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Conséquences didactiques

Dans le document Langues et TICE (Page 67-70)

6. Faciliter l'appropriation

3.2. Scénarisation et simulation

3.3.3. Conséquences didactiques

Moduler la complexité. Le choix des documents va se faire non seulement en

prenant en compte les différents facteurs de complexité que nous venons d'exposer, mais en les modulant. Il est possible, surtout en début d'apprentissage, de proposer des documents courts, principalement informatifs, simples à comprendre, afin de rassurer les apprenants qui ont, à cette étape, une propension à vouloir comprendre non seulement l'ensemble du message, mais tous ses composants. Cependant, le recours à ce type de documents est rapidement à éviter si l'on souhaite amener les apprenants à gérer l'imprévu. Il est d'ailleurs remarquable que certains concepteurs de matériel pédagogique destiné aux enfants du primaire n'hésitent pas à proposer une langue riche, variée et authentique en faisant l'hypothèse que cette exposition sera le meilleur moyen d'habituer les apprenants à ne pas tout comprendre dans un message. La complexité peut certes venir de la langue, mais elle dépend aussi beaucoup de la tâche à réaliser.

Varier les registres. A la notion de type de discours, nous préférons celle de

variée constitue un des objectifs pédagogiques. Ainsi, il est possible de repérer trois registres :

- le registre soutenu (bulletins journalistiques, conférences) propose une langue recherchée, formelle qui pourrait être qualifiée d'écrit oralisé ;

- le registre intermédiaire présente une langue où le locuteur parle naturellement, mais s'adresse à un interlocuteur étranger : ce serait, par exemple, le cas de l'entretien ;

- le registre familier qui donne à entendre une langue riche des caractéristiques propres à la langue orale telles que décrites dans le tableau 3.1.

S'il semble souhaitable que les apprenants soient exposés autant que possible à tous ces registres, le registre familier est souvent absent du matériel pédagogique. Cette absence pourrait s'expliquer par la difficulté de capter cette langue par nature fortement contextualisée. Elle pourrait également venir d'une représentation normative de la langue en situation scolaire. Pourtant, cette langue familière, avec ce qu'elle comporte de traits caractéristiques, pourrait préparer les apprenants à comprendre les interactions d'une grande majorité de locuteurs de la L2.

Respecter les grammaires du récit. Selon Gaonac'h et Passerault (1998 : 349),

le récit comporte invariablement une superstructure narrative composée d'une exposition et d'un ou plusieurs épisodes. En étudiant les scripts des reportages télévisés, il est possible de voir que ceux-ci suivent généralement la même logique narrative : présentation des protagonistes, de la situation et d'un événement initial. Cet événement initial provoque un certain nombre de réactions (correspondant à la phase d'interview du reportage) et l'élaboration d'hypothèses avec l'apport d'informations complémentaires (phase de commentaire). Kintsch (1998 : 18), par exemple, a évoqué l'atout cognitif des histoires qui constituent des modèles mentaux nous permettant d'appréhender le monde. Selon lui, les récits sont des structures cognitives qui créent une unité culturelle. Ainsi, les récits présentés selon cette organisation canonique seraient mieux rappelés car le schéma narratif permettrait de créer des repères structurants dans le flot de l'information.

Proposer une approche thématique. Relativement peu d'auteurs se sont

penchés sur la question, pourtant cruciale, du thème qui unifie sémantiquement la tâche. Or le thème semble motiver la compréhension, et son choix pourrait avoir un impact sur la propension des apprenants à négocier le sens (Ellis, 2003 : 91). Deux questions se posent dès lors qu'on examine cet aspect subjectif de l'apprentissage : comment identifier les thèmes qui encouragent un investissement dans la tâche ?

Comment mesurer l'impact d'un thème sur la performance de l'apprenant ? A la première question, il semble que la familiarité de l'apprenant avec le thème va susciter une motivation à apprendre. Estaire et Zanon (1994, cités par Ellis, 2003 : 219) ont ainsi proposé un générateur de thèmes censé représenter les centres d'intérêts d'apprenants non adultes. Selon ces auteurs, les thèmes les plus motivants sont aussi ceux qui sont les plus proches de la vie courante de l'apprenant (famille > vie scolaire > vie alentour > vie imaginaire). Il est raisonnable de penser que des apprenants adultes seront plus à mêmes de se décentrer, et que ce sera davantage l'intérêt intrinsèque du sujet ou le potentiel perçu pour des interactions futures qui motiveront leurs choix. En tout état de cause, il semble qu'une implication émotionnelle soit souhaitable pour motiver l'apprentissage et le rendre aussi mémorable que possible car, comme le souligne LeDoux (2003 : 277), "les émotions (…) amplifient le souvenir".

Enfin, le choix du thème variera considérablement, selon que l'objectif pédagogique de la tâche est d'atteindre une maîtrise générale ou bien une utilisation spécifique de la L2. De même, les thèmes choisis vont dépendre du niveau linguistique des apprenants ainsi que des valeurs et de la culture du contexte d'apprentissage (Ellis, 2003 : 219).

Exploiter la multimodalité et multiréférentialité. Lancien (1998 : 9-10) a

parlé des rapports de redondance ou de forte complémentarité entre les trois canaux (images, sons et textes), ce qui permettrait de faciliter la compréhension des énoncés linguistiques. La multimodalité, que Lancien désigne par "multicanalité" donne l'occasion de "cerner" une même information dans des représentations différentes (Legros et Crinon, 2002 : 42). Cette multimodalité semble constituer une des propriétés fondamentales des TICE avec un potentiel certain pour l'apprentissage. Dans une liste de recommandations pédagogiques, Rost (2002 : 105) préconise que "la présentation de l'input [soit] multimodale [pour] permettre plusieurs perspectives" car cela permettrait une construction du sens plus stable de la part de l'apprenant.

Nous ne détaillerons pas ici les bénéfices de la vidéo. Cornaire (1998 : 129) cite une recherche menée par Batlova qui a montré que l'usage de la vidéo présentait des avantages indéniables en rendant l'attention plus soutenue, en particulier, grâce à sa charge affective. La vidéo constitue surtout, pour nous, un moyen puissant de contextualiser le discours, d'apporter des indices extralinguistiques, de permettre aux apprenants de se construire un répertoire de vignettes culturelles associées à des situations d'énonciation précises. En bref, c'est une opportunité de situer la langue et de la donner à voir.

D'autre part, la multiréférentialité correspond à la possibilité de rassembler des sources d'information diverses sur un thème donné. C'est en utilisant ces différentes sources, en assurant la complémentarité des documents et des contextes d'énonciation, que se crée la multiréférentialité. Pudelko, Crinon et Legros (2002 : 84-106) se sont intéressés à la lecture à partir de sources multiples. Cette tâche met en jeu, selon eux, des opérations de comparaison, de synthèse et de mise en cohérence d'informations éparses. Ils expliquent qu'"une lecture efficace des sources multiples nécessite la maîtrise d'autres habiletés, telles que prendre les notes, organiser l'information, détecter les incohérences et les redondances". D'autre part, ils citent les travaux de chercheurs qui ont montré que l'entrecroisement des sources en lecture est particulièrement bénéfique pour des lecteurs experts tandis qu'une découverte plus linéaire semble préférable pour des apprenants novices (p. 105).

Dans le document Langues et TICE (Page 67-70)