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Après avoir évoqué de manière succincte les éléments observés en prospection en relation avec les cellules, il s’agit, à présent, de dresser un bilan plus précis sur les contextes de découverte des éléments du corpus, à la lumière de toutes les informations obtenues au cours des différentes opérations de terrain. L’objectif n’est pas de refaire ici une liste de tous les cas recensés, mais d’essayer de savoir s’ils répondent à des normes et, le cas échéant, de travailler à leur défi nition.

2. 1. Le contexte naturel

2.1.1. Les secteurs interfl uviaux et les ravins

Lors de la présentation générale du massif du Barajas, nous n’avons pas manqué d’insister sur le fait que les sites préhispaniques sont établis avec une préférence marquée dans les secteurs interfl uviaux. Ces derniers présentaient sans doute l’avantage, non négligeable, d’offrir des terrains de pente modérée sur des superfi cies relativement étendues. Les groupes organisés sur ces interfl uves sont généralement suffi samment bien conservés pour qu’ils puissent être appréciés aujourd’hui en surface. Il a également été dit, à plusieurs reprises, que, parmi ces constructions, on observait, à des fréquences variables selon les endroits, des constructions souterraines. Il est donc d’ores et déjà admis qu’il s’agissait là de secteurs adaptés à l’architecture en creux.

Au cours des différentes prospections organisées sur le massif, une quantité non négligeable de vestiges a aussi été enregistrée dans les ravins souvent très abrupts qui séparent les interfl uves. Ces constructions ont souvent été emportées dans la pente et se trouvent maintenant dans un état de destruction avancée qui ne permettait pas de les topographier. Dans tous les cas, l’occupation associée aux structures souterraine semble être résidentielle. Certains ravins ont apparemment été plus occupés que d’autres. Probablement une portion de l’architecture en creux qui existait à ces endroits est à présent invisible, mais les éléments souterrains observés (MOR-D’01 à 22, LAR-01’01, TAP-A2’01) suffi sent pour affi rmer que les cellules ne sont pas une caractéristique exclusive des interfl uves. De plus, on l’a dit, les éléments enregistrés sont associés à de l’habitat. En défi nitive, il semblerait donc que leur fréquence relève plus du degré de l’anthropisation que de la topographie elle-même.

Fig. 171 : Tableau récapitulatif des structures souterraines et des diff érentes analyses dont chacune a fait l’objet

nbre minimum de cellules opérations de terrain travaux de laboratoires année

différents secteurs Los Toriles

TOR-01'01 1 fouille céramique + lithique 2003

TOR-02 4 fouille céramique + lithique+ chimie 2005

TOR-03'01 1 fouille céramique + lithique 2001

TOR-04 1 prospection 2002

Charco la Tortuga

CHAR-01'01 1 fouille céramique + lithique 2004

CHAR-02'01 1 prospection 2003

CHAR-03'01 1 prospection 2003

Los Nogales

NOG-C3'01 1 fouille céramique + lithique 2005

NOG-C5 2 nettoyage 2005

El Moro

MOR-D 12 fouille céramique + lithique 2000

MOR-D'22 1 prospection 2003 PAL-01 2 nettoyage 2004 Camposanto SAN-01'01 1 prospection 2003 SAN-02'01 1 prospection 2003 SAN-03'01 1 prospection 2003 SAN-04'01 1 prospection 2003 SAN-05'01 1 prospection 2003 SAN-F'01 5 prospection 2003 Yacata El Angel ANG-A1'01 1 prospection 2003 ANG-B2'01 1 prospection 2003 ANG-B4'01 1 prospection 2003

ANG-F3 10 fouille céramique + lithique+ chimie 2004

La Perra PER-01'01 1 prospection 2003 PER-C1'01 1 prospection 2003 Lomillo Largo LAR-01'01 1 prospection 2003 LAR-02'01 1 prospection 2003 Las Majadas MAJ-A2 5 prospection 2003 Casas Tapadas TAP-A2'01 1 prospection 2003

TAP-A1 2 fouille céramique + lithique 2000

TAP-BC4'01 1 fouille céramique + lithique+ chimie 2004

TAP-BC23'01 1 fouille céramique + lithique+ chimie 2004

TAP-BC8 2 fouille céramique + lithique 2001

TAP-BC11 1 prospection 2004 TAP-E6'01 1 prospection 2003 TAP-E13 2 prospection 2003 TAP-E12 3 prospection 2003 La Campana CAM'01-01 1 prospection 2003

TOR' NOG' CHAR' MOR' SAN' C5 C3 ANG' LAR' PER' MAJ' TAP'

CAM' Cours d'eau saisonniers

Points d'eau saisonniers ou permanents

Sites archéologiques

0 2,5 kM

Nmg

Habitats modernes

Secteurs de cellules souterraines 01 02 03 04 01 02 03 D D22 PAL F1 A1 A3 A1 B2 F3 01 C3 01 02 A1 BC4 BC23 BC8 BC11 E6 E13 E12 01 01 02 03 04 05 B4

2.1.2. Les secteurs de plaine et les hauteurs

Considérons à présent un autre critère topographique : celui de la hauteur. Ce critère va de pair avec les conditions géomorphologiques. En effet, sur le massif du Barajas, les sols sont généralement minces sur les hauteurs et plus épais en bord de plaine, où ils sont formés en partie par l’accumulation des colluvions.

On remarquera que les établissements sont généralement établis à un niveau de hauteur médian : on ne les trouve pas dans les plaines, on ne les trouve pas non plus, ni dans les secteurs les plus élevés du massif. La zone appelée localement “El Picacho” se situe au point le plus haut du massif, à plus de 2200 m d’altitude. Dans cette zone, le terrain est globalement moins pentu et moins empierré que sur les interfl uves, et quelques points d’eau y ont été enregistrés ; néanmoins, il n’existe aucun vestige à cet endroit ; les sites de Charco la Tortuga et de Toriles sont les seuls établissements de hauteur et l’occupation semble y avoir été limitée, voire intermittante. Quelques exemplaires de cellules souterraines ont été enregistrés parmi les vestiges de ces secteurs ; mais ils ne sont pas plus fréquents que les bâtiments aériens.

En résumé, que l’on prenne en compte la topographie ou les caractéristiques géomorphologiques, on constate qu’aucun de ces deux critères ne semble avoir eu un rôle déterminant sur la distribution des structures souterraines. Ces dernières apparaissent en fait dans tous les secteurs anthropisés, quelles que soient la topographie et la nature du terrain.

2.2. Le contexte anthropique

En poursuivant notre enquête, il s’agit à présent de comprendre dans quels contextes anthropisés spécifi ques se trouve l’architecture souterraine du massif.

2.2.1. Les secteurs monumentaux

Les secteurs monumentaux ont été évoqués brièvement dans le premier chapitre. Il a été dit en particulier que leur construction paraissait avoir été normée autour de deux modules particuliers. Le premier se compose d’une à trois bases pyramidales ou plates-formes hautes réparties autour d’une place, ce qui reproduit un schéma commun en Mésoamérique, à savoir des pyramides organisées autour d’une place, ouverte ou semi-fermée. La fonction de ces complexes est vraisemblablement liée à des aspects communautaires de nature religieuse et/ou politique. Le second module est formé d’un bâtiment à pièces multiples, à disposition variable auquel est joint un enclos carré ou rectangulaire pourvu d’un atrium central délimité par des piliers (Pereira, Migeon et Michelet 2001), et une cour rectangulaire en contrebas. Ce module est fort peu connu en dehors du Barajas ; des halles à colonnes ou piliers existent toutefois à San Antonio Carupo dans le Michoacan et dans la zone Chalchihuites dans l’État de Zacatecas. La fonction des bâtiments formant ce type d’aménagement n’est pas claire, et probablement faut-il envisager à la fois une fonction résidentielle de l’élite, et des fonctions publiques

à vocation peut-être politique ou économique.

Sur le massif du Barajas, ces deux types de modules ont été enregistrés à plusieurs reprises. Nous n’avons jamais retrouvé de structure souterraine associée avec des complexes monumentaux du premier genre. Concernant le second module, une cellule a été enregistrée sur le site de Nogales dans la plate-forme d’un des bâtiments à pièces multiples qui bordaient la place C (NOG-C3’01). Une autre cellule a été enregistrée sur une plate-forme beaucoup plus modeste, entre deux groupes monumentaux (NOG-C5’01/02).

En résumé, les constructions souterraines semblent avoir été rares dans les secteurs de constructions monumentales, quoiqu’elles aient pu exister, au moins dans des bâtiments liés aux activités de l’élite.

2.2.2. Les secteurs d’habitat et les secteurs agricoles

Comme il a été dit dans le premier chapitre, les habitats n’ont à première vue, aucun plan- type sur le massif. Ils se présentent sous la forme de constructions en pierre sèche érigées sur des plates-formes, mais plus souvent, sur de simples terrasses aménagées, pour certaines d’entre elles, les murs semblent avoir comporté une partie supérieure en matériaux périssables. Les maisons peuvent présenter un plan bipartite, tripartite ou plus complexe encore. Leur répartition spatiale varie : on les retrouve de manière sporadique sur les hauteurs et dans les ravins ; elles sont plus systématiquement présentes dans certaines zones basses comme à Camposanto et à El Moro, et un peu plus nuclées dans d’autres comme à Casas Tapadas.

Les secteurs agricoles, eux, ne sont pas toujours faciles à identifi er. Néanmoins, il apparaît que l’agriculture se pratiquait de préférence sur des terrasses. De fait, sur tout le massif du Barajas, il existe des traces de terrassements anciens, une solution adaptée à l’inclinaison naturelle du terrain et aux risques érosifs. Cependant, il n’est pas impossible que de petites surfaces pentues, sans aménagement particulier, aient été aussi cultivées ; c’est d’ailleurs encore le cas actuellement dans cette région, où de petites parcelles domestiques sont mises en culture dans la pente. Les solutions retenues (avec ou sans terrasse) ne sont évidemment pas incompatibles avec l’hypothèse selon laquelle, dans cette portion du Bajio, on se situait à la limite des pratiques agricoles sans irrigation.

En défi nitive, il convient de considérer conjointement les secteurs d’habitat et les éventuels secteurs agricoles. S’il est notable que certaines zones du massif présentent une densité notable en bâtiments aériens, dont au moins certains ont été résidentiels, d’autres, en revanche, ne comprennent que des bâtiments très espacés et il est envisageable qu’elles aient servi principalement de terrains de culture.

Dans les descriptions que l’on trouvera dans le volume “Données et analyses”, il est fait mention, à plusieurs reprises, de cellules associées à chacun des cas de fi gure évoqués ici. Dans le groupe BC de Casas Tapadas, par exemple, qui est un des endroits les plus densément occupés du massif puisque les constructions ne sont distantes de quelques mètres les unes des autres, on a pu observer des cellules souterraines aménagées dans les terrasses artifi cielles sur lesquelles se trouvent les maisons (Volume “Données et Analyses” : Fig. 120). À Charco la Tortuga, à l’inverse, les constructions sont, là, distantes

de dizaines, voire de centaines de mètres, mais l’on trouve également des structures souterraines. L’architecture souterraine ne paraît donc pas en relation stricte avec la densité de l’occupation et elle ne semble pas non plus être directement liée à des secteurs mis en culture.

Pour résumer, on peut dire que l’architecture souterraine est représentée dans tous les secteurs occupés par des bâtiments ou des aménagements aériens, qu’il s’agisse de constructions monumentales, de maisons ou de terrasses de culture, mais qu’une majorité est associée à des résidences.