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ٰProtection de la biodiversité

La France est l’un des pays d’Europe bénéficiant de la plus grande biodiversité. Elle se situe au 8ème rang mondial des pays hébergeant le plus grand nombre d’espèces animales et végétales menacées203. Des espèces considérées comme banales, comme les moineaux ou les mésanges204, sont autant touchées que des espèces plus rares situées dans les DOM ou dans le pourtour méditerranéen (les deux points les plus sensibles du territoire). En métropole, sur 696 espèces évaluées par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), 13 sont classées comme éteintes et 140 sont menacées de disparition, soit 20 %... Le mitage provoqué par l’artificialisation progressive des sols affecte les écosystèmes et la fragmentation des espaces naturels, réduit les mouvements comme les migrations et diminue la taille des populations, risquant de conduire à un appauvrissement des patrimoines génétiques.

Comme l’affirme l’avis du CESE de 2011 sur la biodiversité205, l’échelle des territoires est pertinente pour concevoir et mettre en place des projets de développement incluant la problématique de la biodiversité dans l’ensemble des activités humaines. La convergence des actions des collectivités avec les objectifs définis par la stratégie nationale pour la biodiversité passe par une articulation et une complémentarité des compétences entre les différents niveaux de collectivité.

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réglementaire, l’abondance de textes qui veulent embrasser toutes les situations, sans jamais y arriver et trop souvent sans coordination interministérielle suffisante.

Au vu de ces constats apparemment contradictoires, le CESE affirme qu’une politique nationale d’aménagement du territoire, régulatrice et structurante, mise en œuvre par un État stratège, est d’autant plus nécessaire dans ce contexte caractérisé par la décentralisation (et par la déconcentration), ainsi que par les contraintes budgétaires (à tous niveaux).

Pour répondre à des situations extrêmement diverses (qui provoquent ces ressentis), les experts autant que les ministères concernés ont été amenés les uns et les autres à élaborer et à mettre en œuvre de multiples réponses et projets visant à agir sur la réalité des territoires et notamment des situations inégalitaires qui les concernent, soit secteur par secteur, soit à travers les politiques transverses de péréquation et d’aménagement du territoire nationales et territoriales. Les deux rapports déjà cités de Thierry Wahl et d’Eloi Laurent ont synthétisé et actualisé ces multiples approches.

Le CESE lui-même, comme cela vient d’être rappelé, a adopté des avis comportant d’importantes préconisations pour prendre en compte la spécificité de chacun des secteurs d’activité et de service dans ces territoires.

Nombre de ces recommandations ont été prises en compte par les pouvoirs publics au moins en partie. Pourtant, et telle a été la raison de la saisine pour le présent rapport, des inégalités territoriales persistent, aggravées par la crise : non seulement, les habitants de tous les territoires disent le ressentir, mais encore c’est une réalité soulignée par tous les observateurs et acteurs de la vie économique, sociale et environnementale, qui varie toutefois selon les thématiques et les échelles examinées.

Or, autant, en période de croissance, les différentes politiques publiques ont eu et peuvent avoir des effets significatifs sur la réduction de certaines inégalités entre territoires, autant, en période de « croissance molle », il est possible de s’interroger sur leur efficacité.

Et pourtant, tous les analystes sont d’accord sur ce point, inégalités spatiales et inégalités sociales se nourrissent réciproquement pour aboutir à un véritable « cumul des handicaps », comme cela a été souligné.

Dans ce contexte, le CESE souhaite identifier les politiques publiques économiques, sociales et environnementales qu’il convient tout à la fois de « sanctuariser », de hiérarchiser et de prioriser surtout, en cette période « de crise ».

Pour aller des constats à l’action, le CESE a cherché en conséquence à poser les questions préalables et prioritaires qui doivent s’imposer à tout décideur en charge d’un territoire, quelle que soit sa « taille ». Il considère qu’apporter des réponses aux huit questions suivantes est absolument nécessaire lorsque l’on veut, au niveau européen, national et, en l’occurrence, territorial, œuvrer à la recherche d’une plus grande égalité entre les territoires.

La nécessité d’un diagnostic territorial

Un diagnostic territorial approfondi et multicritères est indispensable : en effet, les territoires sont extrêmement divers : leurs atouts comme leurs faiblesses sont en conséquence très différents. Dans certains territoires, les inégalités peuvent s’accroitre dans certains domaines mais pas dans tous ; certains peuvent par contre être « victimes » d’un véritable cumul des handicaps. Voila pourquoi réduire les inégalités territoriales entre eux nécessite de discerner au préalable quelles sont leurs spécificités.

Une question se pose au préalable, la question de la « maille », car on constate que certaines inégalités s’accroissent à certaines échelles et diminuent à d’autres.

Une fois la « maille » déterminée en accord avec l’ensemble des parties prenantes, ce diagnostic devrait être établi selon une méthodologie « cadre » reprenant les mêmes items selon la maille retenue.

Cela exige des capacités d’ingénierie, tant de l’Etat que des acteurs locaux, qu’il convient de sauvegarder et de développer à tous les niveaux. Enfin, il est nécessaire que ce diagnostic soit partagé. Ceci exige que les principes et les méthodes de la « démocratie participative » soient mis en œuvre.

Accessibilité et mobilité

Ces questions ont été posées par tous les intervenants auditionnés. Le CESE considère qu’il s’agit de questions prioritaires à traiter dans toute analyse des atouts et faiblesses d’un territoire quelle que soit sa taille.

Ceci se comprend parfaitement lorsque l’on prend en compte les observations suivantes :

– Les moyens alloués aux politiques d’investissement et d’infrastructures sont les premières victimes des contraintes budgétaires, tant de l’Etat que des collectivités territoriales ;

– Mais, au-delà de ce constat, accessibilité et mobilité figurent avec le logement parmi les premières préoccupations de nos concitoyens et des entreprises (quelle que soit leur taille) : résidence-travail, accès au lieu de vacances, facteurs d’attractivité pour tout entrepreneur ;

– Le projet de SNIT, sur lequel le CESE a rendu un avis, est en cours de révision, comme notre assemblée l’avait souhaité. Ceci se justifie à la fois pour des raisons de moyens (les projets envisagés n’étant pas tous financièrement réalisables sur la durée prévue), mais aussi pour des multiples raisons qualitatives dont, à titre d’exemple, la prise en compte en particulier des réseaux secondaires ;

– L’accessibilité aux TIC encore insuffisante (notamment pour le haut débit et très haut débit) ;

– La territorialisation des activités économiques et la volonté de les rapprocher des structures de recherche et d’enseignement supérieur, le développement des TIC peuvent-ils être des facteurs positifs de développement des territoires sans accessibilité sociale, culturelle…. ?

– Enfin, la réponse à ces interrogations demande à ce que l’on intègre (sans en faire un simple ajout) la dimension environnementale.

L’exigence de proximité des citoyens dans tous les domaines

Quelles peuvent et doivent être les réponses à apporter à cette exigence de tous les citoyens et de toutes les entreprises ? Peut-on répondre à cette attente de façon uniforme et d’en haut dans tous les domaines et pour tous les services nécessaires et/ou utiles à leur vie quotidienne, personnelle et familiale : services publics, culture, santé, sport, commerce, services financiers... ?

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En effet, malgré les volontés politiques et les efforts consentis, une majorité de nos concitoyens est confrontée à un accroissement des distances à parcourir, voire des temps quotidiens de déplacement.

Des transferts mal appréhendés globalement

Ils sont la somme des apports d’une part, de la contribution de l’Etat (en réduction du fait de la contrainte budgétaire), d’autre part d’une péréquation forte mais illisible et enfin d’une politique de redistribution au niveau des ménages dont les effets territoriaux sont insuffisamment analysés et appréhendés.

Ainsi se pose la double question d’une amélioration et d’une simplification des mécanismes de péréquation, ainsi que d’une analyse approfondie des effets territoriaux des redistributions sociales qui se développeraient à travers les politiques de santé, de prévention et de services aux personnes.

Les modes de gouvernance

Quelle que soit l’issue du débat relatif à « l’acte III » de la décentralisation (dont le terme est à ce jour incertain), le CESE considère qu’il est essentiel dans le cadre institutionnel actuel de s’interroger sur le « qui fait quoi ? ». Ainsi, il lui parait important de se prononcer, non pour affirmer une nouvelle fois que mutualisation et péréquation sont des « outils » indispensables de toute gouvernance mais comment (par qui, à quel niveau et selon quelle méthode), ils doivent être mis en œuvre pour « doper » au mieux les territoires et leur « mise en capacité ».

Comment ces politiques dont le cadre doit être déterminé par « l’Etat stratège » peuvent-elles être articulées avec les modes de gouvernance territoriaux dans le respect du principe constitutionnel (art. 72) de libre administration des collectivités locales ? Dans ce cadre, le CESE prend en compte les scénarios envisagés par Thierry Wahl pour améliorer la gouvernance nationale de la politique nationale d’aménagement du territoire.

Métropoles et pôles métropolitains

Il s’agit d’une tendance lourde de fait, mais est-elle maîtrisée ?

Le débat reste vif entre les experts tenant des différentes théories sur le polycentrisme, les réseaux de ville, la concentration et la densification. Il ne s’agit donc pas d’en traiter de manière exhaustive. Par contre, le CESE estime nécessaire de soumettre trois interrogations aux décideurs :

– Si les enjeux économiques paraissent à peu près cernés et font l’objet de politiques territoriales volontaristes, leurs enjeux sociaux et environnementaux ne sont-ils pas encore largement sous-estimés ?

– Les métropoles et pôles métropolitains sont-ils des moteurs de croissance, et/ou dans le contexte actuel, ces mêmes enjeux ont-ils des effets pervers tel qu’un « effet de siphonage » certes des crédits publics mais surtout des activités productives ? S’agit-il d’une vraie ou fausse question ?

– Paris, capitale de la France, « ville-monde ». Mais la politique actuellement discutée du Grand Paris doit-elle ignorer ces dernières interrogations ? Ces entités

« métropoles », nouveaux échelons territoriaux, bientôt consacrées par la loi, doivent-elles faire l’objet de politiques spécifiques, qui, par définition, n’auraient aucun effet sur le reste du pays et de ses territoires ?

La politique européenne

Quel que soit le mode de gouvernance et de gestion retenu pour l’attribution et la répartition des fonds européens, ces derniers, dans leur ensemble, ont des effets territoriaux incontestables.

Cela pose nombre de questions allant de la complexité qui préside à leur mise en œuvre, aux choix prioritaires faits pour leur répartition dans le contexte actuel d’austérité budgétaire, à son articulation avec l’aménagement du territoire à la française.

Quelle méthode et quel cadre budgétaire ?

Le Gouvernement a arrêté un mode de gouvernance en créant un ministère de l’Égalité des territoires ; il prévoit l’organisation d’un CIADT et programme une loi relative à l’égalité des territoires et du logement, qui devrait traiter du temps long. Le CESE, assemblée du

« premier mot » et du « temps long », souhaite formuler un avis sur ce calendrier et ce qu’il sous-tend. Comment s’articulent à ses yeux les différents projets de loi de différents ministères, mais surtout du ministère à la politique de la Ville et du ministère chargé de la décentralisation ?

Enfin, dans cette période de contraintes fortes sur les finances publiques, il importe aussi au CESE d’examiner quelles peuvent et doivent en être les traductions budgétaires, tant au niveau national que territorial.

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