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2 Analyse posturale globale et méthodes cliniques d’évaluation de l’équilibre

2.4 Analyse biomécanique de l’équilibre postural

2.4.1 Contraintes s’exerçant sur le rachis lombaire

De même, Templier [1998] étudie de manière similaire les efforts subis par les disques intervertébraux au moyen du modèle de Lavaste [1990]. La Table 2.3 montre ainsi que lorsque le tronc est incliné de 45˚, les efforts s’exerçant sur les disques intervertébraux sont de cinq à sept fois plus importants qu’en position érigée.

2 - MÉTHODES D’ÉVALUATION DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL

Table 2.3 – Efforts exercés sur les disques lombaires pour différentes orientations du tronc. Le modèle est paramétré pour un adulte de 70kg portant une charge de 45kg [Templier, 1998]. Tronc vertical (N) Tronc incliné de 45˚(N) Efforts au niveau du disque intervertébral L5 / S1 750 4650 L4 / L5 660 4430 L3 / L4 710 4470 L2 / L3 790 4330 L1 / L2 750 3945

Plus récemment, Travert et coll. [accepted] analysent les effets d’un décalage du point d’application de l’effort sur une vertèbre isolée en termes de contraintes (Figure 2.7) internes. Si l’effort est appliqué à l’aplomb de la vertèbre, les contraintes à l’intérieur du corps vertébral restent faibles et distribuées de manière homogène. En revanche, un décalage d’un centimètre génère une augmentation des contraintes de 150% à l’intérieur du corps vertébral. Bien que cette étude ne concerne qu’une seule vertèbre, ces obser- vations sont généralisables à l’unité fonctionnelle (2 vertèbres et un disque). Dans ce dernier cas, le disque intervertébral sera fortement contraint lors de l’application d’un effort désaxé du fait de la différence de rigidité entre l’os des vertèbres et le tissus des disques. Cette hypercontrainte locale peut alors dégrader les tissus et être responsable de douleurs ou d’inflammations.

a - Effort appliqué à l’aplomb du centre du corps vertébral.

b - Effort appliqué 1 cm en avant du centre du plateau supérieur.

Figure 2.7 – Contraintes (de von Mises) subies par la vertèbre suite à l’application d’un effort au milieu et en avant du plateau supérieur [Travert et coll., accepted]. Un décalage du point d’application de l’effort entraîne une augmentation des contraintes au sein du corps vertébral. Image LBM.

2.4 - ANALYSE BIOMÉCANIQUE DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL

2.4.2

La barycentremétrie

Si les modèles théoriques mettent en évidence les efforts nécessaires au maintien de certaines postures et attirent l’attention sur les contraintes auxquelles est soumis le squelette, ces approches ne sont pas dédiées à l’étude clinique personnalisée. De plus, leur résultats doivent faire l’objet de validations pour cette application particulière. Duval-Beaupère et coll. [1975] ont mis au point un scanner à rayons gamma permettant d’estimer la masse et le centre de gravité d’une tranche du corps humain : le barycentre- mètre. Combiné à des clichés radiographiques, ce système leur permet en additionnant les masses des tranches adéquates de visualiser la position du centre de gravité de l’en- semble supporté par chaque niveau vertébral et par les deux cotyles. Dès lors, il devient possible de mesurer le « bras de levier », et donc les moments induits par les forces gravitaires à chaque niveau.

En particulier, Duval-Beaupère et coll. [1992] montrent alors que le centre de gravité de l’ensemble supporté par les deux cotyles est invariablement situé à l’aplomb du centre bicoxofémoral et en avant de T9 chez 17 sujets asymptomatiques (Figure 2.8). Ainsi, cette étude montre que le poids du tronc et de la tête n’exercent aucun effort à même de faire pivoter le bassin autour des têtes fémorales chez le sujet asymptomatique.

T9 Incidence Pelvienne Gîte T9 (~12°) Centre de masse de l’ensemble supporté par les têtes fémorales

Verticale

têtes fémorales Normale au

plateau sacré

Figure 2.8 – Analyse barycentremétrique et définition de la gîte T9 d’après Duval- Beaupère et Legaye [2004].

Le barycentremètre n’étant pas un outil destiné à l’utilisation clinique quotidienne, Legaye et Duval-Beaupère [2008] valident un outil statistique permettant d’estimer le « bras de levier » en L3 dans le plan sagittal à partir de mesures radiographiques conven- tionnelles.

En parallèle, Pokorski [2007] propose d’appliquer la technique des tranches à des modèles géométriques tridimensionnels personnalisés complets (squelette et enveloppe externe) réalisés à partir d’images stéréo-radiographiques en considérant les densités proposées par Dempster [1955]. À partir d’une paire de radiographies EOS™, cette étude parvient à calculer le centre de masse de l’ensemble supporté par les pieds, les genoux, le bassin et chaque niveau vertébral pour 16 adultes asymptomatiques (Figure 2.9).

2 - MÉTHODES D’ÉVALUATION DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL

De plus, ces travaux proposent un premier modèle de calcul pour estimer le moment de force dû à la gravité le long de la colonne vertébrale.

a - Les centres de masses élémentaires peuvent être déter- minés en 3D. Nm 6,0 -4,0 4,0 2,0 -2,0 0,0 T12/L1 L1/L2 L2/L3 L3/L4 L4/L5 Niveaux intervertébraux Moment ex ercé par la gr av ité

b - Le calcul des bras de leviers permet d’établir le corridor de normalité des moments de flexion induits par les forces de gravité à chaque étage vertébral (un écart type). Le moment de flexion s’annule vers L3. Le poids supporté par cette vertèbre s’exerce donc à son aplomb chez le sujet asymptomatique.

Figure 2.9 – Analyse barycentremétrique à partir de stéréoradiographies et calculs des moments de flexion exercés sur chaque étage vertébral [Pokorski, 2007].

Alors que le barycentremètre effectue sa mesure couché et uniquement dans le plan sagittal, cette approche peut permettre d’analyser les efforts exercés par la gravité sur les segments de la tête aux pieds en position érigée et en trois dimensions. Toutefois, le caractère préliminaire de ces travaux et la durée nécessaire à la réalisation de ces modèles tridimensionnels personnalisés complets dédie pour l’instant cette approche à une utilisation en recherche plutôt qu’en routine.

Ces premiers résultats confirment les observations de Duval-Beaupère et Legaye [2004] qui montrent que les centres de masse des ensembles supportés par chaque ver- tèbre et les têtes fémorales sont quasiment à la verticale l’un de l’autre à 3 mm près. Sur la Figure 2.9a, ce résultat semble s’étendre au cas de l’ensemble supporté par les genoux et même par les pieds. D’un point de vue pratique, cela signifie que l’on peut estimer le bras de levier associé à l’effort gravitaire pour tous les niveaux lombaires à partir du moment où l’on connaît la ligne de gravité.