAV+ARRCO

+AGIRC

Tous régimes Total des dépenses

de retraite 38 Md€ 15,9 Md€ 170,6 Md€ 281,3 Md€

Droits liés aux avantages

non contributifs 5,3 Md€ 4,1 Md€ 29,9 Md€ 50,1 Md€

En % 13,9 % 25,8 % 17,5 % 17,8 %

Départs anticipés

pour motifs familiaux 0,8Md€ 0,9 Md€ 0 1,8 Md€

Départs anticipés liés

à la catégorie active 1,3 Md€ 0,7 Md€ 0 6,4 Md€

Majorations liées

aux minima de pensions 0,3 Md€ 1,1 Md€ 6,1 Md€ 8,4 Md€

Périodes assimilées 0,4 Md€ 0,1 Md€ 8 Md€ 8,9 Md€

Majorations de pensions

pour 3 enfants et plus 1,1 Md€ 0,6 Md€ 4,4 Md€ 7,6 Md€

Majorations des durées

d’assurance et AVPF 0,6 Md€ 0,3 Md€ 5,7 Md€ 7 Md€

Minimum vieillesse 0 0 2,3 Md€ 2,6 Md€

Autres 0,8 Md€ 0,4 Md€ 3,4 Md€ 10,0 Md€

Source : EIR 2012, DREES.

Si les départs anticipés pèsent pour près de 40 % dans les dépenses liées à des avantages non contributifs, leur répartition est différente : la forte féminisation des affiliés à la CNRACL conduit à un poids plus élevé des dépenses de départs anticipés pour motifs familiaux qu’au SRE (22 %

contre 15 %). La fermeture du dispositif autorisant les départs au bout de 15 ans de services pour les parents ayant eu 3 enfants et plus en a paradoxalement alourdi le coût dans un premier temps en suscitant un afflux de demandes. Le niveau relatif des rémunérations explique que les majorations pour 3 enfants et plus, au sein de ces avantages non contributifs, représentent un poids plus lourd au SRE (20 %) qu’à la CNRACL (15 %).

Bien qu’elles soient en proportion plus nombreuses, les retraites des catégories actives pèsent proportionnellement moins à la CNRACL (17 % contre 24,5 %), en raison a priori du faible niveau relatif de rémunération des personnels concernés, de bonifications de services plus rares, ainsi que de départs anticipés pour motifs familiaux nombreux, sans condition d’âge notamment, qui ont rendu moins attractifs les départs au titre de la catégorie active.

Une identification accrue des dépenses des régimes de retraite des fonctionnaires résultant des avantages non contributifs, distinguant les dispositifs de solidarité des autres avantages, et de leur évolution permettrait un pilotage renforcé et un suivi plus efficace des mesures de maîtrise mises en œuvre ou susceptibles de l’être. Elle devrait conduire à leur affecter des financements spécifiques.

III - Une convergence réelle, mais partielle