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II Matériel et méthode

II.3 Comment conduire des mesures expérimentales de transmittances

Dans cette partie, la démarche pour choisir un protocole de mesure de la transmittance à partir du banc expérimental précédemment décrit est présentée. Dans la littérature, il a été relevé que les protocoles de mesures de la transmittance à partir d’une sphère intégrante ne sont pas systématiquement décrits précisément ni justifiés (Berberoglu and Pilon, 2007; Shahin et al., 2019). Deux approches semblent se distinguer : certains auteurs éclairent toute la surface de l’échantillon (Shahin et al., 2019) quand d’autres éclairent l’échantillon avec une source laser de dimension faible devant l’ouverture de la sphère (Berberoglu and Pilon, 2007; Jing and Song, 2017; Merzlyak and Razi Naqvi, 2000). Les milieux étudiés étant diffusants dans le visible, des interrogations émergent quant au choix à retenir parmi ces protocoles de mesure afin de mesurer une transmittance cohérente sans perte du signal transmis. Les auteurs Merzlvak et al. (Merzlyak and Razi Naqvi, 2000) ont soulevé la question dans le cas où l’échantillon est fortement diffusant. En revanche, leur cas est difficilement comparable au notre, car la cellule de mesure qu’ils ont utilisée est de taille similaire à l’ouverture de la surface de la sphère.

II.3.1 Protocoles

En raison de l’ouverture très faible de la sphère (ouverture sphérique de 7 cm² environ) par rapport à la surface de l’échantillon (rectangle de 150 cm²), une interrogation a émergé au sujet de la définition des frontières de l’échantillon et des conséquences sur le protocole de mesure de la transmittance : quelle surface de l’échantillon éclairer par rapport à la surface de collecte afin de respecter le bilan photonique défini en Équation 2-25 et ayant pour frontière les contours de l’échantillon ?

+ + 9 + €u =

Équation 2-25

Où représente les rayons incidents rétroréfléchis par la face incidente de l’échantillon, 9 ceux absorbés par le milieu, ceux transmis par la surface sortante, € u les photons diffusés en sortie des surfaces haute et basse de l’échantillon et ceux incidents.

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Pour illustrer ce qui vient d’être dit, énumérons ce qui peut se passer. En éclairant toute la surface incidente de l’échantillon, en premier lieu l’on remarque que la surface éclairée de l’échantillon est bien supérieure à la surface d’ouverture de la sphère. Ainsi une partie des photons transmis n’est pas collecté comme cela est illustré par le schéma (a) en Figure 2-22. Le bilan photonique (Équation 2-25) n’est donc pas vérifié. Une autre façon de procéder est d’éclairer seulement une petite surface de la face avant de l’échantillon en positionnant un diaphragme dont l’ouverture est modulable, de manière que le flux transmis soit collecté, comme cela est illustré sur le schéma (b). Dans ce cas, le cône de transmission est inclus dans l’ouverture de la sphère d’intégration et l’ensemble des photons transmis sont collectés. Le bilan photonique défini par l’Équation 2-25 peut être fait. Les mesures de transmittances effectuées sont alors représentatives de la capacité de transmission de l’échantillon. Un autre cas, dit intermédiaire, peut se produire si l’ouverture du diaphragme est trop importante ou le milieu très diffusant comme illustré sur le schéma (c). Le cône de transmission est alors légèrement supérieur à l’ouverture de la sphère et le bilan photonique n’est pas respecté.

(a) (b)

(c)

Figure 2-22 Schémas illustratifs de l’influence de la surface éclairée incidente de l’échantillon (cuve remplie en suspension) sur la collecte du signal transmis. (a) surface éclairée incidente >>surface de collecte

(b) surface éclairée incidente << surface de collecte (c) surface éclairée incidente ≅ surface de collecte.

Cône de transmission Faisceaux diffusés Faisceaux incidents collimatés Ouverture de la sphère Face haute

Face basse Cuve PMMA + suspension

Diaphragme

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II.3.2 Mesures expérimentales

Afin de vérifier ce qui vient d’être énoncé, des mesures de transmission, dans le domaine UVA et dans le visible, ont été conduites en faisant varier la surface éclairée au moyen du diaphragme. Des ouvertures de diamètres de 5 ou 15 mm (correspondant à des surfaces de 0,2 et 1,8 cm² respectivement) ont été testées ainsi que le cas sans diaphragme (ie toute la surface de l’échantillon est éclairée), et ce pour différentes concentrations en dioxyde de titane afin d’obtenir un phénomène de diffusion plus ou moins marqué. Les résultats obtenus sont tracés en Figure 2-23. 0,01 kg.m-3 0,1 kg.m-3 0,5 kg.m-3 1 kg.m-3 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 350 450 550 650 750 T ran sm it tan ce s (% ) Longueurs d'onde (nm) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 350 450 550 650 750 Longueurs d'onde (nm) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 350 450 550 650 750 T ran sm it tan ce s (% ) Longueurs d'onde (nm) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 350 450 550 650 750 Longueurs d'onde (nm)

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2 kg.m-3 3 kg.m-3

Figure 2-23 Transmittances mesurées pour différentes concentrations en suspension (0,01 - 0,1 -0,5 - 1 – 2 - 3 kg.m-3) selon l’ouverture du diaphragme. Sans diaphragme (bleu); avec diaphragme pour des ouvertures de 15 mm de diamètre (orange) et de 5 mm (grise). Erreurs de reproductibilité <3%.

Pour chaque ouverture testée, le diaphragme est simplement utilisé dans un premier temps, à l’ouverture correspondante, afin de régler le temps d’acquisition du logiciel et obtenir un signal suffisant. Ce temps réglé, le diaphragme est retiré pour la mesure de référence (nommée R dans la section II.2.2) et replacé, à l’ouverture correspondante, devant l’échantillon pour la mesure du flux transmis (nommée S dans la section II.2.2). Les temps d’acquisition doivent être en effet identique entre R et S. L’ajout d’un diaphragme devant l’échantillon a nécessité des temps d’intégration plus importants en raison d’une forte diminution du signal reçu par la sphère. Pour une faible ouverture (de 5 mm), le nombre de photons reçus par le spectrophotomètre est à la limite de détection par le logiciel d’acquisition. Ceci explique que les résultats de transmittances soient plus bruités (Figure 2-23).

Aux plus faibles concentrations (0,01 et 0,1 kg.m-3), qui correspondent au cas d’un milieu fortement dilué et donc assez transparent, les trois options d’éclairement donnent des résultats très proches. Avec l’augmentation de la concentration, à 0,5 kg.m-3 (milieu qui s’opacifie) une distinction s’opère dans le domaine du visible d’autant plus marquée que la concentration en dioxyde de titane augmente. Dans le domaine des UVA néanmoins, les résultats restent similaires. Dans le visible, les transmittances mesurées pour une ouverture de diaphragme de 15 mm se placent systématiquement en-dessous de celles mesurées pour une surface incidente éclairée dans sa totalité. Pour une surface de collecte (ouverture de la sphère) similaire entre les deux cas, la quantité de photons transmis diffère de façon importante selon

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 350 450 550 650 750 T ran sm it tan ce s (% ) Longueurs d'onde (nm) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 350 450 550 650 750 Longueurs d'onde (nm)

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la surface éclairée : elle se trouve réduite lorsque la surface incidente est réduite. Un éclairement total de la face incidente surestime ainsi le nombre de photons collectés par la sphère en sortie d’échantillon dans le cas où la référence est une surface de la taille de la zone de collecte. Ceci correspond au cas (a) de la Figure 2-22 : des photons hors de la zone de

collecte viennent s’ajouter contrairement au cas d’un éclairement de la face incidente plus grand que celui de la surface de collecte. En réduisant encore l’ouverture de diaphragme à 5 mm, on constate qu’aux fortes concentrations de 2 et 3 kg.m-3 (milieux opaques), les transmittances mesurées pour cette ouverture de diaphragme de 5 mm se placent au-dessus de celles pour une ouverture de diaphragme de 15 mm. Ces résultats laissent à penser que le choix d’une ouverture de 15 mm est trop élevé entrainant une perte des photons transmis comme illustré par le cas (c) de la Figure 2-22. La taille du cône est en effet également fonction de la concentration en diffuseurs, plus cette dernière est élevée, plus des diffusions vont se produire et l’élargir. En revanche, pour les concentrations en photo-catalyseur de 0,5 et 1 kg.m-3, les transmittances mesurées pour une ouverture de diaphragme de 5 mm sont similaires en deçà de 500 nm à celles mesurées sans diaphragme puis, au-delà de 500 nm, se placent légèrement au-dessus. Ces résultats sont inexpliqués par rapport aux conclusions précédentes. Plusieurs hypothèses peuvent être conduites. Pour ces concentrations-là, le milieu reste encore peu diffusant, donc le cas où la surface totale est éclairée surestime de façon moins importante la transmission. Il se rapproche du cas où l’ouverture de diaphragme est très faible mais n’explique pas que la mesure soit au-dessus. L’homogénéisation de la solution peut également être remise en cause, si celle-ci est mal conduite, elle conduit à une forte variabilité de la taille des agrégats donc du phénomène de diffusion. En effet, sur un même échantillon la répétition de la mesure conduit à des écarts inférieurs à 3% mais la préparation de duplicatas voire des triplicatas auraient pu conforter ces résultats.

II.3.3 Choix du protocole

En conclusion, le protocole consistant à éclairer totalement la face incidente de l’échantillon alors que l’ouverture de collecte est petite devant cette dernière, conduit à surestimer le nombre de photons collectés par la sphère et donc les valeurs des transmittances, dans le domaine du visible où la diffusion est majoritaire. Concernant l’éclairement avec un faible pinceau de 5 mm de diamètre, les conclusions se sont avérées variables selon le niveau de concentration en TiO2 et requerraient davantage d’investigations pour obtenir des mesures

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cohérentes dans le domaine du visible. Une ouverture de diaphragme intermédiaire entre 5 et 15 mm aurait été souhaitable ainsi que l’utilisation d’une lampe plus puissante pour éclairer ces conclusions. L’on peut néanmoins estimer que le cas (b) se situe en-deçà d’une ouverture de 15 mm. En revanche, une ouverture du diaphragme de 15 mm n’est pas adaptée.

Dans l’UV, où le phénomène d’absorption est prédominant, les mesures expérimentales montrent en revanche l’absence de l’impact du protocole d’éclairement sur la mesure de transmittance. Le protocole semble ne pas impacter la mesure, et le choix d’éclairer toute la surface de l’échantillon pour ce domaine, a été retenu afin d’améliorer le signal reçu par la sphère.