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Comme pour l’étude 1, afin d’avoir une meilleure compréhension du développement des capacités de transfert intermodal, nous avons cherché à savoir si un transfert intermodal serait présent indépendamment du type de visages et de voix utilisées. De ce fait, pour l’expérience 5, nous avons choisi de reproduire le paradigme de l’expérience 4, mais en modifiant les stimuli utilisés, censés ajouter un meilleur contrôle des stimuli. Les stimuli sont les mêmes que ceux de l’expérience 2 (condition 2).

Méthode expérience 5 6.2.1.1. Participants

Cinquante-sept bébés âgés de 2, 4 et 6 mois et nés à terme (au moins 37 semaines de gestation) ont été inclus dans l’échantillon final de cette étude. Dans cet échantillon, les bébés ont été répartis en trois groupes d’âge : les bébés de 2 mois : 10 bébés (6 filles ; âge moyen = 61.8 jours ± 6.32, intervalle = 57-74 jours), les bébés de 4 mois : 20 bébés (11 filles ; âge moyen

= 125.65 jours ± 6.51, intervalle = 114-140 jours) et les bébés de 6 mois : 27 bébés (13 filles ; âge moyen = 189.85 jours ± 11.17, intervalle = 163-210 jours). Vingt et un bébés supplémentaires ont été exclus en raison de pleurs (N=6), de biais latéraux (N=6) (c.-à-d. qu’ils ont regardé d’un côté plus de 95% dans au moins 3 essais) ou encore en raison d’un temps de regard insuffisant (N=9) (c.-à-d. ne pas regarder plus de 50% du temps ou ne pas regarder les stimuli durant tout un essai). Les caractéristiques descriptives de l’échantillon final incluant les trois groupes d’âge sont les suivantes : l’âge moyen des mères était de 34.98 ans (± 4.4) et de 37.11 ans (± 5.5) pour les pères. Les parents ayant participé à l’étude étaient principalement mariés ou vivaient en concubinage (89%) et une minorité de mères élevaient leur enfant seules (11%). Le statut socioéconomique (SSE) de la famille a été calculé à l’aide de l’échelle Largo basée sur l’occupation paternelle et l’éducation maternelle, allant de 2 (le SSE le plus élevé) à 12 (le SSE le plus faible) (Largo et al., 1989). Le statut socioéconomique (SSE) moyen des familles de l’échantillon était de 4.03 ± 2.01, intervalle = 2-9. L’étude a été approuvée par le comité d’éthique de la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de Genève et tous les parents ont donné leur consentement éclairé, par écrit, à la participation de leur enfant à cette expérience.

6.2.1.2. Stimuli

Les stimuli visuels et auditifs émotionnels de joie, colère ou neutre utilisés dans cette étude étaient les mêmes que ceux de l’expérience 2. Les stimuli visuels étaient des visages émotionnels virtuels féminins créés avec FACSGen (Roesch et al., 2011) et les stimuli auditifs étaient des voix émotionnelles féminines prononçant des pseudo-mots provenant de la base de données « GEMEP » (Bänziger et al., 2012).

6.2.1.3. Procédure expérimentale

Pour cette étude, nous avons accueilli les bébés et leurs parents dans une salle du cabinet pédiatrique des doctoresses Hamdan et Oury. Le paradigme expérimental correspondait à ce qui a été présenté au chapitre II Contributions expérimentales, point 4.3, Paradigme expérimental (Figure 29).

6.2.1.4. Analyse des données

Comme pour l’expérience 2, le temps de regard a été enregistré par une caméra et codé hors ligne. Le temps de regard a été codé grâce aux regards sur le côté gauche, le côté droit de l’écran, générant des données brutes. Toutes les vidéos ont été double codées avec le logiciel BORIS (Friard & Gamba, 2016) par deux observateurs naïfs avec une moyenne d’accord de 0.93 (Pearson’s r). Pour les analyses, nous avons pris la moyenne des deux observations. Nous avons effectué une analyse de variance (ANOVA) à mesures répétées sur le temps total de regards et le nombre de regards de chaque côté de l’écran (gauche ou droite) correspondant aux deux visages émotionnels (joie et colère). Dans le but de comparer les trois groupes d’âge (2, 4 et 6 mois) et toutes les voix, nous avons calculé les distributions de temps de regard total (DTRT) comme la différence de distribution de regards pour la joie (>0%) ou la colère (<0%) ((temps de regard sur la joie - temps de regard sur la colère) / (temps de regard sur la joie + temps de regard sur la colère)). Un t-test à un échantillon comparé à la chance (0%) a été effectué avec la DTRT, afin de déterminer une préférence pour les visages émotionnels significativement supérieure au niveau de chance, plus de 0% pour les visages de joie et moins de 0% pour les visages de colère. Les analyses statistiques ont été effectuées à l’aide de Statistica 13. Le seuil de significativité était de .05. Le test de Bonferroni a été effectué afin de déterminer les différences significatives. Les tailles d’effet ont été calculées avec l’eta-carré partiel (ηp2) pour les ANOVAs.

Résultats expérience 5 6.2.2.1. « Baseline » : voix neutre

Nous avons analysé le temps de regard sur les visages émotionnels après l’écoute d’une voix neutre. Une ANOVA à mesures répétées a été réalisée sur le temps passé à regarder les visages avec les visages émotionnels (joie, colère) comme facteur intra-sujets et l’âge des bébés (2, 4 ou 6 mois) comme facteur inter-sujets.

L’effet principal des visages émotionnels était non significatif F(1, 54) = 0.34, p = .561, ηp2 =.006. L’effet principal de l’âge était significatif F(2, 54) = 3.89, p = .026, ηp2 =.126.

L’analyse post-hoc réalisée avec Bonferroni a indiqué que les bébés de 2 mois (4.74 ± 0.13 s) regardaient plus longtemps les visages que les bébés de 6 mois (4.31 ± 0.08 s) p=.029.

L’interaction entre les visages émotionnels et l’âge était non significative F(2, 54) = 0.13, p = .874, ηp2 = .005.

6.2.2.2. Condition expérimentale : voix émotionnelles

Nous avons analysé le temps de regard sur les visages émotionnels après l’écoute des voix émotionnelles. Une ANOVA à mesures répétées a été réalisée sur le temps passé à regarder les visages avec les visages émotionnels (joie, colère) et les voix émotionnelles (joie, colère) comme facteurs intra-sujets et l’âge des bébés (2, 4 ou 6 mois) comme facteur inter-sujets.

L’effet principal des visages émotionnels était non significatif F(1, 54) = 0.001, p = .910, ηp2 =.000, aucune différence de temps de regard n’a été mise en évidence entre le visage de joie (4.31 ± 0.14 s) et le visage de colère (4.34 ± 0.16 s). L’effet principal des voix émotionnelles était non significatif F(1, 54) = 0.04, p = .85, ηp2 =.000. L’effet principal de l’âge était significatif F(2, 54) = 5.53, p = .007, ηp2 = .17. L’analyse post-hoc réalisée avec Bonferroni a révélé que les bébés de 2 mois (4.74 ± 0.17 s) regardaient plus longtemps les visages que les bébés de 4 mois (4.18 ± 0.12 s) p = .033 et les bébés de 6 mois (4.07 ± 0.11 s) p = .005.

L’interaction entre les voix émotionnelles et les visages émotionnels n’était pas significative F(1, 54 )= 0.51, p = .478, ηp2 = .009. De plus, la triple interaction entre l’âge, les visages émotionnels et les voix émotionnelles n’était pas significative F(2, 54) = 0.54, p = .587, ηp2 = .019). Cependant, selon Iacobucci (2001), afin de répondre à une hypothèse posée a

priori, il est possible d’examiner l’effet d’une interaction non significative si un des effets principaux est significatif (l’âge). Par conséquent, nous avons analysé les comparaisons a priori entre le temps de regard sur le visage de joie ou de colère en fonction des voix émotionnelles et de l’âge des bébés. Les comparaisons planifiées n’ont révélé aucune différence entre le temps passé à regarder les visages de joie et colère, pour chaque voix émotionnelle et chaque âge. Les autres interactions n’étaient pas significatives, toutes les ps > .29.

6.2.2.3. Distribution du temps de regard total (DTRT)

Une ANOVA à mesures répétées a été réalisée sur la distribution du temps de regard total (DTRT) avec les voix (joie, colère, neutre) comme facteurs intra-sujets et l’âge des bébés (2, 4 ou 6 mois) comme facteur inter-sujets. Un résultat positif représentait le pourcentage du temps de regard en faveur du visage de joie et un résultat négatif représentait le pourcentage du temps de regard en faveur du visage de colère.

L’effet principal des voix était non significatif F(2, 108) = 0.56, p = .575, ηp2 =.010.

L’effet principal de l’âge était non significatif F(2, 54) = 0.58, p = .561, ηp2 =.021. L’interaction entre les voix émotionnelles et l’âge était également non significative F(4, 108) = 0.47, p = .754, ηp2 =.017.

Nous avons également effectué un test T à un échantillon sur la DTRT sur les visages émotionnels en fonction de chaque voix (neutre, joie, colère) et de l’âge des bébés (2, 4 ou 6 mois) comparé au niveau de chance de 0%. Nous n’avons retrouvé aucune différence significativement supérieure au niveau de chance, toutes les ps > .27 (Figure 46).

Figure 46. DTRT sur les visages de joie (>0%) ou de colère (<0%) en fonction des voix (neutre, joie ou colère) et de l’âge des bébés (2, 4, 6 mois). Les barres verticales représentent l’erreur standard.

-40%

6.2.2.4. Nombre de regards

Nous avons également analysé le nombre de regards sur le visage de joie ou de colère en fonction de la voix et de l’âge. Une ANOVA à mesures répétées a été réalisée sur le nombre de regards sur les visages avec les visages émotionnels (joie, colère) et les voix émotionnelles (joie, colère, neutre) comme facteurs intra-sujets et l’âge des bébés (2, 4 ou 6 mois) comme facteur inter-sujets.

Cette analyse a mis en avant que le nombre de regards dirigés sur chaque visage émotionnel augmentait avec l’âge F(2, 54) = 10.40, p = .0002, ηp2 = .28. Le nombre de regards dirigé sur chaque visage émotionnel était moins élevé pour les bébés de 2 mois (1.41 ± 0.27) que les bébés de 4 mois (2.48 ± 0.19; p = .007) et ceux de 6 mois (2.87 ± 0.17 ; p <.001). Nous n’avons trouvé aucune différence du nombre de regards sur les visages émotionnels, F(1, 54) = 0.99, p = .327, ηp2 =.018, en fonction des voix, F(2, 108) = 1.23, p=.297, ηp2 = .022 ou de l’interaction entre les visages et les voix, F(2, 108) = 0.08, p = .927, ηp2 = .001. Toutes les autres interactions étaient non-significatives, toutes les ps > .05.

Discussion expérience 5

Dans l’expérience 5, nous avons analysé si les bébés de 2, 4 et 6 mois étaient capables d’extraire des composantes amodales des expressions émotionnelles à travers un paradigme de transfert intermodal audio-visuel. Le but de cette expérience était d’examiner si les résultats que nous avons trouvés dans la condition 1 (expérience 4) étaient les mêmes dans la condition 2, avec des visages virtuels 3D et des pseudo-mots.

Pour cette expérience 5, nous n’avons trouvé aucune différence de temps de regard entre les deux visages émotionnels, et ce pour chacune des trois voix (neutre, joie ou colère). Cette absence de différence significative a répliqué les résultats eye-tracking à 6 mois de cette même condition présentés dans l’expérience 2.

En ce qui concerne les résultats développementaux, aucune différence selon l’âge des bébés n’a été trouvée en fonction des expressions faciales émotionnelles ou des voix émotionnelles. Nous avons seulement constaté que les bébés de deux mois regardaient les visages plus longtemps, mais faisaient un nombre de fixations moins élevé que les bébés plus âgés. Ce résultat suggère qu’ils feraient moins d’aller-retour entre les deux visages.

Discussion générale étude 2

L’étude 2 avait pour objectif d’examiner si les bébés de 2, 4 et 6 mois étaient capables d’extraire et de transférer une information émotionnelle amodale de la voix au visage. Afin d’avoir une meilleure compréhension des capacités de transfert intermodal, nous avons cherché à savoir si un transfert intermodal était présent indépendamment du type de visages et de voix utilisés. De ce fait, deux conditions différentes ont été présentées aux bébés, la condition 1 dans laquelle les voix étaient des vocalisations non-verbales et les visages étaient des photographies (expérience 4 : manuscrit soumis) et la condition 2 dans laquelle les voix étaient des pseudo-mots et les visages étaient virtuels (expérience 5). Dans les expériences rapportées ici, nous avons observé qu’un transfert intermodal émotionnel serait possible, même si fragile, dès l’âge de 6 mois. Cependant, cette capacité s’est révélée limitée à la condition 1.

Premièrement, après la « baseline » (voix neutre), aucune différence de temps de regard entre les deux visages émotionnels (colère ou joie) n’a été montré, et ce, dans les deux conditions. En ce qui concerne le transfert intermodal, l’absence de préférence visuelle pour l’une ou l’autre expression faciale était attendue avec la voix neutre, car les deux expressions faciales étaient nouvelles vis-à-vis de la voix.

Deuxièmement, après les voix émotionnelles (colère ou joie), différents résultats ont été observés en fonction de la condition. La première condition (photographies de visages et vocalisations non-verbales) a révélé la possibilité d’un transfert intermodal émotionnel précoce, tandis que la deuxième condition (visages virtuels et pseudo-mots) n’a pas mis en évidence cette capacité précoce.

D’une part, dans la condition 1, les résultats suggèrent qu’un transfert intermodal serait possible après les voix émotionnelles. En effet, après la voix de joie, le visage de colère était regardé plus longtemps, mais uniquement à 6 mois. Ce résultat serait en adéquation avec notre précédente étude en eye-tracking à 6 mois utilisant les mêmes stimuli (étude 1, condition 1). La primauté d’un transfert intermodal avec la voix de joie pourrait être associée à une plus grande familiarité de cette expression comparée à la colère. Indéniablement, la plupart des personnes s’occupant d’enfants expriment majoritairement de la joie avec un bébé. Par conséquent, cette familiarité semble être associée à une discrimination précoce de la joie par rapport à toutes les autres émotions de base. De plus, cette discrimination semble compromise chez les bébés moins

exposés à la joie comme dans le cas d’une dépression post-partum maternelle (Raag et al., 1997). Si nous admettons que le stimulus vocal de joie est beaucoup plus familier, les bébés devraient avoir une préférence pour la nouveauté et préférer explorer l’expression faciale incongruente, la colère. Si la voix du stimulus vocal en colère est moins familière et donc moins bien comprise, la plupart des bébés n’exprimeraient pas de préférence pour l’une ou l’autre expression faciale (colère ou joie). De plus, les stimuli vocaux de colère sélectionnés pourraient être considérés comme moins écologiques que ceux de joie. En effet, il est inhabituel d’exprimer la colère en répétant la même vocalisation plusieurs fois comparé à la joie et l’expression habituelle de rire associée, qui est la répétition de la même vocalisation.

Cependant, nous devons faire preuve de prudence quant à la possibilité d’un tel transfert intermodal. Comme l’a montré notre étude précédente (expérience 1), il serait possible que la préférence pour le visage en colère soit affectée par la saillance de la bouche du visage en colère utilisé. Néanmoins, les résultats ont montré que c’est après avoir écouté les voix émotionnelles et en particulier après la voix de joie, que le visage de colère était regardé plus longtemps, suggérant que le visage incongruent attirerait le plus l’attention.

D’autre part, dans la condition 2, le transfert intermodal trouvé dans la condition 1 n’

pas été montré. En effet, aucune différence de temps de regard n’a été révélée entre les deux visages émotionnels, et ce, après les deux voix émotionnelles. Cette absence de résultat peut suggérer qu’avec les stimuli employés, la reconnaissance des émotions grâce à un transfert intermodal serait trop difficile jusqu’à 6 mois. En effet, les stimuli que nous avons utilisés dans cette deuxième condition étaient plus contrôlés et aussi plus difficiles à discriminer. Les visages ont été créés par un logiciel (FACSGen) et n’étaient pas des photographies de visages réels comme ceux de la condition 1. Nous pouvons donc émettre l’hypothèse que les bébés de cet âge ont moins ou n’ont même jamais été exposés à de tels visages et n’ont donc peut-être pas réussi à faire le lien avec les voix. En outre, concernant les stimuli vocaux, chaque voix émotionnelle est la combinaison de trois voix féminines différentes. Afin de comprendre que l’émotion présentée est la même pour les trois voix et en extraire les propriétés émotionnelles, les bébés doivent catégoriser l’expression vocale. Des études ont montré qu’une discrimination catégorielle entre la joie et plusieurs autres émotions (surprise, tristesse, peur) était possible à partir de 6-7 mois (A. J. Caron et al., 1988; R. F. Caron et al., 1982; Ludemann & Nelson, 1988;

C. A. Nelson, 1987; C. A. Nelson & Dolgin, 1985). La capacité à catégoriser les émotions

entre deux émotions exprimées par la même personne. Ainsi, l’absence de transfert dans la condition 2, peut être expliquée par la difficulté des stimuli employés. Ainsi, la condition 2 présenterait plusieurs obstacles à un tel transfert intermodal précoce. Ces résultats suggèrent que jusqu’à 6 mois, les bébés auraient besoin d’être exposés à des stimuli plus simples et plus écologiques pour être discriminés ou créer une association entre les voix émotionnelles et les visages.

Troisièmement, en ce qui concerne l’exploration du développement, différents résultats en fonction de la condition expérimentale ont été observés. Concernant le temps d’exploration du visage, dans la condition 1, à chaque âge, les bébés ont montré le même temps d’exploration du visage alors que dans la condition 2, les bébés de 2 mois regardaient plus longtemps le visage que les bébés plus âgés (4 et 6 mois). Néanmoins en ce qui concerne le nombre de regards, nous avons trouvé les mêmes résultats entre les deux conditions. Avec le développement, les bébés ont produit un plus grand nombre de regards. Ces résultats suggèrent que les bébés plus jeunes pourraient avoir des temps de fixation plus longs sur le visage, mais qu’avec l’âge, ils feraient plus de fixations, interprétées comme des allers-retours entre les visages. Le raccourcissement du temps d’exploration chez les bébés plus âgés pourrait s’expliquer par une accoutumance plus rapide aux visages présentés, associée à une baisse d’intérêt. Ainsi, l’augmentation du nombre de regards avec l’âge suggérerait que les bébés plus âgés ont exploré plus attentivement et ont comparé davantage les visages auxquels ils étaient exposés. De plus, selon Cohen (1972), il existerait une corrélation négative entre les mesures du temps de recherche et le nombre de regards. Par ailleurs, la moyenne du temps de recherche semble être un indicateur plus sensible de l’acuité visuelle.

Pour l’expérience 4, le résultat principal a révélé qu’à 6 mois seulement, après avoir écouté une voix de joie, les bébés regardaient davantage le visage en colère (incongruent) que le visage de joie (congruent), confirmant les résultats de l’expérience 1. Ces résultats suggèrent que la capacité à percevoir l’émotion de joie de manière amodale émergerait entre 4 et 6 mois.

Pour l’expérience 5, aucune préférence pour le visage de joie ou de colère n’a été mise en évidence, confirmant les résultats de l’expérience 2. Ces résultats suggèrent que les stimuli utilisés dans la condition 2 étaient trop complexes pour être discriminés ou déclencher un transfert intermodal.

En conclusion, ces résultats ont révélé que les propriétés des stimuli utilisés ont influencé la capacité de transfert intermodal des émotions chez les bébés. Les visages virtuels et les voix présentés dans la condition 2 seraient trop compliqués pour créer un transfert intermodal émotionnel à ces âges. Alors que les photographies de visages et les vocalisations non-verbales, présentés dans la condition 1, semblent attirer plus l’attention sur le visage de colère mais seulement après les voix émotionnelles. Ainsi, un transfert intermodal émotionnel des modalités auditives aux modalités visuelles serait possible, mais limité, suggérant l’émergence d’une capacité de reconnaissance amodale de l’émotion de joie entre 4 et 6 mois.

Etude 3: transfert intermodal émotionnel (joie vs. colère et peur vs. colère) à 4 mois : analyses caméra

Résumé 11. Etude 3

Cette étude a évalué les capacités de transfert intermodal des bébés de 4 mois. Pour cela nous avons effectué deux expériences : la première avec des stimuli de joie et de colère (les mêmes que ceux des études 1 et 4) (expérience 6) et la deuxième avec des stimuli de peur et de colère (expérience 7). Le but de ces deux expériences était d’évaluer si un transfert intermodal serait présent de la même manière si les émotions présentaient une valence opposée ou si elles présentaient une valence similaire. De plus, afin de mettre en évidence un éventuel impact du genre des stimuli présentés sur le transfert intermodal émotionnel, pour chacune des expériences, un groupe de bébés a été exposé à des stimuli féminins et un autre groupe à des stimuli masculins.

Pour l’expérience 6 (joie vs. colère), les résultats indiquaient qu’un transfert intermodal