1 CHAPITRE I : REVUE DE LITTÉRATURE
1.9 Propriétés géotechniques et mécaniques des graveleux latéritiques
1.9.3 Classification des sols latéritiques
Le but d’une classification géotechnique est de permettre à partir de constatations de
terrain et d’essais simples de laboratoire, de prévoir le comportement mécanique d’un matériau.
Elle indique par classe de sol la portance à laquelle l’on pourrait s’attendre. Les systèmes de
classification communément utilisés en génie civil, basés sur la distribution des grains et la
plasticité, sont limités quant à leur utilisation pour classifier les sols résiduels. Cette limitation
est due essentiellement à deux facteurs :
le caractère évolutif des sols résiduels rendant difficile l’application et la reproductibilité
des essais classiques comme la granulométrie ou les limites d’Atterberg,
le principe de l’élaboration de ces classifications sur la stabilité des grains de sols.
Les relations entre la latérite et les horizons indurés étant évidentes, les tentatives de
classification ont cherché à préciser les relations les liant en s’appuyant soit sur des
caractéristiques morphologiques, soit sur des critères génétiques. Les différents systèmes de
classification sont nombreux et divers. Nous distinguons (Maignien, 1966 ; Lin, 1986) :
Le système de l’ex-U.R.S.S. qui est basé sur des facteurs génétiques. Ce système
distingue d’abord les latérites tropicales des sols latéritiques subtropicaux. Ces
différences sont liées à des facteurs thermiques d’érosion et de formation des sols ; mais
aussi sur l’ampleur du processus de cuirassement et la puissance des produits formés.
Le système Français : dans ce système, il est fait une nette discrimination entre les sols
d’altération latéritique appelés sols ferralitiques et les processus de cuirassement, ces
derniers pouvant apparaître dans des sols génétiquement différents tels que les sols
ferrugineux tropicaux, les sols ferralitiques, les sols hydromorphes. Il en résulte que la
présence d’horizons à matériaux indurés riches en sesquioxydes (latérite) n’apparaît
qu’au niveau du sous-groupe.
Référence Type de sol Lieu Roche mère Perméabilité K (m/s)
Gneiss résiduel Brésil Gneiss 3.10
-7à 6.10
-6Basalte résiduel Brésil Basalte 2.10
-7Terzaghi (1958) Argile de Sasumua Kenya Cendre volcanique 0,8.10
-7à 7.10
-7Matyas (1969) Argile de Sasumua Kenya Cendre volcanique 2.10
-7à 6.10
-8Andrews (1936) Latérite Hawaii Basalte 1,48.10
-4à 5,4.10
-7De Graft-Johnson (1969) Argile latéritique Ghana Granite 7,5.10
-5à 1,7.10
-7Vargas et al. (1965)
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Le système Portugais : il se rapproche de la classification française. Il distingue les sols
fersialitiques tropicaux avec ou sans latérite, les sols para-ferralitiques, les sols
ferralitiques avec ou sans les fines latéritiques.
Le système Britannique : ce système s’inspire de l’étude faite sur les latérites du Ghana
et se penche plutôt sur les latosols. Ces sols se regroupent dans l’ordre des
« Climatophytic Earths » dont les principales caractéristiques sont liées à la fois à
l’action du climat et de la végétation.
Le système Australien : dans ce système quatre groupes de sols sont reconnus comme
latéritiques : krasnozems, krasnozems latéritiques, terres rouges latéritiques et les sols
podzoliques latéritiques.
Le système U.S.A. : l’ensemble des sols latéritiques, cuirassés ou non, est groupé dans
l’ordre des oxisols qui est défini comme suit : sols minéraux à horizon oxique ou ayant,
à moins de 30 cm de la surface, de la plinthite qui forme une phase continue et qui n’est
pas indurée. Dans la catégorie des oxisols, qui dérivent eux-mêmes des latosols, on peut
citer les sous-classes suivantes: les aquox, les acrox, les udox, les ustox et les idox.
Le système Belge : il s’agit d’un système morphologique. Les critères utilisés pour les
différenciations des différentes catégories sont les suivantes : ordres, sous-ordres, petit
groupe et grand groupe. La classification des sols latéritiques s’appuie essentiellement
sur la définition de l’horizon : horizon B ferralitique qui est un horizon situé entre
l’horizon A et la roche amollie. L’ensemble des sols latéritiques est groupé surtout dans
l’ordre des kaolisols et quelques-uns dans l’ordre des kaolisols lessivés.
Nous distinguons entre autres certaines classifications spécifiques comme le système
S.P.I (d’Hoore 1963) et le système F.A.O. (Maignien, 1966).
Quoi qu’il en soit, une classification performante sur un territoire donné et pour un
domaine précis doit être :
complète : tous les sols doivent y trouver leur place,
univoque : le même sol ne doit pas pouvoir se situer dans deux cases différentes du
tableau de classification,
simple d’emploi : classer un sol ne doit nécessiter qu’un nombre limité d’essais de
laboratoire,
utilitaire : les coupures doivent correspondre aux transitions dans les domaines d’emploi,
fine : le nombre de classes doit être suffisant pour refléter les variétés dans les sols rencontrés,
parlante : les désignations ou les symboles utilisés doivent être si possible faciles à
mémoriser.
Un grand nombre de classifications de sols latéritiques a été proposé, mais jusqu’à présent
aucune n’est parvenue à atteindre le « consensus final ». Néanmoins, ces classifications ont
contribué à une meilleure connaissance des graveleux latéritiques. L’utilisation des
classifications les plus connues comme l’American Association of State Highway
Transportation Officials (AASHTO), l’Unified Soil Classification System (USCS) ou les
Recommandations pour les Terrassements Routiers (RTR), permet de classifier tous les sols
latéritiques dans une même classe.
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Par exemple pour la classification AASHTO ou HRB, ces sols sont généralement rangés
dans les classes A-2-4 à A-2-7. Dans les classifications USCS et RTR, ils sont respectivement
classés GC (grave argileuse) et B6. Ceci démontre également l’insuffisance des classifications
utilisées dans le cas des graveleux latéritiques, ces classes étant de nature différente. Plusieurs
pays comme le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Gabon, le Cameroun, le Burkina Faso, etc…, ont
tenté d’établir une classification ou simplement résumer les caractéristiques des matériaux
rencontrés dans ces régions. Parmi celles-ci, les plus importantes sont :
la classification de Lyon Associates (1971) qui reprend la classification génétique d’Hoore
(1963),
la classification ivoirienne qui tient compte du facteur génétique établit en 1984 par le
L.B.T.P. (Cougny, 1988),
la classification du C.E.B.T.P. basée sur le pourcentage de fines, l’indice de plasticité et le
produit pourcentage de fines par l’indice de plasticité.
1.9.3.1 Classification ivoirienne des graveleux latéritiques
Plusieurs classifications ont été élaborées en Côte d’Ivoire pour les graveleux latéritiques.
Elles s’appuient essentiellement sur les travaux pédologiques de l’ORSTOM de Côte d’Ivoire.
Le système de classification est le suivant :
en géotechnique, classer en fonction de la granulométrie (tamisât à 80 µm ou teneur en
fines) et de la plasticité (indice de plasticité IP),
en géologie, préciser la roche mère,
en pédologie, préciser la position occupée par l’échantillon dans le profil type ABC,
préciser la nature de l’altération (ferralitique ou ferrugineuse) et le faciès de la couche.
Trois classes de graveleux latéritiques ont été mises en évidence (Tableau 1-7)
correspondant à des qualités géomécaniques décroissantes (G1, G2, G3). Les classifications
successives ont abouti à affiner les distinctions, mais les trois classes ont subsisté.
Tableau 1-7:Classification des graveleux latéritiques naturels de Côte d'Ivoire.
G1 5 - 15 5 - 15 30 à 80 21 à 23 5 à 8
G2 15 - 25 15 - 25 20 à 30 20 à 22,5 9 à 10
G3 25 - 35 25 - 35 14 à 40 19 à 22 8 à 12
Valeurs moyennes des caractéristiques de compactage ICBR à 95% OPM après
4 jours d'immersion
Poids volumique sec
optimal (kN/m3) Teneur en optimale (%) % de fines
C80µm Indice de
Plasticité IP Catégorie
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1.9.3.2 Les études du Congo Démocratique (Zaïre)
Au Congo Démocratique, les recherches effectuées sur les sols concernant la capacité
d’absorption des sols à l’essai de bleu de méthylène, confirment la dispersion des résultats notée
par les autres auteurs, mais notent que, si la valeur de bleu déterminée sur la fraction 0/5 mm
rapportée à la masse totale du matériau (0/D) est supérieure à 0,4 g/100 g, l’indice CBR est
toujours inférieur à 40 (à 95% de l’OPM) (Figure 1-16).
Pour les auteurs congolais, une valeur VB (0/D) inférieure à 0,3 g/100 g serait
caractéristique de graveleux latéritiques à fines peu actives et de bonne portance.
Figure 1-16:Relation entre ICBR 95%OPM et valeur de bleu sur matériau total (Congo RDC).
Une manière commode de représenter les paramètres d’identification d’un graveleux
latéritique sur un diagramme où l’on fait croître ou décroître ensemble les valeurs qui évoluent
dans le même sens a été proposée (Figure 1-17 et Tableau 1-8). Elle fait varier dans le même
sens d'une part :
le refus à 2 mm (fraction graveleuse) : R
2mm= 1 – C
2mm,
le poids volumique sec à l’OPM γd
OPM,
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Et d’autre part :
la teneur en fines ou passant à 80 µm (C
80µm),
la limite de liquidité W
L,
l’indice de plasticité I
P,
la teneur en eau optimale à l’OPM W
OPM.
Chaque type de matériau se trouve ainsi représenté par un zigzag continu recoupant une
certaine position dans le diagramme (Figure 1-17)
Figure 1-17: Diagramme d'identification géotechnique des graveleux latéritiques proposé par
les études du RDC.
Tableau 1-8: Définition des classes de graveleux latéritiques du RDC.
GL1 GL2 GL3
Refus à 2 mm (%) 63 - 85 (74) 53 - 75 (66) 44 - 71 (57)
Passant à 80 µm 8 - 18 (13) 16 - 26 (21) 25 - 37 (31)
Limite de liquidité (w
L) 26 - 52 (39) 32 - 58 (45) 36 - 66 (50)
Indice de plasticité I
p9 - 25 (16) 14 - 26 (20) 14 - 34 (24)
C80µm x I
p125 - 265 (195) 300 - 520 (410) 535 - 915 (725)
ϒs (KN/m
3) > 30 > 29 > 28
ϒdOPM (KN/m
3) 21 - 24 (22,5) 19,8 - 23,2 (21,5) 18,5 - 21,5 (20)
Teneur en eau w
OPM(%) 6 - 11 (9) 8 - 13 (11) 10 - 16 (13)
I
CBR(95%OPM) 22 - 102 (62) 14 -68 (41) 14 - 46 (30)
Gonflement (moule CBR) 0,1 0,4 0,8
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1.9.3.3 Les études du Nigéria
Lyon Associates (1971) a étudié les sols du Nigéria, comme l’ont été ceux du Ghana. Ces
études, réalisées en faisant intervenir les facteurs « roche mère » et « degré d’altération »,
donnent les propriétés géotechniques des sols du Nigéria en relation avec la roche mère (Figure
1-18, Tableau 1-9).
Figure 1-18: Courbes granulométriques des sols du Nigéria en fonction de la roche mère.
Tableau 1-9: Caractéristiques géotechniques des sols de Nigéria en fonction de la roche mère.
Dans le document
Caractérisation et valorisation des matérieux latéritiques utilisés en construction routière au Niger
(Page 80-85)