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Défaillances des différentes politiques urbaines successives de la capitale

CHAPITRE 7 : LE GRAND PROJET URBAIN D’ALGER

1.2. Défaillances des différentes politiques urbaines successives de la capitale

Les politiques urbaines successives menées depuis le début de la colonisation et même après l'indépendance sont riches d'enseignements de part les différences et contradictions qu'elles cachent. En effet, ces politiques urbaines reflètent le contexte socio-économique et politique spécifique à chaque période. Cependant, les études effectuées sur la capitale souveraine en particulier le rapport « Alger capitale du 21ème siècle » font état d'un échec alarmant de toutes les politiques urbaines successives notamment à travers les instruments d'urbanisme que sont le P.O.G, le P.U.D et le P.D.A.U. En effet, la situation sur le terrain à la veille du lancement du G.P.U d'Alger est très révélatrice de cet échec ; une urbanisation qualifiée d'anarchique et un aspect architectural de piètre qualité. Ceci, n'est au fait que la conséquence d'un «…développement par addition et sans

instrumentation d'urbanisme intégrée et cohérente...»1. Pourtant, certains instruments développés

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après l'indépendance en particulier le P.O.G constituait déjà une planification stratégique à l'échelle de l'aire métropolitaine d'Alger.

Le pouvoir en place avait décidé de rompre d'une manière radicale avec les schémas légués par la colonisation, par la réappropriation de l'espace urbain colonial à travers la réalisation de projets et des équipements structurants et de grande envergure. L'objectif principal de l'Etat était alors, de faire de la capitale Alger un symbole de la souveraineté nationale restaurée et une grande métropole économique d'un pays en plein développement1.

L'originalité du C.O.M.E.D.O.R. réside dans le fait qu'il a mobilisé une multitude d'acteurs et surtout les pratiques de coordination et de concertation mise en œuvre en son sein : Transversalité et interdisciplinarité, en d'autres termes les principes fondamentaux d'un vrai Grand Projet Urbain souple et prospectif. En effet, le C.N.E.R.U était créé en 1979, et opte pour une politique urbaine déjà pratiquée par la colonisation française à la fin des années 1950 au travers les instruments d'urbanismes : le P.U.D et ses corollaires, les Z.H.U.N et les Z.l. Ces instruments d'urbanisme sont à l'origine de l'ampleur de l'urbanisation accélérée des grandes villes et en particulier Alger dans les années 1980.

Malgré, les nombreuses réalisations enregistrées notamment les Z.H.U.N et les lotissements, cependant du point de vue qualitatif, l'espace urbain produit est décevant tant sur le plan de la dégradation rapide des immeubles, de la pauvreté du langage architectural, de la sous utilisation des espaces extérieurs, du sous-équipement, de la rupture avec le reste de la commune et notamment le centre ville, du cadre social (surpeuplement des logements, délinquance, insécurité), du cadre économique (sous-emploi, déficit en transports ...) et en fin du cadre environnemental (réseaux défectueux, espaces verts inexistants).

Ceci récapitule les défaillances d'une urbanisation qui se faisait à coup de programmes économiques et d'habitat et non sur la base de plans d'urbanisme tenant compte de la dimension spatiale, de l'utilisation rationnelle des sols urbains et de l'échelle mineure produisant ainsi, des expansions urbaines démesurées et anarchique. Cette approche linéaire et sectorielle sans coordination réelle, ne tient pas compte de la réalité urbaine et des spécificités locales. Le chevauchement des prérogatives induit par la multiplicité des centres de décision ne pouvait que

1

SGROÏ-DUFRESNE Maria, 1986, Alger 1830-1984 : Stratégie et enjeux urbains, Editions Recherche sur les Civilisations, Paris, 252 pages.

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conduire à une anarchie sur le terrain : l'anarchie urbaine.1La nouvelle loi n° 90-29 du premier décembre relative à l'aménagement et à l'urbanisme confère au P.D.A.U et son corollaire le P.O.S contrairement aux précédents instruments (le P.O.G et le P.U.D) un caractère juridique du fait qu'ils sont régis par des lois et des décrets d'exécution notamment, à travers la définition des droits de construire sur les terrains urbanisables.

Un autre fait important, est le nouveau contexte d'économie de marché et du multipartisme «démocratie» qui a favorisé l'émergence de nouveaux acteurs (les élus, les promoteurs, les privés, les associations, etc.), qui vont participer à la gestion urbaine de la commune. La décentralisation a permit l'introduction de la concertation entre les différents acteurs en tant que mode démocratique de gestion urbaine notamment, à travers les assemblées de délibération municipale en vue d'approbation des P.D.A.U.

Même si, ces nouveaux instruments de gestion urbaine introduisent une nouvelle manière plus rationnelle, plus démocratique et plus soucieuse des échelles mineures, cependant, comme le reconnaît le Directeur de l'Urbanisme et de l'Architecture au prés du Ministère de l'Habitat de l'époque dans une interview accordée à la revue H.T.M : « Le produit de cette urbanisation, de part

son caractère purement réglementaire, ne permet pas l'émergence de produits formels de nature à constituer des projets urbains »2.

C'est pour cette raison que les décideurs de l'Etat algérien ont pris conscience de la nécessité de réfléchir sur une autre stratégie d'aménagement en particulier pour la capitale Alger, à même de constituer un Grand Projet Urbain. Mais, un Grand Projet Urbain nécessite aussi l'implication d'une multitude d'acteurs en particulier les citoyens dans le choix d'aménagement de leur cité. C'est ainsi donc, que le P.D.A.U d'Alger initié en 1991 et approuvé en 1995 ne connaîtra pas de suite et sera remplacé dés 1997 par une nouvelle stratégie d'aménagement: le G.P.U d'Alger.

1

DRIS Nassima, 2002, Préface OSTROWESTSKY Sylvia, La ville mouvementée, espace publics, centrante, mémoire urbaine à Alger, Ed L'Harmattan, UE, 345 pages.

2

NAÏT-SAADA Makhlouf, Avril 1995, Economie de marché : La ville et l'architecture, in La transition à l'économie de marché, La ville et l'architecture, Revue d'architecture et d'urbanisme, H.T.M. (Habitat Tradition et Modernité), n°3, PP. 53-60.

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Finalement, ces instruments d'urbanisme (P.O.G, P.U.D, P.D.A.U) n'ont servi que pour légitimer ou remettre en cause des projets selon les rapports de force entre les différents acteurs du pouvoir (les décideurs) en place. Cette remise en cause des différents instruments d’urbanisme ne peut que produire en fait des incohérences sur le terrain et engendré ainsi une urbanisation démesurée et anarchique.