1 CHAPITRE I : REVUE DE LITTÉRATURE
1.12 Conclusion
Les sols latéritiques sont des matériaux meubles formés en milieu tropical, composés
d’une fraction granulaire constituée de pisolithes ou de nodules ferrugineux emballés dans une
matrice fine limono-argileuse. Les pédologues distinguent les processus géologiques
conduisant à la configuration des paysages, des processus pédologiques qui aboutissent à la
formation de ces sols et donnent à ces derniers la définition suivante : « les sols latéritiques sont
des complexes dynamiques formés à partir d’une roche mère par l’action des facteurs du
milieu ». Ces matériaux sont caractérisés par leur teneur particulièrement élevée en oxydes et
hydroxydes de fer et/ou d’alumine (sesquioxydes). La teneur en oxydes de fer peut atteindre
dans certains cas jusqu’à 80% du produit dû à la ferralitisation. Le fer est généralement retrouvé
sous forme de goethite FeOOH ou d’hématite Fe
2O
3, l’alumine sous forme de gibbsite Al(OH)
3ou boehmite AlO(OH) et les argiles dont la plus commune aux sols résiduels tropicaux est la
kaolinite Al
2Si
2O
5(OH)
4. Ce matériau renferme aussi une grande quantité de silice libre ou
combinée.
Les profils latéritiques au sens pédologique sont caractérisés par des niveaux ou horizons
A, B, C et D dans le cas où les quatre horizons sont bien différenciés. Dans les profils
latéritiques les oxydes et hydroxydes de fer s’accumulent dans l’horizon B. L’horizon D
correspond à celui de la roche saine, l’horizon C la zone de lessivage ou horizon de roche
altérée, appelé également la saprolithe. La confusion sur les théories de la genèse et définition
des matériaux latéritiques qui a subsisté pendant au moins un siècle et demi a rendu leur
caractérisation difficile.
Il apparaît que le phénomène de latéritisation se manifeste essentiellement par une
altération chimique et physico-chimique et/ou transformation des minéraux originels de la
roche mère tels que les minéraux argileux et les constituants latéritiques majeurs (Fe, Al, Ti
et Mg).
Trois principales phases de latéritisation sont à distinguer :
la première phase (lessivage primaire) : se manifeste par une altération
physico-chimique complète ou partielle des minéraux originels de la roche mère et une
libération de faibles quantités de minéraux originels et de gels de sesquioxydes.
la deuxième étape (lessivage secondaire ou latéritisation) : se caractérise par un
lessivage partiel ou complet des bases et la silice combinée, couplé à d’autres
processus chimiques favorisant la dissociation, la mobilisation, la migration et
l’accumulation des éléments insolubles tels que les oxydes de fer et d’aluminium.
la troisième étape consiste : à une déshydratation partielle ou complète des colloïdes
hydratés tels que les oxydes de fer et d’aluminium.
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Ces processus sont couplés aux conditions de drainage, à la topographie du modelé, au
climat et à la composition chimique de l’eau de percolation. L’intensité du lessivage dépend
également de la nature et de l’importance de l’altération chimique des minéraux originels.
Sous climat subtropical à faible intensité d’altération chimique et à faible vitesse de
transformation des sols, l’altération physico-chimique ne dépasse guère le stade de la formation
des argiles, les produits néo-synthétisés étant riches en minéraux argileux avec une
prédominance pour la kaolinite. Des minéraux d’oxydes hydratés de fer et d’aluminium peuvent
être retrouvés en faible quantité.
Sous climat à alternance de périodes chaudes et humides avec un couvert végétal dense,
le lessivage est intense et continu de sorte que les minéraux argileux jadis silicates d’aluminium
hydratés sont détruits dans une altération continue, une partie de la silice est lessivée et l’autre
partie entre dans la synthèse des oxydes d’aluminium comme la gibbsite.
La complexité liée au phénomène de latéritisation au fil de plusieurs périodes géologiques
a eu pour conséquence la mise place d’une grande variété de sols latéritiques. Ces sols peuvent
se différencier en fonction de plusieurs facteurs propres à chaque localité.
La plupart des données de la littérature font ressortir les principaux facteurs influençant
la genèse et les propriétés mécaniques de ces sols. Nous distinguons essentiellement les facteurs
tels que l’origine de la roche mère, les facteurs pédogénétiques, la texture matricielle dans
laquelle se produit l’accumulation des sesquioxydes, le degré de latéritisation, la morphologie,
la composition minéralogique, les facteurs climatiques…etc.
Il n’est pas nécessaire d’insister sur l’importance des graveleux latéritiques dans les
projets de construction en génie civil (routes, barrages en terre, ouvrages d’accès, digues…)
dans les pays tropicaux et subtropicaux. Cependant, l’utilisation de ces matériaux en
construction routière requiert un minimum de conditions pour s’assurer de leur bonne capacité
portante vis-à-vis des niveaux de sollicitation auxquels ils sont soumis.
Les tentatives de mise en place de techniques universelles de caractérisation de ces
matériaux se sont butées à de nombreuses difficultés justement à cause de leur caractère évolutif
spécifique aux conditions particulières de leur mise en place. De nombreuses études et
recherches menées sur les sols latéritiques ont abouti à la conclusion selon laquelle, une étude
représentative de caractérisation de ces sols ou la mise en place de spécifications relatives à leur
utilisation doit se faire sans perdre de vue les facteurs géologiques, génétiques et
minéralogiques d’une part et d’autre part les essais géotechniques standards (si possibles
adaptés localement).
Actuellement les études de génie civil portent sur les propriétés géotechniques de ces
matériaux, principalement la portance, la plasticité et la teneur en fines…etc., pour évaluer leur
aptitude en construction de routes, de barrages en terre et de tout autre ouvrage de génie civil
faisant appel à l’utilisation de ces sols.
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La majorité des routes des tropiques sont construites avec les sols latéritiques
concrétionnés, ce qui provoque l’apparition d’ondes régulières appelées “tôle ondulée”,
phénomènes liés à des processus vibratoires cycliques imprimés à la chaussée par le passage
des poids lourds.
Un choix adéquat des matériaux latéritiques supposerait donc une étude représentative et
interdisciplinaire (géologie, géotechnique, pédologique, mécanique, minéralogique,
chimique,…etc.) en prenant en compte tous les principaux facteurs de mise en place des
gisements latéritiques et la caractérisation de ces derniers conformément aux techniques
appropriées. Un intérêt particulier pour une utilisation efficiente de ces sols serait la mise en
relation des facteurs génétiques et minéralogiques d’une part et les méthodes de caractérisation
physico-mécaniques et géotechniques d’autre part.
CHAPITRE II
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2 CHAPITRE II : METHODOLOGIE GENERALE D’ETUDE
2.1 Introduction
L’évaluation de l’aptitude des graveleux latéritiques en couches de chaussée, dans la
grande majorité des projets d’étude routière en Afrique tropicale ne s’intéresse qu’à la
caractérisation mécanique et géotechnique. Les analyses fines ne sont en aucun cas considérées
dans le cadre des études de projet. Or de nombreuses études montrent que ces analyses apportent
des détails considérables sur le rôle de la microstructure et la composition minéralogique sur
les performances mécaniques des graveleux latéritiques. À ce problème s’ajoute le manque de
spécification exclusivement dédiée à une caractérisation plus réaliste. La plupart des techniques
de caractérisation des sols résiduels sont basées sur des spécifications étrangères dont les
procédures d’essai ont été déduites à partir des expériences effectuées sur des sols aux facteurs
environnementaux forts différents des conditions climatiques qui règnent en zone tropicale. Par
ailleurs, les données retrouvées dans la littérature montrent que les propriétés mécaniques et
géotechniques des sols latéritiques sont très souvent en relation avec les facteurs
compositionnels et environnementaux tels que le drainage, la nature de la roche-mère, la
pluviométrie, etc. La morphologie et l’aspect textural représentent aussi des informations très
utiles à l’étude des sols résiduels.
Les travaux effectués dans le cadre de la thèse concernent les graveleux latéritiques situés
dans la partie centrale du sud-ouest du Niger. Cette étude a pour objectif principal d’estimer
l’effet des facteurs génétiques et environnementaux sur les propriétés considérées pour
l’évaluation de l’aptitude des graveleux latéritiques en construction. L’étude concerne un
ensemble de sept (7) gisements latéritiques. D’autres facteurs climatiques tels que la
pluviométrie, le mode de drainage, les températures moyennes, le modelé et la végétation sont
considérés au besoin pour étayer certaines tendances au cas où les données recueillies ne
suffisent pas à dégager des conclusions plus précises. Les échantillons ont été prélevés dans
l’horizon B d’accumulation des oxydes de fer car c’est généralement l’horizon qui comporte
les graveleux latéritiques aux propriétés satisfaisantes. L’ensemble des données géotechniques
sont réunies et exploitées statistiquement afin de procéder à une analyse de leur variabilité. Les
caractéristiques de portance sont également évaluées via les méthodes courantes de
détermination de la densité sèche à l’optimum Proctor et l’évaluation de l’indice CBR par
l’essai de poinçonnement. Les caractéristiques mécaniques de cisaillement et de compressibilité
respectivement évaluées à l’aide de la boite de cisaillement et la cellule œdométrique
complètent la caractérisation en favorisant une compréhension de leur comportement
mécanique vis-à-vis des sollicitations extérieures apportées par les charges roulantes lorsque
ces sols sont utilisés en couche d’assise.
Par ailleurs, les analyses chimiques et minéralogiques permettent de mettre en relief
l’effet de la composition chimique sur les propriétés géotechniques et mécaniques des sols
latéritiques. Parmi les méthodes utilisées, les unes permettent une évaluation qualitative et les
autres une évaluation semi-quantitative des composés chimiques. Le bilan qualitatif des
minéraux contenu dans les sols est obtenu par la diffractométrie des rayons X.
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La méthode permet de distinguer qualitativement les minéraux mais aussi une
semi-quantification grossière de la proportion de chaque phase minérale.En revanche, la technique
ne donne pas d’information sur la combinaison et l’arrangement des différentes phases
minérales contenues dans les échantillons de sol. Ceci justifie l’utilisation de la microanalyse
X à l’EDS via le Microscope Électronique à Balayage (MEB). L’observation au MEB combinée
à la microanalyse X par EDS est très complémentaire à la DRX qui est plus macroscopique.
L’analyse EDS permet notamment de décrire l’association et l’arrangement des différentes
phases minérales. Les analyses DRX et au MEB sont complétées par les analyses ATD-ATG,
basées sur la calcination des échantillons de sol à haute température. Les départs de masse à des
températures spécifiques correspondent à certaines phases minérales contenues dans le sol. Les
résultats ainsi déduits sont utiles à une étude plus structurée et plus réaliste du comportement
géotechnique et géomécanique des sols latéritiques avant leur sélection en couche de chaussée.
Cette analyse, pour être efficiente ne saurait se passer de la prise en compte de l’influence de la
variabilité induite par les facteurs compositionnels et environnementaux.
Dans ce chapitre, nous feront tout d’abord un bref résumé des caractéristiques in-situ des
gisements latéritiques de la zone d’étude c’est-à-dire la situation géographique, le contexte
géologique et les informations sur la végétation, le modelé et la pluviométrie. Nous
présenterons ensuite les procédures de caractérisation géotechnique, mécanique et
minéralogique de ces sols en précisant l’appareillage utilisé pour la réalisation de chaque essai.
2.2 Données générales des sols latéritiques de la zone d’étude
Dans le document
Caractérisation et valorisation des matérieux latéritiques utilisés en construction routière au Niger
(Page 91-97)