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20 Chapitre 2 : Cadre théorique

2.7.1. Pointhistorique

2.7.6.5. Connaissance de l'évaluation scientifique

Selon Magnusson et al. (1999), ce type de connaissances des enseignants englobe la compréhension de ce qui est important à évaluer dans l’apprentissage des sciences,

ainsi que la connaissance des méthodes d'évaluation des apprentissages en sciences. Le

premier aspect concerne la compréhension des concepts, l’évaluation de thèmes

interdisciplinaires, des principes clés et les idées qui fournissent une description de la science comme un moyen de savoir, ainsi que les caractéristiques de la connaissance

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scientifique « nature of science », des investigations scientifiques et des capacités expérimentales. La seconde sous-catégorie concerne la connaissance des enseignants des moyens qui pourraient être employés pour évaluer les aspects spécifiques de l'apprentissage des élèves, importants pour un thème.

2.7.7. Connaissancesdesenseignantsetaction

Notre présentation des cadres théoriques, dans les pages précédentes, apporte des outils conceptuels pour nous aider à analyser nos données du côté de l’activité des enseignants et de son organisation, ainsi que sur les types de connaissances qu’ils

pourraient mobiliser pendant leur enseignement. Mais, pour pouvoir mener cette étude,

nous questionnons la relation entre les connaissances de l’enseignant et son action dans sa

classe.

Nous avons vu, dans le paragraphe 2.2.1. (p. 15) que pour Vergnaud, le sujet sait mobiliser des connaissances-en-acte pour atteindre son but. C'est-à-dire, qu’il sait mobiliser des concepts, dans l’action, qu’il a d’abord construits avant de les avoir appris. Ce qui amène Vergnaud à distinguer les connaissances prédicatives des connaissances opératoires. Ces deux formes sont indissociablement liées, avec la forme opératoire qui est première. Pour Altet (2002), l’activité professionnelle se traduit « par la mise en

œuvre des savoirs, procédés et compétences en acte par un sujet » (p. 86). Les deux points de vue nous paraissent assez proches et soulignent le lien entre activité et connaissances professionnelles, ce que nous retrouvons aussi dans les travaux de Van Driel et al. (1998).

Grangeat et Munoz (2011) ont défini le concept de « savoir-processus » pour étudier le rôle « des savoirs professionnels dans la pratique enseignante » (p. 9). C’est une

adaptation du schème tel qu’il est défini par Vergnaud (1996) associée à la notion de connaissance du processus de travail proposée par Fischer et Boreham (2004). Il est défini comme une unité élementaire d’un « modèle opératif » (Pastré, 2005) qui est « comme un modèle cognitif qui sous-tend les activités professionnelles (…) pour comprendre les savoirs et les pratiques enseignantes » (p. 10). Le savoir-processus est constitué de quatre éléments. Il regroupe le but de l'action, le ou les indices qui la déclenchent, la ou les règles d'action mises en oeuvre et les connaissances qui justifient, à la fois, l'action et les choix réalisés en cours d'action.

Les savoir-processus, comme les schèmes, représentent l’organisation de l’activité

quelques dimensions critiques de la situation en vue de faciliter l’action pratique » (p. 7). C'est-à-dire que nous ne sommes pas dans une modélisation « dynamique » de ce qui se passe dans la classe en termes de changements de buts et de régulations suivant une échelle de temps mais plutôt dans une modélisation « statique » de ce qui est fait afin de renseigner le modèle opératif. Les savoirs-processus sont regroupés selon leurs buts génériques (Grangeat, 2011). Cette « photographie » du modèle opératif de chaque enseignant permet de caractériser son expertise en analysant le développement et

l’extension du modèle opératif et elle renseigne aussi sur ses besoins en formation. Notre choix pour étudier l’organisation de l’activité des enseignants se porte sur le concept de schème et pas sur celui de savoir-processus car notre problématique nécessite

d’identifier les changements de but et les régulations opérées par les enseignants dans

l’action. En effet, c’est à partir de ces écarts entre ce qu’ils ont prévu et ce qu’ils réalisent

que nous pensons identifier les connaissances professionnelles.

Nous avons vu que le schème « est une organisation invariante de la conduite pour une classe de situations donnée » (Vergnaud, 1990). Cette articulation, opérée par Vergnaud, entre la notion de schème et celle de situation, permet de montrer que toute activité est organisée. Cette organisation est déterminée par la classe de situations à laquelle le schème se rapporte. Vergnaud donne, dans sa définition analytique, ses éléments constitutifs qui sont au nombre de quatre. Il est nécessaire de les identifier pour comprendre comment le schème fonctionne, comment il génère l’action.

C’est dans les invariants opératoires que vont se retrouver les connaissances des enseignants. Ce sont des théorèmes-en-acte et concepts-en-acte, c'est-à-dire, des propositions tenues pour vraies et des objets ou des prédicats qui sont tenus pour

pertinents, pour la prise d’information nécessaire à l’action. Nous voyons bien la relation

entre des propositions, les concepts et les connaissances des enseignants.

Il nous reste maintenant à savoir si le concept de PCK est compatible avec les connaissances-en-acte, suivant les définitions données précédemment. Le concept de PCK n’est pas issu d’un cadrage théorique mais d’une analyse « des tests pour les

professeurs, utilisés pour certifier des candidats au niveau d’un comté »8 (Shulman,

8

Les citations de Lee Shulman dans ce paragraphe sont tirées d’un article de la revue Education et

Didactique, Vol 1, avril 2007. Sensevy et Amade-Escot font une analyse de ces travaux et présentent une « traduction commentée » de son article publié en 1985 qui s’intitule « Those who understand. Knowledge

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1985). Shulman constate qu’entre 1885 et 1980, les objets évalués ont changé : du contenu disciplinaire en 1885, du contenu pédagogique en 1980. Il déclare que la distinction entre savoir et pédagogie « ne représente pas une tradition séculaire, mais

vient plutôt d’un développement plus récent » (Ibid., p. 102). Il se pose alors le problème

de réunir plutôt que de distinguer le contenu disciplinaire et la pédagogie, dans l’idée de

« réfléchir sur la connaissance qui se développe dans les esprits des professeurs, et plus particulièrement sur celle relative aux contenus » (Ibid., p. 104). Il définit, alors, la connaissance pédagogique du contenu (PCK) qui répond bien, selon lui, à la réflexion

précédente. Ce sont des connaissances propres à l’enseignement d’un contenu.

Par conséquent, le concept de PCK n’appartient pas à un paradigme particulier. Il peut être très utile comme cadre d’analyse des connaissances des enseignants et répond

bien à notre question concernant la compatibilité entre les connaissances des enseignants

et l’action dans la classe.

2.8. Synthèseducadrethéorique

Depuis la synthèse des outils issus de la didactique professionnelle, nous avons présenté un modèle décrivant quatre catégories de connaissances de l’enseignant dont les PCK qui nous intéressent particulièrement. Au départ, elles sont un amalgame entre des

connaissances disciplinaires et des connaissances pédagogiques. Mais, l’évolution du modèle, suivant Grossman, montre que la connaissance du contexte d’enseignement

influence aussi les PCK.

Les PCK dépendent d’un contenu à enseigner. Dans le modèle sur lequel nous prendrons appui pour analyser les connaissances mobilisées par les enseignants, les PCK ont cinq composantes incluant chacune des sous-catégories :

- Les orientations de l'enseignant pour l'enseignement des sciences, incluant sa connaissance des objectifs et des approches générales pour cet enseignement ;

- Les connaissances curriculaires en sciences ;

- Les connaissances de l'évaluation en sciences, y compris de ce qu'il faut évaluer et de comment l'évaluer ;

- La connaissance des stratégies éducatives en sciences, y compris les représentations, les activités, et des méthodes ;

- La connaissance de ce que peuvent comprendre les élèves en sciences, les conceptions communes et les zones de difficultés.

Ces sous-catégories nous permettent d’effectuer une analyse extrêmement fine des connaissances en jeu que nous qualifierons de niveau microscopique. Ces éléments de connaissances sont mobilisés par les enseignants quand le discours se précise.

2.9. Questionsethypothèsesderecherche

Notre questionnement porte sur les connaissances professionnelles mobilisées par les professeurs dans leur enseignement des sciences expérimentales. Il s’agit d’identifier

les types de connaissances en jeu dans la préparation de la classe et au cours de sa mise en

œuvre. Notre problématique s’articule autour de trois questions principales :

- Quelles connaissances professionnelles sont mobilisées par les enseignants ?

- Comment évoluent-elles au cours de l’activité du professeur ?

- Quelles sont les spécificités dans l’activité du professeur, des connaissances professionnelles en jeu, lors de DI ?

Les cadres théoriques que nous avons présentés dans ce chapitre nous permettent

d’articuler l’action des enseignants avec leurs connaissances. Nous étudions

l’organisation de leur activité qui est représentée par le concept de schème. Dans cette organisation, nous faisons l’hypothèse que nous trouverons des connaissances professionnelles dans les invariants opératoires (§ 2.7.7. p. 48). Nous mobilisons le concept de PCK comme cadre d’analyse des connaissances des enseignants en nous référant au modèle de Magnusson, Krajcik, et Borko (1999) pour caractériser les types de connaissances professionnelles en jeu. La première question principale se décline donc en sous-questions de la manière suivante :

- Quels types de connaissances identifions-nous dans les invariants opératoires ?

- Retrouvons-nous les catégories et les sous-catégories de notre modèle de référence ?

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- Identifions-nous d’autres catégories ou sous-catégories ?

- Existe-t-il des connaissances dans d’autres composantes du schème ? Le cas échéant, de quel type sont-elles ?

- Quel est l’impact des types de connaissances sur l’activité des enseignants et son organisation ?

L’analyse de l’activité des enseignants à partir du concept de schème nous permet d’identifier les changements de but dans l’action, suite à un incident critique. D’un point

de vue méthodologique, un incident critique est un imprévu que les enseignants ont

identifié et qu’ils peuvent caractériser. Nous appelons un imprévu une situation de classe

qui n’a pas été anticipée par le professeur. Il peut être une réponse d’élève, une attitude,

une difficulté inattendue dans une activité, etc.

Nous étudions ces changements dans l’activité des enseignants car nous pensons

pouvoir, d’une part, interroger leur préparation, c'est-à-dire ce qu’ils ont prévu et, d’autre

part, identifier les régulations qu’ils opèrent dans l’action, c'est-à-dire ce qu’ils réalisent.

C’est à partir du concept de boucle de régulation rétroactive de l’activité que nous analysons les conséquences de l’écart entre le prévu et le réalisé. Par conséquent, la seconde question principale se décline en sous-questions de la manière suivante :

- Comment se construisent les nouvelles connaissances ?

- De quel(s) type(s) sont-elles ?

- Comment participent-elles à l’organisation de l’activité et à sa conduite ?

- Comment contribuent-elles à l’acquisition d’expérience des enseignants ?

Notre étude prend en compte l’enseignement des sciences par les démarches

d’investigation. Elle nous conduit à comparer des mises en œuvre dans le premier degré

et dans le second degré. La troisième question principale se décline donc en sous-questions de la manière suivante :

- Observons-nous les enseignants mobiliser des types de connaissances spécifiquement à certains moments des DI ?

- Entre le premier et le second degré, quels sont les points communs et les différences, du côté de l’activité du professeurdans la mise en œuvre de DI et du côté des connaissances professionnelles ?

Notre travail a nécessité la construction d’une méthodologie qui permette de passer de l’observation des enseignants en action dans la classe à l’identification des connaissances qu’ils avaient mobilisées dans cette action. Nous présentons au chapitre suivant notre méthodologie.