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Contexte général de l’optimisation aéro-structure en aéronautique

1.1.1 Aeroelastic Tailoring

L’optimisation structurale s’est développée vers la fin des années 1960, pour des va-riables de dimensionnement (épaisseurs, sections) et de forme (voir la revue de [Adelman et Haftka]). L’optimisation en aérodynamique a démarré un peu plus tard, dans les années 1970, essentiellement pour des écoulements compressibles subsoniques, à l’aide de modèles aérodynamiques peu fidèles [Hicks et Szelazek 1978]. L’optimisation aéroélastique (autre-ment dit, la prise en compte des interactions du fluide avec la structure dans l’optimisation aérodynamique), apparait dans les années 1980, mais toujours en faisant appel à des simulations basse-fidélité (typiquement, méthode de la ligne portante), et des modèles

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simples (méthode de plaque équivalente pour la structure par exemple) [Barthelemy et Bergen 1988].

Dans la même période, la conception du caisson voilure du Grumman X-29 (avion expérimental à flèche inverse) marque le début d’un nouveau genre de dimensionnement structure. La nécessité d’une optimisation particulière du caisson voilure composite fût dictée par l’instabilité de divergence statique inhérente aux voilures à flèche inverse. Cette instabilité aéroélastique fût éliminée en utilisant des matériaux composites à la place des traditionnels alliages d’aluminium et en adaptant les séquences d’empilement composites afin de générer une interaction aéroélastique favorable. Ce procédé relève de l’Aeroelastic

Tailoring [Shirk et al. 1986].

1.1.2 Optimisation intégrée

Lorsque des matériaux composites sont utilisés, ou plus généralement pour des ailes à fort allongement, la performance d’un avion dépend plus fortement des interactions fluide-structure. Dans ce cas, l’optimisation aéro-structure de l’avion, c’est-à-dire l’optimisation concurrente de l’aérodynamique et de la structure en tenant compte des interactions entre les deux disciplines est recommandée pour mieux prédire la physique impliquée dans le problème. Cependant ces interactions ont longtemps été négligées pour des raisons de coût de calcul. Ces limitations conduisirent les avionneurs à suivre une boucle d’optimisation séquentielle, chaque discipline gagnant en maturité séparément. Cependant, cette stratégie peut conduire à une configuration multidisciplinaire sous-optimale. En effet, la performance d’un système multidisciplinaire dépend non seulement des performance de chacune des disciplines, mais aussi de leurs interactions [Martins et Lambe 2013]. Dès lors, on com-prend l’importance d’un couplage fort entre les disciplines dans une boucle d’optimisation multidisciplinaire. Cela permet majoritairement d’identifier plus tôt et de manière plus fiable dès la phase de conception préliminaire les configurations prometteuses. Ainsi, en 1988, [Grossman et al.] prouvent sur l’optimisation aéro-structure d’une aile de planeur que l’optimisation séquentielle est clairement moins efficace que l’optimisation où le design est intégré, autrement dit lorsqu’on ne considère qu’un seul système aéro-structure qui échange avec l’optimiseur. Dans ce cas, la recherche d’un optimum (typiquement l’amélioration du

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compromis masse/trainée en fonction de paramètres aérodynamiques et structuraux) est effectuée en considérant l’espace de recherche associé à ces deux fonctions objectifs et à l’en-semble des contraintes du système aéro-structure. La contrepartie d’une approche intégrée est la difficulté additionnelle associée au calcul des sensibilités des termes croisés entre les deux domaines. Il s’agit typiquement des gradients de la performance aérodynamique par rapport aux paramètres structuraux et des gradients des réponses structures par rapport aux paramètres aérodynamiques de forme. Afin de limiter ce coût de calcul supplémentaire, les modèles aérodynamique et structure utilisés dans l’article de [Grossman et al.] sont de faible fidélité (ligne portante, modèle poutre).

En 1989, [Haftka et al.] cherchent à réduire ce coût de calcul sur le même type d’op-timisation aéro-structure à design intégré, mais en considérant cette fois des panneaux aérodynamiques et des éléments finis. Pour ce faire, ils utilisent des procédures d’optimisa-tion numérique approchées. De plus, le calcul des dérivées croisées repose sur des méthodes par perturbations ne tenant compte que de l’impact des déformations en torsion sur la distribution de portance.

A cette époque, le constat partagé par ces auteurs est que la principale limitation est due au manque de puissance de calcul pour être capable d’améliorer le degré de fidélité des simulations, en particulier en aérodynamique.

1.1.3 Optimisation globale / optimisation locale

Les optimisations que les auteurs cités précédemment proposent font appel à des méthodes à base de gradients (méthodes de descente), ce sont donc des méthodes d’op-timisation destinées à chercher un optimum local. La recherche d’un optimum global à l’aide d’algorithmes tels que le recuit simulé [Cerny 1985], les colonies de fourmis [Do-rigo et al. 2006] ou encore les algorithmes génétiques [Holland 2010], a peu été utilisée car trop coûteuse par rapport aux méthodes de descentes. En particulier, les problèmes d’optimisation où le niveau de détail du design est élevé impliquent la prise en compte d’un grand nombre de paramètres de conception. De plus, lorsque le niveau de fidélité des simulations est également élevé (typiquement modélisation RANS/ modèle éléments finis tridimensionnel) afin de capturer par exemple les effets non-linéaires d’un écoulement

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transsonique, l’optimisation basée sur les gradients est préférable pour résoudre de tels problèmes en un temps raisonnable. De ce fait, le calcul efficace des gradients est un moyen de limiter le coût d’une optimisation réaliste.

Il existe cependant des techniques d’hybridation entre les algorithmes d’optimisation globale et locale. On cherche alors à combiner les avantages de ces deux types d’algorithmes, autrement dit trouver un optimum global rapidement. Par exemple, [Toal et al.] proposent en 2011 un algorithme de recherche globale par essaims particulaires (voir [Kennedy et Eberhart 2001]), associé à un modèle réduit basé sur la technique du krigeage ([Krige 1951]) afin de réduire le coût de calcul. La construction de ce dernier appelle un algorithme de recherche locale basé sur le calcul de gradient par méthode adjointe. [Bompard] développe au cours de sa thèse un algorithme d’optimisation globale utilisant des modèles de substitution (krigeage, fonctions de base radiales (RBF), régression à vecteurs de support) qu’il étend afin de prendre en compte les gradients pour améliorer la précision des modèles et ainsi réduire le nombre d’évaluations nécessaires. [March et Willcox] présentent un algorithme d’optimisation multi-fidélité pour des problèmes sans contraintes, basé sur l’utilisation de RBF afin de modéliser l’erreur d’interpolation entre les fonctions haute-fidélité et basse-fidélité.

Les algorithmes d’optimisation hybrides (global/local) sont particulièrement prometteurs lorsqu’ils sont utilisés conjointement avec des surfaces de réponses multi-niveaux afin de corriger le modèle réduit via des calculs haute-fidélité. Cependant, ils ne font pas l’objet d’une étude particulière au sein de ces travaux en raison de leur coût de calcul encore trop important lorsque l’on étudie des configurations réalistes d’avions. On se concentrera donc, dans ce qui suit, sur des algorithmes d’optimisation basés sur des gradients.