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B.   L’arrivée de Claude-Marie Marduel à la veille de la Révolution 32

2.   Début de la carrière de Claude-Marie Marduel, une succession à la cure de Saint-

Claude-Marie Marduel, fils de Claude Marduel et d’Elisabeth Bertrand naquit à Lyon, le 30 septembre 1747. Baptisé le 1er octobre 1747 dans la paroisse de Saint Nizier de Lyon, il eut pour parrain Claude-Benoit Marduel et pour marraine Marie Anne Bertrand [Doc. 7]. Il se destina à l’état ecclésiastique à l’âge de quatorze ans. Attiré à Paris par son oncle Jean- Baptiste en 1761, il poursuivit ses études sous la surveillance de ce dernier. Docteur en théologie, il reçut dans la chapelle supérieure du Palais archiépiscopal parisien, le 23 juin 1764, la première tonsure par Monseigneur Henri Hachette-Desportes, évêque titulaire de Cydonia, vicaire général du même archevêque parisien. Le 19 décembre 1767, il reçut les quatre ordres mineurs par Monseigneur Louis François Marc Hilaire de Conzié, évêque de Saint-Omer. Nommé sous-diacre le 17 décembre 1768 par Monseigneur Charles-Gilbert de May de Termont, évêque de Blois, il fut reçu diacre par Monseigneur Christophe de Beaumont le 23 décembre 1769125. En 1772, peu de temps après son ordination le 18 juin

1771126, il fut attaché comme vicaire à Saint-Roch aux côtés de son oncle.

Claude-Marie était destiné à prendre la place de Jean-Baptiste à sa disparition. Il avait d’ailleurs obtenu, avant sa mort advenue le 17 mars 1787, sa promesse de l’avoir pour successeur à la cure de Saint-Roch. Après agrément de l’archevêque, il résigna sa cure en faveur de son neveu par un acte du 5 février 1787, procuration reçue par les notaires Margantin et Havard. « On avoit bien lu que M. Marduel, […] avoit long-temps refusé de résigner sa cure à ce neveu, & l’on présumait qu’il avoit de fortes raisons pour ne pas vouloir

125 Ce déroulé du début de carrière de Claude-Marie a été réalisé grâce aux notes qui nous ont été communiquées par M. l’abbé Philippe Ploix, directeur des A.H.D.P.

126 ANONYME, « Nouvelles ecclésiastiques », dans L'Ami de la religion et du Roi : journal ecclésiastique, politique et littéraire, t. 75, 1833, p. 597.

se reposer dans un âge aussi avancé, en favorisant un proche parent. Quoiqu’il en soit, le neveu sembloit avoir vaincu la répugnance de son oncle »127.

La cession semblait réglée, mais c’était sans compter sur une nouvelle affaire qui allait toucher la famille Marduel, une proie décidément appréciée de ses contemporains. La mort de Jean-Baptiste « pouvoit faire vaquer un bénéfice important, beaucoup plus par la considération qu’il donne, lorsqu’on est exact à remplir les grands devoirs qu’il impose, que par les revenus qu’il produit. Il ne manque pas de personnes qui aspirent à de pareilles places »128 et « des vues ambitieuses firent d’abord semer de ces bruits qui n’ont pas même l’apparence du vrai, & qu’on n’accueille que parce qu’il s’accordent avec les dispositions trop communes de former d’injustes soupçons »129.

Si le testament olographe de Jean-Baptiste Marduel daté du 11 janvier 1780 et déposé le 18 mars 1787 chez Maître Margantin, notaire à Paris, ne nous donne aucun indice quant à la possible cession de la cure de Saint-Roch à Claude-Marie130, il faut nous tourner vers l’acte de résignation du 5 février 1787. Le document, normalement déposé dans les minutes du notaire Michel Havard des Archives Nationales s’avère introuvable131. Par un heureux hasard,

une copie de l’original réalisée le 15 novembre 1826 est conservée aux Archives Historiques du diocèse de Paris132. Dans ce document, plusieurs éléments éveillent notre curiosité. Tout d’abord, il y est signifié que Jean-Baptiste, « malade de corps » est « toute fois sain d’Esprit, ainsi qu’il est apparu aux notaires ». Il est intéressant de noter que la Gazette des

tribunaux annonce qu’au moment de sa mort, d’aucuns disaient que « le Curé n’avoit pas été

en état de résigner à cause de l’état d’imbécillité où l’âge l’avoit réduit »133 alors que la résignation « avoit été faite le même jour où le Curé de Saint-Roch avoit été administré publiquement, en présence de la Communauté »134. De plus, il y est précisé que Jean-Baptiste

127 PETIT DE BACHAUMONT Louis, Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la république des lettres en France, depuis MDCCLXII jusqu'à nos jours ou Journal d'un observateur, contenant les analyses des pieces de théâtre qui ont paru durant cet intervalle; les relations des assemblées littéraires; les notices des livres nouveaux, 36 t., Londres, John Adamson, 1780-1789, (t. XXXVI), Londres, John Adamson, 1789, p. 214-215. 128 ANONYME, « Parlement de Paris. Grand’ Chambre. Affaire de la Cure de Saint-Roch. Résignation », dans Gazette des tribunaux, t. XXV, n°13, 1788, p. 193.

129 Idem.

130 Ce testament, répertorié aux A.N., Minutier central des notaires, sous la côte « MC/ET/CXVII/891 » est introuvable. Une copie en existe, conservée aux A.P., D.C6 281, Folios 145 verso et 146 recto.

131 Il est répertorié aux A.N., Minutier central des notaires, « MC/ET/LXXVII/421», Dossier « Mars 1787 ». 132 « DÉMISSION DE CURE. Le cure de ST ROCH à M. Marduel, son Neveu », copie de l’original du 5 févr. 1827, A.H.D.P., Z.22, Dossier 849.

133 ANONYME, op. cit., 1788, p. 193. 134 Ibidem, p. 194.

« a déclaré ne pouvoir signer à cause de la paralysie dont il est attaqué et qui lui est survenue sur la main droite »135. Nous pouvons avancer que ces deux éléments vont certainement être à l’origine d’un procès intenté par le sieur F… dont voici les faits.

Bientôt « s’élève contre le curé de Saint-Roch actuel une affaire criminelle très- fâcheuse pour lui »136. Ayant obtenu en Cour de Rome137 la cure de Saint-Roch comme vacante à cause de mort avec la clause de dévolu accidentel permettant d’attaquer les titres de possesseur paisible, le sieur F… fit contestation en déposant plainte au Châtelet. Il y avançait l’argument par nous sus-cité, à savoir que Jean-Baptiste n’était pas en pleine possession de ses moyens au moment de la résignation à son neveu138.

Réalisant la réfutabilité de son argument à la lecture dudit acte de résignation, il imagina d’entamer une nouvelle procédure. Au mois de décembre 1787, il déposa au Châtelet une accusation de faux contre les deux notaires receveurs de la procuration de résignation, Margantin et Havard, et obtint l’injonction aux notaires de porter leurs minutes au Greffe139. Il accusait Marduel de « l’avoir fabriquée de concert avec les notaires qui l’ont signée, & d’avoir tenu la mort de son oncle cachée pendant six jours, pour se donner le temps d’exécuter toutes ses mesures »140.

Quasiment un an après le début de cette affaire et après maints appels des deux parties, l’arrêt du 11 mars 1788 déclara finalement le sieur F… comme non recevable dans ses demandes et maintint la garde de la cure de Saint-Roch à Marduel141.

Si la Gazette des tribunaux résumant le déroulé du procès préfère taire le nom du revendicateur de la cure de Claude-Marie, il nous a été possible de le retrouver. Il s’agit de Claude-François Fourquet, prêtre de Dijon dont les manœuvres ont fait l’objet d’un ouvrage publié en 1789142. Bien qu’il n’ait pu obtenir la cure de Saint-Roch en s’opposant à Claude- Marie Marduel, ses prétentions ne s’éteignirent pas à l’issu du procès. Au mois de janvier 1791, la cure vacante de Saint-Roch, après le refus de Claude-Marie de prêter serment à la Constitution civile du clergé, va à nouveau être l’objet de sa convoitise. Le samedi 22 janvier

135 « DÉMISSION DE CURE. Le cure de ST ROCH à M. Marduel, son Neveu », copie de l’original du 5 févr. 1827, A.H.D.P., Z.22, Dossier 849.

136 PETIT DE BACHAUMONT Louis, op. cit., 1789, p. 214. 137 Instance juridique pontificale.

138 Ceci est ce que le droit actuel désignerait sous le vocable d’abus de faiblesse. 139 ANONYME, op. cit., 1788, p. 195.

140 PETIT DE BACHAUMONT Louis, op. cit., 1789, p. 215. 141 ANONYME, op. cit., 1788, p. 198.

142ANONYME, Mémoire pour Me Claude-François Fourquet, prêtre, pourvu per obitum de la cure de S. Roch,

à Paris, contre Me Claude-Marie Marduel, prêtre, se disant aussi pourvu, à titre de résignation, de la même cure, Paris, veuve Delaguette, 1789.

1791, à 9 heures du matin, heure d’ouverture de la 63ème séance de l’Assemblée électorale du département de Paris, M. Pastoret, ex-président de l’Assemblée électorale, faisait lecture d’une nouvelle requête de Claude-François Fourquet, prétendant son droit à la cure de Saint- Roch143. Cette protestation contre toutes élections pouvant lui porter préjudice sera renouvelée lors de la séance du 29 janvier de la même année144. Malheureusement pour lui, et comme nous le montrerons dans la suite de notre exposé, ses manœuvres furent vouées à l’échec.

L’affaire était consommée et la prise de possession eut lieu pendant la nuit. « Au reste, Claude Marduel ne resta pas longtemps paisible possesseur de sa nouvelle cure. La révolution se leva orageuse et sanglante »145.