• Aucun résultat trouvé

5 Etude sous haute pression de l’oxyde de zinc nanométrique

5.3 Méthodes de synthèses et caractérisations

5.3.4 La spectroscopie Raman dans l’oxyde de zinc ZnO

5.3.4.3 Conclusions sur la signature Raman de la densité de défauts

Il est intéressant de noter que les observations par spectroscopie Raman corroborent les caractérisations effectuées précédemment et suggèrent une meilleure cristallinité (défauts intrinsèques et stœchiométrie) de l’échantillon 1. La densité de défauts initialement présente dans les échantillons 2, 3 et 4 semble ainsi se manifester (et pouvoir être identifiée) sur les spectres Raman par différentes caractéristiques, dont les plus prononcées sont un élargissement du mode E2 (high) ainsi que l’exaltation du mode E1 (LO).

Afin de vérifier la pertinence de cette influence des défauts sur le signal Raman, nous avons volontairement introduit une large quantité de défauts dans l’échantillon 1 via un recuit à 420 °K sous flux d’O2 et flux d’argon, et caractérisé les échantillons avant et après recuit. Rappelons que l’augmentation de la densité de défauts (lacunes) avec la température est reliée à l’augmentation du terme d’entropie ∆S (en raison du désordre crée par ces lacunes) dans la variation d’enthalpie libre ∆G :

ο ൌ οെ ο,

où nl et ∆Gf désignent respectivement le nombre de lacunes et l’enthalpie de formation de ces dernières.

Notons que par soucis de rigueur, les trois échantillons ont été obtenus à partir d’une même "fournée". Précisons par ailleurs qu’aucune coalescence n’est attendue à une telle température (nos collaborateurs de PLYRA ayant mesuré sur ces échantillons une température limite aux alentours de 700-800 K 79).

En premier lieu nous avons tenu à vérifier la conservation de la stœchiométrie via des mesures de spectroscopie d’électron Auger (AES) présentées en figure 5.19.a. Le spectre de ZnO initial est très proche de celui observé dans une poudre de ZnO 79, attestant de la bonne stœchiométrie de l’échantillon. Nous observons que le pic Auger autour de 986 eV (noté 2 dans la figure), caractéristique de la phase métallique (phase Zn) n’augmente pas sous recuit, indiquant ainsi l’absence d’évaporation ou d’insertion d’oxygène dans le réseau cristallin. Comme évoqué précédemment ceci provient d’une importante barrière de Mott empêchant la diffusion dans ZnO de l’Oxygène provenant de la phase gazeuse. L’absence de modification de la stœchiométrie suggère la nature intrinsèque de défauts éventuellement créés durant le recuit.

Afin de sonder l'évolution de la cristallinité, nous avons par la suite effectué des spectres de photoluminescence à températures ambiantes. L’évolution du spectre de l’exciton libre est présentée en figure 5.19.b et celui de la luminescence visible en figure 5.19.c. Concernant la figure 5.19.b, dans une structure wurtzite parfaite, seule l’observation de l’exciton libre (FX) est attendue et aucune réplique phonon n’est permise. En présence de défauts en revanche (cas d’un cristal réel), la diffusion des répliques phonons de l’exciton libre sont attendues respectivement à 3.26 eV pour FX-1LO et 3.16 eV pour FX-2LO. Précisons que les domaines émetteurs étant de taille relativement élevée (d~16 nm), aucun décalage en énergie des contributions (par effet de confinement) n’est attendu.

107

Figure 5.19 : a) Transitions LMM Auger du Zinc dans un échantillon synthétisé par LECBD avant recuit comparé aux échantillons recuit sous O2 et Ar respectivement. L’épaulement visible autour de 986 eV est caractéristique des transitions LMM du zinc dans une phase métalliq ue et apporte une information sur la sous-stoechiométrie en O de l’échantillon. L’intensité de cette composante est ici équivalente à celle d’une poudre de ZnO de bonne stoechiométrie. b) Spectres d’émission excitonique à température ambiante des trois échantillons de ZnO. Les différentes contributions attribuées à l’exciton libre (FX), la première (FX-1LO) et la seconde (FX-2LO) répliques phonon sont représentées en noir, rouge et bleu respectivement. Tandis que la contribution de l’exciton libre domine da ns l’échantillon recuit, la contribution FX-1LO devient prépondérante dans les échantillons recuits attestant de la création de défauts cristallins. c) L’augmentation de la luminescence dans le visible après recuit traduit la création de défauts de cristallinité (lacunes d’oxygène et de zinc 107).

108 La présence de ces répliques permet non seulement de témoigner qualitativement de la cristallinité de l’échantillon mais il est aussi possible via le facteur dit de Huang-Rhys (HR) d’estimer quantitativement la qualité cristalline de l’échantillon. Il est clair sur la figure 5.19.b que le signal des nanoparticules avant recuit est dominé par la contribution FX à 3.30 eV. Le facteur HR associé, défini comme I1/I0 (où I1 et I0 désignent les intensités de FX-1LO et de FX respectivement), est estimé à seulement 0.39. Concernant les échantillons recuits sous O2 et Ar en revanche, le facteur de Huang-Rhys obtenu est estimé à 10.5 et 12.3 respectivement. L’augmentation significative du facteur HR lors de recuits indique ainsi clairement la dégradation de la qualité cristalline des nanoparticules. L’augmentation significative de la luminescence visible dans les échantillons recuits appuie ces conclusions.

Figure 5.20: (à gauche) Spectres Raman à conditions ambiantes de l’échantillon 1 avant recuit, de l’échantillon 1 recuit sous flux d’O2 et de l’échantillon 3 à titre de comparaison. Le pic surmonté d’une * correspond à un pic de pollution (voir annexe III). L’augmentation de la densité de défauts se manifeste essentiellement par l’exaltation du pic attribué au mode E1(LO).

109 Nous présentons en figure 5.20 les spectres Raman obtenus avant et après recuit sous O2 (le recuit sous Ar conduit à un spectre similaire) ainsi que le spectre de l’échantillon obtenu par voie hydrothermale à titre de comparaison. Le tableau à droite de la figure présente les différentes caractéristiques des pics Raman associés aux modes E2high et E1(LO). Aucun décalage en fréquence significatif n’est observé après recuit. Un élargissement du mode E2high est en revanche observé et devient comparable à la valeur observée sur l’échantillon 3. Notons à nouveau que ce résultat est difficilement appréciable en raison de la possible exaltation du mode E1(TO) à basse fréquence (~ 415 cm-1). L’impact du recuit est en revanche particulièrement frappant sur l’augmentation en intensité du mode polaire E1(LO) (suivi par le ratio I(E1(LO)/I(E2high)). L’intensité de ce dernier devient comparable à celle observé dans l’échantillon obtenu dans un échantillon caractérisé avec une densité de défauts importante (échantillon 3). Notons par ailleurs que les valeurs obtenues sur ces deux échantillons sont du même ordre de grandeur que les observations de la littérature sur des échantillons (obtenus par broyage) de taille équivalente 55,94. Ces résultats sont par ailleurs cohérents avec l’étude de Windisch 108 dans laquelle une démarche inverse à la nôtre est effectuée. Ce dernier a en effet observé que la "guérison" des lacunes d’oxygène par recuit sous H2 s’accompagnait d’une diminution prononcée du mode E1(LO).

Les mesures obtenues par les différentes techniques de caractérisation (Auger, photoluminescence, Raman) attestent de la création de défauts de cristallinité dans le recuit sous O2 de l’échantillon obtenu par LECBD. De plus, l’exaltation du mode polaire E1(LO) après recuit (et donc après création de défauts) semble valider la sensibilité de ce dernier aux défauts intrinsèques de l’échantillon. Le suivi de ce mode peut ainsi être envisagé comme une sonde accessible par spectroscopie Raman de la cristallinité des nanoparticules de ZnO

Tableau 5.3 Fréquence (ω), largeur à mi-hauteur (HWHM) et intensité relative (I(E1(LO)/I(E2high) des modes E1(LO) et E2high.

.

Dans ce qui suit, nous présenterons les spectres Raman obtenus durant un cycle pression sur les différents échantillons de ZnO présentés précédemment. Ces échantillons sont de tailles équivalentes et ne diffèrent que par leur voie de synthèse. Cette approche nous permettra ainsi d’étudier l’impact de la densité de défauts sur le polymorphisme sous pression de ZnO à ces échelles. Rappelons à ce titre que la transition wz-NaCl est attendue autour de 12-15 GPa (pour les tailles étudiées ici) selon la littérature 28,58,61.

110