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Apprécier la réalité des inégalités territoriales nécessite une analyse approfondie : du fait de l’influence croissante des métropoles et des villes sur les territoires qui les environnent, appréhender le niveau territorial dans lequel vivent les personnes suppose de prendre en compte à la fois l’échelle des déplacements domicile-travail, et celle des bassins de vie, où se déroule pour partie la vie quotidienne. Les personnes sont également mobiles à certaines périodes de l’année et au cours de leur vie, et ces mouvements de population influent dans certains cas très fortement sur les inégalités territoriales. Les inégalités sont par ailleurs plurielles (éducation et formation, activité économique, emploi, logement, pauvreté, santé, environnement, etc.) et un territoire peut se retrouver en grande difficulté dans certains domaines, mais en situation plutôt favorable au regard d’autres critères. Les inégalités sectorielles varient aussi selon la maille retenue : à titre d’exemple, des zones d’emploi ont relativement bien supporté la crise dans des régions ou départements qui vont mal et

inversement, tandis que des inégalités semblent tendre à se réduire à l’échelle régionale et départementale mais s’accroissent souvent au sein d’un même territoire, par exemple entre centre-ville et périphérie, ou entre métropoles et petites villes.

Pour autant, les constats faits par ce rapport et avis soulignent, outre le caractère multidimensionnel des inégalités territoriales et la situation très contrastée des territoires en France, le caractère cumulatif de certaines inégalités : nombre de quartiers urbains en difficultés, de zones rurales déconnectées des aires urbaines, mais aussi certaines des collectivités territoriales situées dans le nord et dans l’est de la France, ou encore dans l’Outre-mer, connaissent, à la fois, des difficultés considérables d’ordre économique, des situations sociales très préoccupantes, des problèmes d’accès aux services publics, ainsi qu’un environnement parfois dégradé. Inégalités sociales et territoriales sont de même souvent corrélées. Ces cumuls de difficulté rendent leur correction très difficile au seul niveau des collectivités concernées.

Par la création même d’un ministère de l’Égalité des territoires et du Logement, le gouvernement a souligné l’importance et la complexité de cet enjeu de l’égalité des territoires et nourri les espoirs de ceux qui souhaitent un maintien et une amplification des efforts visant à les réduire.

Par le présent avis et rapport, le CESE a entendu y contribuer. Il met en garde contre les risques d’une stratégie de métropolisation et de densification mal maîtrisée qu’un État centralisé et centralisateur se bornerait à accompagner, tendance lourde que l’on ne pourrait ni infléchir ni même ajuster.

Il préconise au contraire une politique volontariste d’aménagement durable des territoires, conduite sur le long terme par un État stratège, largement décentralisée et déconcentrée, visant à conforter une « France en réseau », afin de réduire dans la durée les inégalités territoriales, au bénéfice notamment des territoires les plus en difficultés.

Les politiques publiques, et notamment celles relevant de l’État et de la solidarité nationale, doivent en effet contribuer à combler les handicaps cumulés qui peuvent annuler les atouts d’attractivité de certains territoires. C’est une nécessité si l’on veut remettre tous les territoires, les collectivités et les acteurs qui les habitent, en capacité de se développer.

Pour ce faire, le CESE propose une méthode de travail qui doit permettre de faire travailler ensemble tous les acteurs à partir d’un diagnostic territorial préalable et partagé, élaboré au moins tous les six ans, aux divers niveaux de collectivités. Elle repose sur la prise de conscience, à tous les niveaux et dans tous les domaines, de la nécessité de poursuivre les efforts de démocratie participative, mais aussi sur le renforcement nécessaire de la gouvernance territoriale, afin de conforter la capacité d’initiative et de décision des acteurs de l’État comme des collectivités.

Il n’était pas possible, compte tenu de l’ampleur du sujet, de formuler, dans chacun des domaines sectoriels où existent des inégalités territoriales, des propositions visant à y remédier.

Les préconisations formulées par l’avis se centrent sur plusieurs domaines particulièrement stratégiques pour le développement territorial : celui des réseaux d’infrastructures en matière de technologies d’information et de communication (TIC), celui des réseaux de transports physiques, celui de l’accès aux services publics, ainsi que celui de la mise en réseau des territoires, des métropoles aux villes moyennes jusqu’aux petits bourgs et aux zones rurales environnantes. La politique de revitalisation économique des

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territoires, via notamment le développement de pôles d’excellence (pôles de compétitivité, etc.) en réseau sur l’ensemble des territoires, en est un autre élément majeur.

Le CESE présente par ailleurs certains des outils qui lui semblent les plus essentiels au regard de cette stratégie et de cette méthode : la production de normes doit être rationnalisée et une meilleure transversalité de l’action de l’État doit être assurée en parallèle à une déconcentration, pour permettre une action efficace contre les cumuls de difficultés.

Les mécanismes de péréquation financières doivent être mieux analysés, simplifiés et renforcés, tandis que la « péréquation sociale de fait », dont le rôle est essentiel, doit être mieux mesurée et prise en compte.

Le CESE appelle à la tenue, au début de l’année 2014, d’un CIADT, comme le laissait espérer Cécile Duflot, ministre de l’Égalité des territoires et du logement, lors de son audition par la section, afin de préparer une loi-cadre et de programmation sur l’Égalité des territoires.

Enfin, le CESE souligne l’importance du rôle de l’Union européenne pour réduire les inégalités territoriales. La prise de conscience de cette nécessité est cruciale à quelques mois des élections européennes et de la mise en place d’une nouvelle Commission européenne.

Il importera que celle-ci veille, avec les acteurs concernés, État, régions et territoires, à améliorer la cohérence de ses actions avec les leurs, afin de créer un effet de synergie. Le taux d’utilisation en France des fonds structurels doit aussi être amélioré et le versement par les services de l’État des aides européennes à leurs bénéficiaires accéléré.