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Comment évaluer la douleur chez les animaux d’élevage ?

3.3. Critères comportementaux de la douleur

Comme il a déjà été écrit précédemment, les comportements liés à la douleur peuvent être classés en quatre catégories en fonction du « but » poursuivi (Matteri et al., 2000; Molony et al., 1997). Certains sont destinés à informer les congénères. Dans certaines situations, les animaux blessés peuvent tirer avantage de ces comportements dans la mesure où leurs congénères peuvent leur apporter une aide (Broom & Fraser, 1990). Cependant, attirer l’attention des autres animaux peut également s’avérer négatif, notamment chez les espèces « proies » qui s’exposeraient ainsi davantage à d’éventuels prédateurs. Ceci pourrait expliquer pourquoi les ruminants, les porcs ou les oiseaux de ferme (ce sont des espèces « proies ») montrent relativement peu de comportements de douleur (Anil et al., 2002; Sanford et al., 1986).

Il est souvent reproché à l’évaluation comportementale de la douleur un manque d’objectivité. Pour s’assurer que la douleur est réelle et la distinguer du stress engendré par la procédure, des tests similaires doivent être faits avec et sans anesthésiques (Rushen et al., 2007). Chez les bovins et les ovins, de nombreuses interventions douloureuses ont été analysées et les critères validés en les croisant entre eux et, en comparant les réponses à celles d’animaux contrôles (on mime la procédure douloureuse) ou ayant subi la procédure mais recevant différents niveaux d’analgésie* (par exemple : Doherty et al., 2007; Molony et al., 2002; Molony et al., 1995; Tom et al., 2002). Pour limiter les problèmes d’interprétation des comportements, il faut une bonne connaissance du comportement de l’espèce, voir des individus (Rutherford, 2002). Parmi les nombreuses difficultés rencontrées, il arrive que des observateurs (éleveurs, vétérinaires…) constamment exposés à des animaux « douloureux » finissent par trouver normaux des comportements de douleur et sous estiment l’existence de douleur (Whay et al., 2003). A l’inverse, des animaux ayant constamment des douleurs, auxquels ils ne peuvent échapper, peuvent cesser de montrer qu’ils ont mal (Seskel, 2008). Les réponses comportementales à la même stimulation nociceptive peuvent donc varier au

cours du temps. Outre ces variations phasiques à la douleur, il existe des variations qui s’expliquent par des états physiologiques particuliers, comme la gestation et la mise bas chez les mammifères ou la ponte chez les oiseaux, qui modifient probablement les seuils de sensibilité à la douleur. Une autre source de variation provient de l’animal lui-même avec certains animaux qui vont exprimer un comportement et d’autres pas du tout et, pour ceux qui l’expriment, ce sera avec une fréquence et/ou une intensité plus ou moins grandes. Cette variabilité se retrouve dans quasiment toutes les études à travers les écart-types.

Les critères comportementaux permettent généralement d’identifier la douleur et sont d’ailleurs privilégiés chez l’homme lorsque la communication verbale n’est pas possible (Herr et al., 2006b). Ils sont très sensibles et apparaissent immédiatement en cas de douleur aiguë. Ils permettent généralement de renseigner sur le lieu de la douleur : réaction de défense au toucher, posture d’évitement ou grattage de la zone douloureuse… Cependant, certains comportements très généraux comme l’apathie, l’isolement ou le manque d’appétit posent problème car ils ne sont pas spécifiques puisque qu’on peut les rencontrer dans des situations pathologiques, de stress ou d’inconfort sans composante nociceptive. Lors d’affections spontanées (maladies), les signes peuvent également se confondre avec les signes cliniques de la maladie. Il faut donc rester vigilant même si certains comportements sont très évocateurs de douleur (Tableau 3).

3.3.1. Chez le porc et les ruminants

La plupart des critères comportementaux ont été décrits pendant et après divers types d’interventions douloureuses qui elles-mêmes peuvent se faire suivant diverses modalités comme la coupe de queue (scalpel, ciseau ou coupe-queue thermique qui permet une cautérisation), la castration (enlèvement des testicules après incision au scalpel ou avec des pinces coupantes, sans incision par pose d’élastique de striction ou par écrasement du cordeau spermatique avec une pince Burdizzo), le marquage (fer rouge ou azote liquide) ou l’écornage (destruction des bourgeons des cornes par voie chimique ou thermique). La description détaillée de ces procédures sera effectuée dans le chapitre 4. Par ailleurs, certains comportements ont été décrits dans des tests standardisés de stimulation nociceptive pour étudier les facteurs de variation de la sensibilité à la douleur ou l’efficacité de traitements contre la douleur. Certains des comportements révélateurs de la douleur ont été validés en comparant des animaux ayant reçu ou non un traitement antalgique, en mesurant la variabilité entre observateurs ou en comparant les résultats avec d’autres types de mesure.

Tableau 3. Inventaire des principaux critères comportementaux de la douleur

occasionnée par les affections douloureuses les plus fréquentes des bovins (Anil et al., 2002; Bareille, 2007; Garber & Madison, 1991; Hewson, 2004; Milne et al., 2003; Radostits et al., 2007; Rialland et al., 2008; Roger, 2008; Rosenberger, 1977; Sanford et al., 1986; Underwood, 2002).

Affections douloureuses Principaux signes évocateurs de douleur

Stomatite Gingivite Glossite (actinobacillose) Lésions dentaires Fracture de la mâchoire Bruxisme* Ptyalisme* Dysphagie*

Inappétence voire anorexie Rumination irrégulière te Conjonctivite Uvéite Photophobie Blépharospasme* Epiphora* Encolure

Atteintes du larynx et du pharynx Obstruction œsophagienne

Extension de l'encolure Protrusion de la langue

Thora

x Pleurésie

Bronchopneumonie Péricardite

Réaction à la percussion thoracique (pleurodynie) Plaintes synchrones de l'expiration

Posture antalgique : • Lordose*

• Tête en extension et portée basse • Coudes écartés

Réticulite

Ulcère de la caillette Hépatite aiguë

Plaintes synchrones de l'expiration Posture antalgique :

• Lordose

• Tête en extension et portée basse • Coudes écartés

Signe du garrot positif

Plaintes lorsque l'animal descend un plan incliné Rumination irrégulière

- Affections digestives : syndrome occlusif, invagination intestinale, intussusception, torsion de caillette, volvulus du caecum, spasmes intestinaux, obstruction du cholédoque, péritonite diffuse aiguë - Affections génitales : avortement, part, torsion de matrice, coliques de faux travail - Affections urinaires : pyélonéphrites, cystites, urolithiase, pyélonéphrite, néphrite interstitielle, hydronéphrose

Plaintes spontanées Signes de coliques : - Coliques légères : • Agitation • Piétinement - Coliques sévères : • Self-auscultation

• Coups de pieds dans l'abdomen • Alternance de coucher/relever - Coliques très sévères : • Roulade • Pédalage Abdome n

Douleur à la palpation transrectale du rein gauche

Fourbure aiguë

Boiterie intense.

Station debout très difficile. Réticence au déplacement, raideur. Posture antalgique : Lordose

Réaction positive à la pince exploratrice. Réaction positive à la percussion de l'onglon. Phlegmon interdigité

Boiterie intense avec suppression d'appui. Posture antalgique, port de pied en pince. Fonte musculaire du membre soulagé.

Membres

Dermatite digitée Boiterie franche.

Déplacements hésitants.

Mamelle

Mammite Augmentation de la distance séparant les jarrets

c

. Coups de pieds en salle de traite.

Métrite Ténesme* Orga ne s nita ux Vaginite Ténesme

Les vocalisations sont très souvent utilisées pour identifier la douleur aussi bien chez l’homme que chez l’animal. Une des difficultés pour utiliser ce critère est que des vocalisations sont également très souvent émises lors d’une simple manipulation chez les ovins, bovins ou porcins. Cependant, de nombreuses études ont montré que le nombre et les caractéristiques de ces vocalisations étaient modifiés lors de situations douloureuses (Grandin, 2001; Manteuffel et al., 2004; Prunier et al., 2006; revues bibliographiques : Watts & Stookey, 2000). De telles altérations semblent être sous le contrôle de régions du tronc cérébral qui reçoivent directement des informations de régions du cerveau impliquées dans l’intégration de la douleur (substance grise périaqueducale) et des émotions (amygdale et cortex cingulaire) (Manteuffel et al., 2004). C’est chez le porc que l’étude des vocalisations a été le plus souvent utilisée pour analyser la douleur (Leidig et al., 2009; Marx et al., 2003; Puppe et al., 2005; Taylor et al., 2001; Torrey et al., 2009; Weary et al., 1998; White et al.,

simulation de l’intervention avec des porcs soumis à l’intervention (castration chirurgicale ou coupe de la queue) et dans certains cas, des porcs castrés ayant reçu au préalable une anesthésie locale*. Dans la plupart de ces études, les auteurs ont enregistré les vocalisations et analysé le sonogramme par des moyens informatiques. Par exemple les travaux de Horn et al. (1999) ont montré que les cris de haute fréquence (> 1000 Hz) sont plus fréquents, durent plus longtemps et ont une intensité plus élevée lorsque que les porcs sont castrés que lorsqu’ils sont manipulés en mimant la castration, que le nombre des cris les plus aigus est réduit de près de moitié lorsque les porcelets bénéficient d’une anesthésie locale avant la castration. De leur côté, Puppe et al. (2005) ont comparé la fréquence maximale, la pureté et l’entropie2 des vocalisations émises par des porcelets âgés de 2 semaines et ont observé des altérations subtiles de ces caractéristiques comme une entropie inférieure des cris de haute fréquence pendant la castration. Chez le veau, Watts et Stookey (1999) ont montré que la fréquence de l’harmonie fondamentale de même que la fréquence maximale des cris et leur intensité étaient augmentées chez les animaux soumis au marquage au fer rouge par rapport à des animaux témoins. Les vocalisations peuvent aussi être utilisées de façon beaucoup plus simple en dénombrant les animaux qui vocalisent. Ceci a été réalisé à l’abattoir chez des bovins pendant la phase de pré-abattage (Grandin, 1998; Grandin, 2001) ou lors d’interventions douloureuses chez l’agneau (castration à la pince Burdizzo : (Molony et al., 1997), castration et coupe de la queue par voie chirurgicale ou pose d’élastique : (Shutt et al., 1988)) ou chez les bovins (marquage au fer rouge ou à l’azote liquide : (Schwartzkopf-Genswein et al., 1998)). Cependant, l’utilisation des vocalisations dans les heures suivant une pratique douloureuse s’avère décevante et peu utile pour détecter la douleur chez les ruminants ((Grant, 2004) ; revue bibliographique : (Molony et al., 2002)) et n’a pas été utilisée chez le porc. Par ailleurs, même pendant les interventions douloureuses, il faut rester critique sur l’utilisation des vocalisations car de très nombreux animaux vocalisent lors d’une simple manipulation et des variations peuvent exister indépendamment de phénomènes douloureux ce qui peut conduire à une mauvaise interprétation des résultats. Ainsi, dans l’étude de Taylor et al. (2001), le plus faible nombre de vocalisations pendant la castration chez les porcs les plus jeunes (3 vs. 10 jours d’âge) ne doit pas être interprété comme un signe de moindre douleur car une variation similaire du nombre des cris aigus existe chez les animaux témoins.

Les comportements automatiques de retrait sont fréquemment observés chez les animaux en cas de stimulation nociceptive. Ils sont d’ailleurs utilisés chez les ovins, les bovins ou les ovins pour mesurer la réponse à stimulations nociceptives contrôlées. Il s’agit par exemple de mesurer au bout de combien temps les animaux bougent la patte ou donne un coup de pied quand une zone limitée du pied, de l’épaule ou de l’arrière train est chauffée par un rayon laser (porc : (Jarvis et al., 1997) ; veau : (Rushen et al., 2007; Veissier et al., 2000) ; vache : (Herskin et al., 2003; Schwartzkopf-Genswein et al., 1997)). D’autres types de stimulation nociceptive peuvent être utilisés comme une décharge électrique (ovin : Cook et al., 1996)), une stimulation thermique par une lampe chauffante (ovin : Nolan et al., 1987b) ou une stimulation mécanique par pression (ovin (Nolan et al., 1987a), vache ( Ley et al., 1996)) avec à chaque fois la mesure de comportements de retrait vis-à-vis de cette stimulation. Avec cette méthode, il est possible de tester l’efficacité d’un traitement antalgique pour soulager la douleur comme cela a été fait par exemple chez des vaches laitières présentant une boiterie et soumises à un test de pression au niveau de la patte à l’origine de la boiterie (Laven et al., 2008).

Les comportements de défense pendant une intervention douloureuse sont également très fréquents. Il s’agit par exemple de mouvements des pattes et du corps pendant la castration (Horn et al., 1999; Leidig et al., 2009; Marx et al., 2003), ou l’épointage des dents de jeunes porcelets (Noonan et al., 1994; Prunier et al., 2001; Torrey et al., 2009); Figure 3). Chez des vaches laitières ou des bœufs à l’engrais, on observe des sauts ou des coups de pieds pendant le marquage au fer rouge ou à l’azote liquide (Lay Jr et al., 1992; Schwartzkopf-Genswein et al., 1998). Ces animaux montrent également des pressions

exercées sur la cage de contention beaucoup plus fortes qu’en cas de simulation (Schwartzkopf-Genswein et al., 1998). Des comportements de défense (e.g. coups de pied) peuvent également être observés lors de la palpation d’une zone douloureuse comme cela a été montré chez l’agneau après la castration par pose d’élastique de striction (Thornton & Waterman-Pearson, 1999). Des vaches boiteuses réagissent à des seuils de pression plus faibles ou a des températures qui n’entraineraient pas de réponse chez des animaux sains (Whay et al., 1997; Whay et al., 1998). La réaction de l’animal à une approche de l’homme ou à une manipulation de la région supposée douloureuse peut donc être utilisée pour mettre en évidence la douleur (Morton & Griffiths, 1985).

0 20 40 60 80 100

cri couinement grognement mouvement

des pattes mouvement du corps Répertoire comportemental P o rcel et s exp ri m an t l e co mp o rt em en t (% ) coupe simulation b a b b a a a

Figure 3. Comparaison du comportement de porcelets âgés d’un jour pendant la coupe

de la queue avec un coupe-queue thermique ou la simulation de la coupe de la queue (Prunier et al., 2001), a, b : différence significative entre les groupes à P < 0,05)

0 5 10 15 20 25 30 0-2.5 h 24-26 h 48-50 h 72-74 h Ensemble

Temps de puis la castration

P our c e nt . des obs er v at ions C NC

Tétée et massage de la mamelle

*** 0 5 10 15 20 25 0-2.5 h 24-26 h 48-50 h 72-74 h Ensemble

Temps depuis la castration

P ourc ent ag e des o bs er v a ti ons Eveillé inactif *** ** 0 1 2 3 4 5 6 0-2.5 h 24-26 h 48-50 h 72-74 h Ensemble

Temps de puis la castration

P er c en t. des o bs er v a ti ons C NC Tremblement ** ** 0 2 4 6 8 10 0-2.5 h 24-26 h 48-50 h 72-74 h Ensemble

Temps depuis la castration

P ourc ent ag e des o bs er v a ti ons *** *** ** *** T Agitation de la queue

Figure 4. Comparaison de quelques comportements de porcelets castrés à 5 jours d’âge

(C) ou non (NC) à différents moments par rapport au traitement (Hay et al., 2003), différence significative entre les groupes à P < 0,01 (**) et à P < 0,001 (***)

Outre les comportements automatiques de retrait et ceux de défense, il existe un certain nombre d’autres comportements qui concernent directement la zone douloureuse et sont donc relativement faciles à interpréter. Il s’agit par exemple de léchages ou de grattages qui permettent probablement de soulager la douleur en masquant les signaux nociceptifs. En effet, l’activation des nocicepteurs peut être inhibée par l’activation simultanée de récepteurs sensoriels non nociceptifs situés au niveau de la peau (revue bibliographique : Guirimand & Le Bars, 1996; Melzack & Wall, 1965). Ainsi, les veaux lèchent plus souvent le bout de queue après la coupe de la queue (Eicher et al., 2000) ou la zone scrotale dans les 48 jours suivant une castration (Molony et al., 1995). Des léchages sont également observés dans des tests de stimulation nociceptive (Herskin et al., 2003; Veissier et al., 2000). Chez le porc, on n’observe pas de léchage probablement pour des raisons anatomiques. Par contre, on observe des comportements de grattage du scrotum ((Hay et al., 2003; Llamas Moya et al., 2008) (Figure 4) ou des postures en chien assis dans les jours suivant la castration chirurgicale (Llamas Moya et al., 2008). De même dans des tests de stimulation nociceptive, des grattages de la zone stimulée sont observés (Herskin et al., 2009; Jarvis et al., 1997). D’autres comportements assez proches peuvent être observés : mouvements de la tête pour atteindre la zone douloureuse chez l’agneau après la castration et/ou la coupe de la queue (revue bibliographique : Molony et al., 2002), frottement des mâchoires l’une contre l’autre après l’épointage des dents chez le porc (Bataille et al., 2002a; Noonan et al., 1994).

A côté de ces comportements de stimulation de la zone douloureuse, il existe des comportements d’évitement de la zone douloureuse ainsi que des postures antalgiques.

L’exemple le plus classique est le comportement de boiterie : les lésions au niveau du pied entrainent fréquemment une suppression de l’appui et un score de boiterie (note donnée en fonction de l’intensité des modifications de l’appui et de la démarche) élevé chez les bovins (Flower & Weary, 2006; O'Callaghan et al., 2003; Whay et al., 1998). L’utilisation d’un traitement analgésique réduit l’intensité de la boiterie chez les bovins démontrant l’influence de la douleur sur ce comportement (Rushen et al., 2007). Après la castration chirurgicale, on observe plus souvent les animaux allongés sur le côté avec les pattes en extension chez le porc (Hay et al., 2004). Après la castration avec des élastiques de striction, on observe également davantage de postures allongées sur le ventre ou sur le côté avec les pattes arrière en extension chez l’agneau (Molony et al., 1993) ou le veau (Robertson et al., 1994). Il arrive également que les animaux aient une posture recroquevillée tout en étant allongés ou soient debout immobiles après la castration (porc : (Hay et al., 2003) ; agneau (Molony et al., 1993)). Ces différentes postures permettraient d’éviter de stimuler la zone douloureuse (revue bibliographique : Molony & Kent, 1997). Des veaux récemment écornés montrent des mouvements vigoureux de la tête et des oreilles qui ne sont pas présents pendant la durée d’action de l’anesthésie locale (Sylvester et al., 2004).

L’agitation de la queue est utilisée comme critère de la douleur aussi bien après la coupe de la queue et plus curieusement après la castration. Ainsi, dès que des porcelets ayant subi la coupe de queue sont remis dans leur loge, ils agitent davantage le moignon de queue ou au contraire le collent plus souvent sous le corps entre les pattes arrières que les porcelets témoins (Noonan et al., 1994; Prunier et al., 2001; Torrey et al., 2009). Dès les premières heures et pendant plusieurs jours après la castration par incision, les porcelets agitent plus souvent la queue que lorsqu’ils sont seulement manipulés ((Hay et al., 2003; Llamas Moya et al., 2008; Wemelsfelder & van Putten, 1985); Figure 4). Ce comportement est retrouvé chez le veau après la castration avec un effet plus marqué lorsque la castration est effectuée par pose d’élastique qu’après incision (Robertson et al., 1994). Ce comportement est très souvent observé dans des tests standardisés où l’agitation de la queue apparait en même temps que des réactions de retrait des membres lors de l’application d’un stimulus nociceptif thermique au niveau de la peau (voir ci-dessus).

Très rapidement après l’intervention chirurgicale, il est possible d’observer des comportements qui se rattachent à l’activation du système sympathique. Ainsi, dans les premières heures qui suivent la castration chirurgicale des porcelets, on observe davantage de tremblements (Hay et al., 2004) même si ceci n’est pas toujours retrouvé (Llamas Moya et al., 2008). Chez l’agneau soumis à la castration (par incision ou par pose d’élastique) ou à la coupe de queue (par coupe au ciseau ou au coupe-queue thermique), des tremblements ont également été observés (Molony et al., 2002) même s’il n’est pas toujours possible de les quantifier car ils sont souvent masqués par les mouvements respiratoires (Lester et al., 1996). Par ailleurs, chez les très jeunes animaux, on observe très souvent des spasmes et des tremblements spontanés pendant le sommeil.

Des altérations générales du comportement sont souvent décrites après une intervention douloureuse. Ces altérations sont difficiles à interpréter car des perturbations de l’environnement physique ou social des animaux ou un état de maladie peuvent également en être à l’origine. Il s’agit par exemple d’une moindre activité à la mamelle (tétée et massage de la mamelle) des porcelets après la castration sans qu’il soit clairement démontré que le comportement de tétée soit inhibé ((Hay et al., 2003; McGlone et al., 1998; McGlone et al., 1993). Chez le veau, la réduction du nombre de tétées après la castration est plus clair (Robertson et al., 1994). L’isolement des animaux ainsi que la désynchronisation des comportements avec les autres animaux de la portée ont également été observés chez le porc après la castration (Hay et al., 2003) ou la coupe de queue (Torrey et al., 2009). Une réduction des déplacements pendant plusieurs jours (Hay et al., 2003; Llamas Moya et al., 2008) et l’augmentation d’un état d’éveil tout en étant inactifs pendant quelques heures sont observés après la castration (Hay et al., 2003). Chez l’agneau, une posture debout immobile en « statue » a également été décrite tout de suite après la castration par incision du scrotum (Molony et al., 1993). Chez l’agneau et le veau, un état d’agitation (les animaux se lèvent et se couchent fréquemment) est décrit pendant plusieurs jours après la pose

d’élastique pour la castration et/ou la coupe de la queue (Lester et al., 1996; Molony et al., 2002; Robertson et al., 1994). Cet état d’agitation semble spécifique de la pose d’élastique car elle n’est pas retrouvée après la castration ou la coupe de la queue au scalpel ((Lester et al., 1996; Molony et al., 1993; Sylvester et al., 2004). Dans d’autres situations comme après l’écornage chez le veau, on observe une diminution de l’activité générale (Sylvester et al., 2004). De même, des vaches ayant une douleur viscérale induite par réticula-péritonite traumatique diminuent leur durée d’activité locomotrice de 70 à 90% (Rialland et al., 2008). Il est intéressant de noter que dans cette étude, le groupe pour lequel l’intensité douloureuse est maximale a une activité accrue dans un deuxième temps, témoignant d’une modification du comportement. De la même manière, on observe parfois une augmentation de l’alimentation et de l’activité générale après des procédures douloureuses chez des génisses (Eicher et al., 2000) ou des agneaux (Mellor & Murray, 1989b). Ces activations comportementales pourraient être expliquées comme des comportements redirigés de

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