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1.4 Décroissance double bêta

1.4.2 Décroissance double bêta sans émission de neutrinos

Dans le cadre de la théorie de Majorana suggérant un neutrino identique à son antiparticule, Furry est le premier, en 1939, a établir la possible existence d'une décroissance double bêta sans émission de neutrinos (ββ0ν) [77] s'écrivant comme suit :

(A, Z) → (A, Z + 2) + 2e (1.4.3)

Expérimentalement, étant donné que toute l'énergie disponible Qββ est emportée par les élec-trons, la détection de ces deux derniers va correspondre à un pic d'énergie centré sur la valeur de Qββ (gure1.13). Il est à noter que tous les émetteurs ββ2ν sont des potentiels émetteurs ββ0ν.

Figure 1.13: Représentation schématique de la somme de l'énergie des deux électrons émis (Ee1 et Ee2) lors des décroissances double bêta avec émission de neutrinos, sans émission de neutrinos et dans le cas d'une émission d'une autre particule telle que le Majoron χ. Qββreprésente l'énergie de transition.

Ce processus est interdit par le Modèle Standard car il viole la conservation du nombre leptonique total de deux unités conséquence du fait que le neutrino est une particule de Majorana. De plus, cette transition n'est possible que dans le cas d'un neutrino de Majorana massif. Nous allons voir par la suite quels sont les diérents échanges possibles permettant la double décroissance bêta sans émission de neutrinos.

Echange de neutrino léger par courant gauche

La décroissance ββ0ν par l'échange d'un neutrino gauche léger de Majorana correspond à ce que l'on appelle aussi le mécanisme de masse [78]. Dans ce cas, l'antineutrino émis au premier vertex, à la manière d'une décroissance β simple, est absorbée dans le second vertex (équation 1.4.4 et gure1.14). Cela n'est possible que si le neutrino est sa propre antiparticule (ν = ¯ν), c'est à dire une particule de Majorana. De plus, an de permettre un couplage par courant gauche (V-A) entre le neutrino et le quark, le neutrino doit obligatoirement être massif an que le renversement d'hélicité par transformation de Lorentz soit possible. La désintégration peut alors se résumer par ces deux équations :

n −−−→ pV −A ++ eL+ ¯νeR

νeL+ n −−−→ pV −A ++ eL (1.4.4)

Dans ce cas, le neutrino virtuel échangé est massif, ce qui implique la présence d'un terme de masse dans le calcul du taux de transition de la décroissance. Ainsi, la demi-vie de la décroissance ββ0ν va dépendre d'un terme de masse supplémentaire de telle sorte que :

1 T1/2 = G (Qββ, Z) M 2 mββ me 2 (1.4.5) avec :

 G(Qββ, Z)le facteur d'espace de phase (section 1.4.3) pour la transition ββ0ν en sachant que G(Qββ, Z) 6= G(Qββ, Z).

 M l'élément de matrice nucléaire correspond à la décroissance (section 1.4.4) en sachant que M 6= M.

 mββ la masse eective du neutrino de Majorana comme déni à l'équation1.3.37.  me la masse de l'électron.

Figure 1.14: Diagramme de Feynman de la décroissance double bêta sans émission de neutrinos. Echange de neutrino léger par courant droit

Dans le cas d'un échange de neutrino léger par courant droit, le renversement d'hélicité n'est plus une obligation (équation1.4.6). Cependant, la condition d'un neutrino massif doit toujours être

respectée an de garantir l'orthogonalité entre les états propres de masse et de saveur [79]. Ce type de mécanisme peut être résumé de la sorte :

n −−−→ pV −A ++ eL+ ¯νeR

νeR+ n −−−→ pV +A ++ eR (1.4.6)

Dans cette hypothèse, l'expression du taux de transition de la décroissance va dépendre de toutes les combinaisons de courants droits et gauches possibles, l'exemple présenté n'étant qu'un cas parmi d'autres. Le taux de transition sera donc composé des diérents facteurs d'espace de phase ou d'éléments de matrice nucléaire propres à chacune des interactions.

La discrimination entre les deux derniers processus que nous venons de voir (par courant gauche ou courant droit) est possible expérimentalement si on arrive à accéder à l'énergie des particules ainsi qu'à leur angle d'émission. En eet, si on regarde les équations1.4.4 et1.4.6, on constate que l'hélicité des électrons émis dans l'état nal est diérente. Si les électrons ont une hélicité identique, l'émission aura une tendance préférentielle à se faire dans des directions opposées an de garantir une hélicité totale nulle. Dans le cas inverse, l'émission dans une même direction sera privilégiée. C'est la raison pour laquelle les expériences permettant de reconstruire les traces de particules sont indispensable pour discriminer les diérents processus d'émission.

Echange de neutrino avec émission de Majoron

La double désintégration bêta sans émission de neutrinos est possible dans le cas où le neutrino est une particule de Majorana. Le nombre leptonique total n'est alors pas conservé (violation de deux unités) entrainant une brisure de la symétrie B-L6. Une autre extension du Modèle Standard prévoit la brisure spontanée de symétrie globale entrainant l'existence d'un boson de Goldstone, appelé aussi majoron χ[80]. Ainsi, la décroissance ββ0νχpeut s'écrire de la sorte :

(A, Z) → (A, Z + 2) + 2e+ χ (1.4.7)

Dans ce cas, le nombre leptonique associé au majoron est de deux unités an de rétablir la conservation de la symétrie globale.

Ce mécanisme va pouvoir être discriminé au niveau du spectre en énergie totale des deux élec-trons. En eet, la présence du majoron, qui ne peut pas être détecté, va entrainer une perte d'in-formation sur l'énergie de la transition Qββ selon une forme bien dénie (gure 1.13). De plus, il est important de noter que certains modèles prévoient l'émission simultanée de plusieurs majorons entrainant des changements spéciques sur le spectre en énergie total attendu des électrons. Modèle supersymétrique

Les théories de supersymétrie (notée SUSY) sont des théories de symétrie d'espace-temps établies pour répondre aux questions ouvertes auxquelles le Modèle Standard ne peut pas répondre. Elles sont capables d'intégrer des mécanismes autorisant la décroissance double bêta sans émission de neutrinos [81]. Le processus peut alors être décrit par l'échange d'un gluino ou d'un neutralino massif à la place du neutrino virtuel vu auparavant. De la même manière que pour les autres mécanismes, celui-ci n'est possible qu'avec un neutrino de Majorana.