• Aucun résultat trouvé

Coup de b´ elier de masse

Dans le document M´ecanique des fluides (Page 102-107)

Ph´ enom` enes transitoires dans les conduites

3.4 Coup de b´ elier de masse

Lorsque les vitesses sont chang´ees rapidement dans un ´ecoulement, des variations de pression importantes sont not´ees et donc `a ´eviter. Ceci n’est plus le cas si les conditions d’´ecoulement sont chang´ees de fa¸con lente. Dans cette configuration, les variations de pression sont minimes, la masse volumique du liquide reste quasiment constante, et les conduites peuvent ˆetre consid´er´ees comme ´etant ind´eformables. On parlera de coup de b´elier de masse.

Nous ´etudierons dans un premier temps l’´etablissement de l’´ecoulement lors d’une ouverture de vanne afin d’appliquer les ´equations vues plus haut. Ensuite, le coup de b´elier de masse sera abord´e pour une fermeture de la vanne en bout de conduite. Nous verrons enfin qu’il est possible d’´eviter de trop grandes variations de pression par l’utilisation de chemin´ee d’´equilibre.

3.4.1 Ouverture d’une vanne : ´ etablissement de l’´ ecoulement

On consid`ere une conduite BC de longueur L pr´ec´ed´ee d’un convergent AB tr`es court et assez prononc´e, et pourvue d’une vanne en C (Fig.3.1). Le but de ce calcul est d’estimer l’augmentation progressive de la vitesse de l’´ecoulement qui prend place lorsqu’on ouvre la vanne.

Dans le convergent AB, la variation de vitesse dans la direction de la conduite est tr`es importante cons´ecutivement `a l’´evolution rapide de la section de passage du liquide (i.e. uB >> uA). De ce fait le terme instationnaire (∂u/∂t) de l’´equation (3.1) devient n´egligeable devant le terme de convection (∂u/∂x). Cette ´equation devient alors :

ρu∂u

∂x =−∂p

∂x

L’int´egration spatiale le long du convergent de cette expression, en tenant compte d’une vitesse en entr´ee de convergent n´egligeable devant celle observ´ee en sortie de convergent, donne :

u2B = 2

ρ(pA−pB) (3.2)

La conduite BC quant `a elle est caract´eris´ee par une section constante, le bilan de masse (??) devient alors ∂u/∂x = 0 La vitesse u ne d´epend que du temps et non plus de la position dans cette conduite (on peut enlever l’indice B). L’´equation d’Euler (3.1) est simplifi´ee `a

ρ∂u

∂t =−∂p

∂x

int´egr´ee le long de la conduite BC donne : ρL∂u

∂t =pB−pC

La relation (3.2) nous permet d’exprimer la pression en B en fonction de celle en A ainsi que de la vitesse au d´ebut de la conduite BC :

ρL∂u

que l’on peut ´ecrire sous une autre forme, en isolant les param`etres de vitesse et de temps dans deux membres diff´erents :

du 1− u2

2gh

= gh L dt

C’est l`a l’´equation diff´erentielle fondamentale de l’´etablissement du r´egime d’´ecoulement de l’eau dans une conduite dont la section de sortie est constante et qui est soumise `a une pression h constante. En posant v =u/√

2gh etτ =p

2L2/gh, il vient dv

1−v2 = dt τ

La solution est obtenue en int´egrant chacun des membres, il vient alors : argth(v) + Cste = t

τ

A l’instant` t= 0, la vitesse est nulle entraˆınant une valeur nulle de la constante. Finale-ment, on obtient la vitesse en sortie, dont l’´evolution est donn´ee sur la figure 3.2 :

u(t) =p

2gh×tanh t

τ

La constante de temps τ caract´erise le temps n´ecessaire `a l’´ecoulement pour atteindre quasiment une vitesse constante. On remarque d’apr`es son expression que le r´egime est atteint d’autant plus rapidement que la conduite est courte et que la d´enivellation est importante. On remarquera de plus, que l’expression de la vitesse du r´egime ´etabli (i.e., u = √

2gh, formule de Torricelli1) pouvait ˆetre d´eduite de l’expression de Bernoulli sta-tionnaire. On remarquera d’autre part que le temps caract´eristique τ ne d´epend pas de la masse volumique (repr´esentant le fluide) et de la section de la conduite.

En r´ealit´e, l’´ecoulement n’atteint jamais cette vitesse pour des raisons de dissipation d’´energie par frottement : u=K√

2gh, avec K <1.

1. Evangelista Torricelli, physicien italien (1608-1647) fut le secr´etaire et ami de Galil´ee durant les trois derni`eres ann´ees de sa vie. En ´etudiant le vide, il mit au point le premier barom`etre `a mercure en 1643-1644.

t u

p2gh

τ

Figure 3.2: ´Evolution de la vitesse en sortie de conduite apr`es ouverture `a l’instant nul.

3.4.2 Fermeture progressive d’une vanne

L’´ecoulement du cas pr´ec´edent est ´etabli. `A l’instant t = 0, on ferme la vanne en C.

La diminution du d´ebit s’accompagne d’une augmentation de l’´energie potentielle2 sous forme d’une surpression du liquide contenue dans la conduite : c’est le ph´enomˆene decoup de b´elier. On s’int´eresse `a la variation de pression subit par le fluide dans la section BC.

L’´equation de continuit´e donne comme pr´ec´edemment ∂u/∂x = 0. L’int´egration le long de la conduite de l’´equation d’Euler simplifi´ee entraˆıne :

ρL∂u

∂t =pB−pVanne

La surpression au niveau de la vanne vaut alors : ∆p=−ρL∂u

∂t

On remarquera que le terme temporel est n´egatif cons´ecutivement `a la d´ec´el´eration de l’´ecoulement, g´en´erant alors une augmentation de la pression dans la conduite (i.e. ∆p >

0). On note aussi que l’´evaluation de la variation de pression est fortement li´ee `a l’esti-mation de l’´evolution temporelle de la vitesse. Cette derni`ere est g´en´eralement obtenue

`a l’aide de la connaissance des pertes de charge `a l’origine du changment du point de fonctionnement.

Application num´erique :Soit une conduite de longueur 1 km dans laquelle de l’eau circule

`a une vitesse ´egale `a 2 m/s, la vanne est ferm´ee en 4 secondes. La formule pr´ec´edente pr´edit ∆p= 5 bar. La pr´esence de telles pressions pose d’´enormes probl`emes du point de vue du mat´eriel. Il existe des syst`emes limitant cette surpression. La chemin´ee d’´equilibre, une de ces possibilit´es, est d´ecrite dans la section suivante.

3.4.3 Att´ enuation du coup de b´ elier : la chemin´ ee d’´ equilibre

Afin d’att´enuer cet effet, il est possible d’introduire dans le syst`eme un r´eservoir ca-pable soit d’accepter de l’eau en pr´esence d’une surpression du fluide, soit caca-pable d’en restituer `a l’´ecoulement lors d’une d´epression du fluide dans la conduite. Un syst`eme exis-tant est la chemin´ee d’´equilibre, sch´ematis´ee sur la figure3.3 et repr´esent´ee page103. Les

2. Dans ce cas, on fait l’hypoth`ese que le milieu fluide est capable d’emmagasiner sous deux formes diff´erentes l’´energie et que de plus ces deux formes sont transformables l’une en l’autre.

chemin´ees sont plac´ees entre le bassin d’accumulation et la centrale hydro´electrique et ne n´ecessitent aucun entretien.

r´eservoir chemin´ee

h zr

patm. patm.

u

zc

E S

L

(a) (b)

Figure 3.3: Chemin´ee d’´equilibre. a, installation dans un r´eseau hydraulique ; b, vue en coupe (d’apr`es Dupont [12]).

Lorsque la pression a tendance `a baisser au pied de la chemin´ee par exemple, celle-ci fournit du liquide et permet d’ajuster la pression en fonction du niveau dans la chemin´ee ; en cas de surpression la chemin´ee est aussi capable d’accepter du liquide. Les variations de pression sont donc associ´ees `a des variations de volume. Jetons un œil sur les ´equations qui gouvernent ce probl`eme.

On consid`ere la chemin´ee de la figure pr´ec´edente, de section Sc (alors que la conduite principale est caract´eris´ee par une section s), dans lequel le niveau d’eau est rep´er´e par la cote zc (le niveau du r´eservoir zr est suppos´e constant et sera le niveau de r´ef´erence).

On notera h = zc −zr, la diff´erence de hauteur entre le niveau dans la chemin´ee et le r´eservoir.

Notons qu’avant de fermer la vanne, les niveaux dans le r´eservoir et dans la chemin´ee sont sensiblement ´egaux. L’´equation d’Euler simplifi´ee et int´egr´ee sur la longueur de la conduite ES donne :

ρL∂u

∂t =pE −pS =−ρgh ou ∂u

∂t =−g

Lh (3.3)

On note que l’´evolution de la vitesse et la variation de hauteur sont de signes oppos´es. Une d´ecroissance de la vitesse est caract´eris´ee par une augmentation de la hauteur dans la chemin´ee. Celle-ci g´en`erera une pression ρgh d’autant plus importante, qui aura pour rˆole de s’opposer au mouvement du fluide. Le d´ebit sera d`es lors graduellement r´eduit. Le rˆole d’une chemin´ee d’´equilibre vient d’ˆetre mis en ´evidence.

Rappelons que la surpression cr´e´ee par la fermeture de la vanne est caract´eris´ee par un soul`evement de la surface libre dans la chemin´ee, et ensuite des oscillations de celle-ci. On cherche alors `a mettre en place une ´equation diff´erentielle de cette hauteur, ayant pour solution un terme sinuso¨ıdal. La relation (3.3) correspond presque `a ce que l’on recherche, mis `a part le fait que la vitesse intervienne. Afin de faire apparaˆıtre le termeh, utilisons la conservation du d´ebit massique de la conduite vers la chemin´ee :

ρsu =ρSc∂zc

∂t =ρSc∂h

∂t que l’on peut d´eriver par rapport au temps :

∂u

le niveau de l’eau dans la chemin´ee laisse donc apparaˆıtre des oscillations de pulsation Ω =p

sg/ScL. La solution de cette ´equation est de la forme h(t) = A×sin(Ωt+ Φ). Les param`etres A et Φ sont d´etermin´es `a l’aide de conditions `a l’instant initial. Les niveaux des deux r´eservoirs sont ´egaux (h(0) = 0), d’o`u Φ = 0. D’autre part, le d´ebit est transmis

`a la chemin´ee, soit suo = S ∂h r´esolution, la solution devient h(t) =uo

psL/Scg×sin Ωt et le maximum de surpression est alors associ´e `a un maximum de d´enivel´e, soit :

∆pMax≡ρghMax =ρg ssL

Scguo.

Si l’on reste dans le cas de la conduite pr´ec´edente avec en plus une chemin´ee de diam`etre trois fois plus grand que celui de la conduite (i.e.,Sc = 9s), il vient :

∆pMax= 1000×9,81×

r 1000

9×9,81×2 = 66030 Pa = 0,66 bar

au lieu des 5 bar dans le cas d’une conduite sans chemin´ee. Ce syst`eme est largement utilis´e dans le cas d’alimentation de turbine afin d’amortir les brusques variations dans la manœuvre du distributeur de la turbine.

Ainsi, la chemin´ee d’´equilibre transforme le coup de b´elier, cons´ecutif `a l’augmen-tation subite de la pression de l’eau pro-voqu´ee par la fermeture rapide des vannes, en un ph´enom`ene d’oscillations de masse.

L’eau monte dans la chemin´ee et la pres-sion se trouve ainsi ´equilibr´ee. La section doit ˆetre assez importante pour ne pas entraˆıner de vidange totale en pr´esence d’une forte d´epression et une hauteur suffisante pour

´eviter tout d´ebordement au passage d’une surpression. La jonction d’une chemin´ee avec la conduite principale doit ˆetre judicieuse afin d’´eviter de grandes pertes de charge.

Les 7 chutes, St Ferreol des Neiges, QUEBEC.

Ces r´esultats ne sont valables que pour des temps de fermeture ou d’ouverture lents. L’application de ces lois dans le cas d’ouverture plus courte indiquerait des surpressions beaucoup plus grandes que celles observ´ees. En effet, si les va-riations de pression sont suffisamment rapides et importantes, l’eau devient un fluide compressible susceptible de propager des ondes `a grande vitesse. Le reste du chapitre s’int´eresse aux effets de cette compressibilit´e.

Dans le document M´ecanique des fluides (Page 102-107)